Les Démoniaques dans l’art/p48

La bibliothèque libre.


SAINT BENOIT GUÉRISSANT UN POSSÉDÉ

FRESQUE DE LOUIS CARRACHE (NÉ EN 1551, MORT EN 1619). CLOÎTRE SAINT-MICHEL IN BOSCO, À BOLOGNE

L’École bolonaise nous donne deux représentations de démoniaques, deux fresques, l’une de la main de Louis Carrache, l’autre du Dominiquin son élève. Nous n’avons pas ici à apprécier dans son ensemble l’œuvre des Carrache, dont la fortune a subi des alternatives si diverses, ni à établir, à ce point de vue, de parallèle entre le maître et l’élève. Néanmoins la comparaison s’impose entre les deux peintres qui traitent un même sujet, et peut-être les considérations dans lesquelles nous allons entrer fourniront-elles à la critique de nouveaux éléments d’appréciation.


SAINT BENOÎT GUÉRISSANT UN POSSÉDÉ
Dessin au trait d’après une photographie de Simone Cantarini d’après une fresque de Louis Carache, dans le cloître de Saint-Michel in Bosco, à Bologne [1].

La fresque de Louis Carrache est dans le cloître de Saint-Michel in Bosco, à Bologne. Elle représente saint Benoit guérissant un possédé. L’énergumène se débat, maintenu et porté par deux hommes. Le désordre des vêtements qui laissent la poitrine à nu, les mouvements . désordonnés des jambes et la saillie de la langue sont, à notre avis, les points les plus intéressants et qui méritent d’être signalés. Mais les membres supérieurs, les mains ouvertes tendues la paume en avant, ont une attitude absolument opposée à toute idée de convulsion ; la figure elle-même, à part la saillie de la langue déjà signalée, n’offre aucun trait caractéristique ; enfin les membres inférieurs, malgré leur agitation apparente, ne portent aucune marque tant soit peu précise des spasmes ou contractures habituels aux crises démoniaques. Qu’il y a loin entre cette figure prétentieuse et pleine d’emphase et le jeune possédé du Dominiquin dont l’attitude si simple et cependant si vraie nous montre — avec les yeux convulsés en haut, le renversement rigide de tout le corps en arrière, l’extension forcée des pieds — des signes absolument typiques et conformes à la réalité.

Nous n’hésitons donc pas à placer, à notre point de vue spécial, le possédé du Dominiquin

bien au-dessus de celui de Louis Carrache.

  1. Nous devons cette photographie à l’obligeance du Dr Tommaso-Tommasi de Florence.