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Les Enfantines du bon pays de France/Chansons de métiers

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Chansons de Métiers.


LE TRAVAIL.


Un jour d’été, je m’ suis levé ;
Je descendis dans mon jardin.
Gentil coqli qui bertin,
Bis cajoli,
Gentil coqli qui.

Je descendis dans mon jardin,
Pour y cueillir un romarin.
Gentil, etc.

Pour y cueillir un romarin,
Un rossignol vint sur ma main.
Gentil, etc.


Un rossignol vint sur ma main,
Il me dit trois mots en latin.
Gentil, etc.

Il me dit trois mots en latin,
Mes bons enfants, travaillez bien.
Gentil, etc.

Mes bons enfants, travaillez bien,
Car si vous n’ travaillez pas bien.
Gentil, etc.

Car si vous n’ travaillez pas bien,
Vous n aurez rien avec votr’ pain.
Gentil, etc.

Vous n’aurez rien avec votr’ pain,
Et puis vous mourrez de faim.
Gentil coqli qui bertin,
Bis cajoli,
Gentil coqli qui[1].


LE COMPAGNON DU TOUR DE FRANCE.


Partons, chers compagnons,
Le devoir nous engage ;
Partons, voici le temps
Qu’il nous faut battre aux champs.

Là-bas dans ces prairies,
Ces coteaux, ces verdures,
On entend les oiseaux,
Chanter les airs nouveaux ;
Ils disent, compagnons,
Dans leur charmant langage :
Pour avoir du plaisir,
Il est temps de partir.

(Le Compagnon du tour de France.) 
Rathery (Moniteur, 15 juin 1853).


LES MARINS DE LA GOÉLETTE.


Les marins de la goëlette,
Vire, vire la viroulette,
Les marins de la goëlette
Voilà des drôles de marins.
Quand ils montent sur leur navire,
Vire, la viroulette, vire...
Quand ils montent sur leur navire,
Ils emportent les tambourins.

Puis s’il arrive une tempête,
Vire, vire, la viroulette,
Puis, s’il arrive une tempête,
Vous ne savez pas ce qu’ils font ?
De peur que le bateau chavire,
Vire, la viroulette, vire...
De peur que le bateau chavire,
Ils dansent en rond sur le pont.

Alph. Daudet (les Absents).


AVEINE, AVEINE !
(L’été.)


Voulez-vous savoir comment, comment
On sème l’aveine ?
Mon père la semait ainsi,
Puis se reposait à demi.
Frappe du pied, puis de la main !
Un petit tour pour ton voisin !
Aveine, aveine, aveine,
Que le beau temps t’amène.

Voulez-vous savoir comment, comment
On plante l’aveine ?
Mon père la plantait ainsi,
Puis se reposait à demi.
Frappe du pied, puis de la main !
Un petit tour pour ton voisin !
Aveine, aveine, aveine,
Que le beau temps t’amène.

Voulez-vous savoir comment, comment
On coupe l’aveine ?
Mon père la coupait ainsi,

Puis se reposait à demi.
Frappe du pied, puis de la main !
Un petit tour pour ton voisin !
Aveine, aveine, aveine,
Que le beau temps t’amène.

Voulez-vous savoir comment, comment
On mange l’aveine ?
Mon père la mangeait ainsi,
Puis se reposait à demi.
Frappe du pied, puis de la main !
Un petit tour pour ton voisin !
Aveine, aveine, aveine,
Que le beau temps t’amène.

(Poitou.)


Chœur.

Avoine, avoine, avoine,
Que le bon Dieu t’amène.
Qui veut savoir
Et qui veut voir
Comment on doit battre l’avoine ?
Mon père la battait ainsi.
Puis il se reposait ainsi.

Chœur.

Avoine, avoine, avoine,
Que le bon Dieu t’amène.

Qui veut savoir
Et qui veut voir
Comment on vanne l’avoine ?
Mon père la vannait ainsi,
Puis il se reposait ainsi.

Chœur.

Avoine, avoine, avoine,
Que le bon Dieu t’amène.

On imite ainsi toutes les opérations de la moisson, puis un termine en disant ; « Mon père la mangeait ainsi. »


LA COUPE AU VIN.


La voilà, la joli’ coupe,
Coupi, coupons, coupons le vin.
La voilà, la joli’ coup’ la la,
La voilà, la joli’ coupe au vin.

Et de coupe en pagne, en pagne,
Pagni, pagnons, pagnons le vin,
La voilà, la joli’ pagn’ la la :
La voilà, la joli’ pagne au vin.

Et de pagne en hotte, en hotte
Hotti, hottons, hottons le vin ;
La voilà, la joli’ hott’ la la,
La voilà, la joli’ hotte au vin.


Et de hotte en cube, en cube,
Cubi, cubons, cubons le vin ;
La voilà, la joli’ cub’ la la,
La voilà, la joli’ cube au vin.

Et de cube en foule, en foule,
Fouli, foulons, foulons le vin ;
La voilà, la joli’ foul’ la la,
La voilà, la joli’ foule au vin.

Et de foule en presse, en presse,
Pressi, pressons, pressons le vin ;
La voilà, la joli’ press’ la la,
La voilà, la joli’ presse au vin.

Et de presse en tonne, en tonne,
Tonni, tonnons, tonnons le vin ;
La voilà, la joli’ tonn’ la la,
La voilà, la joli’ tonne au vin.

Et de tonne en tire, en tire,
Tiri, tirons, tirons le vin ;
La voilà, la joli’ tir’ la la,
La voilà, la joli’ tire au vin.


Et de tire en verse, en verse,
Versi, versons, versons le vin ;
La voilà, la joli’ vers’ la la,
La voilà, la joli’ verse au vin.

Et de verse en boisse, en boisse,
Boissi, boissons, buvons le vin ;
La voilà, la joli’ boiss’ la la,
La voilà, la joli’ boisse au vin.

(Berry.) 
Bujeaud. (Chants et Chansons populaires
des Provinces de l’Ouest.)


Cette pièce et la précédente, ainsi que la Chanson de la laine, peuvent fournir une indication utile aux auteurs ou maîtres qui songeraient à composer des exercices scolaires où l’on ferait imiter aux enfants les divers métiers, avec des paroles appropriées à cette gymnastique d’ensemble et amusante, que l’on organiserait de la sorte.

(Voyez le Jeu du Blé de Mme Pape-Carpentier, page 234.)


LA CHANSON DE LA CHARRUE AUX BŒUFS.


O éheu ! depardieu ! éheu !
Fromentin et Rogeul,
Et Grivel, ce bon bœuf !
Allez toute la voye.
Que larrons ne vous voient,
Vous emmèneraient à Troyes,
Et de Troyes à Châlons.
Changer à bons Lyons.
De traire[2] vous semons !
Et d’aller au charron.
Teurre[3] bonnot, faillon !


Cette chanson est extraite de la Passion de Monseigneur saint Didier, évéque de Langres.

Nicolas Flameng, auteur de ce mystère, composé en 1482, le fait chanter par un charruyer qui cause avec Didier. Elle était alors populaire.

(Note de M. Tarbé.)


LES « FORESTIERS » (BUCHERONS) DU CANADA.


Voici l’hiver arrivé,
Les rivières sont gelées,
C’est le temps d’aller au bois,
Manger du lard et des pois !
Dans les chantiers nous hivernerons,
Dans les chantiers nous hivernerons.

Pauv’ voyageur que t’as de la misère,
Souvent tu couches par terre,
A la pluie, au mauvais temps,
A la ligueur de tous les temps !
Dans les chantiers nous hivernerons,
Dans les chantiers nous hivernerons.

Quand ça vient sur le printemps,
Chacun craint le mauvais temps,
On est fatigué du pain,
Pour du lard on n’en a point.
Dans les chantiers, ah ! n’hivernons plus ;
Dans les chantiers, ah ! n’hivernons plus.

E. Gagnon. (Chants populaires du Canada.
Québec. Desbarats, éditeur. 1865.)


On compte au Canada près de trois millions d’habitants qui descendent des colons français et qui parlent encore aujourd’hui notre langue. Cette chanson, qui met en scène les descendants de nos compatriotes, défrichant la forêt vierge, perdus dans le pays des lacs, et exprimant leurs sentiments dans la langue française à laquelle ils sont restés fidèles, intéresse donc à un double titre les enfants de la France.


LES PIQUEURS DE GRÈS
de la Forêt de Fontainebleau.


Tous les piqueurs de grès,
Sont de fameux sujets,
C’est, à Fontainebleau,
Ce qu’il y a de plus beau.

Ah ! si le roi savait
Qu’on est bien en forêt,
Il quitterait son beau
Château de Fontainebleau.

(Le Conseiller des enfants, 1853.)
Communiqué par M. Rolland.


LA LANO.


Quand ven lou mes de mai
Les toundeires venoun,
Toundoun la nuech, toundoun lou jour,
Pendent un mes, et quinze jours,
Et très semanos,
Toundon la lano
D’agnels et blancs moutous[4].


TRADUCTION.


Quand vient le mois de mai
Les tondeurs viennent ;
Tondent la nuit, tondent le jour,
Pendant un mois et quinze jours
Et trois semaines ;
Tondent la laine
D’agneaux et blancs moutons.


Les toundeires s’en van,
Les lavaires venoun,
Lavoun la nuech, lavoun lou jour,

Les lavaires s’en van,
Les cardaires venoun,
Cardoun la nuech, cardoun lou jour,

Les cardaires s’en van,
Les fieraires venoun,
Fieroun la nuech, fieroun lou jour,


Les tondeurs s’en vont,
Les laveurs viennent ;
Lavent la nuit, lavent le jour.

Les laveurs s’en vont,
Les cardeurs viennent ;
Cardent la nuit, cardent le jour.

Les cardeurs s’en vont
Les fllêurs viennent ;
Filent la nuit, filent le jour.


M. Garcin nous écrit : « On n’a pas pu dire : La laine d’agnelets, blancs moutons, mais : La lano d’agnels et blancs moutous.

« Dans la basse Provence on dit « moutouns » ; mais dans la partie haute, dans les Basses-Alpes, comme d’ailleurs dans le Languedoc et la Gascogne, on dit « moutous ». Remarquez d’ailleurs que par là on rétablit la rime populaire d’assonance. »


Les fieraires s’en van,
Les facturiers venoun,
Teissoun la nuech...

Les facturiers s’en van,
Les talhurs venoun,
Talhoun la nuech...

Les talhurs s’en van,
Les praticos venoun,
Crompoun la nuech...

Les praticos s’en van,
Les patiaires venoun,
Patiez la nuech, patiez lou jour,


Les fileurs s’en vont,
Les tisseurs viennent,
Tissent la nuit, tissent le jour.

Les tisseurs s’en vont,
Les tailleurs viennent,
Taillent la nuit, taillent le jour.

Les tailleurs s’en vont,
Les chalands (les pratiques) viennent,
Achètent la nuit, achètent le jour.

Les chalands s’en vont,
Les chiffonniers viennent,
Amassent chiffons la nuit, amassent chiffons le jour,


Pendent un mes, et quinze jours,
Et très semanos,
Patiez la lano
D'agnels et blancs moutous.

Damas-Arbaud. (Chants populaires de la Provence.)


Pendant un mois et quinze jours
Et trois semaines,
Amassent chiffons de laine,
D’agneaux et blancs moutons.


Une variante de cette ronde est chantée dans la vallée de Barcelonnette ; M. Damas-Arbaud n’en cite que le premier couplet :

Qu’y a-t-il encore à faire
Dedans la maison ?
Il y a à tondre la laine
De nos moutons.
Tondons la nuit, tondons le jour,
Tondons-les trois semaines,
La lon, la lon, la laine.

N. B. Nous désirerions posséder tout entière cette variante de la vallée de Barcelonnette et serions bien reconnaissant à la personne qui voudrait l’adresser à la « Mélusine », Paris, Viaut, 42, rue St-André-des-Arts.  P. K.


LE PETIT PASTOUREAU.


Quand j’étais chez mon père,
Tout petit pastoureau,
Je ne savais rien faire
Que garder mon troupeau.

Un jour le loup me happe
Mon agneau le plus beau,
Mais mon chien le rattrape,
Et je sauve la peau.

Je m’en fais un’ capote
Contre le vent et l’eau,
Et j’ai mis la queuyotte
Pour plum’ à mon chapeau.

Puis d’un os à la moelle
J’ai fait un chalumeau.
Dansez au son, les belles,
A l’ombre de l’ormeau.


LA CHANSON DU PETIT PASTOUREAU.


Quand j’étais chez mon père
Tout petit pastouriau,
J’allais garder mes bêtes
Dessous le grand ormiau.

Eh ! houp, la, la !
Gens de la Brenne,
Qu’en dira-t-on
D’la montaigne ?
La faridondaine !
Houp ! la, lon !
Tra, la, la, la, la, la, la, laire !

Le loup, il est venu,
M’a mangé le plus biau,
S’il n’eût été goulu,
Il m’eût laissé la piau ! — Eh ! houp.

Pour m’en faire une veste
Et m’garantir de l’iau,
Et le bout de la queue,
Pour mettre à mon capiau ! — Eh ! houp.

Et puis l’os de la cuisse,
Pour m’faire un calumiau
Pour fair’ danser les filles
Dessous le grand ormiau.

Eh ! houp, la, la !
Gens de la Brenne,
Qu’en dira-t-on
D’la montaigne ?
La faridondaine !
Houp ! la, lon !
Tra, la, la, la, la, la, la, laire[5] !

Tarbé.


LE PETIT MOUSSE.


Il était un petit navire (bis)
Qui sur la mer s’en est allé (bis).

Voilà qu’au bout d’une semaine,
Le pain, le vin leur a manqué.

Ils tirent à la courte paille,
Savoir qui qui sera mangé.

Le p’tit mousse qui fait les pailles,
La plus courte lui a tombé.

Il pleure, il crie : « O Vierge-Mère,
Sera donc moi sera mangé ! »

Mais au grand mât voilà qu’il monte ;
Il ne voit qu’eau de tous côtés.

Il monte encore jusqu’à la pomme,
Il voit la terre ! il est sauvé !

Et tous, ils chantent : terre, terre !
Et tous, ils chantent : terre, terre !

Le p’tit mousse, i’ n’ s’ra pas mangé !
Le p’tit mousse, i’ n’ s’ra pas mangé ![6]

1


LE JEU DU BLÉ.


Tica, tica, tac,
Dans le moulin
Le bon grain
Devient belle farine.
Tica, tica, tac,
Dans le moulin
La meule en tournant écrase le grain.

Gué, gué bons paysans,
Le monde a faim, du courage !
A l’ouvrage.
Gué, gué, bons paysans.
Vive les bœufs, la charrue et les champs.

Mme Marie Pape-Carpantier.
(Jeux gymnastiques. Hachette, édit.)


LE JEU DU BLÉ.


Les geindres font trop d’embarras.
Amis ne les imitons pas.
Sans crier : hein ! sans crier : ah !
Faisons la pâte à tour de bras.

Gué, gué, bons paysans,
Le monde a faim, du courage !
A l’ouvrage,
Gué, gué, bons paysans.
Vive les bœufs, la charrue et les champs.

Mme Marie Pape-Carpantier.
(Jeux gymnastiques. Hachette, édit.)
  1. Ardennes. — Collection de M. Nozot.
  2. Tirer, tire.
  3. Tirer, tire.
  4. Nous le rétablissons ainsi :

    « D’agnels et blancs moutous »,

    d’après une correction proposée par M. Eug. Garcin, l’auteur du livre si patriotique : les Français du Nord et du Midi.

  5. Pailly, Brennes (Haute-Marne). Collection de M. Carnandet. — La Brenne, petit ruisseau qui prend sa source au village de Brennes-lès-Langres.
  6. Voir dans le Supplément le Gwerziou breton : les Matelots.