Les Forces éternelles/Lorsque je souffre encor…

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Comtesse de Noailles ()
Arthème Fayard & Cie, éditeurs (p. 385).

LORSQUE JE SOUFFRE ENCOR…


Lorsque je souffre encor plus qu’à mon habitude
De ces maux accablants à travers quoi je vis,
Et que, ni les beaux cieux éventés, ni l’étude,
Ni mes regards toujours soulevés et ravis,
Ne peuvent rehausser mon esprit, asservi
Par la pusillanime et sombre inquiétude,
Je songe avec horreur à l’instant de ma mort,
A cet instant subit, étranger, sans espace,
Où contre un mur secret le faible corps se casse,
Déjà vidé d’amour, d’espoir et de remords…

— N’éviterai-je pas la hideuse amertume
De sentir, — quand la mort étrangle le mourant,
Le bâillonne, l’aveugle et le remplit de brume, —
Que ton être, qui fut ma force et ma coutume,
À mon esprit terni devient indifférent ?