Les Forces éternelles/Scintillement

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Comtesse de Noailles ()
Arthème Fayard & Cie, éditeurs (p. 146-147).

SCINTILLEMENT



Le frais printemps est revenu,
Sa tiède atmosphère ébahie
Répand ce plaisir vif, ténu,
Qui semble toujours inconnu.
Les bois sont imbibés de pluie ;
Les lourds bourgeons gonflés, mouillés,
Scintillent d’eau et de lumière.
— Ô verte éponge printanière,
Tu fais ruisseler sur le cœur
La joie humide des odeurs !
Comme des elfes invisibles
Tous ces petits parfums contents
S’en vont s’insinuant, sautant,
Sous les fins herbages flexibles :
Frais piétinement clandestin
Qui rend la Nature attentive !

Les vents légers ont ce matin
Cette odeur d’onde et de lointain
Qu’ont les vagues contre les rives.
— Divine spontanéité,
Jeunesse éternelle du monde,
Verte cosse où mûrit l’été,
Printemps en qui l’espoir abonde,
Ah ! demeurez à peine ouvert,
Ne dépliez pas vos feuillages,
C’est vous la fierté du jeune âge,
Car les étés vont vers l’hiver !…