Les Foules de Lourdes/Préface

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P.-V. Stock (p. 5-7).


Mon intention n’est pas de narrer, par le menu, l’histoire de Bernadette et de Lourdes. Des centaines de volumes ont paru qui la racontent ; elle est, on peut le dire, rabâchée par les écrivains de tous les camps, efflanquée par les redites. Je veux simplement, pour aider à la compréhension des croquis et des notes dont se compose ce livre, rappeler brièvement les apparitions de la Vierge dans la grotte de Massabieille, située sur les bords de la rivière du Gave, au couchant de Lourdes.

En l’an 1858, la Vierge apparut dix-huit fois — du jeudi 11 février au vendredi 16 juillet — dans cette grotte, à une petite fille de quatorze ans, l’aînée des six enfants du meunier François Soubirous, à Bernadette.

Bernadette la vit, en une sorte de buée lumineuse, debout, dans une crevasse, en forme d’ogive, ouverte dans le haut du roc ; elle avait l’apparence d’une jeune fille de seize ou dix-sept ans, de taille moyenne, plutôt petite, très jolie, avec une voix douce et des yeux bleus. Elle était vêtue d’une robe blanche serrée à la ceinture par une écharpe bleu de ciel qui tombait en deux pans jusqu’aux pieds nus, coupés à la naissance des doigts par le bas de la robe ; et ces doigts étaient fleuris d’une rose jaune, tout en feu. La tête était couverte d’un voile et les mains tenaient un chapelet dont les grains blancs étaient enfilés dans une chaînette d’or.

En ses diverses apparitions, Elle s’exprima dans le patois de Lourdes et dit à l’enfant :

— Voulez-vous me faire la grâce de venir, ici, pendant quinze jours ? Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse dans ce monde, mais dans l’autre ; je désire qu’il vienne du monde. — Vous prierez Dieu pour les pécheurs. — Pénitence, pénitence, pénitence ! — Vous irez dire aux prêtres de bâtir ici une chapelle. — Je veux qu’on y vienne en procession. — Allez boire à la fontaine et vous y laver. Allez manger de l’herbe que vous trouverez là. — Je suis l’Immaculée Conception, je désire une chapelle, ici.

Elle révéla, en outre, à Bernadette, une formule spéciale de prière et trois secrets personnels qui ne furent jamais divulgués.

Ajoutons que la Vierge n’a pas crée, au moment où Elle parlait, cette source qui fuse de la grotte ; elle existait depuis longtemps mais était invisible et coulait, sans que personne le sût, sous les sables, avant que d’aller se perdre sans doute dans le cours du Gave. La Vierge s’est donc bornée à désigner l’endroit à la petite qui, sur ses indications, gratta le sol et l’en fit jaillir.

Cette source qui, lorsqu’elle s’élança de terre, n’était qu’un filet d’eau de la grosseur d’un doigt, débite actuellement, et sans jamais tarir, 122.000 litres par 24 heures.

Elle est devenue célèbre par les guérisons auxquelles elle sert de véhicule.

Quant à Bernadette, après avoir subi les épreuves de toutes sortes que lui infligèrent les autorités ecclésiastiques et civiles, elle entra, une fois sa mission terminée, à l’âge de vingt-deux ans, au couvent de Saint-Gildard, chez les sœurs de la Charité à Nevers. Elle y prit le voile sous le nom de sœur Marie Bernard et y mourut, très pieusement, le 16 avril 1879, âgée de 35 ans 3 mois et 9 jours.