Les Gaietés/L’Accouchement

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Les GaietésAux dépens de la Compagnie (p. 50-51).


L’ACCOUCHEMENT,

ACCIDENT ARRIVÉ À UNE FILLE VERTUEUSE.


Air : Je veux être un chien.


Maman, que je souffre à l’endroit
Où décemment je mets le doigt !
Vite, il faut qu’on me déshabille !
Moi qui tiens si fort à l’honneur,
M’arriverait-il un malheur !
Ah ! foutre ! ah ! chien !
Non, je n’y conçois rien,
Mais j’accouche, foi d’honnêt’fille.

Pourtant je ne grossissais pas ;
Je n’avais qu’un peu plus d’appas,
Ça complétait ma pacotille.
La vertu m’avait réussi.
Dieux !… l’accoucheur est-il ici ?
Ah ! foutre, etc.


Cela me vint-il en dormant
Ou par l’effet d’un sentiment ?
Car moi, c’est par là que je brille.
Serait-ce mon baron perclus !
Bon !… s’il avait ce qu’il n’a plus…
Ah ! foutre, etc.

N’est-ce pas un soir que, fort tard,
Sur ma porte, un galant hussard,
En passant me trouva gentille ?
Il n’a tenté qu’un faible essai…
J’étais retroussée, il est vrai.
Ah ! foutre, etc.

Ce n’est pas mon Italien ;
Il m’a prouvé son goût trop bien :
Il n’aura jamais de famille.
À sa guise il était reçu…
M’a-t-il trompée à son insu !
Ah ! foutre ! etc.

Vivez donc de privations !
Prenez donc des précautions !
Sans la sauce mangez l’anguille !
Beau moyen et bien éprouvé :
J’en suis pour un enfant trouvé.
Ah foutre ! ah chien !
Non, je n’y conçois rien,
Mais j’accouche, foi d’honnêt’fille.