Les Médailles d’argile/Portrait double

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Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 221).
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PORTRAIT DOUBLE


L’époque fut païenne, idolâtre et lascive
En ce siècle impudique où naquit sa beauté,
Et son torse divin sur lui n’a pas porté
Le corsage hypocrite où la gorge est captive.

Le peintre, par deux fois, d’un pinceau qui s’avive
Au ton de l’incarnat d’un modèle vanté,
Sur la toile a repeint ce beau corps et tenté
Qu’en un double portrait sa grâce se survive.

Dans l’un elle est assise et caresse son sein
Dont le ferme contour a l’antique dessin
De la coupe où ses doigts effeuillent une rose ;

Mais dans l’autre, plus belle, elle m’est apparue,
Statue entière où frise un angle d’ombre fauve,
Car elle y est debout et rit d’y être nue.