Les Polonais et la commune de Paris/Chapitre 3

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III


ÉTABLISSEMENT DE LA COMMUNE POLONAISE À PARIS. — MANIFESTE POLONAIS. — RÉUNIONS POLONAISES.


Un fait qui frappe bien des gens sérieux, c’est que l’émigration polonaise a devancé de longtemps les misérables qui ont fait l’exécrable Commune de 1871.

Pleins d’enthousiasme pour les idées préconisées dans les divers congrès de l’Internationale, les Polonais réfugiés se constituèrent dès 1868 en Commune centrale à Paris, avec des communes provinciales dans les villes de France et dans toute l’Europe où il y avait des groupes d’émigrés.

Nous retrouvons un manifeste signé : Alexandre Biernawski, Bosak, Jaroslav Dombrowski, St. Jarmund, Boleslav Swietorzecki, Valère Wroblewski, l’abbé Zulinski, dans lequel il est dit ce qui suit : « Le comité représentatif de l’émigration polonaise, dans le but d’établir l’organisation stable de l’émigration, décide ce qui suit :

« 1o Dans chaque localité, l’émigration se constituera en commune, et choisira un caissier et un secrétaire pour s’entendre avec le comité représentatif.

« 2o Les sociétés existant déjà sont reconnues comme communes organisées, et on en attend les procès-verbaux.

« 3o La ville de Paris, en raison de son étendue, formera au moins trois communes.

« ….. 5o Outre des cotisations pour des buts speciaux, chaque réfugié est tenu de verser,

pour les affaires générales, 25 centimes par mois. Cette cotisation sera versée par le caissier communal entre les mains du caissier du Comité représentatif. »

Voici en quels termes le manifeste est conçu :

« L’émigration ne peut pas se contenter de faire de la propagande dans l’intérieur du pays. Elle doit se révéler dans tous ses rapports avec les étrangers. Non-seulement dans la presse étrangère, et en présence des peuples libres, l’émigration manifestera les besoins et les aspirations du pays, mais encore elle prendra part à chaque lutte armée entreprise pour la délivrance de n’importe quel peuple opprimé : elle montrera ainsi sa solidarité avec l’idée républicaine. »

À la suite de ce manifeste, on organisa quatre-vingt-onze communes polonaises, succursales de la Commune centrale de Paris. Il y eut des réunions périodiques, auxquelles on invita les principaux énergumènes des réunions de Belleville, de la Redoute, du Waux-Hall, du Vieux-Chêne et du Pré-aux-Clercs, qui étaient émerveillés des progrès accomplis par la démagogie polonaise. Raoul Rigault, Ducasse, Briosne, Amouroux et tant d’autres, allaient chaque jour aux réunions des communes polonaises de la Villette et du Panthéon. Ils y furent conduits par la Polonaise Paule Minck, qui fit traduire en polonais son discours finissant ainsi : « Nous n’admettons pas la puissance de Dieu, parce que nous ne voulons ni Dieu ni puissance d’aucune sorte », pour enseigner les progrès à ses chers compatriotes.

La commune polonaise du Panthéon envoya un délégué au congrès de Lausanne de septembre 1869, où Bosak lut un rapport sur la situation actuelle de la Pologne. Le congrès déclara qu’il ne connaissait pas suffisamment la question, et qu’on convoquerait une commission composée de cinq membres, qui recueillerait tous les documents concernant la question polonaise.