Les Principes de 89 et le Socialisme/Préface

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I. L’invasion socialiste.[modifier]

Les élections législatives de 1893, les grèves qui ont suivi l’attentat du 9 décembre, ont démontré que ce n’étaient pas des dangers chimériques que j’avais dénoncés, dans ma lettre aux mineurs de Carmaux, dans mon discours du 8 mai et dans mon livre : la Tyrannie socialiste.

Non seulement en France où les socialistes qui avaient eu 90.000 voix en 1889, s’attribuent plus de 60 députés et ont recueilli plus de 500.000 voix, dont 226.000 à Paris, sans compter un chiffre égal de radicaux-socialistes qui se mettent à leur suite ; mais en Angleterre, ce pays de l’individualisme, où, malgré l’opposition qu’ils avaient trouvée de la part de radicaux comme Bradlaugh, ils sont parvenus à envoyer, en 1892, onze membres du parti ouvrier, qui, devenus un groupe important dans une majorité de 40 voix, ont forcé le gouvernement à leur faire les plus dangereuses concessions au point de vue de la limitation des heures de travail et de l’assurance obligatoire contre les accidents ; en Autriche, spécialement en Bohême et en Silésie, où ils agissent avec la puissance qui résulte d’une forte organisation ; en Belgique où ils apportent leur force aux radicaux, mais avec la pensée de les subordonner ; en Suisse, où ils inscrivent en tête de leur programme le Droit au travail ; en Danemark où, au mois de mars 1893, sept socialistes sont entrés au conseil municipal de Copenhague ; aux États-Unis où le People’s Party, soutenu par les Silvermen, les intéressés dans la hausse de l’argent, compte 22 membres dans le congrès et pèsera de son poids tantôt sur le parti démocrate, tantôt sur le parti républicain, partout nous constatons cette poussée. Nous devons appliquer à ce mouvement cette parole de M. Thiers : — Il ne faut s’épouvanter de rien : mais il faut prendre tout au sérieux.


II. Le programme socialiste.[modifier]

Le programme des socialistes français se résume ainsi :

« Organisation du prolétariat sur le terrain de la lutte des classes, sans compromission aucune, en vue de la Révolution sociale[1].

« Conquête du pouvoir politique de la Classe ouvrière, constituée en parti distinct.

« Appropriation collective, le plus vite possible et par tous les moyens, du sol, du sous-sol, instruments de travail, cette période étant considérée comme phase transitoire vers le socialisme libertaire[2],

« L’expropriation avec une indemnité est donc une chimère autant, sinon plus, que le rachat. Et quelque regret qu’on puisse en éprouver, quelque pénible que paraisse aux natures pacifiques ce troisième et dernier moyen, nous n’avons plus devant nous que la reprise violente sur quelques-uns de ce qui appartient à tous, disons le mot : la Révolution[3].

Immédiatement, transformation, dans les communes, de tous les commerces, et spécialement ceux de l’alimentation, en services publics.

Reprise des mines et des chemins de fer par l’État, banque d’État, mainmise sur chaque personne par l’impôt personnel et confiscation graduelle de chaque fortune par l’impôt progressif et l’abolition de l’héritage.

Législation de privilège et d’oppression selon les qualités des citoyens ; limitation des heures de travail, chômages obligatoires, fixation de minima de salaires, réglementation des ateliers par les associations ouvrières, etc.

Comme politique, « emploi de tous les moyens de lutte, résistance économique (grève), vote et force selon les cas[4].

« Même une grève vaincue a son utilité si, comme le recommande Lafargue avec tant de raison, au lieu de faire la grève pour la grève, on ne s’en sert que comme d’un moyen d’ébullitionner les masses ouvrières, d’arracher au capital son masque de phrases philanthropiques et libérales et de montrer aux yeux de tous sa face hideuse et sa meurtrière exploitation.

« On n’arrivera jamais à convaincre la bourgeoisie moderne qu’elle doit se prêter à la socialisation des capitaux. C’est la force qui décidera de cette question, en dernière analyse ; la force, l’accoucheuse des sociétés nouvelles, dit Marx.

« Il ne s’agit donc pas d’être réformiste ou révolutionnaire : il faut être réformiste et révolutionnaire. Nous ne laisserons pas faiblir en nous l’esprit révolutionnaire[5]. »


Voilà le programme des socialistes français, calqué sur les programmes des socialistes allemands, tel qu’il a été formulé par des congrès qui ont constitué leur parti, par les possibilistes, et par le Docteur du socialisme, M. Benoit Malon : il aboutit à la suppression de la propriété individuelle par la force. J’écris ces lignes, au lendemain de la séance du 16 janvier, dans laquelle les socialistes ont obtenu une majorité sous prétexte de dégrèvement de l’impôt foncier, en faisant violer le principe de l’égalité des citoyens devant l’impôt ; et M. Jaurès, au nom de ces singuliers défenseurs des intérêts de la propriété, avait dit :

Nous ne distinguons pas entre les capitalistes terriens et les autres. Pour nous, les propriétaires oisifs du sol ne détiennent les rentes du sol qu’arbitrairement.

En même temps que M. Jaurès affirmait cette expropriation de tous les propriétaires qui n’auraient pas pu prouver, en montrant les callosités de leurs mains, qu’ils maniaient eux-mêmes la houe, la bêche ou la faucille, un autre socialiste, M. Avez, déclarait qu’il voudrait « brûler le grand livre » ; et il caractérisait suffisamment les moyens de persuasion qu’il emploierait à l’égard des récalcitrants, en s’écriant :

« Nous sommes fiers des actes de la Commune ; nous sommes les continuateurs des membres de la Commune ! »



III. Le lendemain de la victoire socialiste.[modifier]

Supposons que ces descendants des Pastoureaux du XIIIe siècle, des Jacques du XIVe, des Paysans du XVIe siècle, de certaines hordes de 93, des insurgés de juin, des Communards de 71, prennent le pouvoir, dépouillent ceux qui possèdent, quel sera le lendemain ? Eux et leurs amis deviendraient-ils seulement propriétaires et capitalistes, s’ils changeaient les propriétaires et les capitalistes d’aujourd’hui en prolétaires ? Ils peuvent amonceler les ruines, faire banqueroute, comme un roi du bon vieux temps ou comme un sultan ; « flamber » les monuments et les hôtels, anéantir tous les titres de propriété, supprimer les bornages et détruire le travail des siècles ; faire main basse sur les usines et les outillages : barbares de l’intérieur, ils peuvent passer sur la civilisation actuelle comme une horde de Mogols ; ils peuvent emporter tout l’édifice social dans leur torrent ; mais ce dont je les défie, c’est de féconder le sol qu’ils auront bouleversé. Entre les ruines qu’ils auront semées erreront de nouvelles et plus lamentables misères que celles qui peuvent encore exister dans nos civilisations. Ces agents de destruction ont raison d’arbrer le drapeau noir. C’est un drapeau de deuil qui convient à ces fossoyeurs de la civilisation.

Du cataclysme qu’ils entrevoient dans leur cauchemar, ils ne pourraient même pas faire naître un droit permettant à un corps social de vivre, de se maintenir et de se développer.


IV. L’Endosmose socialiste.[modifier]

Ce qui est grave, c’est qu’ils trouvent tous les jours des hommes que j’appellerais leurs auxiliaires, si un parti, qui conspire au grand jour la destruction sociale par la force, pouvait compter d’autres membres que des complices.

Par l’oubli de tous les principes de notre droit public, par la phraséologie qui en résulte, par une sorte de sentimentalité qui rappelle « la sensibilité » qu’invoquait Robespierre pour envoyer à la guillotine « les traîtres » qui ne le considéraient pas comme l’incarnation de « la vertu », c’est à qui fera leur jeu.

Le Volkswart, leur journal allemand, vient de publier un article intitulé L’Endosmose dans lequel il montre les idées socialistes s’infiltrant partout en Allemagne, dans les gouvernements, dans les églises. Il en triomphe. C’est son rôle.

En France, nous assistons au même phénomène. Depuis moins de six semaines, deux fois les socialistes ont été les maîtres de la Chambre.

Le lundi 4 décembre, la proposition d’amnistie déposée par M. Paschal Grousset vient en discussion et réunit 226 voix dont 215 républicaines ; elle n’est repoussée que par 257 voix, dont 205 républicaines seulement.

La Chambre des députés, les yeux dessillés par l’explosion de la bombe de Vaillant, après avoir voté la loi sur la presse, les lois sur les associations de malfaiteurs et sur les explosifs, au lendemain des vacances, semblait revenue un peu plus sérieuse qu’au moment où la majorité républicaine votait l’amnistie et où le gouvernement n’était sauvé que grâce à l’appoint de la droite. On devait croire que la majorité des républicains s’était reprise et laissait les socialistes et les radicaux socialistes isolés avec les 124 voix qui, le 13 décembre, avaient appuyé l’ordre du jour Basly. Pas du tout. Le 16 janvier, les socialistes imaginent que puisqu’on réduit le taux d’intérêt des rentiers, il faut s’empresser d’en faire bénéficier les propriétaires. Ces bonnes âmes veulent engraisser leurs condamnés à mort.

Ils réunissent 280 voix contre 240, une majorité de 40 voix, formée de beaucoup de ces condamnés à mort complaisants, et il a fallu toute l’énergie de M. Casimir Périer, président du Conseil, pour faire réparer par un vote sur l’ensemble ce vote qui mettait en demeure, en vertu de la logique parlementaire, le Président de la République d’appeler M. Jaurès pour former un cabinet avec lequel il aurait commencé, en compagnie de MM. Guesde, Goblet, Jourde, Baudin, à faire passer de la théorie à la pratique la politique du Quatrième État.

Le Sénat lui-même « s’est mis dans le train », avant que les purs socialistes l’aient envahi, en adoptant la loi sur les sociétés coopératives.

La discussion, entre hommes sérieux dont beaucoup sont des légistes, a révélé un oubli de tous les principes sur lesquels repose notre législation.

Effrayé des conséquences que cette loi peut avoir, M. Marcel Barthe avait déposé un amendement ainsi concu : « La loi reconnaît en faveur des ouvriers de l’industrie et du commerce, quatre espèces de sociétés coopératives auxquelles elle accorde certaines immunités fiscales. »

Qu’est-ce à dire ? Voilà des « sociétés faites en faveur des ouvriers. » On aurait eu des brevets d’ouvriers. Nous revenons à la législation de castes.

Les partisans de la loi ont réclamé le privilège de l’exemption de l’impôt pour les sociétés coopératives, en se servant de qualifications comme celle-ci : « impôt sur la pauvreté. »

M. Tolain, qui est resté toujours socialiste, a dit : « C’est un privilège, je ne recule pas devant le mot. » Et M. Volland, en combattant la loi, a repris : « J’admets une loi de privilège pour les petits, pour les humbles », transportant ainsi dans le vocabulaire juridique le vocabulaire de la chaire, comme si, en droit, au nom du principe de l’égalité devant la loi, il y avait « des petits et des humbles. » Et M. Marty, ministre du commerce, lui, soutenant la loi, l’a qualifiée « de loi de philanthropie, de loi de justice », comme si la philanthropie, qui est une attitude de sympathie pour certaines personnes, avait quelque corrélation avec « la justice » qui est un acte d’impartialité envers tous ; et comme si, accorder « par philanthropie » des « privilèges aux humbles et aux petits » ce n’était pas violer le principe de « la justice », en vertu duquel tout privilège est une spoliation !

Telle est la cacophonie d’idées à laquelle a donné lieu, au Sénat, la discussion de la loi sur les Sociétés coopératives ; et il l’a adoptée, « par philanthropie » en considération « des humbles et des petits », quoiqu’en fait, on lui ait prouvé que les sociétés coopératives pouvaient n’être que des machines à vendre dans la main de grands négociants, usant déjà du prestige que donne ce titre et devant se servir de la loi nouvelle pour écraser de leur concurrence privilégiée « les petits et les humbles » du commerce.

M. François Coppée parle à l’Académie française de « l’heure des concessions », tout en conseillant de ne pas « céder aux menaces d’en bas », et demande qu’on ne crie pas « à l’impossible devant certaines réformes qui paraissent exorbitantes », et il espère qu’avec « leur cœur, » « les privilégiés de ce monde régleront la question de la misère, car il n’y pas d’autre question sociale[6]. »

À tout instant, par suite de sentimentalité, de molle philanthropie, et d’oubli des principes, même ceux qui croient y résister, se laissent aller à donner leur aval aux théories socialistes.

De ce que vous les faites vôtres, cessent-elles d’être socialistes ? La qualité des idées n’est pas modifiée par les intentions de ceux qui les soutiennent.

Au contraire, ceux qui caressent cette politique, au lieu d’en dénoncer le péril, servent à sa propagande, en lui donnant pour point d’appui leur autorité personnelle.

Dans les administrations, dans l’armée même, on trouve des gens qui, regardant la girouette, se mettent dès maintenant du côté de ce qu’ils considèrent comme le manche. Il y a eu des ministres et des préfets qui ont appuyé les socialistes dans les dernières élections.

Le 16 janvier, le commissaire du gouvernement près le conseil de préfecture de la Seine a soutenu la validation de l’élection des prud’hommes, nommés sous le patronage d’un Comité de vigilance, qui, en tête de son programme, mettait :

Art. 1er. — Tout candidat, comme conseiller prud’homme, déclare que le but qu’il poursuit est la suppression complète du patronat et du salariat ; que pour arriver à ce résultat, il se déclare partisan de la lutte des classes.

L’homme qui prend cet engagement doit remplir l’office de juge ; et le conseil de préfecture déclare solennellement qu’il présente des garanties d’impartialité suffisantes pour le remplir !

Depuis longtemps, j’ai protesté contre la complicité de braves gens timides, de bourgeois, de gens riches, de négociants, de capitalistes, avec les anarchistes et les socialistes révolutionnaires qu’ils commanditent, dont ils subventionnent les journaux, directement ou en annonces, dont ils payent les frais de propagande.

Les socialistes représentent le parti de la guerre sociale et de la confiscation. Eux-mêmes le proclament. Tout accord, toute combinaison, toute complaisance avec eux constituent une trahison à l’égard du reste de la nation. Les républicains, dignes de ce nom, doivent les tenir à l’écart, comme ils tenaient les boulangistes.


V. La Politique de résistance.[modifier]

— Mais ce que vous soutenez, c’est une « politique de résistance » disent quelques radicaux qui se suicident avec résolution au profit des socialistes. « Politique de résistance ! » crient, avec indignation, ces aimables socialistes qui, en même temps, reconnaissent qu’ils ne peuvent triompher que par la force !

Quelle autre politique voulez-vous donc qu’on ait à l’égard de gens qui se déclarent vos ennemis et annoncent bien haut qu’ils veulent conquérir vos dépouilles ? Voulez-vous une politique de condescendance ? Voulez-vous une politique d’alliance avec ces ennemis ? Soit : mais alors soyez logiques jusqu’au bout : millionnaires qui marchez avec eux — et il y en a — partagez ! déposez vos fortunes, vos terres, vos rentes sur l’autel du collectivisme, de manière qu’on ne puisse pas supposer que, si vous hurlez avec les loups, c’est pour les jeter sur les voisins, avec le lâche espoir d’être épargnés et de profiter du butin commun.


VI. Rôle des économistes.[modifier]

Quels sont les hommes qui peuvent lutter avec efficacité contre les socialistes, qui se mettent en avant ? Ce sont les économistes. Or, les économistes ne sont pas populaires. Ils ont la faiblesse de représenter la science contre le préjugé et le charlatanisme, l’intérêt général contre des intérêts privés.

Cependant leurs adversaires ont l’habitude de les qualifier d’optimistes, de disciples de Pangloss, et affirment que nous trouvons que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

J’ai déjà répondu que nous aurions un bien heureux caractère, si nous étions satisfaits de la manière dont on applique nos idées, et dont nous sommes traités par les protectionnistes d’un côté, par les socialistes de l’autre.[7]

Des égoïstes ! nous qualifie le philanthrope Henry Maret. Parce qu’un journal a raconté qu’une pauvre femme est morte de misère, il conclut que « toute propriété qui n’est pas le gain du travail est un vol » et il s’écrie : « Laissez faire l’exploiteur, ainsi le veut la liberté, ainsi le veut l’économie politique, ainsi le veut Gournay. »

Si M. Henry Maret se donnait la peine d’observer un peu l’histoire, il saurait que les prôneurs de charité, les fondateurs de prix de vertu, les rêveurs sentimentaux, les écrivains pathétiques, les orateurs larmoyants, les poètes pleureurs n’ont joué qu’un rôle insignifiant dans la lutte contre la misère, dans le développement du bien être, dans le progrès de la richesse et sa diffusion ; il apprendrait que tous les utopistes, depuis Platon jusqu’à Cabet, n’ont servi qu’à amuser des naïfs et qu’à détourner les malheureux du travail utile et de l’épargne qui leur auraient donné ce qu’ils demandaient en vain à des chimères. Quant aux théoriciens et aux praticiens de guerre sociale, aussi bien ceux de 1848 que ceux de 1871, il ne doit pas ignorer qu’ils ont pris des ruines pour piédestal, et qu’ils n’ont laissé d’autres traces que des souvenirs d’épouvante.

Les gens qui se lamentent autour d’un moribond ne l’ont jamais guéri. Les gémissements des pleureuses espagnoles n’ont jamais ressuscité un de ces morts que Laborde met debout en lui tirant la langue. L’homme utile, au chevet d’un malade, c’est le médecin ou le chirurgien, dont le devoir est de paraître impassible, et qui cherche les moyens pratiques de guérir ou de soulager les souffrances, avec méthode, et non d’après ses fantaisies et les variations de ses sentiments. Aux hommes utiles et silencieux qui ont augmenté la production du blé et du bétail ; qui ont permis à tout le monde, dans les quelques pays, dits civilisés, qui se trouvent sur le globe, d’avoir du linge et des souliers ; qui ont facilité les transports, les transactions, appris la comptabilité, développé le crédit, permis à tous de prendre des habitudes d’épargne et de prévoyance ; qui ont abaissé les obstacles que les divers gouvernements avaient mis entre les producteurs et les consommateurs ; qui ont essayé d’introduire dans le monde ces droits méconnus : la liberté du travail et de la circulation, l’humanité réservera sa reconnaissance quand elle aura une réelle conscience des conditions de ses progrès ; et parmi ces destructeurs de la misère, elle placera au premier rang, Gournay, ses amis les physiocrates et les économistes qui, mettant leur devoir au-dessus de la popularité, continuent de déblayer la voie de tous les obstacles qu’y amoncèlent à l’envi les ignorants et les marchands d’orviétan social.


VII. Notre devoir.[modifier]

Nous avons un devoir à remplir. Nous ne devons pas nous laisser intimider par les injures, les calomnies, les menaces,le tapage et les cris de victoire que poussent les socialistes. Non seulement nous devons défendre contre eux les principes de liberté et de justice qu’ils veulent détruire, mais nous devons les attaquer ; opposer propagande à propagande, défendre la liberté, la propriété, la légalité, la paix sociale, la patrie contre la tyrannie socialiste, contre le collectivisme, contre la guerre sociale, et contre l’internationalisme révolutionnaire ; et de même qu’ils ont fait l’Union socialiste, nous devons faire l’Union individualiste, sans réserves ni équivoques politiques, avec la volonté et l’ambition d’aider à l’évolution pacifique de la République, en harmonie avec les Principes de 89.

On aura beau les dédaigner et les repousser, ils sont solides. Ce sont les assises sur lesquelles repose le droit public moderne. Nous devons prendre garde qu’on ne les escamote ou qu’on ne les tourne. En leur nom, nous devons nous dresser contre tous ceux, qu’ils viennent de droite ou de gauche, du passé ou de l’étranger, qui veulent les fausser ou les saper.

Yves Guyot.

17 janvier 1894.



  1. Neuvième congrès ouvrier de la Fédération du Centre.
  2. Quatrième congrès national ouvrier tenu au Havre, 1880.
  3. Jules Guesde, Collectivisme et Révolution.
  4. Manifeste des broussistes, les opportunistes du socialisme. Benoit Malon. Le nouveau parti, p. 101.
  5. Benoit Malon, Le nouveau parti, p. 80.
  6. M. François Coppée. Rapport sur les prix de vertu, novembre 1893.
  7. Voir la Science Economique. Introduction.