Les Putains cloîtrées/Préface

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Préface de l’Éditeur.

Les Putains cloitrées, Bandeau de début de chapitre
Les Putains cloitrées, Bandeau de début de chapitre

PRÉFACE DE L’ÉDITEUR.







Lettrine F outre est de l’essence de la nature : chaque être porte en soi, plus ou moins, cette faculté générative pour laquelle nous sommes nés. Le plaisir qui provient de ces étroits embrassements et d’un commerce enchanteur, est le but que les deux sexes se proposent. On a beau couvrir du voile de la modestie les désirs et les passions, ils n’en agitent pas moins le cœur de la gente pucelle, ainsi que celui du cénobite le plus austère. Il n’est point de palliatif contre ce feu qui dévore notre existence, et qui donne la vie et fait mouvoir tout ce qui respire. C’est particulièrement chez les femmes, où se développent, avec le plus de grâce, ces sensations heureuses. Pour donner un terme honnête à cette passion, on a nommé coquetterie ce qui, exprimé dans son vrai sens, veut dire : besoin de foutre.

Toutes les femmes possèdent à peu près les mêmes charmes, mais la coquetterie les embellit. Nos yeux, par qui l’âme reçoit ses premières sensations, brillent à l’aspect d’une de ces aimables coquettes au teint fleuri, à la taille légère et au pied mignon.

Aucune ville d’Europe ne renferme, comme Paris, toutes ces grâces que les poëtes, dans leur cerveau délirant, ont pris tant de plaisir à peindre. C’est vraiment là qu’est fixé l’asyle de l’amour ; c’est la véritable demeure des vainqueurs de Mars : aussi toutes les productions du génie français se ressentent-elles de ces voluptueuses influences. Collé, Piron, Grecourt, Voltaire, Robbé, la Fontaine même, cet homme de la nature, a pris plaisir d’employer ses crayons à des peintures lascives que l’on admire chaque jour. Au théâtre, le galant Favart a multiplié ces tableaux, en alliant la bienséance aux roses de la volupté. Tous ces jolis opéra-comiques sont autant de leçons d’amour et une arriette chantée avec grâce agite dans nos cœurs l’ardeur qui le brûle. L’on ne sort de ces représentations que pour rechercher le plaisir qu’elles nous inspirent. Pourquoi des esprits attrabilaires blâment-ils l’écrivain dont la plume légère et badine chante avec naïveté les plaisirs de l’amour ? Pourquoi ? C’est que ceux-là ne connaissent de ce dieu que les rigueurs : mais pour les amants heureux, ils aiment à entendre leurs plaisirs chantés par Apollon. C’est à ces amants heureux que nous offrons ce petit ouvrage, qui ajoutera un fleuron de plus à la couronne de Priape.

La jolie comédie des Visitandines a donné lieu à cette parodie. La scène, au lieu de se passer dans un couvent, est transportée à Bicètre.