Les Races de chèvres de la Suisse/Race chamoisée des Alpes

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Bouc, Race chamoisée des Alpes.


Chèvre, Race Chamoisée de Alpes

B. Race chamoisée des Alpes.

Gemsfarbige Alpenziege.
(Pl. III et IV.)

1. Distribution Géographique.

La race chamoisée est certainement une des plus répandues en Suisse, où elle est connue sous des noms différents. Il n’y a pas de canton qui ne la possède dans toute sa pureté, ou à l’état de métis, c’est à dire croisée avec d’autres races.

Nous la trouvons principalement le long de la chaîne méridionale des Alpes suisses faisant frontière à l’Italie, où elle est fréquemment confondue avec la chèvre de cette vallée d’Aoste où les marchands valaisans s’approvisionnent de petit bétail.

Dans les cantons des Grisons et du Tessin, elle est aussi plus d’une fois confondue avec la chèvre piémontaise ; c’est d’ailleurs la même race qui peuple : 1. les frontières italiennes, mais avec un manteau plus ou moins foncé selon la provenance de ces animaux ; 2. les montagnes avoisinant le massif du Mont-Blanc, en Italie et en Savoie, avec cette seule différence que le manteau est plus clair et le poil plus court sur toutes les parties du corps. Dans le centre de la Suisse le manteau est plus foncé ; sa nuance se rapproche beaucoup de celle du bouquetin des Alpes, ce qui accuserait peut-être des croisements avec le superbe animal.

Dans le canton des Grisons qui en nourrit le plus grand nombre, les chèvres chamoisées ont le manteau plus foncé, le corps plus petit que dans les vallées d’Aoste et rappellent mieux, en un mot, le type du chamois. Elles y sont connues sous les noms suivants : Einheimische Rasse, braunschwarz, reiner Gebirgsschlag, dunkelgemsfarbig et aussi rein gemsfarbige Ziege. Il est à remarquer que dans toutes ces appellations, il est fait mention du même manteau brun-foncé.

Dans le canton de St-Gall on désigne la chèvre chamoisée sous le nom de St. Galler Oberländer ou Stiefelgeissen, gelblich, gehörnt. Le nom de Stiefel (botte) lui a été donné à cause de la nuance plus foncée de la partie inférieure de ses quatre membres, ce qui la fait paraître comme bottée ; c’est du reste le manteau des véritables chèvres chamoisées.

Celles du canton de Berne exposées en 1895, figuraient au catalogue sous le nom de Hasleschlag ou Type du Hasli.

Dans le canton d’Unterwald elle prend le nom de Obwaldnerschlag, braun. Ces désignations sont toujours suivies du mot « gehörnt », c’est à dire encornée, car la chamoisée comme la chèvre à col noir est toujours pourvue de cornes ; cette dernière les a plus fortes que la chamoisée.

On trouve cependant dans la Gruyère une sorte de chèvres très grandes et très bonnes laitières, avec un manteau identique à celui de la véritable chamoisée, mais ne portant point de cornes. Elle s’accommodent aussi bien de la stabulation que de l’alpage. Ce sont les plus grosses chèvres de la Suisse, mais elles sont moins alertes que la chamoisée à cornes, qui est plus petite. Les manteaux cendrés que l’on rencontre parfois dans le même canton sont le résultat de croisements ou aussi créés par une longue stabulation.

2. Manteau, Taille, Formes et Proportions.

La race chamoisée se distingue, ainsi que son nom l’indique par son manteau couleur chamois. — Le brun clair forme le fond du manteau, mais une raie dorsale brun foncé, partant de la nuque, se prolonge jusqu’à l’extrémité de la queue. La face, le bord et l’intérieur des oreilles, la partie antérieure de la poitrine et les épaules sont également plus foncés que le reste du corps. Les jambes, vues depuis devant, sont d’une teinte plus foncée jusqu’au dessus des genoux et des jarrets ; les tendons longeant le canon, sont quelquefois plus clairs.[1]

Le mufle, les muqueuses de la bouche ainsi que les cils sont de nuance foncée. Il en est de même des cornes et des »onglons«.

La chamoisée est aussi de taille moyenne (0,75 — 0,85 m au garrot), comme la chèvre de Viège. Nourrie en plaine pendant quelques années, elle augmente de poids, comme du reste toutes les races. Sa conformation rappelle celle du chamois : tête courte et légère, front déprimé, regard vif et hardi, cornes élancées, de formes plutôt ovales.

L’encolure est courte, le garrot arrondi, la poitrine bien développée et profonde. Ses membres sont fins et relativement courts avec de vigoureux jarrets, la ligne du dos est droite, par contre la largeur des reins et le développement de la croupe laissent à désirer ; en général cette croupe pourrait être plus longue, plus large et un peu moins inclinée.

Un poil court recouvre entièrement le corps, mais sur le dos et les cuisses, ce poil est parfois plus long ; c’est ce qu’on appelle le poil demi-long, en termes d’élevage. Ceci est préférable à la montagne, car les animaux supportent ainsi plus facilement le froid et les intempéries des saisons.

3. Tempérament et Aptitudes.

La chèvre chamoisée, comme celle à col noir, est essentiellement montagnarde ; elle est également robuste et pleine de pétulance, mais en été, elle s’habitue plus vite à l’écurie ; elle s’engraisse facilement. La quantité de lait qu’on en tire varie beaucoup, suivant les endroits qu’elle habite ; ainsi sur les hautes Alpes il est moins abondant que dans les vallées basses. Cette race n’a pas été jusqu’ici recherchée pour l’exportation.

Le croisement de la chèvre chamoisée avec d’autres races, a donné naissance à un grand nombre de variétés de toutes formes et de toutes nuances, qui sont répandues dans la Suisse entière. Les traces de croisements persistent très longtemps, ce qui prouve l’ancienneté et la fixité de cette race, et sa puissance à transmettre ses caractères.

Dans le croisement de la chamoisée et de la chèvre à col noir, on remarque autour des oreilles et du chanfrein de celle-ci des poils roussâtres qui restent visibles pendant plusieurs générations. Croisée avec la chamoisée, la chèvre du Gessenay prend un manteau doré ou jaune paille. Ces mélanges de teintes chez les métis de l’espèce caprine sont très intéressants, car ils peuvent nous fournir d’excellents renseignements pour l’étude de l’espèce bovine, au point de vue des races.

  1. Au bout de quelques générations, le manteau de la chamoisée devient plus clair, par la stabulation, et se brunit, au contraire, sous l’action du soleil.