Les Romans de la Table ronde (Paulin Paris)/Livre 2/01

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I.

joseph et son fils josephe arrivent à sarras. — sacre de josephe. — premier sacrifice de la messe.



Nous ne nous arrêterons pas sur le début du Saint-Graal : il est, à peu de chose près, le même que celui du poëme de Robert de Boron. Le romancier s’évertue pour la première fois, en supposant que Joseph avait été marié, que sa femme se nommait Enigée[1] et qu’il avait eu un fils dont le nom différait du sien par l’addition d’un e final. Josephe, dans tout le cours du récit, dominera Joseph ; il sera l’objet de toutes les grâces divines et le souverain pontife de la religion nouvelle. Baptisé par saint Philippe évêque de Jérusalem, il avait nécessairement plus de quarante ans quand Vespasien tira de prison son père.

Nous quittons le poëme de Robert de Boron pour suivre les deux Joseph et leurs parents, nouvellement baptisés, sur le chemin qui conduit à Sarras, ville principale d’un royaume du même nom qui confinait à l’Égypte. C’est de cette ville, qui devait une des premières adopter la fausse religion de Mahomet, que tirent leur nom ceux qui croient aujourd’hui à ce faux prophète.

Ils n’emportaient avec eux d’autre trésor, d’autres provisions, que la sainte écuelle rendue par Jésus-Christ lui-même à Joseph d’Arimathie : Joseph à la présence de cette précieuse relique avait dû de ne pas sentir la faim ni la soif : les quarante années de sa captivité n’avaient été qu’un instant pour lui. Avant d’arriver à Sarras, il avait entendu le Fils de Dieu lui commander, comme autrefois Dieu le Père à Moïse, de faire une arche ou châsse, pour y enfermer ce vase. Les chrétiens qu’il conduisait devaient faire à l’avenir leurs dévotions devant l’arche. À Joseph et à son fils seuls le droit de l’ouvrir, de regarder dans le vase, de le prendre dans leurs mains. Deux hommes choisis entre tous devaient porter l’arche sur leurs épaules, toutes les fois que la caravane serait en marche.

En arrivant à Sarras, Joseph apprit que le roi du pays, Évalac le Méconnu, était en guerre avec le roi d’Égypte Tolomée[2], et qu’il venait d’être vaincu dans une grande bataille. Doué du don de l’éloquence, Joseph se présenta devant lui pour lui déclarer que, s’il voulait reprendre l’avantage sur les Égyptiens, il devait renoncer à ses idoles et reconnaître Dieu en trois personnes. Son discours présente un excellent résumé des dogmes de la foi chrétienne ; rien n’y paraît oublié, et c’est encore la doctrine exposée dans nos catéchismes.

Évalac eut la nuit suivante une vision qui lui fit comprendre le Dieu trinitaire, la seconde Personne revêtue de l’enveloppe mortelle et conçue dans le sein d’une Vierge immaculée. Le Saint-Esprit vint en même temps avertir Joseph que son fils Josephe était choisi pour garder le saint vase ; qu’il serait ordonné prêtre de la main de Jésus-Christ ; qu’il aurait le pouvoir de transmettre le sacerdoce à ceux qu’il en jugerait dignes, comme ceux-ci le transmettraient à leur tour, dans les contrées où Dieu les établirait[3].

Le Saint-Esprit dit à Joseph : « Quand l’aube prochaine éclairera l’arche, quand tes soixante-cinq compagnons auront fait leurs génuflexions devant elle, je prendrai ton fils, je l’ordonnerai prêtre, je lui donnerai ma chair et mon sang à garder. »

Et le lendemain, la même voix divine, parlant aux chrétiens assemblés : « Écoutez, nouveaux enfants ! Les anciens prophètes eurent le don de mon Saint-Esprit ; vous l’obtiendrez également, et vous aurez bien plus encore, car vous aurez chaque jour mon corps en votre compagnie, tel que je le revêtis sur la terre. La seule différence, c’est que vous ne me verrez pas en cette semblance. Ô mon serviteur Josephe ! je t’ai jugé digne de recevoir en ta garde la chair et le sang de ton Sauveur. Je t’ai reconnu pour le plus pur des mortels et le plus exempt de péchés, le mieux dégagé de convoitise, d’orgueil et de mensonge : ton cœur est chaste, ton corps est vierge ; reçois le don le plus élevé que mortel puisse souhaiter : seul tu le recevras de ma main, et tous ceux qui l’auront plus tard devront le recevoir de la tienne. Ouvre la porte de l’arche, et demeure ferme à la vue de ce qui te sera découvert. »

Alors Josephe ouvrit l’arche en tremblant de tous ses membres.

Il vit dedans un homme vêtu d’une robe plus rouge et plus éclatante que le feu ardent. Tels étaient aussi ses pieds, ses mains et son visage.

Cinq anges l’entouraient, vêtus de même, et portant chacun six ailes flamboyantes. L’un tenait une grande croix sanglante ; le second trois clous d’où le sang paraissait dégoutter ; le troisième une lance dont le fer était également rouge de sang ; le quatrième étendait devant le visage de l’homme une ceinture ensanglantée ; dans la main du cinquième était une verge tortillée, également humide de sang. Sur une bande que les cinq anges tenaient développée, il y avait des lettres qui disaient : Ce sont les armes avec lesquelles le Juge de tout le monde a vaincu la mort ; et sur le front de l’homme d’autres lettres blanches : En cette forme viendrai-je juger toutes choses, au jour épouvantable.

La terre sous les pieds de l’homme paraissait couverte d’une rosée sanglante qui la rendait toute vermeille.

Et l’arche semblait avoir alors dix fois sa première étendue. Les cinq anges circulaient sans peine dans l’intérieur autour de l’homme, qu’ils contemplaient les yeux remplis de larmes.

Josephe, ébloui de tout ce qu’il voyait, ne put prononcer une parole ; il s’inclina, baissa la tête et restait tout abîmé dans ses pensées, quand la voix céleste l’appela ; aussitôt il releva le front et vit un autre tableau.

L’homme était attaché sur la croix que tenaient les cinq anges. Les clous étaient entrés dans ses pieds et dans ses mains ; la ceinture serrait le milieu de son corps, sa tête retombait sur la poitrine ; on eût dit un homme dans les angoisses de la mort. Le fer de la lance pénétrait dans le côté, d’où jaillissait un ruisselet d’eau et de sang ; sous les pieds était l’écuelle de Joseph, recueillant le sang qui dégouttait des mains et du côté ; elle en était remplie au point de donner à croire qu’elle allait déborder.

Puis les clous parurent se détacher, et l’homme tomber à terre la tête la première. Alors Josephe, d’un mouvement involontaire, se jeta en avant pour le soutenir : comme il avançait un pied dans l’arche, cinq anges s’élancèrent, les uns vibrant contre lui la pointe de leurs épées, les autres élevant leurs lances comme prêtes à le frapper. Il essaya pourtant de passer, tant il avait à cœur de venir en aide à celui qu’il reconnaissait déjà pour son Sauveur et son Dieu ; mais la force invincible d’un ange le retint malgré lui.

Comme il demeurait immobile, Joseph, incliné à quelque distance, s’inquiétait de voir son fils arrêté au seuil de l’arche : il se leva et se rapprocha de lui. Mais Josephe, le retenant de la main : « Ah ! père, » dit-il, « ne me touche pas, ne m’enlève pas de la gloire où je suis. L’Esprit-Saint me transporte par-delà la terre. » Ces mots redoublèrent la curiosité du père, et, sans égard pour la défense, il se laissa tomber à genoux devant l’arche, en cherchant à découvrir ce qui se passait à l’intérieur.

Il y vit un petit autel couvert d’un linge blanc sous un premier drap vermeil. Sur l’autel étaient posés trois clous et un fer de lance. Un vase d’or en forme de hanap occupait la place du milieu. La toile blanche jetée sur le hanap ne lui permit pas de distinguer le couvercle et ce qu’il enfermait. Devant l’autel, il vit trois mains tenir une croix vermeille et deux cierges, mais il ne sut pas reconnaître à quels corps ces mains appartenaient.

Il entendit un léger bruit ; une porte s’ouvrit et laissa voir une chambre dans laquelle deux anges tenaient, l’un une aiguière, l’autre un gettoir ou aspersoir. Après eux venaient deux autres anges portant deux grands bassins d’or, et à leur cou deux toiles de merveilleuse finesse. Trois autres portaient des encensoirs d’or illuminés de pierres précieuses, et de leur autre main des boîtes pleines d’encens, de myrrhe et d’épices dont la suave odeur se répandait à l’entour. Ils sortirent de la chambre les uns après les autres. Puis un septième ange, ayant sur son front des lettres qui disaient : Je suis appelé la force du haut Seigneur, tenait dans ses mains un drap vert comme émeraude qui enveloppait la sainte écuelle. Trois anges allèrent à sa rencontre portant des cierges dont la flamme produisait les plus belles couleurs du monde. Alors Josephe vit paraître Jésus-Christ lui-même sous l’apparence qu’il avait en pénétrant dans sa prison, et tel qu’il s’était levé du sépulcre. Seulement son corps était enveloppé des vêtements qui appartiennent au sacerdoce.

L’ange chargé du gettoir puisa dans l’aiguière, et en arrosa les nouveaux chrétiens ; mais les deux Joseph pouvaient seuls le suivre des yeux.

Alors Joseph s’adressant à son fils : « Sais-tu maintenant, beau fils, quel homme conduit cette belle compagnie ? — Oui, mon père ; c’est celui dont David a dit au Psautier : « Dieu a commandé à ses anges de le garder partout où il ira. »

Tout le cortège passa devant eux et parcourut les détours du palais que le roi Évalac avait mis à leur disposition ; palais que Daniel, jadis, dans une intention prophétique, avait appelé le Palais spirituel. Et quand ils arrivaient devant l’arche et avant d’y rentrer, chacun des anges s’inclinait une première fois pour Jésus-Christ, debout dans le fond ; une seconde fois pour l’arche.

Notre-Seigneur s’approchant alors de Josephe : « Apprends, » lui dit-il, « l’intention de cette eau que tu as vu jeter de part et d’autre. C’est la purification des lieux où le mauvais esprit a séjourné. La présence du Saint-Esprit les avait déjà sanctifiés, mais j’ai voulu te donner l’exemple de ce que tu feras, partout où mon service sera célébré. — Mon Seigneur, » demanda Josephe, « comment l’eau pourra-t-elle purifier, si elle n’est pas elle-même purifiée ? — Elle le sera par le signe de la rédemption que tu lui imposeras, en prononçant ces paroles : Que ce soit au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit !

« Maintenant je vais te conférer la grâce suprême que je t’ai promise ; le sacrement de ma chair et de mon sang, que, cette première fois, mon peuple verra clairement, pour que tous puissent, devant les rois et les princes du monde, témoigner que je t’ai choisi pour être le premier pasteur de mes nouvelles brebis, et pour établir les pasteurs chargés de nommer ceux qui, dans les âges suivants, gouverneront mon peuple. Moïse avait conduit et gouverné les fils d’Israël par la puissance que je lui avais donnée : de même seras-tu le guide et le gardien de ce nouveau peuple : ils apprendront de ta bouche comment ils me doivent servir, et comment ils pourront demeurer dans la vraie créance. »

Jésus-Christ prit alors Josephe par la main droite et l’attira vers lui. Tout le peuple assemblé le vit clairement ainsi que les anges dont il était environné.

Et quand Josephe eut fait le signe de la croix, voilà qu’un homme aux longs cheveux blancs sortit de l’arche, portant à son cou le plus riche et le plus beau vêtement que jamais on put imaginer. En même temps parut un autre homme, jeune et de beauté merveilleuse, tenant dans l’une de ses mains une crosse, dans l’autre une mitre de blancheur éclatante. Ils couvrirent Josephe du vêtement épiscopal, en commençant par les sandales, puis le reste du costume, depuis ce temps-là consacré. Ils assirent le nouveau prélat dans une chaire dont on ne pouvait distinguer la matière, mais étincelante des plus riches pierreries que la terre ait jamais fournies[4].

Alors tous les anges vinrent devant lui. Notre-Seigneur le sacra et l’oignit de l’huile prise dans l’ampoule que tenait celui des anges qui l’avait arrêté précédemment au seuil de l’arche.

De la même ampoule fut prise l’onction qui, plus tard, servit à sacrer les rois chrétiens de la Grande-Bretagne jusqu’au père d’Artus, le roi Uter-Pendragon. Notre-Seigneur lui mit ensuite la crosse en main, et lui passa dans un de ses doigts l’anneau que nul mortel ne pourrait contrefaire, nulle force de pierre séparer. « Josephe, » lui dit-il, « je t’ai oint et sacré évêque en présence de tout mon peuple. Apprends le sens des vêtements que je t’ai choisis : les sandales avertissent de ne pas faire un pas inutile, et de tenir les pieds si nets qu’ils n’entrent dans nulle maligne souillure, et ne marchent que pour donner conseil et bon exemple à ceux qui en auraient besoin.

« Les deux robes qui couvrent la première jupe sont blanches, pour répondre aux deux vertus sœurs, la chasteté et la virginité. Le capuchon qui enferme la tête est l’emblème, et de l’humilité qui fait marcher le visage incliné vers la terre, et de la patience que les ennuis et les contrariétés ne détournent pas de la droite voie.

« Le nœud suspendu au bras gauche indique l’abstinence ; on le place ainsi parce que le propre de ce bras est de répandre, comme le propre du bras droit est de retenir. Le lien du col, semblable au joug des bœufs, signifie obéissance à l’égard de toutes les bonnes gens. Enfin la chape ou vêtement supérieur est vermeille, pour exprimer la charité, qui doit être brûlante comme le charbon ardent.

« Le bâton recourbé que doit tenir la main gauche a deux sens : vengeance et miséricorde. Vengeance pour la pointe qui le termine ; miséricorde en raison de sa courbure. L’évêque doit en effet commencer par exhorter charitablement le pécheur : mais, s’il le voit trop endurci, il ne doit pas hésiter à le frapper.

« L’anneau passé au doigt est le signe du mariage contracté par l’évêque avec l’Église, mariage que nulle puissance ne peut dissoudre.

« Le chapeau cornu signifie confession. Il est blanc, en raison de la netteté que l’absolution donne. Les deux cornes répondent l’une au repentir, l’autre à la satisfaction : car l’absolution ne porte ses fruits qu’après la satisfaction ou pénitence accomplie. »

Après ces enseignements, Notre-Seigneur avertit Josephe qu’en l’élevant à la dignité d’évêque, il le rendait responsable des âmes dont il allait avoir la direction. Et dans le même temps qu’il le chargeait du gouvernement des âmes, il laissait à son père le soin de gouverner les corps et de pourvoir à tous les besoins de la compagnie[5].

« Avance maintenant, Josephe, » ajouta Notre-Seigneur, « viens offrir le sacrifice de ma chair et de mon sang, à la vue de tout mon peuple. » Tous alors virent Josephe entrer dans l’arche, et les anges aller et venir autour de lui. Ce fut le premier sacrement de l’autel. Josephe mit peu de temps à l’accomplir ; il ne dit que ces paroles de Jésus-Christ à la Cène : Tenez et mangez, c’est le vrai corps qui sera tourmenté pour vous et pour les nations. Puis, en prenant le vin : Tenez et buvez, c’est le sang de la loi nouvelle, c’est mon propre sang, qui sera répandu en rémission des péchés. Il prononça ces paroles en posant le pain sur la patène du calice ; soudain le pain devint chair, le vin sang. Il vit clairement entre ses mains le corps d’un enfant dont le sang paraissait recueilli dans le calice. Troublé, interdit à cette vue, il ne savait plus que faire : il demeurait immobile, et les larmes coulaient de ses yeux en abondance. Notre-Seigneur lui dit : « Démembre ce que tu tiens, et fais-en trois pièces. » — « Ah ! Seigneur, » répondit Josephe, « ayez pitié de votre serviteur ! Jamais je n’aurai la force de démembrer si belle créature ! — « Fais mon commandement, » reprit le Seigneur, ou renonce à ta part dans mon héritage. »

Alors Josephe sépara la tête, puis le tronc du reste du corps, aussi facilement que si les chairs eussent été cuites ; mais il n’obéit qu’avec crainte, soupirs et grande abondance de larmes.

Et comme il commençait à faire la séparation, tous les anges tombèrent à genoux devant l’autel et demeurèrent ainsi jusqu’à ce que Notre-Seigneur dit à Josephe : « Qu’attends-tu maintenant ? Reçois ce qui est devant toi, c’est-à-dire ton Sauveur. » Josephe se mit à genoux, frappa sa poitrine et implora le pardon de ses péchés. En se relevant, il ne vit plus sur la patène que l’apparence d’un pain. Il le prit, l’éleva, rendit grâces à Notre-Seigneur, ouvrit la bouche et voulut l’y porter ; mais le pain était devenu un corps entier : il essaya de l’éloigner de son visage ; une force invincible le fit pénétrer dans sa bouche. Dès qu’il fut entré, il se sentit inondé de toutes les douceurs et suavités les plus ineffables. Il saisit ensuite le calice, but le vin qui s’y trouvait renfermé, et qui s’était, en approchant de ses lèvres, transformé en véritable sang.

Le sacrifice achevé, un ange prit le calice et la patène et les mit l’un sur l’autre. Sur la patène se trouvaient plusieurs apparences de morceaux de pain. Un second ange posa ses deux mains sur la patène, l’éleva et l’emporta hors de l’arche. Un troisième prit la toile et suivit le second. Dès qu’ils furent hors de l’arche et à la vue de tout le peuple, une voix dit : « Mon petit peuple nouvellement régénéré, j’apporte la rançon ; c’est mon corps qui, pour te sauver, voulut naître et mourir. Prends garde de recevoir avec recueillement cette faveur. Nul n’en peut être digne, s’il n’est pur d’œuvres et de pensées, et s’il n’a ferme créance. »

Alors l’ange qui portait la patène s’agenouilla ; il reçut dignement le Sauveur, et chacun des assistants après lui. Tous, en ouvrant la bouche, reconnaissaient, au lieu du morceau de pain, un enfant admirablement formé. Quand ils furent tous remplis de la délicieuse nourriture, les anges retournèrent dans l’arche et déposèrent les objets dont ils venaient de se servir. Josephe quitta les habits dont Notre-Seigneur l’avait revêtu, referma l’arche, et le peuple fut congédié.

Pour complément de cette grande cérémonie, Josephe, appelant un de ses cousins nommé Lucain, dont il connaissait la prud’homie, le chargea particulièrement de la garde de l’arche, durant la nuit et le jour. C’est à l’exemple de Lucain qu’on trouve encore aujourd’hui, dans les grandes églises, un ministre désigné sous le nom de trésorier, chargé de la garde des reliques et des ornements de la maison de Dieu.



  1. Non sa sœur, comme dans le poëme. Var. Eliab.
  2. Tolomeus ou Tholomée est le nom francisé Ptolémée ; car les syllabes initiale pto, sta, spa, stra, répugnaient à l’ancienne langue française : on supprimait alors la première consonne, ou on la faisait précéder de la voyelle e, qui rendait la prononciation supportable.
  3. « Cil qui tel ordre auront, des ores en avant le rechevront de Josephe par toutes les terres où je metrai et toi et ta semence. » Voilà le point où l’Église bretonne se séparait de l’Église catholique. Elle ne voulait pas que ses prélats reçussent leur consécration du Pape de Rome, et réclamait ce droit en faveur de l’archevêque d’York, élu lui-même par le peuple et le clergé breton. Mais cette prétention schismatique, ne menaçant pas d’être contagieuse et n’ayant pas empêché le souverain pontife, au moins à partir de la fin du dixième siècle, de présider au choix ou de sanctionner l’élection des prélats gallois et bretons, la cour de Rome, toujours sage et prudente, ne s’éleva pas contre l’exposition romanesque des origines de l’Église bretonne. Armée de l’incomparable autorité de l’Évangile : Tu es Petrus, et super hanc petram, etc., elle laissa dire les romanciers, et ne rechercha pas le livré latin sur lequel ils s’appuyaient sans en divulguer le texte original.
  4. Ici le romancier ajoute que cette chaire était encore de son temps conservée dans la ville de Sarras, sous le nom de Siège spirituel. Jamais homme n’eut la témérité de s’y asseoir sans être frappé de mort ou privé de quelqu’un de ses membres. Plus tard, le roi d’Égypte Oclefaus essayera vainement de la mouvoir : quand il voudra s’y asseoir, les yeux lui voleront de la tête ; il sera, le reste de ses jours, privé de l’usage de ses membres.
  5. C’est la distinction du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel.