Les anciens couvents de Lyon/38.3. Recluseries

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Emmanuel Vitte (p. 637-639).

LES RECLUSERIES





LES recluseries sont une des plus étranges manifestations de la vie religieuse, car elles n’étaient pas autre chose que des tombeaux vivants. On en attribue l’institution à saint Eucher. La recluserie comprenait une cellule et un oratoire sans porte entre l’un et l’autre. La cellule ne devait avoir que dix pieds de large et autant de hauteur ; elle était percée de trois petites fenêtres, l’une ayant vue sur l’oratoire, l’autre destinée à recevoir le jour ; on passait les aumônes par la troisième. Les oratoires étaient aussi fort petits, mais l’étendue n’en était pas limitée. On y célébrait les saints mystères. C’est dans ces sortes de cachots que l’on vit des hommes et des femmes s’enfermer pour le reste de leur vie.

Celui ou celle qui désirait mener ce genre de vie commençait par subir quatre années d’épreuve. Après ce temps, si le postulant persévérait dans son dessein, on procédait à la cérémonie de la réclusion. Après certaines prières, on murait la chambre du Reclus ; l’évêque, accompagné de son clergé, apposait son sceau épiscopal sur la cellule, et assignait au Reclus ou à la Recluse une aumône de trois ânées de seigle par an, et de dix deniers chaque semaine. Vers le milieu du quatorzième siècle, Mgr Guillaume de Thurey, édifié du genre de vie que menaient ces pieux solitaires, chacun à part dans sa recluserie, sollicita pour eux des charités auprès des fidèles.

Il y eut à Lyon neuf recluseries d’hommes et quatre de filles. Il n’en reste rien aujourd’hui.

recluserie d’hommes

1° Celle de Saint-Alban, sur la paroisse de Sainte-Croix, auprès de la voûte du palais de Roanne, disent les anciens Almanachs.

2° Celle de Saint-Barthélémy, sur la paroisse de Saint-Paul, en montant à Fourvière.

3° Celle de Saint-Clair, sur la paroisse de Saint-Pierre-et-Saint-Saturnin, au-dessus du Rhône.

4° Celle de Saint-Côme, sur la paroisse et dans le voisinage de Saint-Pierre-et-Saint-Saturnin, vers la rue qui porte encore ce nom et qui en conserve le souvenir.

5° Celle de Saint-Éloi, auprès de la Saône, vers le bureau de la grande Douane, sur la paroisse de Saint-Paul. Il y a encore aujourd’hui, à côté de la place de la Douane, une rue Saint-Éloi.

6° Celle de Saint-Épipoi, sur la paroisse de Saint-Paul, au bas du château de Pierre-Scize. Elle servit de maison à la pauvre veuve sainte Lucie, qui y nourrissait en secret avec elle le martyr lyonnais saint Épipoi.

7° Celle de Saint-Marcel, prêtre lyonnais et martyr, sur la paroisse de Saint-Pierre-et-Saint-Saturnin, au bas de la Grande-Côte.

8° Celle de Notre-Dame-de-la-Saônerie, dans l’emplacement du port Dauphin, sur la paroisse de Saint-Paul.

9° Celle de Saint-Sébastien, proche la porte de la Croix-Rousse, sur la paroisse de Saint-Pierre-et-Saint-Saturnin.

recluserie de femmes

1° Celle de Sainte-Hélène, sur la paroisse et dans le voisinage de l’abbaye d’Ainay. Elle fit partie de l’emplacement où les Dames de la Visitation de Sainte-Marie de Bellecour logeaient leur jardinier, et où mourut saint François de Sales.

2° Celle de Sainte-Madeleine, sur la paroisse de Saint-Georges, à la montée du Gourguillon, incorporée dans la suite à l’église des religieuses du Verbe-Incarné.

3° Celle de Sainte-Marguerite, sur la paroisse de Saint-Paul, à côté de la recluserie de Saint-Barthélémy. Elle fut démolie.

4° Celle de Thunes, nom du terrain qu’elle occupait, et sur lequel les Carmes déchaussés ont bâti leur monastère.

M. Niepce cite encore une chapelle de Papelonge, qui existait au dixième siècle, mais rien n’indique dans ce qu’il en rapporte que ce fût un oratoire de recluserie.

On peut avoir une idée approximative d’une recluserie en visitant la crypte de Saint-Irénée, où l’on montre la chambre de celle qui fut sans doute la dernière recluse.