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Les principaux monuments funéraires/Talma

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TALMA.




Talma (François-Joseph), né à Paris en 1766, l’un des plus grands acteurs qui aient paru sur la scène française, qu’il sera possible d’imiter, mais qu’on ne remplacera pas, doué de tout ce qui constitue le grand comédien, ajouta aux avantages qu’il avait reçus de la nature et d’une éducation soignée, ceux que lui procurèrent la fréquentation des hommes de lettres des artistes du premier ordre, et surtout les exemples des grands talens dont il était entouré sur la scène.

Larive, successeur de Lekain, Mole, Fleury, Dugazon, Monvel, Grandmesnil, Dazincourt, etc., s’empressèrent d’accueillir le jeune acteur avec cette bienveillance que des talens consommés se plaisent à témoigner à un talent qui s’élève, malgré la presque certitude qu’un jour peut-être il les éclipsera tous.

Talma débuta le 27 novembre 1787, dans le rôle de Séide de Mahomet. Il y fut couvert d’applaudissemens. Cette circonstance le fixa définitivement dans une carrière qui s’ouvrit devant lui d’une manière si brillante.

Ce fut alors qu’il se livra à des études approfondies sur son art : mais une de celles auxquelles il se consacra avec le plus de persévérance, fut d’exécuter le projet que Lekain n’avait pu réaliser de son vivant, celui de rendre aux costumes tragiques la noble et pure simplicité de l’antique. Quelques essais, hardiment tentés et favorablement accueillis par le public, l’engagèrent à continuer cette réforme, à laquelle se prêtèrent volontiers quelques uns de ses camarades les plus influens, pénétrés comme lui de l’ensemble et de l’harmonie qui en résulteraient pour la scène française.

Talma joignit à une imagination mélancolique un genre nerveux d’une extrême irritabilité, et qui le servirent puissamment pour donner à sa physionomie cette excessive mobilité qui exprimait, aussi instantanément que la parole et le geste, les sentimens dont il était pénétré. Aussi dans le rôle de Charles IX, où il développa une partie de ses nouveaux moyens, annonça-t-il ce qu’il devait être un jour.

Cette époque commença sa réputation ; elle n’a cessé de croître jusqu’à sa mort, et personne ne lui a contesté le premier rang parmi les tragiques dont se glorifie le théâtre français.

Nous terminerons cette Notice par le portrait que trace de ce célèbre tragédien une femme renommée par son esprit, par son rare talent d’observation, et dont les jugemens qu’elle a portés sur plusieurs contemporains seront confirmés par la postérité.

Madame de Staël, dans son ouvrage intitulé De l’Allemagne, s’exprime ainsi :

« Talma peut être cité comme un modèle de hardiesse et de mesure, de naturel et de dignité. Il possède tous les secrets des arts divers. Ses attitudes rappellent les belles statues de l’antiquité.

« L’expression de son visage, celle de son regard doit être l’étude de tous les peintres. Il y a dans la voix de cet homme je ne sais quelle magie qui, dès les premiers accens, réveille toute la sympathie du cœur : le charme de la musique, de la peinture, de la sculpture, de la poésie, et par-dessus tout du langage de l’âme voilà ses moyens pour développer dans celui qui l’écoute toute la puissance des passions généreuses ou terribles. Quelle connaissance du cœur humain il montre dans la manière de concevoir ses rôles ! Il en est une seconde fois l’auteur par ses accens et par sa physionomie. »

Si l’on eût dû proportionner la grandeur du monument de Talma au talent que possédait l’homme qu’il renferme, nous le trouverions d’une trop petite dimension : néanmoins, quoique d’un style simple, il est d’un excellent goût. Il se compose d’un cénotaphe en pierre de liais, élevé sur un socle de granit, et d’un mur de clôture à hauteur d’appui, de forme carrée, aussi en pierre de liais, et dont le chaperon horizontal est orné de feuilles sculptées en forme d écailles. Sur la façade sont quatre bornes antiques, placées à égale distance, ornées chacune d’une couronne sculptée en creux, et trois portes en fer fondu terminent la clôture.

Sur le cénotaphe est gravé, sur un fond de marbre blanc, le nom de Talma, et au-dessus est placé un masque antique. Ce monument a été exécuté par M. Callou, architecte.