Les sports de la neige/4

La bibliothèque libre.
Traduction par René Auscher.
Hachette & Cie (p. 18-21).

MOTEUR ANIMAL


Le traîneau — Dans les régions montagneuses, comme les Vosges et les Alpes, on utilise depuis très longtemps et encore aujourd’hui le « schlitten ». C’est une sorte de luge aux larges patins de bois, munie à l’avant de brancards recourbés qui rendent plus facile soit sa traction, soit son freinage.

On l’utilise en hiver, et même pendant la belle saison, pour descendre du haut des montagnes, soit les récoltes, soit des matériaux divers.

Le traîneau a été, au début, une simple modification du schlitten : on a remplacé les brancards recourbés par des brancards ordinaires, on y a attelé un renne, un cheval, un âne, un mulet. Telles furent les origines du traîneau actuel.

Cette invention, des plus précieuses pour les populations que la neige bloque dans leurs villages pendant de longs mois, semble des plus simples et des plus naturelles. On croirait qu’elle s’est faite à peu près simultanément dans toutes les régions régulièrement « enneigées », ou que, tout au moins, partout où il y a la neige, le traîneau existe, et depuis de longues années.

Il n’en est rien, et, à part quelques régions privilégiées des Alpes et des Vosges, on ignorait en France, tout récemment encore, son usage.


TRAÎNEAU ALPIN TRAÎNANT DES SKIEURS.
(Cliché Tairraz.)

Depuis deux ou trois ans, cependant, il se crée sous l’influence de puissantes organisations un mouvement très important de tourisme d’hiver, et de grandes caravanes parcourent maintenant des régions autrefois désertes.

Des traîneaux étaient indispensables aux organisateurs de ces Semaines d’Hiver, mais il était impossible d’en trouver dans certaines régions.

Nous citerons un fait tout récent et des plus significatifs.

Lorsque le T. C. F. organisa sa Semaine d’Hiver dans les Pyrénées, il n’existait pas de traîneaux dans le Sud-Ouest de la France, si surprenant que ce fait puisse paraître. Il dut en faire fabriquer et résolut de profiter de cette occasion pour implanter ce moyen de transport dans cette région. Il fallut montrer d’abord aux montagnards « qu’un cheval pouvait traîner sur la neige ou sur la glace un véhicule sans roues », et cela sans la moindre difficulté. L’expérience se fit au grand étonnement des populations et les loueurs de voitures acceptèrent le paiement, sous forme de traîneaux, de la location de leurs chevaux et de leur personnel pendant la durée de l’excursion.

D’ailleurs les différentes étapes se firent ainsi beaucoup plus vite qu’on n’a coutume de les faire, même durant la belle saison, et des chemins inabordables aux voitures furent facilement parcourus par les traîneaux de la caravane.

Il est permis d’espérer que désormais le traîneau acquerra bien vite son droit de cité dans les régions encore nombreuses qui ignorent ce moyen pratique de transport en hiver, et qu’il régnera partout où il y a de la neige, de même qu’il règne depuis de longues années déjà dans de nombreuses parties de la France et de l’Étranger.

Les traîneaux ne peuvent, étant donné leur poids, se déplacer sur de la neige épaisse et molle ; on ne peut les utiliser que sur les routes où a passé le chasse-neige des Ponts et Chaussées chargé de faire la piste sur les voies de grande communication.

Ils se composent essentiellement d’une caisse montée sur patins et dans laquelle se placent les voyageurs ou les marchandises à transporter. On y adapte des brancards auxquels s’attellent les animaux de trait. Le freinage se fait soit au moyen d’une chaîne qu’on enroule autour des patins, soit par une pointe métallique commandée par un levier et qui peut s’enfoncer plus ou moins profondément dans le sol.

Ce traîneau schématique est susceptible de nombreuses variantes, depuis le traîneau luxueux, à la carrosserie soignée, qui repose sur de fins et élégants patins en fer forgé, jusqu’à l’humble caisse posée sur de larges patins de bois dans laquelle les paysans des Alpes placent ou du matériel, ou des bancs, selon qu’ils le destinent au transport des marchandises ou au transport des voyageurs.

Entre parenthèses, lorsqu’on utilise ces traîneaux ou des traîneaux découverts quelconques, il est bon, étant donné la température extérieure, de se munir de couvertures très chaudes et de se protéger le corps et les jambes.

En somme, le traîneau est une voiture dans laquelle les roues ont été remplacées par des patins ; aussi a-t-on cherché à rendre cette transformation commode.

Il est facile de construire, pour chaque modèle de voiture, un système de patins qu’on peut en quelques minutes substituer aux roues lorsque la saison et le temps l’exigent, et il est sage de prévoir dans ce cas, pour les brancards, une fixation à ces patins, car à leur emplacement habituel ils fatigueraient trop les ressorts.

Nous terminerons cette brève étude du traîneau ordinaire en indiquant un procédé assez pratique qui permet de parcourir sans difficulté les routes tantôt « enneigées, » tantôt boueuses, qu’on trouve au printemps.

Le véhicule est muni de patins et d’une paire de roues qui peuvent, grâce à un simple levier, être mises en contact avec le sol, ou être relevées quand on arrive sur une étendue neigeuse.