Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes/DISCOURS PRÉLIMINAIRE

La bibliothèque libre.
Traduction par Weiss, Charles (18...-19...; commandant).
DORBON-AINÉ (1p. 100-121).
DISCOURS PRÉLIMINAIRE
des Vies d’Artistes




Sommaire. — I. Origine des arts du dessin ; tout d’abord chez les Chaldéens — II. Chez les Egyptiens et les Hébreux. — III. Chez les Grecs et les Romains. — IV. Chez lea Etrusques. — V. De la décadence des Arts chez les Romains. — VI. L’architecture plus lente à tomber en décadence. — VII. Par suite du départ des Césars de Rome, l’architecture tombe en plus grande décadence. — VIII. L’invasion de l’Empire romain par les Barbares conduit à une misérable condition tous les arts du dessin. — IX. Des dommages causés aux arts par suite du zèle maladroit des premiers chrétiens. — X. Dommages encore plus grands occasionnés par les actes de l’empereur Constance II et des Sarrazins. — XI De l’Art sous les Lombards, et de l’origine de l’architecture dite tudesque. — XII. De quelques-uns des plus beaux édifices élevés à Florence, à Venise et ailleurs. — XIII. L’architecture renaît un peu en Toscane, et particulièrement à Pise. — XIV. À Lucques. — XV. La sculpture, la peinture et la mosaïque commencent à renaître par les œuvres des Italiens, qui abandonnent l’imitation des Grecs. — XVI. L’art antique est distinct de l’art primitif. — XVII. Conclusion.



J e ne doute pas que ce soit une opinion commune et accréditée chez, pour ainsi dire, tous les écrivains, que la sculpture, conjointement avec la peinture, aient été naturellement et en premier lieu trouvées par les peuples de l’Égypte. Je sais que quelques autres attribuent aux Chaldéens les premières ébauches des marbres, et les premiers reliefs de statues, de même qu’on attribue encore aux Grecs l’invention du pinceau et du coloris. Quant à moi, je dirai que le dessin, qui est le fondement de l’un et de l’autre de ces arts, bien plus, qui est l’âme propre qui conçoit et nourrit en elle-même toutes les parties des intelligences, le dessin, dis-je, eut sa perfection infinie, devançant l’origine de toutes les autres choses, quand le Dieu suprême, ayant créé le grand corps du monde, et orné le ciel de ses lumières les plus étincelantes, descendit en esprit, plus bas, dans l’air limpide et dans la terre solide, et, créant l’homme, donna, avec la délicate invention des choses, la première forme delà sculpture et de la peinture. C’est de ce premier homme ensuite peu à peu (et l’on ne saurait dire le contraire), comme d’un modèle certain, que furent tirées les statues et les sculptures, ainsi que la difficulté des attitudes et des contours. Il en fut de même des premières peintures, quelles qu’elles fussent, en ce qui concerne le moelleux, l’union et l’harmonie des contrastes que font les lumières avec les ombres. Ainsi donc, le premier modèle, d’où sortit la première image de l’homme, fut une masse de terre, et non sans raison, parce que le divin Architecte du temps et de la nature, étant absolument parfait, voulut montrer dans l’imperfection de la matière le moyen d’en enlever et d’en ajouter. C’est de même qu’agissent habituellement les bons sculpteurs et les bons peintres, qui, ajoutant et retranchant à leurs modèles, amènent leurs ébauches imparfaites au degré de fini et de perfection qu’ils veulent.

Dieu donna à l’homme une grande vivacité de couleurs dans ses chairs, ce qui inspira ensuite la peinture à extraire ces mêmes couleurs des entrailles de la terre, pour reproduire tous les objets qui entrent dans les sujets à peindre. On ne peut tout de même pas affirmer d’une manière certaine que les hommes, avant le Déluge, aient produit des œuvres dans ces trois arts, en imitation d’aussi belles choses, bien qu’on puisse vraisemblablement admettre que de toute manière ils aient peint et sculpté.

Bélus, en effet, fils du superbe Nembrot, environ deux cents ans après le Déluge, fit faire la statue dont naquit ensuite l’idolâtrie. Sa belle-fille, Sémiramis, reine de Babylone, quand elle éleva cette cité, dressa, parmi ses monuments, non seulement diverses espèces d’animaux représentés et peints au naturel, mais encore sa propre image, et celle de Ninus, son mari, ainsi que les statues en bronze de son beau-père, de sa belle-mère et de son arrière belle-mère, selon que le rapporte Diodore de Sicile, leur donnant les noms grecs (les Grecs n’existaient pas encore), de Jupiter, de Junon et d’Ops. C’est de ces statues que les Chaldéens apprirent par aventure à faire les images de leurs dieux. Cent cinquante ans après, Rachel, fuyant de Mésopotamie avec Jacob, son mari, enleva les idoles de Laban, son père, ce que raconte ouvertement la Genèse.

II. — Les Chaldéens ne furent cependant pas seuls à faire des sculptures et des peintures. Les Ėgyptiens en produisirent également, pratiquant ces arts avec toute l’application que démontra le merveilleux tombeau de Simandias, roi très ancien, décrit tout au long par Diodore de Sicile. Une autre preuve en est le commandement rigoureux fait par Moïse, au sortir de l’Égypte, à savoir que, sous peine de mort, les Hébreux ne se donnassent aucune image de Dieu. Celui-ci, quand il descendit de la montagne, ayant vu que ses tribus avaient élevé un veau d’or, et qu’elles l’adoraient en grande solennité, s’irrita grandement de voir les honneurs divins concédés à l’effigie d’un animal ; non seulement il la brisa et la réduisit en poudre, mais encore, en punition d’une si monstrueuse erreur, il fit massacrer par les Lévites plusieurs milliers des fils d’Israël criminels, qui s’étaient rendus coupables de cette idolâtrie. Ce qui montre que ce n’est pas le fait de produire des statues, mais leur adoration, qui constituait un péché extrême, est ce qu’on fit dans l’Exode, à savoir que l’art du dessin et des statues, non seulement en marbre, mais en toute sorte de métal, fut concédé par la parole divine à Beseleel, de la tribu de Juda, et à Oliab, de la tribu de Dan ; ce furent eux qui firent les deux chérubins d’or, les chandeliers et le voile, les franges des vêtements sacerdotaux, et tant d’autres choses admirables, en métal coulé, dans le tabernacle, avec le seul but de pousser les hommes à les contempler et à les adorer. C’est ainsi qu’inspiré par les choses vues avant le Déluge, l’orgueil des hommes trouva le moyen de faire les statues de ceux qui voulurent laisser d’eux au monde une gloire immortelle. Mais les Grecs, qui expliquent différemment cette origine, disent que les Ethiopiens inventèrent les premières statues (selon Diodore), que les Égyptiens les prirent d’eux, et les Grecs des Egyptiens. On voit d’ailleurs que, déjà du temps d’Homère, la sculpture et la peinture avaient atteint un haut degré de perfection, comme le montre ce divin poète dans la description du bouclier d’Achille, qu’il nous présente avec tout son art, plutôt sculpté et peint que décrit. Lactance Firmian, faisant des contes fabuleux, l’attribue à Prométhée qui, en imitation du Dieu suprême, forma l’image humaine de boue. C’est de lui que l’art de la statuaire prétend descendre. Selon ce qu’écrit Pline, cet art fut créé en Egypte par Gygès de Lydie. Étant devant le feu et regardant l’ombre de son corps, il fit d’un seul coup avec un charbon son contour sur le mur. À cette époque, pour un temps, on se borna aux simples lignes du corps, sans y mettre de couleur, selon ce qu’affirme le même auteur. Ce procédé fut retrouvé, avec plus de difficulté, par Philoclès d’Égypte, ainsi que par Cléanthe et Ardyx de Corinthe, et par Delephanès de Sicyone.

III. — Cléophante de Corinthe fut le premier, chez les Grecs, qui se servit de couleurs, et Apollodore, le premier qui inventa le pinceau. Vinrent ensuite Polygnote, Thasius, Zeuxis, Timagoras de Chalcis, Pithius et Alaufus, tous très célèbres. Après eux, l’illustre Apelles fut tenu en haute estime et honoré par Alexandre le Grand. Lucien l’écrivain montre avec quel esprit ingénieux il traita les sujets de la calomnie et de la faveur. Presque tous les peintres et sculpteurs excellents furent toujours dotés par le ciel le plus souvent de l’ornement de la poésie, comme on le raconte de Pacuvius, ainsi que de la philosophie, comme on le voit dans Métrodore, aussi versé en philosophie qu’en peinture ; envoyé par les Athéniens à Paul-Émile, pour orner son triomphe, il resta auprès de lui pour apprendre la philosophie à ses enfants. La sculpture fut également grandement pratiquée en Grèce, et par quantité d’artistes excellents, entre autres : Phidias d’Athènes, Praxitèle et Polyclète, maîtres éminents. De même, Lysique et Pyrgotèle excellèrent dans la sculpture en creux, et Pygmalion dans le relief en ivoire. On raconte de lui qu’il obtint, par ses prières, le souffle et l’esprit pour la statue de déesse qu’il sculptait. La peinture fut également honorée et récompensée par les Anciens grecs et romains, puisqu’ils le témoignèrent à ceux qui la firent fleurir, en leur donnant des cités et de grandes dignités. Cet art brilla à Rome, au point que Fabius donna son nom à sa famille, mettant son titre dans les œuvres qu’il peignit si délicatement dans le temple de la Santé, et dont il prit le nom de Fabius Pictor. Il fut interdit, par un décret public, que les esclaves pratiquassent cet art dans les cités. L’art et les artistes furent continuellement tenus en honneur, au point que leurs œuvres rares étaient envoyées à Rome, comme des choses miraculeuses, pour figurer dans les triomphes parmi les autres dépouilles faites sur les ennemis. Les artistes éminents, s’ils étaient esclaves, étaient affranchis et recevaient d’honorables récompenses des républiques. Les Romains eurent tant d’estime pour ces arts que, pendant le sac de Syracuse, Marcellus voulut que l’on respectât un artiste fameux de cette ville, et que, de plus, on évitât de mettre le feu à la partie de la ville où se trouvait un admirable tableau qui fut ensuite porté à Rome, en grande pompe, dans le triomphe. En peu de temps, les Romains, ayant pour ainsi dire dépouillé le monde, réunirent les artistes et leurs plus belles œuvres : c’est ce qui rendit ensuite la ville de Rome si belle, parce qu’elle fut richement décorée de ces statues étrangères, bien plus que par celles qui provenaient d’artistes nationaux. Que l’on sache qu’à Rhodes, cité située dans une petite île, on compta plus de trois mille statues, tant de bronze que de marbre. Les Athéniens n’en eurent pas moins, et infiniment plus les habitants d’Olympie et de Delphes. Les Corinthiens en eurent d’innombrables, toutes admirables et de très grand prix. Qui ne sait que Nicomède, roi de Lycie, éperdument désireux de posséder une Vénus de marbre, de la main de Praxitèle, y consacra presque toutes les richesses de ses peuples ? Attalle n’en fit-il pas autant ? Pour avoir le tableau de Bacchus peint par Aristide, il n’hésita pas à consacrer à son acquisition plus de six mille sesterces. Ce tableau fut apporté à Rome par Lucius Mummius et fut placé en grande pompe dans le temple de Cérès. Mais tout en constatant que la noblesse de cet art était tenue en si haut prix, nous ne savons toujours pas d’une manière certaine qui lui donna le jour. Comme on l’a déjà dit ci-dessus, on constate sa très grande antiquité chez les Chaldéens ; d’autres attribuent son origine aux Ethiopiens, et les Grecs se la décernent à eux-mêmes.

IV. — On peut croire, non sans raison, que cette origine est peut-être plus antique chez les Toscans, comme l’atteste notre Léon Batista Alberti. On le voit aussi clairement dans la merveilleuse sculpture de Porsenna, à Chiusi, où, il n’y a pas longtemps, on a trouvé sous terre, entre les murs du Labyrinthe, quelques tuiles en terre cuite, sur lesquelles il y a des figures en demi-relief, si parfaites, et d’une si belle manière que l’on peut facilement reconnaître que l’art n’en était pas à ses commencements, vers cette époque. Bien plus, la perfection de ces œuvres montre que l’art était bien plus près de son apogée que de ses débuts. On peut encore s’en assurer en voyant continuellement retrouver de nombreux fragments de vases arétins, rouges et noirs, remontant à cette époque, comme on s’en rend compte par le style, avec de charmantes intailles, des figurines et des sujets en bas-relief, ainsi que quantité de petits masques en ronde-bosse finement travaillés par les artistes du temps, qui devaient avoir autant de talent que de pratique dans cet art, à en juger par leurs produits. On voit encore, par les statues trouvées à Viterbe, au début du pontificat d’Alexandre VI, que la sculpture était tenue en haute estime en Toscane, et que sa perfection n’était pas petite. On ne sait pas exactement à quelle époque elles furent faites ; toutefois d’après le style des figures, le mode des sépultures et des constructions, non moins que d’après les inscriptions en lettres toscanes, on peut vraisemblablement conjecturer qu’elles sont très anciennes et qu’elles proviennent d’une époque à laquelle cet art avait atteint un haut point. N’avons-nous pas d’ailleurs des exemples plus probants ? On a trouvé à notre époque, c’est à dire l’an 1554, en creusant les fossés et en élevant les fortifications d’Arezzo, une figure en bronze devant représenter la chimère de Bellerophon[1] ; dans cette figure, on reconnaît que la perfection de cet art remonte aux temps anciens des Toscans, comme on s’en rend compte par la manière étrusque, mais beaucoup plus par les lettres gravées sur une griffe. Comme elles sont peu nombreuses, on suppose, personne actuellement ne connaissant la langue étrusque, qu’elles peuvent représenter aussi bien le nom de l’artiste que celui de cette figure, et peut-être aussi les années, comme on le faisait à cette époque. Actuellement, cette figure, à cause de sa beauté et de son antiquité, a été placée par le seigneur duc Cosme dans la salle des appartements neufs de son palais, où j’ai peint les actes du pape Léon X. Outre cette chimère, on a trouvé dans le même lieu quantité de figurines en bronze du même style, qui sont actuellement chez le seigneur duc. Mais, comme les antiquités des œuvres des Grecs, des Éthiopiens et des Chaldéens sont tout aussi incertaines que celles des nôtres, et peut-être plus, il faut le plus souvent fonder l’appréciation de tels objets sur des conjectures qui ne soient pas si faibles qu’elles n’atteignent leur but. Je crois donc que je ne me suis pas écarté de la vérité et je pense que quiconque voudra examiner ce point avec pondération jugera comme moi, quand j’ai déclaré ci-dessus l’origine de ces arts être la nature elle-même, le modèle initial avoir été l’admirable création du monde, et l’auteur cette divine lumière qui est descendue en nous par une grâce singuhère, et qui non seulement nous a fait supérieurs aux autres animaux, mais semblables, si j’ose dire, à Dieu. Si, à notre époque, on a vu, comme j’espère pouvoir le montrer d’ici peu par beaucoup d’exemples, que de simples enfants, élevés grossièrement dans les campagnes, ont commencé à dessiner par eux-mêmes et grâce à la vivacité de leur esprit, en prenant pour seuls modèles ces belles peintures et sculptures de la nature, combien plus ne peut-on pas et ne doit-on pas penser, avec vraisemblance que les premiers hommes, d’autant plus rapprochés de leur origine et divine génération, par cela même d’autant plus parfaits et de meilleur esprit, ces premiers hommes, dis-je, ayant pour guide la nature, pour maître un esprit extrêmement pur, pour exemple l’admirable modèle du monde, ont trouvé en eux-mêmes l’origine de ces arts si nobles, et, partant d’un petit début, peu à peu les ont améliorés, et finalement les ont conduits à perfection ? Je ne veux pas nier pour cela que l’art ait été un moment à son début ; je sais fort bien qu’il est nécessaire qu’il y ait un commencement, et qu’il soit provoqué par quelqu’un. Il est bien possible d’ailleurs que l’un ait aidé l’autre, enseignant et ouvrant la voie au dessin, à la couleur et au relief, parce que notre art est principalement l’imitation de la nature, et ensuite ne pouvant pas de lui-même atteindre si haut, l’imitation des œuvres de ceux que l’on juge plus grands maîtres que soi. J’affirme toutefois que vouloir dire avec précision que tel ou tel ait été le créateur est une entreprise périlleuse, et peut-être bien inutile à connaître, parce que nous voyons la vraie souche et origine là d’où elle sort. De toutes les œuvres qui sont la vie et la gloire des artistes, les premières en date, puis peu à peu les deuxièmes et les troisièmes furent détruites par le temps qui consume toute chose. Comme il n’y avait pas alors d’écrivains, elles ne purent pas, par ce moyen, être connues des générations ultérieures, et les noms des artistes eux-mêmes leur restèrent inconnus. Du jour où les écrivains commencèrent à mentionner les choses antérieures à leur époque, il ne purent parler de celles-ci, puisqu’ils n’avaient pu en avoir connaissance, en sorte que les premières pour eux furent celles dont la mémoire était encore vivante. De même, le premier des poètes, de l’avis général, est, dit-on, Homère, non pas qu’il n’y ait pas eu de poètes avant lui (bien au contraire, il y en eut d’excellents, et cela se voit clairement dans ses œuvres propres), mais de ces poètes primitifs, quels qu’ils fussent, toute connaissance était perdue depuis plus de deux mille ans. Aussi, laissant de côté ce point trop incertain à cause de son antiquité, nous en viendrons à des choses plus claires, et nous parlerons de leur perfection, de leur ruine, de leur restauration, ou pour mieux dire de leur renaissance, toutes choses dont nous pouvons discourir avec plus de fondement.

V. — Je dis donc qu’il est avéré que l’art commença tard à Rome, puisque les premières statues furent, dit-on, l’image de Cérès fondue en métal avec les biens de Spurius Cassius, lequel fut tué par son propre père, qui n’écouta pas la voix du sang, parce que son fils intriguait pour se faire nommer roi. Les arts de la sculpture et de la peinture continuèrent à fleurir, jusqu’à l’extinction des douze Césars, mais non pas avec cette perfection et cette bonté qu’ils offraient auparavant. On voit dans les édifices qu’élevèrent les empereurs, succédant l’un à l’autre, que chaque jour ces arts allaient déclinant, et venaient à perdre peu à peu l’entière perfection du dessin. Cette décadence se remarque aisément dans les œuvres de sculpture et d’architecture, qui furent faites à Rome, du temps de Constantin, en particulier dans l’arc triomphal que lui éleva le peuple romain, près du Colisée. On y voit que, faute de bons maîtres, non seulement il fallut se servir de sculptures de marbre faites du temps de Trajan, mais encore utiliser les dépouilles amenées à Rome de divers, points du monde. Celui qui reconnaîtra que les ornements votifs qui sont dans les médaillons, en sculpture de demi-relief, ainsi que les captifs, les grands sujets, les colonnes, les corniches et les autres détails d’ornement faits auparavant, sont remarquablement travaillés, étant d’ailleurs des morceaux rapportés d’autre part, remarquera de même que les objets qui furent placés comme remplissage par les sculpteurs de cette époque sont des plus grossiers, par exemple, quelques sujets de petites figures en marbre, sous les médaillons, et le soubassement inférieur, où sont des victoires, ainsi que sous les arcs latéraux certaines divinités fluviales, qui sont ridicules, et faites de manière qu’il est permis de croire fermement qu’avant cette époque déjà, l’art avait commencé à tomber en décadence. Les Goths n’étaient pourtant pas venus, ni les autres nations barbares et étrangères, qui ruinèrent tout à la fois l’Italie et les meilleures formes de l’art. Il est vrai qu’aux temps précités, l’architecture avait moins souffert que les autres arts du dessin. Dans le baptistère que le même empereur Constantin fit élever à Latran, à l’entrée du portique principal, on voit, outre d’admirables colonnes de porphyre, des chapiteaux sculptés en marbre et des bases doubles enlevées d’ailleurs, remarquablement sculptées, en sorte que l’ensemble de cette construction est parfaitement bien compris. Au contraire, les stucs, les mosaïques et d’autres incrustations de parois, dues à des artistes de ce temps, ne ressemblent pas aux ornements analogues que Constantin fit placer à l’intérieur, et qui pour la plupart furent enlevés à des temples de divinités païennes. On dit que Constantin en fit autant dans les jardins d’Equizius, où il éleva un temple, qu’il dota ensuite, et donna aux prêtres chrétiens. Pareillement le magnifique temple de Saint-Jean-de-Latran, élevé par ordre du même empereur, montre également la vérité de ce que nous avons dit, à savoir que, de son temps, la sculpture avait déjà singulièrement décliné, parce que l’image du Sauveur et les douze Apôtres en argent qu’il fit faire furent des sculptures très inférieures, faites sans art et sur un dessin très médiocre. Outre cela, celui qui examinera attentivement les médailles de Constantin, sa statue et les autres statues faites par les sculpteurs de ce temps, œuvres qui sont aujourd’hui au Capitole, verra clairement que ces œuvres sont très loin de la perfection des médailles et des statues des autres empereurs. Toutes ces choses montrent que, longtemps avant la venue des Goths en Italie, la sculpture avait fort décliné.

VI. — Comme nous l’avons dit, l’architecture alla en se maintenant en meilleur état, mais n’étant plus aussi parfaite. Il n’y a pas lieu de s’en étonner, parce que, comme dans la construction des grands édifices on se servait presque toujours de matériaux anciens, il était facile aux architectes d’imiter, dans les nouvelles constructions, en grande partie les anciennes qu’ils avaient toujours devant les yeux. Il leur était plus facile d’opérer ainsi qu’aux sculpteurs d’imiter les bonnes œuvres de sculpture des Anciens, puisque l’art avait disparu. Que tout cela soit vrai, la preuve en est dans le temple du premier des Apôtres, au Vatican, qu’on n’avait décoré que de colonnes, de bases, de chapiteaux, d’architraves, de corniches, de portes et d’autres ornements, ou incrustations, qui furent tous enlevés de divers lieux et édifices antérieurs, construits et ornés richement. On pourrait en dire autant de Santa Croce in Gerusalemme, que Constantin fit élever, sur la prière de sa mère Hélène ; de Saint-Laurent hors les murs, de Sainte-Agnès, construite parle même, à la requête de Constance, sa fille. Qui ne sait que les fonts, qui servirent au baptême de cette dernière et d’une de ses sœurs, étaient tout entiers couverts d’ornements qui provenaient d’une époque bien antérieure ? N’en est-il pas de même de ce bénitier de porphyre, sculpté, de figures admirables, et de quelques candélabres de marbre remarquablement sculptés de feuillages et d’enfants en bas-reliet qui sont vraiment de toute beauté ? En somme, pour cette raison et pour bien d’autres, on peut juger à quel point la sculpture était tombée, du temps de Constantin, et, avec elle, les autres plus belles formes de l’art. Le dernier coup qui devait être porté pour leur ruine totale fut le départ de Constantin de Rome, quand il alla porter le siège de l’empire à Byzance. Non seulement il emmena en Grèce tous les meilleurs sculpteurs, et les autres artistes de son temps, quels qu’ils fussent, mais encore il y apporta une infinité de statues et d’autres œuvres de sculpture admirables.

VII. — Après le départ de Constantin, les Césars qui restèrent après lui en Italie, édifiant continuellement à Rome et ailleurs, s’efforcèrent de faire leurs constructions les meilleures qu’ils purent ; mais comme on peut le voir, la sculpture alla toujours de mal en pis, ainsi que la peinture et l’architecture. La cause en fut peut-être que, lorsque les choses humaines commencent à décliner, elles ne cessent pas d’aller toujours perdant de leur bonté, jusqu’à ce qu’elles atteignent un point au delà duquel elles ne peuvent plus empirer. On voit pareillement que, bien que les architectes du temps du pape Libère s’ingéniassent à faire une grande œuvre dans la construction de l’église Sainte-Marie-Majeure, leur entreprise ne fut pas entièrement couronnée de succès. Bien que cet édifice, qui comme tant d’autres est composé pour la plus grande partie de morceaux anciens, fût élevé avec des mesures très bien comprises, on ne peut néanmoins nier, outre d’autres détails, que la répartition faite tout autour des ornements de stuc et de peintures, au-dessus des colonnes, ne soit pauvre comme dessin, et que quantité d’autres choses que l’on remarque dans ce grand temple n’attestent l’imperfection des arts à cette époque. Bien des années après, quand les chrétiens étaient persécutés sous le règne de Julien l’Apostat, on éleva sur le mont Caelio un temple dédié à saint Jean et à saint Paul martyrs, d’après le style duquel, encore plus mauvais que celui des monuments précités, on se rend compte clairement que l’art à ce moment était presque entièrement perdu. De même les édifices qui furent élevés en Toscane, à cette époque, en font entièrement foi. Pour en passer plusieurs autres sous silence, le temple qui fut dédié, hors les murs d’Arezzo, à San Donato, évêque de cette ville, et qui fut martyrisé sous Julien l’Apostat avec le moine Ilariano, ne fut pas d’une meilleure architecture que les monuments indiqués ci-dessus[2]. Il ne faut pas croire que cela provienne d’une autre cause, que de ce qu’à cette époque il n’y avait pas de meilleurs architectes, parce que le temple en question, comme on a pu s’en rendre compte de nos jours, construit à huit faces, avec des matériaux pris au théâtre, à l’amphithéâtre et à d’autres édifices, qui avaient été élevés à Arezzo, avant que cette ville se fût convertie à la foi chrétienne, ce temple, dis-je, fut élevé, sans qu’on épargnât rien, et avec grands frais, et fut orné de colonnes de granit, de porphyre et de mischio provenant de ces édifices antiques. Pour ma part, je ne doute pas, eu égard à la dépense que l’on reconnaît avoir été faite dans ce temple, que, si les Arétins avaient eu de meilleurs architectes, ils auraient certainement produit une œuvre merveilleuse. On voit à leur travail qu’ils n’épargnèrent rien pour rendre cette œuvre aussi riche et aussi bien ordonnée qu’ils le purent. D’ailleurs, comme je l’ai déjà dit souvent, l’architecture ayant moins perdu de sa perfection que les autres arts, on y voyait des parties qui avaient du bon. Dans le même temps, on agrandit l’église de Santa Maria in Grado en l’honneur du même moine Ilariano ; il l’avait, en effet, longtemps habitée, quand il alla avec Donato cueillir la palme du martyre.

VIII. — Mais comme le plus souvent, la fortune, après vous avoir amené au sommet de la roue, vous précipite ensuite en bas, soit pour se railler de vous, soit regrettant ses faveurs premières, il arriva après ces faits que presque toutes les nations barbares se soulevèrent contre les Romains, en divers lieux du monde, et il en résulta, au bout de peu de temps, non seulement l’abaissement de cet empire si grand, mais sa ruine totale, et particulièrement celle de Rome. Cette chute entraîna celle des meilleurs artistes, sculpteurs, peintres et architectes, qui laissèrent leurs arts et leurs personnes mêmes submergés dans l’immense désastre et la destruction de cette ville si célèbre. La peinture et la sculpture furent les premières à succomber, comme étant des arts qui servaient plus au plaisir des yeux qu’à autre chose. L’autre art, c’est à dire l’architecture, étant nécessaire et devant protéger les hommes, continua à vivre, mais il n’avait plus sa perfection et beauté anciennes. Et, si fortuitement les sculptures et les peintures n’avaient présenté aux yeux des générations les images de ceux dont elles devaient perpétuer la mémoire, le souvenir d’un de ces arts comme de l’autre se serait vite éteint. Quelques-unes de ces œuvres furent donc conservées, soit à cause de ceux qu’elles représentaient, soit à cause des inscriptions, aussi bien dans les édifices privés que dans les monuments publics, autrement dit, dans les amphithéâtres, les théâtres, les thermes, les aqueducs, les temples, les obélisques, les colisées, les pyramides, les arcs de triomphe, les entrepôts, les trésors, et finalement les sépultures elles-mêmes. Une grande partie de ces dernières furent détruites par ces hommes barbares et farouches, qui n’avaient de l’homme que la figure et le nom. Ce furent surtout, entre tous les autres, les Visigoths qui, ayant nommé Alaric leur roi, envahirent l’Italie et Rome[3], et la saccagèrent à deux reprises, sans rien épargner. Les Vandales, venus d’Afrique avec Genséric, leur roi[4], en firent autant. Non content de piller et d’exercer sa cruauté, il emmena les habitants en esclavage, les plongeant ainsi dans une misère infinie. Pareil sort advint à Eudoxie, veuve de l’Empereur Valentinien, qui avait été égorgé peu auparavant par ses propres soldats, qui, complètement dégénérés de l’antique valeur romaine, parce que les meilleures troupes longtemps auparavant avaient été emmenées à Byzance par l’empereur Constantin, n’observaient plus ni coutumes ni bonnes mœurs dans leur manière de vivre. Ainsi, les hommes dignes de ce nom ayant disparu, ainsi que toute vertu, les lois, les costumes, les noms et la langue étant complètement changés, toutes ces causes ensemble et chacune en particulier avaient fait disparaître les beaux esprits et les grands génies, et il ne restait plus rien que de brutal et de grossier.

IX. — Mais, ce qui bien plus que toutes les autres causes de malheur que je viens d’énoncer causa des pertes et des dommages infinis aux professions susdites, fut le zèle fervent de ceux qui professaient la nouvelle religion chrétienne. Après une lutte longue et sanglante, quand elle eut finalement abattu et remplacé l’ancienne religion des païens, grâce à la foule des miracles et à la sincérité des rites, et tandis qu’elle veillait avec un soin vigilant sur les moindres faits qui pussent donner naissance à une erreur à détruire ou à extirper, non seulement ses adhérents mutilèrent et jetèrent à bas toutes les statues admirables, ainsi que les sculptures, peintures, mosaïques et autres ornements des faux dieux adorés par les païens, mais encore ils anéantirent les souvenirs et les monuments élevés à quantité d’hommes éminents, auxquels l’antiquité reconnaissante avait dressé en public, pour leur grand mérite, des statues et d’autres monuments destinés à perpétuer leur mémoire. En outre, pour élever des églises destinées au culte chrétien, non seulement ils détruisirent les temples les plus respectés des dieux, mais pour rendre Saint-Pierre plus riche et plus orné, outre les ornements que ce temple avait dès le début, ils enlevèrent des colonnes de pierre au môle d’Hadrien, qu’on appelle aujourd’hui le château Saint-Ange, et, à beaucoup d’autres monuments, que nous voyons aujourd’hui mutilés. Bien que la religion chrétienne n’agît pas ainsi par haine pour les arts, mais seulement pour outrager et détruire les faux dieux, il n’en est pas moins vrai que ce zèle excessif amena une telle ruine de ces professions autrefois si vénérées, que la forme s’en perdit entièrement. Pour que rien ne mapquât à une si grande infortune, la colère de Totila se déchaîna sur Rome. Non seulement il abattit les murs, et ruina avec le fer et le feu les plus admirables et remarquables édifices de cette ville, mais encore il la brûla en entier, et, l’ayant vidée de tous ses habitants, il la laissa en proie aux flammes ; pendant dix-huit jours entiers, il ne s’y trouva pas un vivant. Il abattit et détruisit les statues, les peinture, les mosaïques et les stucs admirables, au point que la ville ne perdit pas seulement sa majesté, mais que sa forme disparut, ainsi que son existence même. Les appartements de plainpied des palais et des autres édifices, qui primitivement étaient ornés de stucs, de peintures et de statues, furent ensevelis sous les ruines des constructions supérieures, avec toutes les belles choses qu’on a retrouvées de nos jours. Les générations ultérieures, croyant que le tout était ruiné, plantèrent dessus des vignes, en sorte que, les appartements en question étant restés sous terre, les modernes leur ont donné le nom de grottes, et celui de grotesques aux peintures qu’on y voit à présent.

X — Après les Ostrogoths, qui furent anéantis par Narsès, on continua à habiter les ruines de Rome, mais d’une manière assez malaisée, et après un siècle. Constance II, empereur de Constantinople, vint à Rome. Affablement reçu par les Romains, il mutila, dépouilla et emporta tout ce qui était resté en place dans la malheureuse ville de Rome, et que le hasard, plus que la bonne volonté de ses destructeurs, avait épargné. Il est vrai qu’il ne put jouir de ses dépouilles, parce que, ayant été jeté par une tempête en Sicile, il fut justement égorgé par ses sujets, et il laissa à la fois son butin, le trône et la vie, qui furent la proie de la fortune. Non contente des malheurs de Rome, et pour que les objets volés ne pussent jamais y revenir, elle amena une armée de Sarrazins qui vinrent ravager l’île, et emportèrent à Alexandrie les dépouilles de Rome, avec celles des Siciliens, pour la plus grande honte et pour le plus grand dommage de l’Italie et du monde chrétien. Ainsi, tout ce qui n’avait pas été détruit par les pontifes, et particulièrement par saint Grégoire (duquel on dit qu’il condamna à disparaître le reste des statues et des débris des monuments), fut anéanti par la faute de ce Grec détestable. Enfin, comme il n’y avait plus de vestiges, ni d’indices de quelque œuvre qui fût belle, les hommes qui vinrent ensuite, redevenant rudes et grossiers, s’ils firent des peintures et des sculptures, se laissèrent guider par la nature, et, sous l’influence du milieu où ils vivaient, ils se mirent à produire non d’après les règles des arts anciens, qu’ils n’avaient plus, mais suivant les aptitudes de leurs esprits.

XI. — Les arts du dessin étaient donc réduits à ce point, avant, pendant et après l’époque où les Lombards dominèrent en Italie. Ils allèrent ensuite en s’altérant de plus en plus, bien que l’on produisît dans tous les genres de manière qu’on n’aurait pas pu travailler plus lourdement, et avec moins de dessin. On en voit la preuve, entre autres choses, dans quelques figures qui se trouvent dans le portique de Saint-Pierre de Rome, au-dessus des portes, et qui sont traitées à la manière grecque, en mémoire de quelques Pères, qui avaient combattu pour la Sainte Église dans les conciles. Il en est de même de quantité d’œuvres du même style, qui existent dans la ville et dans l’exarchat de Ravenne, en particulier celles que l’on voit à Santa Maria Ritonda[5], hors de cette ville, et qui sont un peu postérieures à l’expulsion des Lombards d’Italie. Je ne passerai pas sous silence que, dans cette église, il y a une chose merveilleusement remarquable : c’est la voûte ou coupole qui la recouvre. Bien qu’elle soit large de dix brasses, et qu’elle serve de toit ou de couverture à cette construction, elle est néanmoins d’un seul morceau, si énorme qu’il paraît presque impossible qu’un bloc de la sorte, pesant plus de deux cent mille livres, ait été posé si haut. Pour revenir à notre sujet, on vit sortir des mains des maîtres de cette époque, ces statues bouffonnes et grotesques qui existent encore maintenant dans les œuvres anciennes. Il en fut de même pour l’architecture. Comme il fallait construire, que la forme et la bonne manière étaient entièrement perdues, tant à cause de la mort des artistes que par la ruine et la disparition des beaux monuments, ceux qui s’adonnèrent à cette profession n’édifiaient que des œuvres, qui, pour l’ordonnance et les mesures, n’avaient ni grâce, ni dessin, ni aucune proportion. Alors surgirent de nouveaux architectes qui, s’inspirant de la barbarie de leurs nations, élevèrent ces édifices dont la manière s’appelle aujourd’hui tudesque. Les œuvres qu’ils produisaient paraissent à nous autres modernes plus ridicules qu’à eux estimables. Finalement, les meilleurs d’entre les artistes trouvèrent une forme meilleure et rappelant un peu la bonne forme antique, dans laquelle nous voyons, par toute l’Italie, les plus vieilles églises, à l’exception des antiques, avoir été édifiées par eux. C’est ainsi que nous avons de Théodoric, roi d’Italie, un palais à Ravenne, un palais à Pavie, et un autre à Modène, tous construits dans une manière barbare, plus riches et spacieux que bien compris et d’une bonne architecture. On peut en dire autant de Santo Stefano, à Rimini, de San Martino de Ravenne, et du temple de San Giovanni Evangelista, élevé dans cette ville par Galla Placidia, vers l’année 438 de notre ère, de San Vitale, qui fut édifié l’an 547, et de la Badia de Classi di fuori, en somme de quantité d’autres monastères et temples édifiés depuis les Lombards. Comme on l’a déjà dit, tous ces édifices sont grands et magnifiques, mais d’une architecture grotesque. Citons, entre autres, plusieurs abbayes en France élevées à saint Benoît, le monastère et l’église de Mont-Cassin, le temple de San Giovanni Battista à Monza, élevé par Théodelinde, cette reine des Goths, pour laquelle le pape saint Grégoire écrivit ses Dialogues. Dans ce monument, cette reine fit peindre l’histoire des Lombards. D’après ces peintures, on voyait que les Lombards avaient la partie postérieure de la tête rasée, et sur le devant portaient les cheveux longs jusqu’aux épaules ; ils se peignaient la figure jusqu’au menton. Leurs vêtements étaient de toile large, dont se servaient aussi les Angles et les Saxons, et qu’ils portaient sous un manteau de diverses couleurs. Leurs souliers étaient ouverts jusqu’aux doigts de pied et se laçaient sur le dessus avec des courroies. Des monuments analogues furent l’église de San Giovanni à Pavie, élevée par Gundiperga, fille de la susdite reine Théodelinde ; dans la même ville l’église de San Salvadore, élevée par Aripert, frère de cette reine, qui succéda à Rodoald, mari de Gundiperga ; l’église de Sant’Ambrogio à Pavie, élevée par Grimoald, roi des Lombards, qui enleva le trône à Perterit, fils de Ripert. Ce Perterit, rétabli sur le trône, après la mort de Grimoald, construisit également à Pavie un monastère de femmes, appelé le Monasterio Nuovo, et dédié à Notre-Dame et à sainte Agathe. La reine en éleva un hors des murs, en l’honneur de la Vierge Marie in Pertica. Conipert, autre fils de ce Perterit, éleva un monastère et un temple analogues à saint Georges, dit di Coronate, dans le lieu où il avait remporté une grande victoire sur Alaric. Un temple, semblable à ceux-ci fut celui que Luitprand, roi des Lombards, et contemporain du roi Pépin, père de Charlemagne, éleva à Pavie, et qu’on appela San Piero in Ciel dauro. Il en est de même du temple de San Piero Clivate que Desiderio, qui régna après Astolphe, éleva dans le diocèse milanais ; des monastères de San Vincenzo à Milan, et de Santa Giulia à Brescia. Tous, en effet, furent construits à grands frais, mais dans une manière des plus grossières et sans aucune proportion.

XII. — À Florence ensuite, l’architecture allant un peu en progressant, l’église de Sant’Apostolo, qui fut élevée par Charlemagne, bien que de petites dimensions, fut d’une admirable manière. Les fûts des colonnes, tout en étant de plusieurs morceaux, ont beaucoup de grâce, et sont exécutés avec de belles proportions ; en outre, les chapiteaux et les arcs jetés pour les petites voûtes des deux nefs secondaires, montrent qu’en Toscane il était resté quelques bons artistes, ou qu’ils avaient resuscité. En somme l’architecture de cette église est telle que Pippo di Ser Brunellesco ne dédaigna pas de s’en servir comme modèle, dans la construction de l’église Santo Spirito, et de celle de San Lorenzo, dans la même cité. On peut en voir autant dans l’église Saint-Marc de Venise [6]. Celle-ci (pour ne rien dire de San Giorgio Maggiore, qui fut élevé par Giovanni Morosini l’an 978) fut commencée par le doge Justiniano e Giovanni Particiaco, près de San Teodosio, quand le corps de saint Marc évangéliste fut envoyé d’Alexandrie à Venise. Après plusieurs incendies, qui endommagèrent le palais du doge et l’église, celle-ci fut finalement réédifiée à la manière grecque, sur les mêmes fondations, et dans le mode où on la voit actuellement, avec une très grande dépense, et sur l’avis de plusieurs architectes, du temps du doge Domenico Selvo, l’an 973 de Notre-Seigneur. Celui-ci fit amener des colonnes de tous les lieux où il put en trouver. La construction se prolongea ainsi jusqu’à l’année 1140, Messer Pietro Polani étant doge, et, comme nous l’avons déjà dit, sur les dessins de plusieurs maîtres, tous grecs. C’est dans la même manière grecque, et dans les mêmes temps, que furent élevées les sept abbayes que le comte Ugo, marquis de Brandebourg, fit construire en Toscane. On peut s’en rendre compte dans la Badia de Florence, dans celle de Settimo, et dans les autres. Toutes ces constructions, et les vestiges de celles qui ne sont plus sur pied, témoignent que l’architecture se maintenait quelque peu, mais fortement abâtardie, et bien différente de la belle manière antique. D’autres exemples sont encore plusieurs vieux palais élevés à Florence, après la ruine de Fiesole, œuvres toscanes, mais avec une ordonnance barbare dans les proportions des portes et des fenêtres démesurément longues, dans la forme ogivale des arcs, voûtés en quartpoint selon la coutume des architectes étrangers de cette époque. Ensuite, l’an 1013, on voit l’art reprendre un peu de vigueur, dans la reconstruction de l’admirable église de San Miniato in sul Monte , du temps de Messer Alibrando, citoyen et évêque de Florence. Outre l’ornementation en marbre qu’on y voit à l’intérieur et à l’extérieur, on remarque, en examinant la façade antérieure, que les architectes toscans s’efforcèrent d’imiter dans les portes, les fenêtres, les colonnes, les arcs et les corniches, autant que cela fut en leur pouvoir, le bel ordre antique qu’ils pouvaient retrouver en partie dans le temple très ancien de San Giovanni qui se trouvait dans leur cité. Dans le même temps on voit la peinture, qui était presque entièrement éteinte, commencer à reprendre quelque peu, ce que montre la mosaïque[7] qui fut posée dans le chœur de cette église de San Miniato .

XIII. — C’est ainsi et, après ce début, que le dessin et l’amélioration des arts commencèrent cà progresser peu à peu en Toscane, comme on le voit l’an 1016, quand les Pisans commencèrent la construction de leur Dôme[8]. À cette époque, ce fut une grande chose d’entreprendre un pareil corps d’église, composé de cinq nefs, et presque entièrement en marbre à l’intérieur comme à l’extérieur. Ce temple, qui fut élevé sous la direction, et sur le dessin, de Busketus, Grec de Dulychium, architecte remarquable de cette époque, fut édifié et orné par les Pisans d’une infinité de dépouilles amenées par mer (les Pisans étant alors au sommet de leur grandeur) de divers pays lointains, ce que montrent bien les colonnes, les bases, les chapiteaux, les corniches, et d’autres pierres de toute sorte qu’on y voit. Comme tous ces objets étaient, les uns de petites dimensions, d’autres plus grands, d’autres enfin de moyennes dimensions, Busketus fit preuve de beaucoup de jugement et de talent dans la manière d’en tirer parti, et de faire la division de toute cette construction très bien entendue, tant pour l’intérieur que pour l’extérieur. Entre autres choses, sur la façade antérieure, décorée d’un grand nombre de colonnes, il disposa très ingénieusement la diminution du fronton, et l’orna de sculptures variées et diverses, ainsi que d’autres colonnes et de statues antiques. Il en fit autant aux deux portes principales de la même façade, entre lesquelles, c’est à dire à côté de celle del carroccio, on donna plus tard à Busketus un honorable tombeau avec trois épitaphes, entre lesquelles il y en a une en vers latins qui ne diffèrent pas beaucoup des autres inscriptions de cette époque. La voici :


Qiiod vixmille boum passent jiiga jiincta movere.
Et quo vix potuti per mare ferre ratis ;
Buscheiti nisu, quod erat mirabile visu,

Dena puellarum turba levavit onus[9].

Comme on a fait mention ci-dessus de l’église Sant’Apostolo, à Florence, je ne passerai pas sous silence que sur une plaque de marbre de celle-ci, fixée sur un des côtés du maître-autel, on lit ces mots :

VIII. V. DIE VI APIULIS, in resurrectione DOMINI, KAROLUS Francorum rex a Roma revertens, ingressus Florentiam, cum magno gaudio et tripudio susceptus civium copiam torqueis aureis decoravit et in Pentecostem fundavit ecclesiam Sanctoriim Apostoionim ; in altari inclusa est lamina plumbea, in qua descripta apparet prefata fondatio et consecratio facta per ARCHIEPISCOPUM TURPINUM, testibus ROLANDO et ULIVERIO[10].

La construction sus-indiquée du Dôme de Pise excitant, par toute l’Italie et particulièrement en Toscane, l’esprit de quantité de gens à de belles entreprises, fut cause que, dans la ville de Pistoia, on commença, l’an 1032, l’église de San Paulo, en présence du bienheureux Atto, évêque de cette ville[11], comme on le lit dans un contrat de cette époque ; il en fut autant de beaucoup d’autres édifices dont il serait trop long de faire mention à présent. Les temps s’écoulant ensuite, l’année 1060, on éleva à Pise le temple rond de San Giovanni[12] en face du Dôme et sur la même place. Ce qui paraîtra merveilleux, et pour ainsi dire entièrement incroyable, se trouve mentionné dans un vieux livre de l’œuvre du Dôme, à savoir que les colonnes de ce temple de San Giovanni, les pilastres et les voûtes furent élevés et construits en quinze jours, sans un jour de plus. On lit dans le même livre, et qui en aura le désir pourra s’en rendre compte, que pour élever ce temple on mit une imposition d’un denier par feu ; mais on n’y dit pas si c’étaient des deniers d’or ou des petits deniers. Or, dans ce temps-là, d’après le même livre, il y avait à Pise 34.000 feux. Ce fut certainement une œuvre considérable, de grande dépense et difficile à exécuter, particulièrement la voûte de la tribune, faite en forme de poire, et recouverte de plomb. L’extérieur est rempli de colonnes, d’ornements et de sujets sculptés. Sur la frise de la porte du milieu, il y a un Christ avec les douze Apôtres[13], en demi-relief, traités à la manière grecque.

XIV. — À la même époque, c’est à dire l’an 1061, les Lucquois, voulant rivaliser avec les Pisans, commencèrent l’église de San Martino[14], à Lucques, sur le dessin de quelques élèves de Busketus {car il n’y avait pas alors d’autres architectes en Toscane). Sur la façade antérieure de cette église est appliquée un portique de marbre, avec des ornements et des sculptures faites en mémoire du pape Alexandre II, qui fut évêque de cette ville peu avant d’être élevé au pontificat. Cette construction et le pape Alexandre sont mentionnés tout au long dans une inscription de neuf vers latins. On en voit autant dans une autre inscription antique, gravée dans le marbre, sous le portique, entre les portes. Sur la même façade sont quelques figures et sous le portique plusieurs sujets de marbre, en demi-relief, tirés de la vie de saint Martin, et traités à la manière grecque. Mais les meilleurs bas-reliefs, qui sont au-dessus d’une des portes, furent faits, cent soixante-dix ans après par Niccola Pisano, et terminés en 1233, comme on le dira en son temps. Quand on les commença, Abellenato et Aliprando étaient intendants de la fabrique, ce que l’on voit clairement par une inscription gravée en marbre, dans le même lieu. Les figures que l’on doit à Niccola Pisano montrent combien l’art de la sculpture fut amélioré par lui. Les édifices précités servirent de modèles à presque tous, sinon à tous les édifices qui furent élevés en Toscane, de l’époque indiquée ci-dessus jusqu’à l’année 1250. Aussi, voit-on que, dans l’espace de tant d’années, l’architecture n’acquit que peu ou rien et ne s’améliora pas sensiblement, qu’elle resta, au contraire, dans les mêmes termes, et alla en continuant de cette manière grossière dont nous voyons encore maintenant quantité d’exemples subsister. Je n’en ferai pas mention pour le moment, parce que j’en parlerai plus tard, quand l’occasion s’en présentera.

XV. — De même que l’architecture, les bonnes sculptures et peintures, qui avaient été enfouies sous terre pendant les désastres de l’Italie, restèrent jusqu’à la même époque renfermées ou inconnues des hommes qui ne pouvaient apprécier que les arts grossiers en usage courant de leur temps. On ne connaissait d’autres sculptures ou peintures que celles que produisait un reste de vieux peintres grecs, et qui consistaient soit en images de terre et de pierre, soit en figures monstrueuses peintes dont seuls les premiers contours recevaient une couche de couleur. Ces artistes, les meilleurs de leur temps, et étant seuls de leurs professions, furent amenés en Italie où ils apportèrent avec eux la mosaïque, la sculpture et la peinture, dans la forme sous laquelle ils connaissaient ces arts. C’est ainsi qu’ils les enseignèrent aux Italiens, grossièrement et lourdement. Les Italiens les pratiquèrent à leur tour, comme on l’a dit et comme on le dira, jusqu’à un certain moment. Les hommes de ces temps n’étant pas accoutumés à d’autre bonté ni à plus grande perfection que celles que reflétaient les œuvres qu’ils avaient devant les yeux, admiraient ces œuvres, et celles-ci, si vulgaires qu’elles fussent, passaient pour des chefs-d’œuvre.

Néanmoins, les esprits des générations suivantes, aidés en partie par la subtilité de l’air, s’affirmèrent au point qu’en 1250, le ciel, prenant en pitié les beaux génies que le terroir toscan ne cessait de produire, les ramena à la forme première. Bien que ceux qui les précédaient eussent sous les yeux des ruines d’arcs de triomphe et d’amphithéâtres, des restes de statues, des vases et des colonnes ornées, après l’ère des ravages, des ruines et des incendies de Rome, ils ne surent pas se servir de ce qu’ils voyaient, ou en tirer quelque profit jusqu’au temps que je viens d’indiquer. Les beaux génies qui vinrent ensuite, sachant parfaitement distinguer le bon du mauvais, abandonnèrent la manière ancienne, et revinrent aux antiques pour les imiter avec toute l’industrie et l’intelligence qui étaient en eux.

XVI. — Mais pour que l’on comprenne aisément la différence de ce que j’appelle ancien et antique, j’appelle antiques les œuvres qui. précédèrent l’époque de Constantin, à Corinthe, à Athènes et à Rome, ainsi que dans d’autres villes fameuses, et qui furent faites jusqu’aux, temps de Néron, des Vespasiens, de Trajan, d’Hadrien et d’Antonin. Les autres œuvres sont appelées anciennes, et sont postérieures à saint Sylvestre ; elles furent produites par un reste d’artistes grecs, qui savaient plutôt teindre que peindre. Comme dans les guerres les excellents artistes primitifs étaient morts, comme on l’a déjà dit, et comme il ne restait que ces Grecs, maîtres anciens et non pas antiques, la peinture consistait en linéaments sur un fond de couleur, comme en font foi actuellement quantité de mosaïques, œuvres de ces Grecs, que l’on voit par toute l’Italie, dans toute église ancienne de n’importe quelle ville, particuhèrement dans le dôme de Pise, à Saint-Marc de Venise, et encore autre part. Il en est de même de beaucoup de peintures que ces Grecs continuaient à faire, dans cette manière caractérisée par des figures ayant des yeux de possédés, les mains ouvertes, et debout sur la pointe des pieds. On en voit encore à San Miniato, hors de Florence, entre la porte qui donne dans la sacristie et celle qui donne sur le couvent ; à Santo Spirito de la même ville, sur tout le côté du cloître qui fait face à l’église ; de même à Arezzo, dans les églises San Giuliano, San Bartolommeo et autres ; à Rome, dans le vieux Saint-Pierre, des peintures qui font le tour des fenêtres. Toutes ces peintures tiennent plus du monstrueux dans leurs contours que de l’image de qui que ce soit. Ces Grecs firent pareillement quantité de sculptures analogues ; on en voit encore maintenant des bas-reliefs au-dessus de la porte de San Michele a piazza Padella, à Florence, à Ognissanti, ainsi que dans beaucoup d’autres lieux des sépultures et des ornements de portes d’églises. Elles ont, comme consoles, des figures destinées à soutenir le toit, si ridicules, si fausses, si laides de proportion et de manière, qu’il paraît impossible d’imaginer quelque chose de plus hideux.

XVII. — J’ai cru devoir pousser jusque-là l’histoire, prise aux débuts, de la sculpture et de la peinture ; peut-être me suis-je plus étendu que je n’aurais dû le faire dans cet ouvrage. Si je l’ai fait, ce n’était pas tant que je fusse transporté par l’amour de l’art, que désireux de rendre un service utile et général à nos artistes. Ceux-ci voyant comment l’art, partant d’un petit début, s’est haussé à un point culminant, et comment d’un si noble degré il a été précipité dans une ruine extrême (la nature de cet art étant par conséquent semblable à celle des autres choses, qui, comme les corps humains, naissent, croissent, vieillissent et meurent), pourront maintenant reconnaître plus facilement la progression de sa renaissance, et l’avènement de sa perfection, qu’il a reconquise de notre temps. Et s’il devait se produire encore (Dieu veuille le contraire !) que l’incurie des hommes, ou la perversité des temps, ou bien encore la volonté divine, à qui il ne plaît pas, semble-t-il, que les choses d’ici-bas se maintiennent longtemps dans une seule forme, conduisissent de nouveau l’art dans les mêmes désordres et la ruine, mes travaux pourront, quelle que soit leur valeur, et s’ils sont dignes de quelque longévité, maintenir l’art dans sa vitalité, par tout ce que j’ai écrit et par ce qu’il me reste à dire, ou tout au moins donner l’idée, à des esprits plus élevés que le mien, de secourir l’art par des moyens plus efficaces ; en sorte que, grâce à ma bonne volonté et à leurs efforts, l’art ait en abondance ces secours et ces ornements dont il a manqué jusqu’à maintenant ; qu’il me soit permis de le dire franchement.

À présent, il est temps d’en venir à la Vie de Giovanni Cimabue. Comme on lui doit le commencement de la nouvelle manière de dessiner et de peindre, il est juste et convenable que sa Vie soit la première de toutes celles que je vais écrire, et dans lesquelles je m’efforcerai le plus possible d’observer l’ordre de leurs manières plutôt que de suivre l’ordre des temps. Je serai bref dans la description de leur extérieur et de leur physionnomie, parce que leurs portraits, que j’ai ajoutés, avec autant de recherches et de dépenses que de soin, donneront la véritable effigie de ces artistes mieux que je n’aurais pu le faire en les décrivant. Et si quelques-uns de ces portraits manquent, ce ne sera pas par ma faute, mais parce qu’on ne les aura trouvés nulle part. Si de plus ces portraits paraissent à quelqu’un par aventure ne pas être semblables à d’autres qu’ils connaissent, que l’on considère que le portrait d’un homme fait quand il avait dix-huit ou vingt ans, ne peut pas être semblable au portrait du même fait quinze ou vingt ans plus tard. À cela j’ajoute que les portraits dessinés ne sont jamais si ressemblants que ceux faits en peinture ; que l’on observe aussi que les graveurs, qui n’ont pas de dessin, altèrent toujours les figures, ne pouvant pas ou ne sachant pas reproduire exactement ces minuties qui rendent les portraits bons et ressemblants, ainsi que cette perfection que rarement ou jamais ont les portraits gravés sur bois. En somme, qui voudra savoir ce que j’ai dû peiner, dépenser et rechercher, pour ces portraits, le verra en lisant ces Vies, et se rendra compte que j’ai cherché à faire pour le mieux.

  1. Cette chimère est au Musée National de Florence.
  2. Le temple de San Donato, ou Duomo Vecchio d’Arezzo, élevé au XIe siècle, fut détruit, en 1561, sur l’ordre de Cosme Ier, pour donner place aux fortifications de la ville.
  3. L’an 410 de notre ère.
  4. En 455.
  5. Ancien tombeau de Théodoric.
  6. Saint-Marc fut commencé en 977 ; Pietro Orseolo, étant doge, en posa la première pierre. L’église ne fut pas terminée avant 1071.
  7. Datée 1297.
  8. Commencé en 1063, d’après l’inscription qui est sur la façade.
  9. Vasari n’a pas rapporté une autre inscription de la même façade mentionnant un autre architecte, Rainaldus, qui vraisemblablement termina le Dôme.
  10. Une inscription analogue se trouve sur le côté extérieur de la porte d’entrée, à gauche. Elle n’est certainement pas antérieure au XVIe siècle.
  11. Atto ne fut nommé évêque qu’en 1133. Le champ, sur lequel fut bâtie l’église destinée à agrandir une église antérieure (que l’on croit avoir été élevée en 748), fut acheté en 1136.
  12. Commencé par Diotisalvi, en 1153, comme le rapporte une inscription gravée sur un pilastre, à droite, en entrant : MCLIII mense aug. fundata fuit hec Ecclesia. — Et une autre en face : Deotisalvi magister hujus operis.
  13. Erreur : onze demi-figures de saints.
  14. Réédifiée en 1160. La façade due à un certain Guidetto est de 1204, comme le rapporte l’inscription suivante : MILL. CCIIII CONDIDIT ELECTI TAM PULCRAS DEXTRA GVI BECTI.