Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes/PERINO del VAGA

La bibliothèque libre.
Traduction par Weiss, Charles (18...-19...; commandant).
DORBON-AINÉ (2p. 278-286).
PERINO del VAGA
Peintre florentin, né en 1500, mort en 1547

Né de parents pauvres, abandonné par eux dès son premier âge, Perino del Vaga n’eut d’autre guide, d’autre soutien que le talent ; il cultiva la peinture avec une telle ardeur, qu’il lui fut permis de produire ces œuvres d’ornement qui ont valu tant de gloire à la ville de Gênes et au prince Doria. Mais venons-en plus particulièrement à sa naissance. Il y avait à Florence un certain Giovanni Buonaccorsi, jeune homme plein de valeur et de générosité, qui, pendant les guerres de la fin de l’autre siècle, dépensa tout ce qu’il avait tant au jeu qu’au service de Charles VIII, roi de France, et finalement y laissa la vie. Il eut un fils appelé Piero, qui, resté à deux mois sans sa mère, morte de la peste, fut, dans cette grande détresse, allaité par une chèvre à la campagne, jusqu’au moment où son père, étant allé à Bologne, reprit une autre femme dont le premier mari et les enfants étaient également morts de la peste. Cette femme continua de nourrir Piero ou plutôt Pierino [diminutif enfantin qu’il ne quitta jamais], et, lorsque Giovanni Buonaccorsi retourna en France, il conduisit Perino à Florence et le laissa à quelques-uns de ses parents qui, soit pour s’en débarrasser, soit parce qu’ils n’avaient pas le moyen de lui faire apprendre un état relevé, le placèrent chez le pharmacien du Pin Doré[1]. Mais, comme ce métier lui déplaisait, il fut pris en qualité d’apprenti par Andrea de’Ceri, peintre, auquel il avait plu par la vivacité de son esprit, qui promettait avec le temps de porter ses fruits. Andrea était un de ces peintres sans talent, qui travaillent à boutique ouverte et qui peignait chaque année, pour la fête de saint Jean, les cierges qui font partie des offrandes de la cité. Aussi l’appelait-on Andrea de’Ceri (des cierges), surnom qui resta ensuite un moment à Perino. Après l’avoir gardé jusqu’à l’âge de onze ans, et lui avoir enseigné de son mieux les principes de l’art, Andrea le confia à son intime ami, Ridolfo, fils de Domenico Ghirlandajo, qui avait une grande réputation. À force de travail et d’application, Perino surpassa bientôt les autres élèves de Ridolfo, et parmi tous les jeunes gens, florentins et étrangers, qui étudiaient le carton de Michel-Ange, aucun n’était capable de lutter avec lui.

À cette époque, le Vaga[2], peintre florentin médiocre, qui travaillait à Toscanella, vint à Florence chercher des auxiliaires qui l’aidassent à exécuter les commandes dont il était surchargé. Il désirait un compagnon et un jeune homme assez habile pour suppléer à son ignorance du dessin et des autres choses de l’art. Celui-ci, voyant Perino dessiner dans l’atelier de Ridolfo, fut frappé de le trouver si supérieur aux autres élèves ; séduit de plus par sa bonne mine et ses manières gracieuses, il lui proposa de l’emmener à Rome, avec la promesse de l’aider dans ses études et aux conditions que le jeune homme fixerait. Avec le consentement de ses premiers maîtres. Perino se rendit d’abord à Toscanella, avec l’autre compagnon, et il les aida à terminer de nombreux travaux. Puis, se plaignant que le Vaga tirait en longueur les promesses qu’il lui avait faites, il se décida à aller tout seul à Rome, ce qui fut cause que le Vaga quitta tout pour le conduire dans cette ville. L’amour de l’art fit retourner Perino à ses études de dessin et, s’y livrant pendant plusieurs semaines, il y prenait plus de goût chaque jour. Puis le Vaga, désirant retourner à Toscanella, le recommanda à plusieurs peintres ; à dater de ce moment, il ne cessa jamais de porter le nom de Perino del Vaga. Forcé de travailler en boutique pour gagner sa subsistance, mais enflammé par la vue des antiques. Perino résolut de consacrer une moitié de la semaine à son métier ordinaire et de donner a l’étude l’autre moitié, ainsi que les jours de fête et la plus grande partie des nuits. Il mit ce projet à exécution et commença par copier les peintures laissées par Michel-Ange dans la chapelle du pape Jules, tout en cherchant à imiter la manière de Raphaël d’Urbin. Il dessina ensuite les bas-reliefs, les statues antiques, ainsi que les décorations tirées des fouilles récentes et appelées grotesques, et apprit à travailler le stuc. Il gagnait péniblement son pain et supportait la misère pour devenir excellent dans cette partie ; aussi devint-il bientôt le meilleur dessinateur qu’il y eût à Rome, et n’y eut-il personne qui entendît mieux que lui la musculature humaine et le nu. Ce qui fut cause qu’il se fit rapidement connaître tant par quantité de seigneurs et de prélats que par les artistes, en particulier par Jules Romain et Giovan Francesco, dit II Fattore, qui parlèrent de lui avec tant d’éloges à leur maître, Raphaël d’Urbin, que celui-ci voulut le connaître et voir ses œuvres. Raphaël fut tellement séduit par ce qu’il en vit, ainsi que par les qualités personnelles de Perino, qu’il le jugea devoir arriver à une grande perfection dans l’art, entre tant de jeunes débutants qu’il avait connus.

Sur ces entrefaites, Raphaël, ayant construit les loges du Vatican, le pape Léon X lui ordonna de les faire orner de stucs, de peintures et de dorures, selon qu’il lui paraîtrait le mieux. Raphaël, nommé chef de toute l’œuvre, confia le travail, pour les stucs et les grotesques, à Jean d’Udine, qui était unique en ce genre et qui excellait encore plus à représenter les animaux, les fruits et autres objets de petites dimensions. Il avait rassemblé autour de lui une foule de maîtres qu’il avait choisis à Rome, ou appelés du dehors, et dont les uns étaient habiles à exécuter les stucs, les autres les grotesques, ceux-ci les fleurs et les fruits, ceux-là les festons et les histoires ; puis il les poussait en avant, et les récompensait, suivant leur valeur. Ainsi, rivalisant entre eux, quantité de jeunes gens prirent part aux travaux des loges qu’ils conduisirent à leur perfection et devinrent ensuite des maîtres excellents dans leurs propres ouvrages. Perino fut adressé à Jean d’Udine par Raphaël pour travailler aux grotesques et aux histoires, avec promesse d’être employé selon son mérite. Poussé par l’émulation, par le désir de montrer ce qu’il savait et de profiter, il ne mit pas longtemps à se faire connaître pour le premier entre tous ceux qui étaient employés aux travaux, pour le dessin et pour le coloris, autant que pour la grâce et la belle manière avec laquelle il exécuta les grotesques et les figures, comme en font foi les grotesques, les festons et les histoires qui sont de sa main dans cet ensemble. Outre qu’ils sont supérieurs à ceux des autres, ils sont plus conformes aux dessins et aux esquisses de Raphaël, comme on peut le voir dans une partie des histoires qui sont au milieu de la voûte et qui représentent les Hébreux passant le Jourdain, la chute des murs de Jéricho, Josué arrêtant le soleil, et d’autres sujets qu’il serait trop long d’énumérer mais où il est facile de reconnaître sa main. Perino appartiennent également les meilleurs morceaux du soubassement, peints en couleur de bronze, parmi lesquels nous citerons le Sacrifice d’Abraham, Jacob luttant avec l’ange, Joseph recevant ses frères, et le Feu du ciel tombant sur les fils de Lévi. Perino fit encore à l’entrée des loges, dans la série du Nouveau Testament, la Nativité du Christ, son Baptême et la Cène des Apôtres, outre les sujets représentés en couleur de bronze sous les fenêtres[3]. Ces œuvres comblent d’étonnement qui les voit, tant pour les peintures que pour les stucs qu’il y exécuta de sa propre main ; en outre, le coloris est plus gracieux et plus poussé que celui des autres. Il en retira une réputation incroyable ; mais les éloges, loin de l’endormir, l’engageaient à redoubler d’efforts pour obtenir les honneurs que l’on prodiguait chaque jour à Raphaël et à Michel-Ange et il travaillait avec d’autant plus d’ardeur qu’il se voyait justement apprécié et chargé de travaux importants par Jean d’Udine et par Raphaël, il témoigna toujours à ce dernier une telle soumission et un tel respect, que Raphaël l’aimait comme son propre fils.

Dans le même temps, Léon X ordonna de décorer la voûte de la salle des Papes[4], qui conduit aux appartements d’Alexandre VI, peints jadis par le Pinturicchio ; cette voûte fut peinte par Jean d’Udine et Perino. Ils exécutèrent ensemble les stucs, les ornements, les grotesques et les animaux qu’on y voit, et divisèrent la voûte en compartiments ronds et ovales renfermant les sept planètes avec les animaux qui s’y rapportent, savoir : Jupiter avec ses aigles, Vénus et ses colombes, la Lune et les femmes. Mars avec ses loups[5], Mercure avec ses coqs, le Soleil et ses chevaux, Saturne et ses serpents[6]. Ils peignirent en outre les douze signes du zodiaque et quelques-unes des autres constellations, telles que la Grande Ourse et la Canicule ; la plupart de ces figures sont dues à Perino. Au milieu de la voûte est un compartiment rond, occupé par quatre Victoires en raccourci qui, les jambes et les bras nus, et le reste du corps couverts de voiles légers, tiennent la couronne du pape et les clefs de saint Pierre. Cet ouvrage fut, et est encore aujourd’hui regardé comme une chose vraiment digne du pontife qui l’avait commandée.

La troisième année de son pontificat, Léon X vint à Florence[7], ce qui donna lieu à des fêtes magnifiques. Perino, autant pour revoir sa patrie que pour voir la pompe de cette ville, vint à Florence avant la cour et orna d’une belle figure haute de sept brasses un arc de triomphe que l’on avait élevé à Santa Trinità. Puis, ayant hâte de revenir à Rome et trouvant bien différente la vie et les coutumes des artistes de cette ville avec celles des Florentins, il quitta Florence et reprit ses travaux accoutumés dans sa nouvelle patrie. Il fit alors diverses peintures d’ornementation, pour l’archevêque de Chypre[8], pour les Fugger, marchands allemands, pour Messer Marchionne Baldassini, ainsi qu’un Christ mort sur les genoux de la Vierge, peint à fresque pour une dame romaine, à Santo Stefano del Cacco[9]. Il peignit ensuite à l’huile, pour un protonotaire, une Descente de croix[10] destinée à une chapelle de la Minerva ; malheureusement, l’inondation[11] qui eut lieu après le sac de Rome a gravement endommagé ce tableau.

À cette époque, Jacopo Sansovino reconstruisit l’église de San Marcello, à Rome, dépendant du couvent des Servi. Quelques chapelles étant terminées et couvertes, Perino fut chargé de peindre dans l’une d’elles un saint Joseph et un saint Philippe, dans des niches, entre lesquelles se trouvait une madone grandement vénérée. Après les avoir terminés, il peignit au-dessus quelques petits enfants et en plaça un, sur un dé, au milieu de la paroi, qui porte sur ses épaules des festons courant jusqu’aux angles de la chapelle, où ils sont tenus par deux autres enfants assis. Cette fresque, qui est la plus belle qu’on ait jamais faite, fut cause que Lorenzo Pucci, cardinal de Santi Quattro, lui confia le soin de peindre à fresque la Vie de la Vierge, dans une chapelle à gauche du chœur, qui lui appartenait dans l’église de la Trinité, couvent des religieux de saint François de Paule. Perino termina toute la voûte et une paroi ; de plus, il exécuta, au dehors de la chapelle, et au-dessus d’un arc, un Isaïe et un Daniel, hauts de quatre brasses. Ces prophètes sont aussi parfaitement dessinés et peints qu’on peut l’attendre d’un grand maître. Entre les deux prophètes sont les armoiries du cardinal, tenues par deux enfants que l’on croirait en relief. Les quatre compartiments de la voûte[12] renferment : le premier la Conception de la Vierge, le deuxième sa Nativité ; le troisième la montre gravissant les degrés du temple et le quatrième représente son mariage avec saint Joseph. Sur la paroi qui tient l’arc de la voûte, il y a la Visitation. Perino ne put décorer les autres parois, étant tombé malade ; et lorsqu’il recouvra la santé, la peste éclata à Rome, l’an 1523, avec tant de violence qu’il dut s’éloigner pour sauver sa vie.

Il alla donc à Florence et y séjourna quelque temps, mais la peste le chassa de cette ville et l’obligea à retourner à Rome. L’an 1525, à l’époque du jubilé, Il Fattore lui donna sa sœur Caterina en mariage, afin que l’amitié qu’il avait contractée avec lui depuis longtemps fût transformée en parenté.

Le succès obtenu par les fresques que Perino avait jadis exécutées à San Marcello engagea le prieur de ce couvent et les chefs de la Compagnia del Crocefisso à lui confier la décoration d’une chapelle, avec l’espoir qu’il produirait quelque chef-œuvre. Perino établit sans retard ses échafaudages et représenta, au milieu de la voûte, la Création d’Ève. Adam est couché et plongé dans le sommeil, pendant qu’Ève, debout et les mains jointes, reçoit la bénédiction de Dieu, dont l’aspect est plein d’une gravité majestueuse. À droite de ce compartiment, Perino peignit un saint Marc et un saint Jean, mais il n’acheva pas la tête et le bras de ce dernier ; entre ces deux Évangélistes, il plaça deux beaux enfants tenant un candélabre[13]. Fendant qu’il y travaillait, il eut une foule d’empêchements, d’indispositions et d’autres de ces accidents qui nous arrivent journellement, sans compter que la Compagnia manqua, dit-on, d’argent. Les choses durèrent ainsi jusqu’en 1527, époque à laquelle le sac de Rome réduisit quantité d’artistes à la dernière extrémité et causa la ruine d’une foule de chefs-d’œuvre. Perino, accompagné de sa femme et portant sa petite fille, cherchait à échapper à cette épouvantable bagarre, quand il fut malheureusement fait prisonnier ; il fut rançonné si cruellement qu’il pensa en devenir fou. Une fois la tempête apaisée, il était tellement abattu par la peur qu’il avait éprouvée, qu’il ne pensait plus à l’art ; néanmoins, il fit quelques gouaches et diverses fantaisies pour des soldats espagnols, et vécut pauvrement comme les autres.

Seul parmi tant d’autres, le Baviera, qui possédait les planches des estampes d’après Raphaël, n’avait pas perdu beaucoup. Par amitié pour Perino et pour lui venir en aide, il lui fit dessiner une suite d’histoires relatant les Métamorphoses des Dieux, pour suivre leurs amours ; ces sujets furent gravés sur cuivre par Jacopo Caraglio.

Tandis que le sac avait ruiné la ville et chassé ses habitants, même le pape qui s’était réfugié à Orvieto, comme il n’y restait plus personne et qu’il ne s’y faisait plus d’affaires, Niccola Veneziano, excellent brodeur, y vint. Comme il était au service du prince Doria, qui portait une vive amitié à Perino, et qui a toujours voulu du bien aux hommes de talent, il persuada Perino de quitter cette ville désolée et d’aller à Gênes, en lui promettant de lui faire allouer quelque travail important par le prince, qui était grand amateur de peinture et qui, plusieurs fois, avait manifesté la volonté de faire richement décorer un palais. Perino, accablé d’infortunes et désirant passionnément quitter Rome, se décida à partir avec Niccola. Il laissa donc sa femme et sa fille à ses parents et se rendit à Gênes où il fut présenté par Niccola au prince Doria, qui l’accueillit avec la plus vive satisfaction. Celui-ci lui fit décorer son palais intérieurement et extérieurement de stucs et de peintures, tant à l’huile qu’à la fresque[14]. La voûte de la deuxième salle représente Jupiter foudroyant les géants ; on voit également dans quatre chambres les plus belles fables d’Ovide. Le Pordenone et Domenico Beccafumi de Sienne prirent par à ces travaux. Ce dernier ne s’y montra inférieur à aucun de ses concurents, bien que ses meilleures productions fussent à Sienne. Perino dessina ensuite la plus grande partie de l’Énéide, avec l’histoire de Didon ; d’après ces dessins, on confectionna des tapisseries. Il fit également des dessins pour des proues de galères, des draperies d’ornement et des bannières ; et le prince lui portait une telle affection que, si Perino était resté à son service, il aurait grandement récompensé son talent. Pendant qu’il travaillait à Gênes, il lui prit fantaisie de rappeler sa femme qui était à Rome et d’acheter une maison à Pise, ville où il avait l’intention de passer ses derniers jours. Messer Antonio di Urbano, fabricien du Dôme de cette ville, lui demanda alors de peindre, près de la porte de la façade et dans un riche cadre déjà en place, un saint Georges tuant le dragon et délivrant la fille du roi. Perino fit d’abord un très beau dessin, d’après lequel une frise d’enfants et d’autres ornements devaient réunir les chapelles, avec des niches renfermant des Prophètes et d’autres sujets. Ce projet ayant plu au fabricien, il débuta par la première chapelle à droite de la porte sus-indiquée, et y termina six enfants très bien exécutés ; l’ornementation devait se continuer de la même manière, ce qui aurait fait un ensemble d’une richesse extraordinaire[15]. Mais Perino retourna à Gênes, où il avait contracté certaines amours, et y demeura plusieurs mois, travaillant pour le prince Doria, et ayant laissé à Pise sa femme Caterina. Comme il ne revenait plus dans cette ville, Sogliani lui fut substitué dans les travaux qu’il avait commencés.

En songeant aux heureux jours qu’il avait passés à Rome, du temps de Léon X, Perino prit en dégoût le séjour de Gênes, malgré les avantages qu’il y avait rencontrés, et finalement il revint à Rome, où il resta assez longtemps inoccupé. Le pape Paul ayant ordonné qu’on ôtât une cheminée qui était dans la salle de l’Incendie, au Vatican, et qu’on la transportât dans la chambre de la Signature, il fallut refaire tout le soubassement de cette dernière pièce, qui est celle où se trouve le Parnasse de Raphaël. Perino y figura en grisaille une suite de termes, de festons, de mascarons et d’autres ornements entremêlés de bas-reliefs peints à fresque et imitant le bronze. Ces bas-reliefs représentent des philosophes, des théologiens, des poètes, et sont en rapport avec chacun des grands tableaux qui les dominent. Bien qu’ils ne soient pas de sa main, il les retoucha à sec, après en avoir fait les cartons. Le pape, ayant reconnu son mérite, le gratifia d’une pension de vingt-cinq ducats par mois, qui lui fut payée jusqu’à sa mort, sous condition de se tenir au service du Vatican et à celui de la maison Farnèse.

Antonio da San Gallo ayant ensuite terminé, dans le Vatican, la grande salle royale, qui précède la chapelle de Sixte IV, Perino distribua le plafond en compartiments octogones et ovales, et fut chargé d’en exécuter les stucs et les ornements les plus riches et les plus beaux que l’art puisse créer. Ces stucs, vraiment royaux, surpassent tout ce que les anciens et les modernes ont produit de mieux en ce genre. Les vitraux des fenêtres de la même salle furent peints par le Pastorino de Sienne, d’après les dessins de Perino, qui fit mettre les parois en état de recevoir des stucs et des tableaux ; ce travail fut ensuite continué par Daniello Ricciarelli da Volterra. Dans le château Saint-Ange, pour Tiberio Crispo, qui en était gouverneur et qui, dans la suite, devint cardinal, il décora une partie des chambres, entre autres la grande salle qui est d’une beauté remarquable ; elle est couverte de stucs et de sujets tirés de l’histoire romaine, exécutés par les auxiliaires de Perino, et principalement par Marco de Sienne, disciple de Domenico Beccafumi[16].

Quand Perino rencontrait des jeunes gens de talent, il s’en servait volontiers, tout en n’hésitant pas à se charger lui-même des travaux les plus vulgaires. Ainsi, il fit souvent des pennons, des bannières, des pentes de baldaquins, des soubrevestes, des portières. Comme il acceptait toutes les commandes, en se contentant souvent du prix le plus mesquin, il succomba sous le poids du labeur et devint catarrheux et infirme. Jour et nuit, il fallait qu’il travaillât pour le palais, qu’il composât des dessins pour les brodeurs et les chasubliers, et qu’il inventât des ornements de tout genre pour les Farnèse, les autres cardinaux et pour les seigneurs de la cour. Les statuaires, les stucateurs, les sculpteurs en bois, les tailleurs, les brodeurs, les peintres, les doreurs ne lui laissaient pas une heure de repos. Son plus grand bonheur, sur cette terre, était de se réfugier au cabaret, avec quelques amis, habitude à laquelle il ne manqua jamais dans toutes les villes où il demeura. Le cabaret était pour lui la souveraine béatitude, le repos du monde et le délassement de ses travaux.

Les excès de travail, de femmes et de table détruisirent sa santé. Il lui survint un asthme qui le mina peu à peu et le rendit phtisique. Enfin, un soir qu’il était à causer avec un de ses amis, près de sa maison, il tomba frappé d’apoplexie ; il avait alors quarante-sept ans. Sa femme et son gendre, Messer Joseffo Cincio, médecin, lui donnèrent, dans la chapelle de San Giuseppe, à la Ritonda de Rome, une honorable sépulture. Il eut pour successeur Daniello da Volterra, qui avait déjà beaucoup travaillé avec lui et dont nous nous occuperons bientôt.



  1. Il existe encore à Florence une pharmacie de ce nom.
  2. Peintre inconnu.
  3. Ces derniers n’existent plus.
  4. Appelée actuellement Salle de l’appartement Borgia.
  5. Erreur, tiré par des chevaux.
  6. Les compartiments de Vénus et de Saturne n’existent plus. Les autres sont en bon état.
  7. Le 30 novembre 1515.
  8. Qui était un Aldobrandini.
  9. Existe encore.
  10. N’existe plus.
  11. Survenue le 8 octobre 1530.
  12. Ces fresques existent encore.
  13. Ces fresques existent encore ; terminées par Daniello da Volterra et Pellegrino da Modena.
  14. La plupart de ces peintures existent encore.
  15. La plupart de ces peintures existent encore.
  16. Ces peintures existent encore.