Lettre du 1653 (Sévigné)

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Texte établi par Monmerqué, Hachette (1p. 375-376).
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1653

* 22. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME LA MARQUISE D’UXELLES[1].

Io sono sdegnata contra di VS. Illma per aver presa una medicina senza dirmi chio andassi ad aiutarla da far loperatione. Non mi credo ch’ il remedio habbia potuto operare sensa il conforto della sua sorella. Bisogna che noi ci vediamo, per trattar la pace insieme. Fra tanto dirò a VS. Illma ch’ andai hier sera al ballo. Lampegiavano miravigliosamente i begli occhi della presidente[2] di cosi legiadra statura. Non sò da dovero se tutti gli strali aventati da lei, fussero indirizzati nel bersaglio ; sò pure ella non havere havuto pensiero di scoccar a voto. Sono stata visitata dal signor conte di Bussy, il quale spera che VS. Illma andra in un piciol festino che si fara nel Tempio[3] fra pochi giorni. La prego humilmente di farmi intendere la sua volonta sopra questo, massimamente sopra l’amore intenso con cui la sconiuro d’honorarmi, et di tacere il contentuto nel billetto[4].


  1. Lettre 22 (revue sur l’autographe). — i. Marie de Bailleul, mariée le 28 février 1644 à François de Brichanteau, marquis de Nangis, et en secondes noces, le 5 octobre 1645, à Louis Châlon du Blé, marquis d’Uxelles, lieutenant général des armées du Roi. Voyez la note 12 de la lettre 26 et la note 4 de la lettre 43. — Nous reproduisons cette lettre d’après l’original sans rien changer ni corriger à l’orthographe.
  2. Mme de Bailleul, femme de Louis de Bailleul, président au parlement de Paris, et frère de la marquise d’Uxelles.
  3. Bussy raconte, dans l’Histoire amoureuse des Gaules (voyez l’édition des Mémoires de Bussy de M. L. Lalanne, tome II, p. 444), que sur le point d’avoir la charge de mestre de camp général de la cavalerie légère, quelques jours avant de partir pour l’armée, il donna une fête à Mme de Sévigné dans les jardins du Temple, chez le grand prieur Hugues de Rabutin. Cette fête date le billet : Bussy fut nommé mestre de camp en 1653. Voyez la Notice, p. 57.
  4. Voici la traduction de ce billet :

    « Je suis indignée contre votre Illustrissime Seigneurie pour avoir pris une médecine sans me dire que je vinsse l’aider à faire cette opération. Je ne puis croire que le remède ait pu opérer sans le secours de votre sœur (de votre amie). Il faut que nous nous voyions pour faire la paix entre nous. Je dirai en attendant à votre Illustrissime Seigneurie que j’ai été au bal hier au soir. Les beaux yeux de la présidente, dont la taille est si gracieuse, jetaient de merveilleux éclairs. Je ne sais en vérité si tous les traits lancés par elle étaient dirigés dans le but ; mais je sais bien qu’elle n’avait pas la pensée de les décocher en vain. J’ai recu la visite de M. le comte de Bussy, qui espère que votre Illustrissime Seigneurie ira à une petite fête qui sera donnée au Temple dans peu de jours. Je la prie humblement de me faire connaître sa volonté à ce sujet, et surtout sur la passion, avec laquelle je la conjure de m’honorer, et de taire le contenu de ce billet. »