Lettre du 7 mai 1670 (Sévigné)

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Texte établi par Monmerqué, Hachette (1p. 557-558).
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104. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE
DE BUSSY RABUTIN.

Trois semaines après avoir écrit cette lettre, je reçus celle-ci de la marquise[1].

À Paris, ce 7e mai 1670.

J’ai sur le cœur de n’avoir rien dit à ma nièce de Bussy[2], cette pauvre enfant que j’ai vue pas plus haute que cela : réparez donc mes torts.

J’ai reçu votre lettre, et je suis fort aise que les cendres du pauvre président aient réchauffé notre commerce. Nous avons ici M. de Corbinelli ; j’en ai une joie sensible, et parce que je juge de vous par moi, je me réjouis avec vous de celle que vous aurez de le voir.

Mme de Grignan est si indigne de votre amitié, elle aime tant son mari, elle est si grosse, que je n’ose vous dire qu’elle se souvient fort de vous. Raillerie à part, elle vous aime et vous honore infiniment[3].

Adieu, Comte, j’ai une si bonne compagnie autour de moi, que je n’ose m’embarquer à vous en dire davantage.


  1. Lettre 104. — i. À ces mots de Bussy, madame de Coligny a ajouté ou plutôt substitué ceux-ci : « Après une longue interruption de commerce, je reçus cette lettre de Mme de Sévigné. »
  2. Louise-Françoise, fille du premier lit, qui épousa le marquis de Coligny. C’était elle qu’on appelait « Mlle de Bussy. » Voyez la Correspondance de son père, tome I, p. 146.
  3. Cette dernière phrase manque dans la copie de Bussy. À la place, il s’y trouve encore une addition, relative à une lettre au Roi : « Au reste, je n’ai rien vu de plus beau ni de plus touchant que votre lettre au Roi. »