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Lettres de Pline le Jeune/Tome premier/Panckoucke 1826/XXV. À Messius Maxime

La bibliothèque libre.
Traduction par Louis de Sacy revue et corrigée par Jules Pierrot.
éditeur Panckoucke (p. 323).
XXV.
Pline à Messius Maxime.

Je vous avais bien dit qu’il était à craindre que le scrutin secret n’amenât quelque désordre[1]. C’est ce qui vient d’arriver à la dernière élection des magistrats. Dans plusieurs billets, on a trouvé des plaisanteries ; en quelques-uns, des impertinences grossières ; dans un, entre autres, à la place du nom des candidats, le nom des protecteurs. Le sénat fit éclater son indignation, et appela à grands cris la colère du prince sur l’auteur de cette insolence. Mais il a échappé à tous ces ressentimens ; il est demeuré ignoré, et peut-être était-il un de ceux qui criaient le plus haut. Que ne doit-il pas oser chez lui, l’homme qui dans une affaire si sérieuse, dans une occasion si importante, se permet des bouffonneries de ce genre, l’homme qui, en plein sénat, fait le railleur, le spirituel, l’agréable ? Pour produire cet excès d’audace dans une âme basse, il ne faut que cette réflexion : Qui le saura ? Demander du papier, prendre la plume, baisser la tête pour écrire, ne craindre point le témoignage des autres, mépriser le sien propre, voilà tout ce qu’il faut pour produire ces bons mots dignes du théâtre et de la scène. De quel côté se tourner ? Quelque remède que l’on emploie, le mal est plus fort que le remède. Mais ce soin regarde quelqu’autre puissance[2], au zèle et aux travaux de laquelle notre mollesse et notre licence préparent de jour en jour de nouveaux sujets de réforme. Adieu.


  1. Que le scrutin secret n’amenât quelque désordre. Voyez liv. iii, 20.
  2. Quelqu’autre puissance. Trajan, sans doute.