Lexique étymologique du breton moderne/E

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Texte établi par Faculté des lettres de Rennes, J. Plihon et L. Hervé (p. 108-119).
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E

1 É, variante, devant voyelle, de la particule verbale éc’h ou éz.

2 É, prép., variante de 1 en avec perte de la nasale[1].

1 Éal, s. m., ange, mbr. ael, corn. ail (voc.) > eal > êl (mais cymr. angel id.). Empr. bas-lat. altéré *agelus, pour angélus empr. gr. ἄγγελος (aggelos).

2 Éal (T.), s. m., poulain, cymr. ael et vir. ál, « couvée, portée » : d’un celt. *aglo- pour *pag-lo-, cf. lat. pro-pâg-ô « postérité », sans autre équivalent connu. V. aussi sous ala.

Éan, s. m., variante de éhan. V. ce mot.

Éar, s. m., air (aussi ér). Empr. fr. air.

Éaz, adj., variante de aez. Empr. fr. aise.

Ébarz, adv., prép., dedans, dans. V. sous 2 é et abarz.

Ébat, s. m., divertissement. Empr. fr. ébat.

Ébén, l’autre (en parlant d’une femme, cf. égilé), corn. yben (des deux genres) : exactement *he ben « la femme (la compagne) d’elle »[2], d’un mot perdu en br., corn. ben-en « femme », cymr. bun et ben-yw, vir. ben, ir. et gael. bean « épouse », celt. *ben-â, sk. gnà, gr. γυνή (gunê) (béot. βανά (bana)), vsl. sena, got. qinô et qën-s, ag. queen « reine », etc.

Ébeûl, s. m., poulain, corn. et cymr. ebol id. : soit un britton. *ep-âlo- dér. de *ep-o- « cheval », gaul. *epos dans Epo-redia, Epona (déesse des charretiers), Usip-etes et autres n. pr. ; celui-ci à son tour représentant un celt. *ek-tco- > vir. ech « cheval », identique à sk, áç-va, gr. ἔϰ-ϝο- (*ek-wo-) ἱππος (hippos), lat. equu-s, got. aíhwa-, lit. asva « jument ».

Ébiou, prép., auprès de, au dessus de, mbr. hebiou, cymr. heibio « outre », vir. sceo « et » : soit « à la suite de », dér. celt. du même radical que hep. V. ce mot.

Ebr (V.), s. m., ciel, corn. ebron id. : variante dialectale de oabren. V. sous oabl et koabr.

Ébrel, s. m., avril, corn. ebral, cymr. ebrill. Empr. lat. Aprîlis Aprilis.

Ék, s. m., pointe : mot rare, mais d’origine fort ancienne, formé comme le lat. ac-ie-s « pointe » sur l’universelle rac. AK « aigu », cf. sk. aç-râ « coin », gr. ἄϰ-ρο-ς (ak-ro-s) « pointu », lat. ac-u-s « aiguille », ac-utus, ac-er, vsl. ostrâ « aigu », etc., etc. V. aussi akr, diék, ibil, higolen, etc.

Ékan, ékant, s. m., encan. Empr. fr. ancien, avec chute de la nasalisation, encant < lat. in quantum.

Ékenver, ékéver, prép., envers : exactement « en opposition à, en regard de ». V. sous 2 é et 2 kèfer.

*Eks-, prép., hors de, de[3] : correspond à l’i.-e. *ek-s gr. ἐκ et ἐξ, lat. ec- et ex, lit. isz, vsl. izû et iz- id. ; apparaît en br. sous les formes ac’h-, ec’h-, ez-[4], eùz, etc.

Éd, s. m., blé, mbr. it > id, corn. yd, cymr. ith > yd, vir. ith, et cf. vbr. it-lânn = gael. iodh-lann « champ de blé » ; d’un celt. *itu- pour *pi-tu-, dér. de rac. PEI « nourrir », sk. pi-tà et zd pi-tu « aliment », lit. petus « repas de midi », vir. i-th-im « je mange » et gael. ith « manger » (sans rapport avec ag. to eat, etc.), vsl. pi-t-ati « nourrir ».

Édrô, adj., volage, étourdi : semble, malgré mbr. hedro, une traduction par calembour de fr. étour(di), compris comme « en tour », c’est-à-dire « faisant des tours ». V. sous 2 é et trô, et cf. kildrô.

Éeûn, adj., droit, juste, mbr. effn, vbr. eunt[5], cymr. iawn y vir. fir-iân id. : d’un celt. *iàno- pour Hp-àno-, qui ne se retrouve avec certitude qu’en germanique (got. ib-n-s « plane », ag. eoen, al. eben).

Éfreiz, s. m., effroi. Empr. fr. ancien esfreis.

Égét, que, corn. eges id. : paraît une dérivation déaspirée de hag[6].

Êgilé, l’autre (en parlant d’un homme, cf. ébén), cymr. y gilydd > gilydd, vir. a chéle id. : exactement *he hile « le compagnon de lui », locution formée d’un mot perdu en br. (cymr. cilydd, vir. cèle « compagnon » ), soit un celt. */rei-/yd-, rac. KEI « aller ». V. sous 1 ktz.

Égin, s. m., germe, bourgeon, cymr. egin id. et egino « germer » : d’un celt. *aA--î/io— « pointe », rac. AK. V. sous ék.

Éginad, s. m., étrenne : soit « commencement, prémices », cf. cymr. eginad « germination », dér. du précédent[7].

Égiz, comme. V. sous 2 é et 2 kîz (en guise de).

Égras, s. m., sauvageon, verjus : cf. cymr. egroes « églantier » (bas-lat. *àcr-eslius), fr. ancien egresse et br. amgroaz.

Éhan, s. m., repos, pause (aussi éan), mbr. ehanaff « s’arrêter » : soit un radical celt. *eks-san- (cf. vir. cumsan-ad « repos », de la même rac. avec un autre préf.), rac. SAN, « accomplir, achever », sk. san-o-ti « il acquiert », gr. ἀνύω « j’accomplis ». Cf. *eks— et *ke-,

Éc’h, particule verbale, variante de éz.

Ec’h, préf., une des formes bretonnes de *eks-.

Éc’hoaz, s. m., sieste du bétail, cymr. echwydd « repos » : soit un celt. *eks-sed-o- id. V. sous *eks- et cf. aè.

Éc’hon, adj., vaste, cymr. ehang id. : soit « exempt d’étroitesse ». V. sous *eks- (négatif par exclusion) et *eng > enk.

Eil, autre, cymr. aill, vir. aile, celt. *alyâ- (cf., pour la forme, sk. an-yâ), gr. ἄλ-λο-ς (al-lo-s), lat. alius, got. al-ji-s, etc. V. sous all[8].

Eil-, particule verbale qui indique la répétition de l’action [eil-zimizi « se remarier ») : identique au précédent.

Eiz, huit, corn. eath, cymr. wyth, vir. ocht n-, ir. et gael. ochd : d’un celt. *oktô(n)[9], sk. açtaà, gr. ὀϰτώ (oktô), lat. octô, got. ahtau, ags. eaht > ag. eight, al. acht, lit. asztunl, etc.

Éjenn, s. m., bœuf, mbr. eugenn, corn. odron, cymr. eidion « bête bovine » : exactement « richesse » [mobilière][10], dér. brittonique d’un emprunt ags. ëad « richesse » (vhal. ôd). — Conj.

El, dans le, variante de enn devant l. Cf. al.

Él, s. m., contracté de 1 éal. V. ce mot.

Élaz, s. m., foie, gésier, cf. corn. glas « estomac » et vir. eclas « jabot » : très obscur ; semble en tout cas contenir le mot glass, visible dans la juxtaposition cymr. afu glas « foie vert » (la vésicule du fiel). V. sous au et 1 glâz.

Elbik, s. m., émulation : abstrait de l’empr. fr. ancien (argot ou patois) alebiqueux, « pointilleux, querelleur ». — Ern.

Élestr, s. m., iris, glaïeul, cymr. et vbr. elestr, ir. elestar > eleastar id. : abstraitde l’empr. bas-lat. alestràre « humecter ». — Conj. Ern. et Stokes[11].

Elf, s. m., palette de moulin, planche : abstrait de mbr. alcéen > eloen id. Empr. bas-lat. aloennus > fr. auvent. — Conj. Loth. V. sous e’/d.

Elien, s. f., élément, cymr. elfen. Empr. lat. elementum.

Elgez, s. f., menton, corn. elgeht, cymr. aelgeth > elgeth. — Étym. inc

Eli, s. m., membre, ergot : malgré ir. et gael. alt « jointure », paraît identique à ézel, avec chute dialectale du z intervocalique, contraction, et doublement de l’l en prononciation rapide, cf. l’l simple de kéfèlek[12].

Élô, s. m., tremble, mbr. ezlen, corn. aidl-en « sapin », vir. aidle « planche », altération de *ezl- en *evl > elv, sous l’influence de elf. V. ce mot, et cf. l’altération similaire de evn[13]. — Étym. inc.

Elven, s. f., étincelle, mbr. elven tan, exactement « élément, atome de feu » : le même mot que elfen, mais contaminé de *uflen « étincelle ». V. sous eufl et fulen.

Elvézen, s. m., raifort : contamination possible de irvin et de *gwrizienn > grisien. V. ces mots et alouein.

Em, syncopé pour en em. V. cette locution.

Éma, il est, voici : exactement « ici » [est], etc., soit é-ma, composé de / en et du même élément local qui se trouve dans ama ou aman. V. ce mot, et cf. 3 ma et mafi.

Embann, s. m., ban, proclamation. Empr. fr. [proclamer] en ban.

Embouda, vb., greffer : dér. d’empr. lat. vulgaire *emputa > fr. ente * « scion de greffe », lui-même empr. gr. ἔμ-φυτον (em-phuton) « qui pousse dans ».

Embréga, vb., manier. Empr. bas-lat. imbrachiàre « embrasser ».

Émé, émez, vb., dit[-il] : seule forme conservée (1 é+mez) d’un vb. qui est en cymr. medd « il dit ». — Étym. inc.[14].

Émesk, adv., parmi, cymr. ym mysg, ir. et gael. am measg > measg id. : soit un celt. *in med-skô « au milieu », dont le second terme est une dérivation de la rac. MEDH « milieu », cf. sk. mádh-ya-, gr. *μεθ (*meth)-yo- μέσσος (messos) μέσος (mesos), lat. med-iu-s, got. mid-ji-s, ag. (a-)mid, al. mit, mitte, etc.[15].

Emgann, s. m., combat : exactement « batterie réciproque ». V. sous em et 2 kann.

Émolch, s. m., chasse, mbr. emolch pour *em-holch, cf. corn. helh-ia « chasser » et helh-wur « chasseur », cymr. in-helch-a > hela « chasser », vir. selg « chasse », ir. et gael. sealg id. : soit un celt. *selg-a, rac. SELG, sans équivalent connu ailleurs ; le préf. est 1 *am-, V. aussi dielc’ha.

Empenn, s. m., cerveau. V. sous 1 en et penn[16].

Empren, s. f., rayon de roue, cf. cymr. mymryn « fragment » : dér. de *mempr- > vempr- > empr-. Empr. lat. membrum au sens de « partie d’un tout ». V. sous ab, azé, etc., pour la chute de l’initiale.

Emwél, s. m., entrevue. V. sous gwél, et cf. emgann.

Emzivad, s. m., orphelin, mbr. emdyvat « abandonné» : exactement *am-di-mat (préf. 1 *am- et 1 di-), c’est-à-dire « en-non-bon, en mauvaise posture, dans la détresse ». V. ces trois mots.

1 En, prép. (et en- préf., cf. quelques-uns des mots suivants), dans corn. en, cymr. in>yn, vir. i n-, gaul. en-, in-, gr. ἐν, lat. in, got., ag. et al. in (ein- préf.), etc. ; commune à toute la famille, sauf peut-être le sk.

2 En, s. m., variante de env. V. ce mot.

Énaoui, vb., animer. V. sous éné et cf. anaoun.

Eṅk, adj., étroit, mbr. encq, cymr. *ang (cf. éc’hon) et cyf-yng, vir. cumang id. : rac. ANGH, « serrer, presser », gr. ἄγχ-ω, lat. ang-ere « serrer », ang-ustus « étroit », got. aggw-u-s et al. eng « étroit », etc.[17].

Eṅkrez, s. m., chagrin, mbr. encres, corn. ancres, vir. an-cride « tort » : soit un celtique signifiant « absence de droit » (cf. lat. in-cer-tu-s), par *a/i- privatif et le radical de kers. V. ces mots.

Eṅderf, eṅderv, s. m., soir, cf. cymr. anterth « matin ». Empr. lat. altéré intra tertiam « pendant la 3e heure » (de 8 à 9 heures du matin)[18].

Eṅdra, tant que : décomposer en en-dré-hag, exactement « en travers que, tandis que ». V. ces mots.

Éné, s. m., âme, mbr. eneff, corn. enef > ene, vir. anim, ir. et gael. anam id. : c’est le sg. dont anaoun est le pluriel. V. ce mot.

Énébarz, s. m., douaire : pour *énep-gwerz, exactement « prix d’achat du visage[19] ». V. sous énep et gwerz.

Éneb-botez, s. m., empeigne : exactement « face de la chaussure », le premier terme gardant le sens étymologique de énep.

Énébi, vb., contrarier, contredire : dér. de énep.

En em, particule qui transforme un vb. actif en vb. réciproque ou réfléchi, corn. em, om, ym, et cymr. ym avec même fonction : variante de 1 *am-, répétée deux fois en br., équivalant à ce que serait en gr. ἀμφι-ἀμφι (*amphi-amphi).

Énep, prép., contre, malgré : exactement « [en] face [de] », mbr. enep et enebenn « visage », corn. enep « page », cymr. enep > gwyneb et vir. enech « visage », sk. àn-ika, zd ain-ika et gr. ἐν-ώπια (en-ôpia) id. ; la rac. est OQ « voir », gr. ὄπ-ωπ-α (op-ôp-a) « j’ai vu » et ὄψομαι (opsomai) « je verrai », lat. oc-ulu-s, vir. ugail, lit. ak-i-s, vsl. ok-o « œil », cf. got. àug-ô id.

Énet, s. m., carnaval, corn. enes, cymr. ynyd id. : exactement « entrée dans [le carême] ». Empr. lat. initium.

1 Énez, s. f., île (pl.inizi), corn. enys, cymr. ynys, vir. et ir. inis, gael. inm’sid. : soit un celt. *iniss-ï f., apparenté au lat. insula[20] et au gr. νᾶσος (nasos).

2 Énez, s. f., poulette, mbr. eenez < eznez id. : fém. dér. de ezn « oiseau ». V. sous evn, et pour le sens cf. ag. fowl (sous falaouéta).

Eṅgéheṅta, vb., engendrer, s’unir : soit un vb. hentaff « hanter » précédé des préf. en- et *ke-(ico-ïre), mais contaminé sans doute par le sens et la forme du fr. engendrer.

Eṅgroez, s. m., foule, presse : serait en cymr. *yng-rwydd, dér. de la même rac. que br. enk. V. ce mot, et cf. lat. ang-ī « être serré ».

Enn, dans le : combinaison de en et de l’article défini, cf. 2 é, el et er.

Énô, adv., là : dér. advb. du même type que anô.

Énoé, s. m., ennui, chagrin. Empr. fr. ancien enui.

Énor, s. m., honneur, respect. Empr. fr. honor-er.

Eṅtân, s. m., incendie. V. sous 1 en et tân.

Eṅtré, prép., parmi, entre, corn. ynter, vbr. ithr, vir. iter > etar, ir. eidir, gael. eadar, gaul. et lat. inter, sk. antár id. : forme comparative de la prép. *en « dans »[21]. Cf. 1 en.

Eṅv, s. m., ciel : pour *nenc[22], mbr. nejff, corn. et cymr. ne/, vir. nem, ir. neamh et gael. nèamh id. : soit un celt. *nem-os, dér. de rac. NEM, « courber, fléchir, distribuer », sk. nám-as « courbure » (> voûte), gr. νέμ-ω (nem-ô) « je distribue » et νομ-ό-ς (nom-o-s) « terrain de pâture », lat. nem-us « bois ». gaul. νεμ-ητο-ν (nem-êto-n) « enclos sacré » et vir. nemed « chapelle », got. nim-an « prendre » et al. nehm-en (vsl. im-q, « je prends »[23]), etc. Cf. lémel.

Envez, s. m., virole, anneau : exactement *en-bes « [ce qui entre] dans le doigt ». V. sous l en et 1 bis.

Eṅvor, s. f., mémoire : pour *meṅvor > *veṅvor, cf. cymr. myfyr « réfléchi ». Empr. lat. savant memoria. V. sous ab.

Éô, si fait : exactement « [cela] est », sg. 3 du vb. béza.

1 Éok, éog, s. m., saumon, corn. ehoc, cymr. eawg > eog, vir. eo (gén. iach), gael. iach, lat. esox> lui-même d’ailleurs emprunté à un dialecte celtique, ainsi que le basque izokin.

2 Éok, éog, adj., mûr, roui, mbr. eaug pour *ehùug, gaul. exacon « petite centaurée[24] » : soit un celt. *ùks-àk-o- <( qui a perdu son àcretè », et cf. lat. dc-er. V. sous *eks- et la rac. sous ék.

Éôl, s. f., huile. Empr. fr. ancien oile avec métathèse. Cf. olèou.

Éon, éonen, s. f., écume, cymr. eœyn id., vbr. euon-oc « écumeux », vir. dan « écume » : soit un celt. *QW-eno- pour *potc-eno-, rac. S PU dans lit. pu-tà et peut-être dans lat. spu-ma[25].

Éontr, s. m., oncle, corn. éviter > ewiter, cymr. ewythr, d’un celt. *awon-tro-, qui n’a d’équivalent approché que lat. avun-culus[26].

Éôp, s. m., ancre, cymr. angor, vbr. aior> etc. Empr. lat. ancora. Cf. 1 éal,

Éost, s. m., août, moisson. Empr. lat. Augustus > agusim.

Éostik, s. m., rossignol : dér. du précédent.

1 Er, s. m., aigle, mbr. erer, cymr. eryr, soit un brittonique *or-iro-, cfi vsl. or-tlti, al. aar et adel-aar « noble-aigle » > arf/er, gr. ὄρ-νι-ς (or-ni-s) « grand oiseau », etc.[27].

2 Er, dans le : combinaison de en et #r, et cf. enn.

Ér, s. m., variante contractée de éar. V. ce mot.

Erbéd, s. m., recommandation : abstrait du vb. erbèdi, composé d’une forme du préf. *ar- et de pédi. V. ces mots.

Êré, s. m., lien : soit un radical celt. *en-rig-, V. la rac. sous rumm, et cf. 1 en, 2 é et kéfré.

Érez, s. f., envie, dégoût, mbr. eres, « jalousie, malice », cymr. eres « étrange » et erysi « étonnement ». — Étym. inc. et cf. gwarizi.

Ergerz, s. m., voyage à pied, promenade : préf. ar- et kerz[28].

Erc’h, s. m., neige, corn. irch > er, cymr. eir-a id., vir. arg « goutte » : d’un celt. *argo- (pour *parg-o-ï), d’étym. inc.[29].

Erméaz, adv., hors, dehors (d’où ermésiad « étranger ») : à traduire littéralement « dans la campagne ». V. sous 2 er et méaz.

Érô, s. m., sillon, mbr. eru id., vbr. eru- « fonds de terre », corn. eru et cymr. erw « champ », vir. arbe et arbar « blé », ir. et gael. arbhar « blé », lat. ar-ou-m « terre de labour », etc. : tous dérivés anciens, formés sur la rac. ARA. V. sous arar et arat.

Err, s. m., élan, fougue, hâte. Empr. fr. ancien erre(< lat. iter) « marche », surtout dans la locution très usuelle grant erre « vite »[30].

Errez, s. m., variante de arrez. V. ce mot.

Erruout, vb., variante de arruout. V. ce mot.

Erv, s. m. (pl. iroi), variante de érô. V. ce mot.

Ervâd, adv., bien, mbr. en mat. V. sous 1 en et màd.

Es, particule, variante de ez dans tous les sens.

Êsa, ésaé, s. m., essai, épreuve. Empr. fr. essai.

Eskammed, s. m., billot : contamination du bas-lat. scamellum « escabeau »[31] et du fr. dialectal *escaffaud « échafaud ». — Conj.

Eskemm, s. m., échange (ex-cambium). Cf. kemm.

Eskenn, s. m., morceau, pour *hesk-enn avec suff. masc, soit donc « sciure », de même formation que heskenn « scie ».

Eskoaz, prép., en comparaison de : exactement « à l’épaule de », parce qu’on se mesure épaule contre épaule. V. sous 2 é et skoaz.

Eskop, s. m., évêque (pl.eskep). Empr. lat. épiscopus[32].

Eskuit, adj., agile, cymr. esgud, vir. escid, ir. éasguidh, gael. easgaidh « dispos » (exempt de fatigue)[33]. V. sous *eks- et skuiz.

Espern, s. m., épargne. Empr. fr. ancien espargne.

Estel, s. m., dévidoir : jadis pl. de astel[34], pris pour un sg.

Estlamm, s. m., étonnement : contamination d’un mbr. *ech-lamm « bondir hors de [soi] » par le mbr. eston empr. fr. V. sous lamm.

Estr, estré, adv., prép., outre, en outre : le mot est avec entré exactement dans le même rapport que lat. extra avec lat. intrà, soit donc un type de comparatif ou d’adv. local dér. de *eks.

Éta, donc, mbr. enta, cymr. ynte (particule adversative de liaison), cf. ag. and y vhal. unii > al. und, sk. àtha « et ».

Êtéô, étev, s. m., tison, brandon, corn. itheu, cymr. etewyn, cf. vir. itharnae « torche » : soit un celt. *itu- < *pitu- et *pitaw-i-, cf. gr. πί-τυ-ς (pi-tu-s) « pin », sk. pitu-dâru (nom d’un arbre très riche en résine), lat. pïnu-s, etc. — Conj. Stokes[35].

Étré, prép., variante de entré. V. ce mot.

Étréaé, prép., vers, mbr. entresea et entrézec id. : soit *en-tres- = lat. *in-trans « dans-à-travers », surchargé d’un suffixe de dérivation adverbiale ; pour le suff., cf. bété, goudé, adâlek, etc. ; pour le corps du mot, étré.

Eûb, s. m., embarras : abstrait de eûbi, mbr. eübi « embarrasser », et celui-ci pour mbr. ac’hubi. Empr. lat. occùpàre « s'emparer de > tenir ferme > faire obstacle ».

Eûbeûl, s. m., variante de ébeùl. V. ce mot.

Eufl, s. m., atome, fétu, duvet volant, cymr. eflyn et yfflyn id. : peut-être simple variante à métathèse de elfen et elven. V. ces mots ; mais cf. aussi cymr. ulwyn « cendre », br. fulen et ulven.

Eul, article indéfini devant l, cf. eunn et al.

Eûn, adj., variante contractée de éeùn. V. ce mot.

Eunn, article indéfini, corn. un, cymr. un, vir. oin, etc. : d’un celt *oino-B « un » (nom de nombre), lat. oinos > anus, gr. οἰνή (oinê) « le point de l’as au jeu de dés », got. àin-s « un », ags. an > ag. one et an, al. ein, etc.[36] ; les principales autres dérivations de cette racine universelle sont sk. éka (< i.-e. *oi-qo-), zd aeva « un » et gr. οἰός « seul » = οἰ-ϝό-, peut-être lat. ae-quus, etc. Cf. unan, intanv, itron.

Eur, variante du précédent. V. sous ar.

Eûr, s. f., chance, bonheur. Empr. fr. heur.

Eûré, il fit (et formes similaires), mbr. gueure. V. sous gra.

Eûred, eûreûd, s. m., noce, mbr. euret. Empr. lat. ôràtus « prière » (ôràtio), restreint au sens de « prière prononcée sur les futurs époux > célébration du mariage ». — Conj. Loth.

Eûz, prép., de : forme moderne de *eks.

2 Eûz, s. m., horreur, terreur : parait contenir, à l’état long, la même rac. que le lat. pav-or, également reproduite par le vir. ûath id., sans autre répondant sûr ni possibilité de préciser la dérivation.

Éva, vb., boire, mbr. evqff, corn. eve, cymr. ib-en (ancien) « nous buvons », vir. ibim ce je bois », gael. ibh y etc. : d’un vb. celt. *ib-ô pour *pib-ô, sk. pib-a-mi, lat. bib-ô[37].

Ével, comme, cymr. efel>fel : forme déaspirée de hèoel à sens adverbial.

Éven, s. m., juin : écourté de mézéven par suite d’une confusion qui l’a rattaché au lat. jnnius ; méz- a été pris pour mtz. V. ces mots.

Éves, s. m., attention (aussi évec’h et éouec’h V.), peut-être pour *he-wez = celt. *su-wik-to- « bonne garde » (cf. hé- et az-aouez), dér. de la même rac. qui a donné lat. vig-il « qui veille », got. wak-jan, ag. to wake, al. wach-en « veiller », wack-er « diligent », weck-en « éveiller », etc., etc. (corn, gwethe et gwithe « veiller »).

Évit, prép., pour, mbr. eguit, corn. awos id. : ce dernier supposerait une forme plus ancienne *awoet. — Étym. inc. Cf. égét.

Évl, s. m., bourdaine. Empr. lat. ébulum, et cf. 2 évor.

Évlec’h, s. m., orme : dér. d’un radical *ecl-, métathèse pour *elv- (contaminé du précédent). Empr. ags. elm ou lat. ulmus[38].

Evn, s. m., oiseau (aussi ein V.) : altéré pour en (cf. 2 ènez) > et celui-ci pour mbr. ezn, corn. heth-en > edhen, vbr. etn-, cymr. erfn, vir. en id. : d’un celt. *etno- pour *pet-no- « volatile », dér. de la rac. PET « voler », et identique à lat. *pet-nà > penna « aile » ; sk. pât-a-ti et gr. πέτ-ε-ται « il vole », πτε-ρό-ν « aile », ag. feather et al. feder « plume », lat. pet-ere « se diriger vers », etc.

Évodi (C.), vb., monter en épis. Cf. dioda[39].

1 Évor, s. m., ellébore : soit un plus ancien *elleoor > *annet>or où ann a été pris pour l’article. Empr. lat. helleborus.

2 Évor, s. m., bourdaine, vir. ibar, ir. et gael. iubhara if », gaul. Eburos n. pr., et cf. cymr. efwr y « berce, blanche-ursine » : d’un celt. *eb-uro-, presque identique au lat. eb-ulu-m « hièble ». Cf. éd.

3 Évor, s. f., variante dénasalisée de envor.

Evr (V.), s. m., variante de ebr. V. ce mot.

1 Éz, particule verbale (cf. 1 é), corn. ydh et y, cymr. yd et y, vbr. it, identique au suivant : en d’autres termes, une phrase telle que aliez é kanann doit se traduire littéralement « [c’est] souvent que je chante ». V. sous 1 a.

2 Ez, que : relatif d’origine obscure. Cf. le précédent.

Ez-, préf., l’une des formes de *eks-.

Ézel, s. m., membre (pl.izili), corn. esel, vir. asil id. : d’un celt. *ass-éli-, lui-même dér. d’un celt. *ass-à, « poutre, côte », d où corn. et cymr. as-en, vir. cu-na, cf. lat. ass-er et got. ans « poutre » ; sans autre équivalent.

Ézéô, s. m., boucle d’attelage. Empr. fr. essieu. — Conj.[40].

Ézomm, s. m., besoin (aussi éhomm V.), cf. corn. eihom id., vbr. edemn-etic « qui a besoin » et vir. adam-na « faim » : contamination d’un composé du vb. « être » et du préf. *eks-, au sens du lat. de-esse « manquer », avec un dér. celt. d’origine indéterminable impliquant l’idée de besoin ». — Conj. — Cf. le suivant.

Ezvésand, adj., absent : préf. ez- et béza, soit le lat. *ex-sens s’il existait avec le sens de ab-sens. V. le précédent.

  1. On ne donnera les composés par é initial qu’autant qu’ils ne sont pas décomposables à première vue. Il est bien entendu qu’il faut parfois les chercher sous l’initiale muée, quoique la mutation ne soit pas régulière : ainsi éverr « bientôt », sous berr, etc.
  2. L’explication par *he penn « une tête de lui » ou « d’elle » (son ou sa pareille) se heurte à l’objection que, dans le second sens, qui justement est le sens breton, on devrait avoir *he fenn. D’autre part, l’extension de sens en comique est bien plus aisément concevable que la restriction de sens en breton. — Le radical de ce mot se retrouve en outre dans l’initiale, à fonction féminine, du br. bisourc’h et du fr. biche.
  3. cymr. ch-, vir. èss— et a « -, gaul. eœ— (cf. aoun).
  4. Phonétiquement et en principe, le groupe ks donne h entre voyelles et s > z devant consonne. V. ces préfixes.
  5. Le t surajouté sons une influence inconnue.
  6. Comme cymr. nogyt « que ne » de nog. Mais, a raison de l’homopbome partielle et de leur sens vague de conjonction, les deux mots égét et éoit (mbr. èguit se sont parfois confondus. — Loth.
  7. L’expression remonte-t-elle à l’époque où l’année commençait avec le printemps ?
  8. La différence entre ail et eil tient à deux types d’accentuation divergents, respectivement *âl-yo- et al-yô-.
  9. Le cymr. et le br. supposent une forme brittonique *oktL Le corn. a subi l’influence de l’ags.
  10. Le bétail est naturellement la richesse par excellence. — Le vocalisme brittonique suppose que l’emprunt a eu lieu à un moment où l’ags. ne prononçait pas encore ead> mais à peu près *aud, soit au début même de l’invasion des Saxons en Grande-Bretagne.
  11. La plante se plaît dans les lieux bien arrosés. Mais les formes ir. et gael. soilsastar et seilisdeir sont embarrassantes.
  12. La désuétude de ézel lui-même peut avoir favorisé l’altération phonétique et la légère déviation sémantique.
  13. Le type *ez-len pourrait remonter a un celt. *pat-ilion* « qui s’étend », cf. lat. patêre « s’étendre » et pat-ulu-s « touffu », gr. μετά-ννῦμι (meta-nnumi) « j’étends », etc. Quant au type elc-, M. Ernault l’en a récemment séparé, en expliquant élô « tremble » et cl/ « palette », respectivement par empr. lat. albus « blanc » et alba « aube » [de moulin] : Mém. Soc. Ling., X, p. 325.
  14. Cf. gr. μῦθ-ο-ς (muth-o-s) dont l’origine n’est pas plus claire.
  15. Les équivalents celtiques directs sont mbr. (irrégulier) y metou « au milieu », oymr. yrneun > meivn « dans », vir. im*medôn et adj. mide « milieu », gaul. *med-io-s dans Medio-ldnum « Milan » (milieu de la plaine), « Meilhan », et autres n. pr. : se garder donc de confondre avec metsk » mélange ». V. ce mot et cf. métou.
  16. Comparer la formation du gr. gr. ἐγ-κέφαλον « encéphale ».
  17. Le k breton est étrange, en regard du gh > g indiqué par toutes les autres langues. L’altération est inexpliquée.
  18. Le mot breton est corrompu. De plus, il a prodigieusement changé de sens ; mais rien n’est plus commun que ces sortes de confusions d’heures, cf. lat. nôna « 3 h. après midi » > ag. noon « midi ».
  19. C’est-à-dire « somme que l’époux donne » ou plus tard « avantages qu’il reconnaît à l’épousée comme prix de sa beauté ».
  20. Ce mot, en effet, a l’air du diminutif d’un plus ancien *inssa. Quant à la signification intime, on a suggéré un primitif *eni-sti avec le sens du lat. in-stà-re « se tenir dans » [l’eau].
  21. La voyelle finale br. est imitée de dré < tré, ce qui revient à dire que entré équivaut à ce que serait un lat. *in-trans.
  22. Sur la chute de n initial, cf. 1 aer.
  23. D’où aussi lat ; em-ô « j’achète » (sens étymologique daos *dê-emô > ctëmo « j’enlève »). Le sens de la racine était évidemment assez fuyant, ce qui justifie les déviations sémantiques.
  24. Plante qu’on faisait macérer dans l’eau.
  25. L’s initiale est mobile, comme dans beaucoup de racines de ce typé * cf ; aussi sk. phè-na et ags. fam > ag. foam (= lat. *spoi-ma > spàma).
  26. Peut-être bien « petit aïeul », terme de caresse pour désigner un « oncle maternel » (fils de l’aïeul maternel).
  27. Peut-on conjecturer quelque rapport avec la rac. de lat. or-io-r, gr. ὄρ-νυ-ται (or-nu-tai) et sk. r-pu-té « il s’élève ». De part et d’autre le vocalisme est peu élain
  28. Ne pas comprendre er kers « dans la marche » ; car, kerz étant masculin, er n’y peut produire mutation douce ; mais il se peut que le type er ait agi sur le vocalisme de *ar-gerz.
  29. Si le brittonique est à séparer de l’ir., on peut tout simplement l’interpréter par *arg-io- « blanc », gaul. *argios (dans Argio-talos n. pr.), gr. ἀγρ-ό-ς, etc. V. sous arc’hant.
  30. Conservé aussi dans le fr. moderne erre-ments.
  31. Attesté surtout par l’al. schemel.
  32. À la différence du fr., qui suppose opiscopus.
  33. Mais sans doute contaminé, en br., de kuit « libre ».
  34. Au sens de « menue pièce de bois ». V. ce mot.
  35. La phonétique rigoureuse exigerait *édéô, mais la dentale peut être restée sourde ou s’être réassourdie par contamination de tân.
  36. Le doublement de l’a final vient en br. de l’analogie de ann, une fois le nom de nombre devenu article.
  37. Subsidiairement apparente à la rac. PO « boire », sk. pâ-hi « bois », gr. πώ-νω et πί-νω, lat. pô-tu-s, pGtâre, etc.
  38. Le nom celt. est vir. lem, ir. lcamh y gael. leamhan, cymr. llwyf.
  39. Le préf. parait être ici *eks-, soit donc *ec’hodi > *êodi > évodi (l’o développant une labiale).
  40. Peu vraisemblable, à raison de l’énorme changement de sens.