Lotus de la bonne loi/Notes/Chapitre 21

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Lotus de la bonne loi
Version du soûtra du Lotus traduite directement à partir de l’original indien en sanscrit.
Traduction par Eugène Burnouf.
Librairie orientale et américaine (p. 418-420).
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Notes du chapitre XXI

CHAPITRE XXI.

f. 208 b.Des formules magiques.] Quoique ce passage ait trait à une des superstitions les plus misérables du Buddhisme du Nord, c’est-à-dire à cette croyance, que certaines paroles ou formules nommées Dhâraṇîs ont une efficacité surnaturelle, et qu’à ce titre on puisse regarder comme à peu près perdu le temps qu’on donnerait à ces formules, j’ai cru cependant nécessaire de rapporter ici les variantes qu’offrent les manuscrits qui sont à ma disposition : le relevé de ces variantes peut être utile plus tard aux savants qui viendraient à rencontrer nos formules chez des peuples Buddhistes étrangers à l’Inde, lesquels se seraient contentés de les transcrire, et auraient pu quelquefois les altérer. Je commence par la version tibétaine qui a reproduit la formule du fol. 208 b.

अन्ये । मन्ये । मने । ममने । चित्ते चिरते । षमे षमेयितावि । षान्ते । मुत्के । मुत्कतमे समे । अविषमे समसमे । जये । काये अकाये । अक्षिणो । षान्ते । षमिते धरणि । आलोकभामे । प्र्त्यवेक्ष?णि । विविर अभ्यन्त । रनिविष्टे । अभ्यन्तरनिविष्टे अभ्यन्तपारिशुडि । उत्कुले । मुत्कुले । अरटे । मरटे । प्रुकाक्षी असमसमे । बुडविलोकिते । अर्मपरीक्षिते । सङ्घनिर्घाषणी । निर्घोषणी । भयाभय । षोधनी मन्त्रमन्त्र । कायते रुतकौशिले । अक्षये अक्षवरहायाविलि । अमन्यनताया ॥

Voici maintenant la version du manuscrit de Londres :

अन्ये मन्ये । अरौ परौ अमरे ममरे चित्ते चरिते । समे समिता विशान्ते । मुत्के मुत्कतये । समे अविसमे समसमे । जये क्षये अक्षये अक्षीणे शान्ते समिते धारणी आलोकभाषे प्रत्यवेक्षणि निधिरचिचिर अभ्यन्तरपिविष्टे अभ्यन्तरापारिशुडि अष्कले । मुकुले अरडे परदे सुकाक्षि असमसमे बुडविलोकिते धर्मपरिक्षिते संघनिर्घसनिनिर्घाषणी भयाभयविशोधनिमन्त्रे मन्त्राक्षयते रतकौशिल्ये अक्षेये अक्षेयवनताये ववकुलवलोतवलोक अमन्यनेताये ॥

Voici la leçon de celui des manuscrits de M. Hodgson qui est transcrit en caractères népalais, f. 168 b.

अन्ये मन्ये । अनौ पनौ । अमने ममने । चित्ते चरिते । समे समिता विशान्ते । मुत्क मुत्कये । समे अविसमे समसमे । जये क्षये अक्षये । अक्षीणे । शान्ते समिते । धारणी आलोकभाषे प्रत्यवेक्षणि । निधि रुचि चिरु अभ्यन्तरपरिशुडि उकुले । मुकुले । अरडे परडे । मुकाक्षि । असमसमे बुडविलोकिते धर्मपरीक्षिते संघनिसंघसनि निर्घाषणि भयाभयविशोधरि मन्त्रक्षयते रुतकौशल्ये अक्षये अक्षये अक्षयवनताये वक्कुलवलात् अमन्यरताये स्वाहा ॥

Le second manuscrit de M. Hodgson, celui qui est transcrit en caractères dêvanâgaris, est tellement semblable au précédent, qu’il suffira d’indiquer le petit nombre de points par où il en diffère. Au lieu de चित्ते, ce manuscrit lit चित्त, et au lieu de अक्षीणे, अक्षीण. La leçon qui résulte de ces deux manuscrits est certainement la plus correcte ; la plus fautive au contraire est celle de la traduction tibétaine du Saddharma puṇḍarîka.

f. 209 a.L’occasion de surprendre.] J’ai déjà parlé de cette expression ci-dessus, chap. vi, f. 80 a, p. 385. Si l’on préfère le second sens que j’ai indiqué pour avatâra, on devra traduire, « l’occasion de perdre. »

Les paroles suivantes des formules magiques.] Voici la leçon de ces formules magiques d’après la version tibétaine du Saddharma puṇḍarîka :

ज्वले महाज्वले । उक्के मुक्के । अते अतावति । नृव्योनृटावनि । इट्टिनि । विट्टि चिट्टिनि । नृटटिनि । नृट्टावति स्वाहा ॥

Voici maintenant la version du manuscrit de Londres :

जवले महाज्वले उकके मुक्के अडे अडावमि नृव्ये नृव्यावति इट्टिनि विट्टिनि चिट्टिनि नृव्यनि नृत्यावनि स्वाहा ॥

Le premier manuscrit de M. Hodgson ne diffère de ce dernier que dans les points suivants : il lit, comme le manuscrit de la Société asiatique, अते au lieu de अडे, विटिनि au lieu de विट्टिनि, et नृट्टिनि au lieu de नृव्यनि.

Le second manuscrit de M. Hodgson lit aussi अते ; इटिनि, विटिनि pour विट्टिनि ; il omet चिट्टिनि, qu’il remplace par नृट्टिनि au lieu de नृव्यनि.

Ce seront.] Voici la leçon des formules magiques de Vâiçravana, d’après la version tibétaine : अगणो गणो । गौरि गन्धारि । चण्डालि । मातङ्गि । पुक्कसि । कुले । स्वाहा ॥.

Les voici, d’après le manuscrit de Londres : अट्टि तट्टि नट्टि वनट्टि अनडे नाडि कुनडि स्वाहा ॥.

Le premier manuscrit de M. Hodgson diffère de celui de Londres dans les points suivants : il omet तट्टे, lit तुनट्टि pour नट्टि ; il omet वनट्टि ; il lit कुटनि pour कुनडि.

Le second manuscrit de M. Hodgson lit à peu près comme le premier : il omet तट्टि, lit तुनट्टि pour गनट्टि, et कुटनि pour कुनडि.

f. 209 b.Ce seront.] Voici la leçon des formules de Virûḍhaka, d’après la version tibétaine : अगणो गणो । गौरि गन्धारि । चण्डालि । मातङ्गि । पुक्कसि । कुले । कुले । स्वाहा ॥

Voici la version du manuscrit de Londres :

अगणे गणे गौरि गन्धारि चण्डालि मातङ्गि पोक्कसि संकुले ब्रूसलसिसि स्वाहा ॥

Le premier manuscrit de M. Hodgson ne diffère de cette leçon que dans les points suivants : गण pour गणे ; चण्डारि pour चण्डालि ; मंकुले pour संकुले ; कुशलि ब्रूहि pour ब्रूसलसिसि.

Le second manuscrit de M. Hodgson a aussi गण pour गणे ; चण्डारि pour चण्डालि ; मंकुले pour मंकुले, et कुशलि ब्रूहि pour ब्रूसलसिसि.

Les Râkchasîs.] Les noms de ces divinités femelles qui rappellent le système monstrueux des Tantras, si même elles ne lui appartiennent pas exclusivement, sont écrits de la manière suivante d’après le premier manuscrit de M. Hodgson : Lambâ. Vilambâ, Kuṭadantî, Puchpadantî, Mukuṭadantî, Kêçanî, Analâ, Mâlâdharî, Kuntî, Sarvasattvôdjôhârî ; Hârîti est omis. Le second manuscrit de M. Hodgson lit exactement comme le premier tous ces noms féminins, sauf le sixième qui est écrit Kaçanî ; il omet de même Hârîti. On trouvera probablement les noms de ces personnages redoutables dans les Tantras dont Csoma de Cörös nous a fait connaître les titres.

f. 210 a.Des formules magiques.] Au lieu de स्तुहे, que donne aussi le manuscrit de Londres, les deux manuscrits de M. Hodgson, d’accord avec la leçon de la version tibétaine, lisent . Le manuscrit de Londres fait suivre la première formule de la lettre , et les trois autres de la syllabe हृ, qui se trouve ainsi placée avant l’exclamation finale de स्वाहा.

Un Yakchakrĭtya.] Après ce mot, les deux manuscrits de M. Hodgson lisent « un Mânuchakrĭtya, » qu’il faut rétablir à cause du terme qui vient immédia­tement après.

f. 210 b.Tritiya, Tchaturthakrĭtya.] Il faut sous-entendre le mot krĭtya après Tritîya, comme après Dvâitîya ; ces termes composés signifient, « un Krĭtya au second, au troisième ou au « quatrième degré. » Les deux manuscrits de M. Hodgson lisent plus correctement Dvâitîyaka, Trâitîyaka et Tchâturthika. Les Krĭtyas sont célèbres au Kachemire ; ce sont des divinités femelles dont on suppose que le pouvoir est au service des magiciens qu’elles favorisent[1]. Ce nom doit donc s’écrire Krĭtyâ et non Krĭtya.

St. 1. La tige du Mardjaka.] J’ignore à quelle plante s’applique ce nom ; il y a tout lieu de croire que ce doit être un végétal analogue au bananier.

St. 3. Qui expriment par la pression l’huile de la graine de sésame.] Voilà une perspective peu encourageante pour ceux qui fabriquent l’huile du tila, si recherchée des Indiens ; mais cette réprobation vient selon toute apparence de ce que ceux qui tirent l’huile de la graine de sésame ne peuvent le faire sans écraser un plus ou moins grand nombre d’êtres animés. On a d’autres preuves du respect que l’exagération d’un bon principe a inspiré de tout temps aux Buddhistes pour la vie des plus petits vermisseaux.

f. 211 a.Des huiles de Tchampaka.] Il s’agit sans doute ici du parfum extrait des fleurs du Michelia tchampaka, que l’on mêle avec de l’huile de cocotier. Je ne sais ce que peut être l’huile de Vârchika, à moins que par Vârchika on ne doive entendre, « parfum extrait du Varchika ou de l’aloès. »

  1. Troyer, Râdjataranginî, t. I, p. 17 et 367.