Louis Eunius ou le Purgatoire de saint Patrice/Texte entier

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Texte établi par Georges DottinHonoré Champion (p. 13-410).

La Bretagne et les Pays Celtiques. Série in-8. II


LOUIS EUNIUS

OU

LE PURGATOIRE DE SAINT PATRICE

MYSTÈRE BRETON EN DEUX JOURNÉES


PUBLIÉ

avec introduction, traduction et notes

Georges DOTTIN

Professeur à l’Université de Rennes.

Doyen de la Faculté des Lettres


PARIS

HONORÉ CHAMPION,

Éditeur

Librairie spéciale pour l’histoire de la France et de ses anciennes provinces

5, quai Malaquais (VIe)

1911

A LA MÉMOIRE

DE

François-Marie LUZEL

Qui a recueilli le théâtre breton.


A

Anatole LE BRAZ

Qui en a écrit l’histoire.

LOUIS EUNIUS

OU

LE PURGATOIRE DE SAINT PATRICE


I

La Légende du Purgatoire de saint Patrice[1].

La plus ancienne mention du Purgatoire de saint Patrice est dans une Vie de saint Patrice, rédigée à la fin du XIIe siècle, d’après des documents antérieurs[2], par Jocelin, Gallois d’origine, moine de Furness, en Lancashire. Après avoir raconté la retraite de saint Patrice sur le mont Cruachan Aigle, en Connaught, où les démons, sous la forme d’oiseaux noirs, s’efforçaient de troubler sa méditation par des cris stridents[3], Jocelin ajoute : « Beaucoup de gens ont l’habitude de jeûner et de veiller sur le sommet de cette montagne, pensant qu’après cela ils n’entreront jamais en enfer, parce qu’ils croient que cette faveur a été obtenue de Dieu par les mérites et les prières de saint Patrice. Et même, quelques-uns qui y avaient passé la nuit racontent qu’ils ont souffert de très graves tourments, par lesquels ils se croient purgés de leurs péchés, d’où certains d’entre eux appellent ce lieu purgatoire (purgatorium) de saint Patrice[4] ».

A peu près à la même époque que Jocelin, Giraud de Cambrie, dans la Topographia Hibernica, place le Purgatoire de saint Patrice en Ulster. « Il y a, écrit-il, sur les confins de l’Ulster, un lac qui contient une lie composée de deux parties[5] ; l’une, ayant une église très respectée, est tout à fait belle et agréable, incomparablement illustrée par les visites des anges et par le concours visible des saints de cet endroit ; l’autre partie, très âpre et horrible, est, dit-on, assignée aux seuls démons, en sorte qu’elle reste presque toujours exposée aux tumultes et aux pompes visibles des mauvais démons. Cette partie a en elle neuf fosses ; si quelqu’un ose passer la nuit dans l’une d’elles (ce qui quelquefois a été tenté sans aucun doute par des hommes téméraires), il est aussitôt saisi par les malins esprits, et toute la nuit il est torturé par de graves châtiments et sans cesse affligé de tant et tant de feux ineffables et de diverses sortes de tortures par l’eau, qu’au matin on trouve à peine quelques restes de souffle dans son corps misérable. A ce qu’on assure, si l’on supporte ces tourments par suite d’une pénitence imposée, on ne subira pas les peines infernales, à moins d’avoir commis des fautes trop graves. Ce lieu est appelé par les habitants Purgatoire de saint Patrice. En effet, comme le saint homme avait discuté avec le peuple incrédule des peines infernales des réprouvés et de la vraie et perpétuelle gloire des élus après la mort, pour imprimer plus sûrement que par les mystères de la foi, des choses si grandes, si inusitées, si nouvelles et inopinées dans les âmes grossières des infidèles, il mérita d’obtenir, par l’instance efficace de ses prières, une grande et admirable connaissance de l’une et de l’autre chose très utile pour ce peuple à la tête dure[6].

Avec Giraud de Cambrie (1147-1223 ?), la légende est désormais située en Ulster, dans l’île du lac Derg, au sud-est du comté de Donegal[7], où se rendent encore aujourd’hui les pèlerins désireux de racheter ici-bas leurs fautes par une dure pénitence. Dès le XIIe siècle, comme on le voit, les traits essentiels de la légende sont fixés ; ils n’avaient pas, sans doute, dans la tradition orale, le caractère abstrait que leur prêtent Jocelin et Giraud. On racontait certainement déjà les aventures merveilleuses et effroyables de tel ou tel qui avait pénétré dans les fosses souterraines et qui y avait rencontré les démons, mélange confus des croyances populaires sur les cavernes et sur les gouffresll), avec les idées religieuses répandues par les dialogues de Grégoire le Grand(,) (540-604) et l’histoire du vénérable Bède(3) (672-735), avec les souvenirs classiques de l’antre de Trophonius (4) et des descentes aux enfers racontées par les poètes(5) ou les philosophes(#).

Ce fut un cistercien de l’abbaye de Saltrey(7), comté de Huntingdon, qui, sur la demande de l’abbé de Sartis, rédigea pour la première fois, à la fin du XIIe siècle, la légende sous la forme qu’elle a gardée pendant plusieurs siècles. L’auteur raconte que les Irlandais, après avoir entendu les prédications de saint Patrice, lui dirent qu’ils ne croiraient pas ses paroles à moins qu’ils ne vissent de leurs propres yeux les tourments de l’enfer et les joies du Paradis. Patrice pria et jeûna longtemps ; le Seigneur lui apparut, lui donna un livre et un bâton, et le conduisit dans le désert. Là, il lui montra une fosse ronde, obscure à l’intérieur, dans laquelle les pécheurs repentants pourraient voir les secrets de l’autre vie et être délivrés de leurs péchés (8). Patrice bâtit à cet endroit une église où il établit des chanoines de saint Augusde Clogher. D’après d’autres, la Caverna Purgatorii aurait été située dans une autre île du lac Derg, Saints’ Island. Voir O’Connor, S* Patrick’s Purgatory, Lough Derg, Dublin, 1895, p. 113-115. [8]

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[15] tin[16] ; la fosse, qui se trouvait dans le cimetière, devant la façade Est de l’église, fut entourée d’un mur fermé d’une porte et d’une serrure, et la clef en fut remise au prieur. Du temps de saint Patrice, beaucoup de pénitents entrèrent dans la fosse, et, lorsqu’ils en sortirent, ils attestèrent qu’ils avaient souffert des tourments et vu les joies ; saint Patrice fit écrire leurs relations que l’on conserva dans l’église. Mais beaucoup d’hommes qui y étaient entrés y périrent. Cet endroit s’appelle Purgatoire de saint Patrice, parce qu’on y est purgé de ses péchés, et l’église s’appelle Reglis[17].

Voici quelles étaient les coutumes établies. On ne pouvait entrer dans le Purgatoire sans une lettre de l’évêque dans le diocèse duquel il était situé ; si l’évêque ne pouvait dissuader le pénitent de cette entreprise, il lui remettait une lettre pour le prieur qui lui conseillait de choisir une autre pénitence. Si le pèlerin persistait dans son dessein, on le faisait entrer dans l’église, où pendant quinze jours il jeûnait et priait. Au bout de ce délai, le pénitent, après avoir entendu la messe, reçu la communion et avoir été aspergé d’eau bénite, est conduit en procession et au chant des litanies jusqu’à la fosse. Là, le prieur lui rappelle encore les dangers que lui feront courir les démons et il ajoute que de nombreux pénitents ne sont jamais revenus. Si l’homme persiste encore dans sa résolution, il reçoit la bénédiction des prêtres, il se recommande aux prières de tous et imprime de sa propre main le signe de la croix sur son front. Le prieur ferme la porte à clef et la procession retourne à l’église. Le lendemain, de bonne heure, le cortège se rend à la fosse, le prieur ouvre la porte, et si l’homme est là, on le conduit avec joie à l’église. Il y demeure quinze jours dans le jeûne et la prière. Si, au contraire, il n’a pas reparu, il est sûr qu’il est allé à sa perdition ; la porte est refermée et tous s’en retournent.

Au temps du roi Etienne[18], un soldat nommé Owen (celui-là même dont on donne le récit) désira faire pénitence dans le Purgatoire de saint Patrice. Malgré les représentations de l’évêque et du prieur, il persista dans son dessein. Owen entra dans la

fosse. Après avoir marché au milieu d’épaisses ténèbres, il aperçut une faible lueur, comme en hiver après le coucher du soleil, et arriva dans une salle soutenue par des colonnes et ressemblant à un cloître monastique. Il s’y promena et s’y assit pour l’admirer. Et voilà que quinze hommes parurent, vêtus de blanc comme des religieux. Celui qui paraissait être le prieur adressa la parole à Owen, lui recommanda d’être courageux et constant dans les tourments qu’il aurait à subir et lui dit qu’en invoquant le nom de Jésus-Christ il serait aussitôt délivré des démons. Après lui avoir donné leur bénédiction, les quinze hommes se retirèrent. Le soldat se prépare courageusement à ce nouveau genre de guerre. Il revêt la cuirasse de justice, le casque de l’espérance de la victoire et du salut éternel, le bouclier de la foi, l’épée de la parole de Dieu, en invoquant le nom de Jésus. Tout à coup, il entend un bruit effroyable comme si tous les hommes et les êtres animés de la terre, de la mer et de l’air se démenaient ensemble, et une troupe innombrable d’horribles démons viennent le saluer en ricanant ; ils le préviennent des tourments qu’il aura à endurer, et en considération des services qu’il leur a rendus jusqu’ici, ils lui conseillent de retourner sur ses pas. Owen ne répond rien. Les démons construisent un grand bûcher, qu’ils allument, lient les pieds et les mains d’Owen, le jettent dans le feu et le traînent avec des crocs de fer au milieu du foyer. Owen invoque le nom de Jésus : l’incendie s’éteint, les liens tombent, les démons s’enfuient.

Quelques autres démons arrivent et entraînent le soldat dans un vaste pays où la terre était noire et l’air ténébreux, et où on ne voyait que des démons ; un vent desséchant pénétrait le corps ; d’abord Owen fut entraîné au sud-est, puis au sud. De là, il entendait des pleurs et des hurlements. Enfin, il parvint dans une plaine où des hommes et des femmes nus étaient fixés à terre sur le ventre par des clous ardents ; de douleur certains mordaient le sol ; des démons couraient entre eux et sur eux et les frappaient de fouets très durs. Le nom de Jésus délivre Owen des tourments qu’on allait lui infliger. Dans une autre plaine plus grande, il vit des gens attachés comme dans la première, mais sur le dos ; des dragons, des serpents de feu et des crapauds énormes les mordaient et les piquaient. Dans une troisième plaine, des hommes et des femmes étaient percés, des pieds à la tête, d’une multitude de clous. Dans une quatrième plaine, il y avait tous les genres de tourments : les uns étaient suspendus à des chaînes de feu par les pieds, par les cheveux, par les bras, et plongés dans des flammes de soufre ; d’autres étaient suspendus au-dessus de feux par des crocs fichés dans leurs yeux, leurs oreilles, leurs gorges, leurs narines, leurs mamelles, leurs parties sexuelles ; d’autres étaient consumés dans des fournaises de soufre, d’autres brûlés dans des poêles à frire, d’autres embrochés et tournés sur le feu par des démons, d’autres dégouttaient de métaux en fusion. Owen vit là quelques-uns de ses compagnons et les reconnut. Puis une roue enflammée apparut devant eux, d’une grandeur étonnante, et dont les rayons et les bandes étaient hérissés de crocs de fer auxquels étaient suspendus des hommes ; une moitié de la roue était dans l’air, et l’autre moitié dans la terre, d’où sortait un feu de soufre ; les démons la faisaient tourner rapidement en fourrant des leviers de fer entre les rayons. Puis le soldat fut entraîné vers une grande maison remplie de fumée, si large et si longue qu’on n’en voyait pas la fin ; il en sortait tant de chaleur qu’Owen ne put aller plus loin. Ce sont les bains, dirent les démons en le forçant à entrer., La maison était pleine d’une quantité innombrable de fosses remplies de métaux en fusion ; des gens y étaient plongés, les uns jusqu’au sourcil, les autres jusqu’aux yeux, jusqu’aux lèvres, jusqu’au cou, jusqu’à la poitrine, jusqu’au nombril, jusqu’aux cuisses, jusqu’aux genoux ; les uns étaient pris par le pied, d’autres par la main ; tous pleuraient et criaient. Ensuite Owen fut conduit sur une montagne où une multitude d’êtres humains semblaient attendre la mort en tremblant ; ils marchaient vers l’Aquilon, et tout à coup un tourbillon vint qui les renversa eux, les démons et le soldat, et les jeta sur un autre côté de la montagne dans un fleuve fétide et très froid, et chaque fois que les damnés essayaient d’en sortir, les démons les y replongeaient. Comme il l’avait fait dans tous les supplices précédents, il suffit à Owen d’invoquer le nom de Jésus pour se retrouver sur l’autre rive.

Puis les démons le traînèrent vers le sud, et il vit devant lui une flamme à senteur de soufre qui montait comme d’un puits, et des êtres des deux sexes, nus et enflammés, qui jaillissaient en l’air comme des étincelles et retombaient dans le puits quand la violence du feu diminuait. Les démons dirent à Owen que c’était l’entrée du puits de l’enfer, leur habitation, et que, s’il y pénétrait, il n’en sortirait jamais. Comptant sur le secours de Dieu, le soldat ne voulut pas retourner en arrière et fut précipité dans le puits ; celui-ci s’élargissait à mesure qu’Owen descendait, et au milieu de ses souffrances il faillit oublier le nom du Sauveur. Aussitôt qu’il l’eut prononcé, il se trouva sain et sauf à côté du puits. D’autres démons s’emparèrent de lui et dirent que leurs compagnons lui avaient menti, que ce n’était pas là l’enfer, mais qu’ils allaient l’y conduire.

Ils arrivèrent à un fleuve large et fétide couvert de flammes de soufre et rempli de démons. Sur le fleuve était un pont[19]. « Il faut que tu le passes », lui dirent les diables, « et nous mettrons en mouvement vents et tourbillons qui te projetteront dans le fleuve, et nos compagnons te plongeront dans l’enfer ». Le pont était glissant, étroit, grêle, très haut dans l’air. Le soldat s’y engagea courageusement ; il trouva le pont ferme sous ses pieds et, plus il montait, plus le pont s’élargissait, en sorte qu’au bout de très peu de temps il aurait pu recevoir quinze chars de front. Les démons, qui ne pouvaient pas aller plus loin, se tenaient au pied du pont, guettant sa chute. En le voyant traverser librement, ils remplirent l’air de leurs clameurs ; ils jetèrent après lui leurs crocs. Owen allait toujours et la largeur du pont croissait au point que l’on n’en voyait plus les bords.

Alors le soldat continua à s’avancer jusqu’à ce qu’il vit un grand mur qui montait du sol dans l’air, mur d’une belle structure, où brillait une porte de divers métaux ornée de pierres précieuses. Comme il en était encore à un demi-mille, la porte s’ouvrit et une odeur se répandit, plus suave que tous les aromates du monde. Et comme il attendait à pénétrer par la porte plus brillante que le soleil, une procession en sortit avec des croix, des bannières, des rameaux de palmes d’or, telle qu’on n’en avait jamais vu. Il y avait là des gens de toute classe, de tout âge, des deux sexes, des archevêques, des évêques, des abbés, des moines, des chanoines, des prêtres et des clercs revêtus des habits de leur ordre ; tous, tant clercs que laïcs, portaient les vêtements sous lesquels ils avaient servi Dieu dans le monde. Tous accueillirent Owen avec joie et vénération pendant que retentissait un concert d’une harmonie inouïe. La porte franchie, la procession se rompit et deux hommes qui semblaient des évêques emmenèrent le soldat pour lui montrer les merveilles de leur patrie ; la lumière y était si pure que le soleil n’y aurait pas plus brillé qu’une lampe ; ce n’étaient que prés verdoyants, fleurs et fruits variés, et arbres merveilleux ; une multitude d’hommes et de femmes s’y promenaient et prenaient plaisir à se visiter ; des chœurs chantaient les louanges de Dieu ; certains vêtements étaient d’or ; d’autres, verts, pourpres, bleus, blancs ; les rois avaient des palmes d’or à la main et des couronnes sur la tête ; il n’y avait en ce pays ni froid, ni rien qui pût faire du mal. Les pontifes dirent à Owen que c’était là le Paradis terrestre, d’où Adam avait été chassé à cause de sa désobéissance. Lorsque les pécheurs ont passé par les tourments et sont délivrés de leurs péchés par les mérites de Jésus-Christ, c’est dans ce lieu de repos qu’ils viennent demeurer, avant de monter partager l’allégresse des saints. Après ces explications, les évêques conduisirent Owen sur une montagne et le firent regarder en haut. Il vit comme de l’or en fusion. « C’est là », dirent-ils, « qu’est la porte du Paradis, c’est par là qu’entrent ceux d’entre nous qui sont élevés au ciel. Dieu nous nourrit chaque jour du mets céleste ». Et comme ils finissaient de parler, il descendit du ciel comme une flamme qui couvrit tout le pays, et, se divisant par rayons, descendit sur chaque tête et sembla y pénétrer tout entière. Elle atteignit Owen et il sentit une telle douceur dans son cœur et dans ses membres qu’il ne savait s’il était vivant ou mort. Mais cette heure passa vite. « Voilà la nourriture », dirent les évêques, « que Dieu nous donne une fois par jour ». Puis ils pressèrent Owen de retourner par la route qu’il avait prise et de mener désormais une vie sainte et sans tache. Mais lui, effrayé, suppliait les pontifes de ne pas le forcer à quitter une si grande béatitude pour retourner aux misères du monde. « C’est l’ordre de Dieu », répondirent-ils, « Lui seul sait ce qui convient à chacun ». Et, bon gré mal gré, triste, mais intrépide, Owen repartit par le chemin qu’il avait déjà suivi.

Sur sa route, les démons qui essayaient de l’effrayer s’évanouissaient dans l’air à son aspect. Quand il fut à la salle où les mauvais esprits l’avaient attaqué pour la première fois, les quinze hommes lui apparurent, louèrent Dieu et félicitèrent Owen de sa victoire ; ils lui annoncèrent qu’il était pur de tout péché et le pressèrent de se rendre le plus tôt possible à l’entrée, de peur que le prieur ne le trouvât pas et refermât la porte. Owen, après avoir reçu leur bénédiction, reprit son ascension, et au moment même où le prieur ouvrait la porte, le soldat apparut ; on le conduisit avec de grands transports de joie dans l’église et il y resta en prières pendant quinze jours. Au bout de ce temps, il reçut sur l’épaule le signe de la croix et partit pour le tombeau du Christ à Jérusalem. Revenu de pèlerinage, il alla demander conseil au roi Etienne, désireux qu’il était de passer le reste de sa vie dans les ordres saints et de combattre pour le Roi des Rois. Or, à ce moment,

Gervais w, abbé de Luda (Louth), avait obtenu du roi Etienne l’autorisation de bâtir un couvent en Irlande. Gervais y envoya un de ses moines nommé Gilbert(1), avec quelques autres, pour fonder le monastère. Gilbert alla se plaindre au roi qu’on l’envoyât dans un pays dont il ne connaissait pas la langue. Le roi lui donna comme interprète le soldat Owen. Toutes les fois que Gilbert était seul avec Owen, il lui parlait de son voyage au purgatoire de saint Patrice. Owen finit par le lui raconter sous le sceau du secret. Gilbert refit souvent devant plusieurs personnes le récit d’Owen. Une d’entre elles doutait de la réalité du voyage et supposait qu’Owen était tombé en extase et que son voyage n’était qu’une vision. Gilbert, à l’appui de la véracité d’Owen, cita l’exemple d’un moine qui avait été enlevé de son lit par les diables et retenu par eux pendant trois jours ; à son retour on l’avait trouvé sérieusement blessé et il avait raconté les tourments qu’il avait subis.

Le moine de Saltrey, reprenant la parole, ajoute qu’il consulta deux abbés d’Irlande sur ces choses ; l’un lui affirma que tout était vrai, mais en ajoutant que beaucoup étaient entrés dans le Purgatoire de saint Patrice qui n’étaient point revenus. Tout récemment encore, un évêque nommé Florentien(3), descendant de saint Patrice (* compagnon de saint Malachie(5), dit à H. de Saltrey que le purgatoire était situé dans son diocèse et que les pèlerins qui en revenaient restaient pâles et languissants. Telle est la première rédaction complète de la légende du Purgatoire de saint Patrice. D’après les indices chronologiques que l’on peut tirer des personnages cités, l’ouvrage du cistercien de Saltrey a dû paraître vers 1189, peu après la translation solennelle à Down des reliques de saint Patrice {*K II se trouve dans un grand nombre de manuscrits qui datent du XIIe au XVe siècle ; mais il n’en a point été publié de texte critique(7). Le texte latin a été [20] [21] [22] [23] [24] [25] [26]

GODALH, GEORGES.

traduit en anglais dès la fin du XIIIe siècle n) ; en français, ÏEspurgatoire saint Patriz de Marie de France w n’est qu’une version en vers du texte latin ; il existe de plus une version française en prose(3) et six autres versions françaises en vers l4). La première traduction française imprimée (5) se place vers 1480 ; une secondel,) parut à Lyon en 1506. On connaît une traduction italienne de ce dernier ouvrage (7).

Le traité d’H. de Saltrey, non seulement fut bien accueilli des chroniqueurs et des hagiographes, mais encore servit de modèle à un grand nombre d’ouvrages analogues dont quelques-uns ont la forme de récits faits par des pèlerins(8) après un séjour au Purgatoire de saint Patrice. Le plus ancien récit de ce genre est attribué à un français nommé Godalh ; il est conservé dans un manuscrit de Turin du XIIIe siècle et remonterait à l’année 1248 ; il est inédit(9). On n’a encore publié que des fragments des visions du hongrois Georges, fils du comte de Krisszafân(10), en 1353 ; de [27] [28] [29] [30] [31] [32] [33] [34] [35] [36]

Louis de Sur(1), en 1358 ; de Louis de France(a>, en 1460. Mais nous connaissons en entier le Voyage au Purgatoire de saint Patrice par Raymond de Perelhos(3). Celui-ci, qui s’intitule chevalier de Rhodes et chambellan du roi de France, se rendit en 1397, avec une suite de vingt hommes et trente chevaux, à l’île du Lac Derg, comme en témoigne un sauf-conduit qui lui fut accordé par le roi Richard III. Raymond rédigea en catalan une relation de son voyage, que O’Sullevan traduisit en latinl4) ; on n’a pas conservé la version catalane, mais c’est une version limousine qui nous en est parvenue dans un manuscrit de la fin du XVe siècle. En réalité, ce récit est pour une bonne partie une adaptation de la vision d’Owen. En 1409, William Staunton, du diocèse de Durham, entrait dans le Purgatoire, à huit heures du matin, le premier vendredi après la fête de l’Exaltation de la Croix ; il nous a laissé une relation en anglais de son pèlerinage(5). Les traces de l’ancienne histoire y sont très effacées, bien que beaucoup de détails soient encore reconnaissables ; mais Staunton semble avoir eu pour but de se moquer des modes extravagantes et de flétrir les vices de son temps. En 1411, un soldat et baron hongrois, nommé Laurent Rathold de Pâszthô, se rendit à l’ile du lac Derg, et sa visite est racontée dans un manuscrit latin de la fin du XVe siècle par Jacobus Yonge, notaire impérial à Dublin(#). Les traits primitifs de la légende sont très modifiés ; il n’est pas question du Paradis terrestre ; mais Rathold spécifie qu’il a réellement vu et n’a pas été dupe de son imagination. En même temps que le baron hongrois, Antonio Mannini se faisait enfermer dans le souterrain et il a raconté de son côté son voyage et ses impressions<7). En 1473, la légende du Purgatoire de saint Patrice pénétra dans le roman italien Guerino ü Meschino (8), qui fut traduit en français dès 1491, [37] [38] [39] [40] [41] [42] [43] [44] , MERLIN.

par Jean de Cuchermois, a réédité à Troyes en 1629 w. C’est l’histoire, au temps de Charlemagne, d’un héros tueur de géants, qui est à la recherche de ses parents et auquel le Pape conseille d’aller au Purgatoire de saint Patrice pour en avoir des nouvelles ; l’adaptation de la légende est très fantaisiste. Vers 1495, la légende du Purgatoire fut mise en vers latins(ï). Mais le renouvellement le plus singulier de la tradition populaire est dû à Etienne Forcatel(S), qui, en 1589, mit en rapport le Purgatoire de saint Patrice avec le cycle arthurien. Arthur, raconte-t-il, travaillait à détruire les superstitions et avait fort à faire, surtout en Irlande, où il n’y avait pas longtemps que saint Patrice avait apporté le christianisme. Au nord de l’île, il vit la caverne qui conduisait au séjour des morts et d’où, après s’être purifiées, les âmes s’envolaient joyeuses jusqu’au ciel. D’après des livres de Merlin, Arthur fut rappelé par Gauvain qui lui conseilla de ne pas explorer à fond l’antre horrible où l’on entendait le fracas d’une cascade qui émettait une odeur de soufre et où résonnaient des voix lugubres qui semblaient privées de corps. L’enchanteur Merlin, consulté sur l’origine du souterrain, après avoir avalé le cœur d’une taupe fraîchement tuée, déclara que c’était Ulysse qui l’avait jadis creusé(4). Ainsi, peu â peu, la légende pieuse du cistercien devenait matière à récits romanesques. C’est dans le premier tiers du XVIIe siècle qu’elle reprit une vie nouvelle ; la vision fut ramenée à ses origines, mais elle s’agrémenta d’une histoire de brigand qui devait ne pas [45] [46] [47] [48] être le moindre élément de son succès. En 1627, un auteur dramatique espagnol, élève, biographe et panégyriste de Lope de Vega, Perez de Montalvan[49], publia à Madrid, dans le livre intitulé Vida y Purgatorio de S. Patricio, un remaniement complet de la légende du soldat Owen. Montalvan utilisa d’abord la rédaction du cistercien de Saltrey, que Messingham avait publiée dès 1624 dans son Tractatus de Purgatorio S. Patricii[50] en la combinant avec un ouvrage de David Roth, évêque d’Ossory[51], né en 1573, mort eri 1660 ; puis le compendium, de Philippe O’Sullevan, dont nous avons déjà parlé ; enfin divers documents antérieurs, reproduction, résumé ou imitation de l’ouvrage de H. de Saltrey : les Chroniques de Matthieu Paris, mort vers 1259[52] ; le Polychronicon de Ralph Higden[53], mort vers 1363 ; la Légende Dorée de Jacques de Voragine[54], mort en 1298, et l’Histoire orientale de Jacques de Vitry[55], mort en 1240. Mais l’intérêt de la légende n’est plus la description du Purgatoire, de l’Enfer et du Paradis terrestre ; il est presque entièrement concentré dans la vie d’Owen, que Montalvan appelle Ludovico Enio[56]. Ce n’est plus une étude d’eschatologie, mais une sorte de roman pieux. Dans l’adresse au lecteur, Montalvan s’exprime ainsi : « Je te remets le Purgatoire de saint Patrice, où, d’après moi, tu trouveras un amusement dévot qui te divertisse et te terrifie, un roman religieux qui te tente et te corrige et une histoire merveilleuse qui en même temps te châtie et te charme[57] ». Le premier chapitre (fo 1-28 ro) traite de la vie et des miracles de saint Patrice. Le second chapitre (fo 28 ro-37 vo) est consacré à la destinée de l’âme après lu mort. Le troisième (fo 37 vo-46 vo) décrit lu situation du Purgatoire terrestre et donne les raisons pour lesquelles Patrice en demanda la révélation à Dieu. Llle est située au milieu d’un lac profond dont les eaux ont la propriété d’accroître la chaleur naturelle de l’estomac ; un des côtés de l lle est environné de pins, de chênes et de lieux montagneux et déserts ; au bas, s’étend une belle vallée ; entre les deux, est bâti le monastère des chanoines réguliers de saint Augustin ; aux extrémités, se trouve un enclos de deux cents pas environ de long et de large ; au milieu de cet enclos, on voit un puits, et, dans un coin plus retiré, l’entrée basse et étroite de la caverne, avec une petite fenêtre à droite et une grosse roche devant. Saint Patrice obtint que Dieu lui fit connaître l’entrée de la caverne parce qu’il ne pouvait réussir à convaincre les Irlandais de l’existence de la vie future. Le chapitre IV (fo 46 vo-52 ro) cite les autorités et donne les raisons de croire au Purgatoire de saint Patrice. Dans le chapitre V, les cérémonies qui précèdent l’entrée au Purgatoire sont décrites (fo 52 ro-59 ro). C’est seulement au chapitre VI (fo 59 vo-79 vo) que commence l’histoire de Louis Enius[58]. Celui-ci était né en Irlande ; mais ses parents furent obligés de quitter le pays et s’établirent à Toulouse. Sa mère mourut en le mettant au monde ; dès son jeune âge, il fit preuve d’un mauvais naturel et d’inclinations perverses ; à l’âge de quinze ans, il perdit son père qui, par ses conseils ou sa sévérité, arrêtait son libertinage. Libre désormais, il dissipa rapidement dans la débauche et le jeu les biens considérables qu’il avait reçus de ses parents. Il dut bientôt recourir à l’emprunt, et, si on le refusait, il prenait par violence ce qu’il n’avait pu obtenir de bon gré. La nuit, il exerçait le métier de tire-laine, et si quelqu’un, pour défendre son

argent(1>, lui faisait quelque résistance, il lui ôtait la vie. Les ministres de la justice dissimulèrent assez longtemps ses crimes, par considération pour sa famille. Un jour, un alguazil(2) joua avec lui et gagna quantité d’or et d’argent. Louis le chargea d’injures et lui demanda la courtoisie qu’il exigeait d’ordinaire au jeu quand il perdait ; l’alguazil ne voulut lui donner que quatre écus. Louis, éteignant la lumière, se jeta sur lui ; il lui arracha, non seulement ce qu’il avait perdu au jeu, mais aussi ce que l’autre avait apporté pour jouer, et le quitta en le raillant. L’alguazil s’en alla, le lendemain, trouver le corregidor(3) pour lui demander justice. Louis, averti par un de ses amis qu’on allait le poursuivre, prit la résolution de se retirer dans un monastère situé à huit milles<4> de Perpignan, et y demeura secrètement en la compagnie du Père confesseur de la communauté. Or, il y avait dans ce monastère une de ses cousines germaines avec laquelle il avait été élevé. Louis en devint amoureux, et comme, avec la permission de la Mère Abbesse, il rencontrait aisément sa cousine à la grille, il lui fit la cour. Théodosia, c’est le nom d’emprunt sous lequel l’auteur dissimule sa naissance, écouta les paroles trompeuses de son cousin qui lui persuada de lui faciliter l’entrée dans le monastère, la nuit, avec les clefs ou d’autres pareilles qu’il demanderait, et ainsi ils raviraient les joyaux de la maison et prendraient leur route vers l’Espagne, où ils pourraient se marier sans crainte d’être reconnus.

Théodosia se laissa convaincre. Avec l’aide de deux de ses amis, Louis entra dans le monastère, en emporta de nuit toutes les richesses, et emmena Théodosia. Etant montés chacun sur un des deux chevaux qu’il avait fait tenir prêts, ils se trouvèrent à douze grandes lieues de là avant que le jour parût, et qu’on se fût aperçu de leur fuite et de leur larcin. Les deux amants se retirèrent à Valence où ils se reposèrent quelque temps. Théodosia n’était pas heureuse ; elle n’avait plus la tranquillité qu’elle trouvait en sa petite cellule et était privée de la compagnie de ses religieuses. Elle avait du repentir de sa lâcheté et, d’autres fois, du désespoir d’obtenir le pardon de son crime. Louis ne fut pas long à dissiper par la gourmandise, l’amour et le jeu, les richesses de leur vol. Et ne sachant plus de quel bois faire flèche, il contraignit la belle Théodosia à trafiquer de ses charmes, l’obligeant de feindre qu’elle était sa sœur et non sa maltresse. Théodosia résista longtemps aux desseins dénaturés de son cousin, puis, forcée par la nécessité,

[59] [60] [61] [62] elle consentit à s’abandonner à tous ceux qui la courtisaient, pour leur argent.

Pendant dix ans, elle courut ainsi toute l’Espagne, jusqu’à ce que, touchée de la grâce de Dieu, elle prit la résolution d’aller trouver secrètement un homme vénérable qui était dans une petite bourgade d’Andalousie et elle lui fit une confession générale de sa vie. Le religieux l’introduisit comme servante dans un monastère de l’endroit, où il avait deux sœurs ; Théodosia y resta, malgré les efforts de Louis pour l’en retirer, et, pendant six ans, y fit une pénitence austère et exemplaire, jusqu’à ce qu’elle mourût, laissant aux religieuses l’exemple de la vie la plus exemplaire qu’on eût encore vue.

Durant huit années après la retraite de Théodosia, Louis continua ses larcins et ses meurtres. Au bout de ce temps, il retourna à Toulouse, où personne ne le reconnut. Comme il y avait là une compagnie de soldats[63], il s’enrôla parmi eux, plutôt dans le dessein de suivre impunément le cours de ses infamies qu’avec le désir de se battre pour le roi de France, dont il était vassal. Comme il était courageux et hardi, il fit des exploits si généreux qu’il s’acquit en peu de temps la réputation d’un vaillant capitaine, et, le lieutenant de sa compagnie étant mort, il lui succéda par son propre mérite, et profita de l’autorité de sa situation pour continuer ses méfaits. Un jour qu’il avait fait marché pour un assassinat, il alla se poster, à la brune, dans l’endroit on devait passer son homme ; comme il l’avait devancé, il attendit, et tout à coup il lui sembla que quelque chose voltigeait au-dessus de son chapeau. Levant les yeux, il vit un papier qui se maintenait dans l’air ; il essaya de l’attraper, et se trouva par cette poursuite éloigné en peu de temps du lieu où il s’était mis en embuscade ; cependant, l’homme qu’il guettait était passé et rentré chez lui. Il resta le reste de la nuit et le jour à méditer sur cet événement extraordinaire. Le soir, il se rendit au même endroit et fut témoin du même prodige. La troisième nuit, il finit par attraper le billet. A peine l’eût-il entre les mains qu’il aperçut près de lui une croix éclairée d’une lampe, et, au bas, ces mots écrits en français : Ici a été tué un homme, priez Dieu pour lui[64]. IV retourna sur ses pas, tout bouffi de colère, et, ouvrant le papier, il y vit peint un homme semblable aux représentations que l on met sur les corps au jour des funérailles, avec cette inscription en gros caractères : Je suis Louis Enius. Il fut pris de défaillance et dut, pour ne pas tomber, s’appuyer à la muraille. Puis, rappelant ses forces, il s’en alla,

chancelant, dans sa maison, où il resta huit jours sans sortir, rêvant et considérant ce papier qu’il avait lu. « Qui doute », se dit-il, « que ceci me donne à entendre que ma mort approche(1> ? Mais comment expier des fautes aussi grandes ? » Louis se décida à se rendre à Rome, résolu à faire sa confession générale au grand pénitencier de Sa Sainteté. En entrant dans l’église de saint Paul, qui est à environ un quart de lieue de Rome, sur la chaussée d’Ostie, il entendit prêcher un saint religieux de l’ordre des Prêcheurs qui criait à tue-tête que personne ne perdit courage, quand même il aurait vécu mille années en offensant Notre-Seigneur ; que lui-même avait été plus grand pécheur qu’eux tous et qu’il ressentait le plus grand contentement du monde quand il voyait entrer dans sa cellule quelque pécheur notable, repentant de ses fautes.

Le sermon achevé, Louis alla trouver le Père et lui fit par écrit . une confession complète de ses péchés. Il était si plein de douleur que ses larmes baignaient le sol et qu’il pouvait à peine remuer la langue(,). Le religieux lui imposa une pénitence médiocre, jugeant que la douleur qu’il témoignait était suffisante pour le purger de tant de crimes qu’il avait commis ; il lui donna l’absolution et la communion. Louis, pénétré de joie, ne s’occupa plus qu’à rendre grâce à la bonté de Dieu et à faire des lectures pieuses. Un jour, il lui tomba entre les mains un livre qui traitait de l’état des âmes du Purgatoire. Rempli de crainte à l’idée des tourments qui l’attendaient en l’autre vie, il eut l’intention d’aller trouver le pénitencier pour qu’il lui imposât une pénitence proportionnée à la grandeur de ses foutes, qui lui servit de purgatoire en ce monde. Un soir, il se rencontra avec quelques personnes qui discouraient de l’état des âmes des défunts, et il entendit dire tant de bien du purgatoire de saint Patrice qu’il prit dessein de faire le voyage d’Hibernie, poussé aussi par le désir de revoir le lieu de sa naissance ; si bien qu’après avoir rendu ses hommages aux saintes reliques que possède la ville de Rome, il en sortit promptement, et, une fois arrivé en Hibernie, s’informa de l’endroit où était le purgatoire privilégié.

Il alla trouver l’évêque qui, après de nombreuses observations, lui donna des lettres pour le prieur du monastère auquel il commanda que Louis fût un des premiers auxquels on permettrait l’entrée de la caverne. Arrivé au monastère, Louis s’y prépara pendant neuf jours ; puis, avec le cérémonial accoutumé, fut conduit à la caverne.

[65] [66]

Montalvan ajoute que le prieur ordonna à Louis, lorsqu’il fut de retour, de faire devant tous une relation de son voyage ; et c’est ce récit qu’il transcrit de point en point (ch. VII, f° 80 r°-86 v®). C’est un résumé de la rédaction de H. de Saltrey. Louis suit une épaisse muraille, puis rencontre une roche qui ferme le chemin ; une petite lueur passant par une fente du rocher lui permet de reconnaître la direction du chemin. En se munissant du signe de la croix, il poursuit sa route et arrive à l’extrémité du petit sentier où il sent la terre mouvante sous ses pieds. Là il s’endort dans les ténèbres. Il est réveillé par un coup de tonnerre, le sol s’abaisse, et il tombe de deux piques de haut. Il prononce la formule que lui a apprise le prieur : « Jésus, fils de Dieu vivant, faites miséricorde à moi, pécheur (1> », et voit la caverne plus ouverte, mais toujours aussi profonde et obscure. Un second coup de tonnerre fait écrouler un quartier de roche et il manque d’être enseveli sous les débris ; mais il se trouve miraculeusement dans une belle salle voûtée et soutenue par des colonnes comme un cloître. Il voit venir à lui douze hommes, vêtus de blanc, portant chacun une croix sur la poitrine, et qui avaient l’air de religieux. Celui qui semblait être le supérieur annonce à Louis les tourments qu’il souffrira et les ruses qu’emploieront les démons pour le faire retourner en arrière. Il l’invite à se prévaloir comme d’un bouclier divin du doux nom de Jésus, qui le délivrera de tous les dangers. Puis les douze hommes prirent congé de lui en l’embrassant et en lui promettant de prier pour lui.

Soudain, un bruit effroyable retentit et une multitude de démons hideux et difformes apparaissent. Après un discours ironique où ils le remercient de ce qu’il a fait pour eux, ils le précipitent dans un brasier, mais à peine Louis a-t-il demandé la miséricorde de Dieu que tout disparaît. Puis (ch. VIH, f° 86 v°-103 r°) il est entraîné dans des caves où se lamentent les âmes, et de là dans une plaine immense où des hommes et des femmes, sur le ventre, attachés à terre par des clous de fer rouge, étaient rongés par des lézards venimeux ; puis dans une seconde plaine, où des dragons arrachaient les veines et les artères avec des guipoirs d’acier ® et versaient du plomb fondu dans les blessures ; d’autres pécheurs étaient plongés au milieu de monceaux de neige au haut desquels de nombreux bourreaux leur appliquaient des aiguilles pénétrantes par tout le corps.

Il y avait aussi une roue munie de clous à crochets et de chaînes ardentes où étaient attachés les damnés par les pieds, et leur tête

[67] [68] traînait à terre sur des foyers de soufre, et quand les démons mettaient la roue en mouvement, les pointes déchiraient les corps en lambeaux. Plus loin, Louis remarqua une maison fort élevée d’où sortaient des flammes infinies ; c’était des bains de glace et de neige où étaient plongés jusqu’au cou ceux qui avaient trop aimé les odeurs profanes ; des démons regardaient aux fenêtres, prêts à frapper de leurs lances ceux qui osaient lever la tête ou les mains. Les démons transportèrent Louis sur une haute montagne d’où il vit une plaine plus large que les précédentes, où étaient des grils hérissés de menues pointes d’acier[69], de grandes roues garnies de couteaux, un puits de feu d’où des âmes rebondissaient, poussées par la violence des flammes et des fumées, et retombaient au fond. D’un autre côté, on voyait en bas un fleuve large comme la mer ; « c’était », dirent les démons, « le fleuve de l’enfer » ; un vent impétueux soulevait les âmes jusqu’au haut de la montagne d’où elles se précipitaient dans le fleuve avec des mugissements épouvantables. Transporté de l’autre côté du fleuve par la vertu du nom de Jésus, Louis aperçoit une belle vallée où était une maison où personne ne semblait habiter parce qu’elle était en ruines[70]. Mais les démons, revenant plus nombreux que jamais, emmènent Louis dans une plaine où la terre était embrasée comme une fournaise de soufre ; des personnes y étaient entassées, embrochées, frappées avec des torches de poix, mais il y avait en leur visage une certaine allégresse, et elles louaient le Seigneur ; Louis pensa que c’était le purgatoire, et il y reconnut le religieux dominicain qui avait entendu sa confession et était mort le même jour ; il vit aussi une de ses cousines qui était là pour avoir été vaniteuse dans les fêtes et avoir pris soin de son visage ; il y avait aussi quantité de religieux, de prêtres, de prélats, de rois et de gens de toute condition. Les démons l’assurèrent que tout ce qu’il avait vu jusqu’ici n’était rien en comparaison de ce qu’il allait voir et qu’ils l’avaient trompé en lui disant que c’était là l’enfer. Alors ils le menèrent au bord d’un fleuve qui, d’un côté, était couvert de feux et de flammes, et, de l’autre, était rempli d’une boue noirâtre et puante. Au lieu de poissons, il y avait des monstres marins aux écailles munies de pointes aigües ; aucune place n’était vide ; tout était rempli de supplices et d’âmes tourmentées. Après que Louis eut fait sa prière, les démons l’enlevèrent sur un pont de glace, très élevé, si long qu’on n’en pouvait voir les limites, si étroit qu’à peine y pouvait-on poser les deux pieds ensemble. Les yeux baissés vers ses pieds, pour ne point voir les monstres qui l’appelaient et lui montraient les supplices qui l’attendaient, Louis résolut de passer outre, à la garde de Dieu. Le pont était glissant, fait en bascule, sans aucun garde-fou, et battu d’un vent impétueux. Pour lui donner quelque idée de ce à quoi il s’exposait, les démons ordonnèrent que quelqu’un passât le pont avant Louis. A peine le malheureux eut-il été précipité dans le fleuve qu’il fut frappé à coups de hache embrasée, qu’on lui arracha un bras, qu’il fut plongé dans une chaudière bouillante et lancé comme une pelote d’un démon à l’autre. Sans se laisser effrayer par cet horrible spectacle, Louis fit plusieurs fois le signe de la croix et se mit en marche ; Dieu l’aida en ce danger ; à chaque pas le pont s’élargissait sans que le vent le renversât ni que les pieds lui tournassent. Les démons tentèrent en vain de le pousser et de le précipiter dans l’abîme ; à l’invocation du nom de Jésus, ils disparurent avec des cris et des hurlements épouvantables.

Louis (ch. IX, fo 103 vo-118 ro) se trouva alors dans une belle vallée pleine de fleurs. Au milieu de ces agréables jardins s’élevait une maison d’une grandeur étonnante dont la porte était d’or très fin, rehaussé de pierres précieuses aussi brillantes que le soleil. Comme Louis s’approchait et n’était plus qu’à un mille de distance, la porte s’ouvrit et il s’en exhala une odeur plus suave que tous les parfums et les aromates du monde.

Lorsque Louis se fut approché davantage, une procession bien réglée en sortit. Après des enseignes d’or, des torches de cire blanche, venaient un nombre infini de gens de tout état et de toute condition : enfants, femmes, mariés, célibataires, religieuses, demoiselles, religieux[71], prêtres, évêques, archevêques, cardinaux, rois et pontifes, portant chacun la marque de sa dignité et de sa condition sur une petite tunique de toile d’argent ; au milieu était un chœur d’anges, les uns tenant des papiers de musique, d’autres des instruments variés, et ils formaient un concert divin ; après trois chants en l’honneur de Dieu et de sa Mère bénie, s’adressant à Louis, ils l’emmenèrent au milieu d’eux, et deux archevêques s’avancèrent pour l’accueillir et l’embrasser. A peine furent-ils entrés par la porte par où ils étaient sortis que Louis se sentit plein de joie ; autour de lui, tout était rempli d’une lumière glorieuse. Tous les êtres qu’il voyait vivaient dans une union complète de volontés. L’un des deux archevêques, qui était saint Patrice, le prit par la main et lui montra plusieurs saints et saintes auxquels il avait eu une dévotion particulière et aussi quelques-uns de ses proches, puis il lui dit qu’il était arrivé au séjour des bienheureux qui voient Dieu face à face ; mais qu’il ne pouvait pas avoir ce privilège parce que les yeux corporels n’ont pas la force de voir un objet infini. Il lui recommanda de mener une vie pure pour n’avoir pas à souffrir après sa mort les supplices dont il avait ressenti quelque atteinte légère. Ce fut une grande douleur pour Louis de ne pouvoir rester dans ce séjour de délices ; mais saint Patrice le prit par la main et, le poussant hors de la porte, la referma promptement. Louis reprit la route qu’il avait déjà parcourue, mais les démons le voyant resplendissant et purifié de tous les péchés passés s’écartaient devant lui et semblaient s’enfuir comme honteux de leur défaite. Louis revit la salle et les douze religieux ; quand il arriva au bout du sentier, il ne trouva aucun vestige de porte. Il adressa ses vœux au ciel et demanda le secours de saint Patrice. A peine la prière était-elle finie qu’un coup de tonnerre retentit, et que Louis, en tâtonnant, trouva comme les degrés d’un puits par où il put remonter jusqu’à la première cave. A peine était-il là qu’il l’entendit ouvrir par le prieur qui venait le chercher en grande procession et qui le conduisit à l’église. Puis il se reposa pendant neuf jours dans une petite cellule, et alors il témoigna avec tant de larmes et d’instance le désir qu’il avait de revêtir l’habit des religieux que le prieur consentit à sa demande.

Voilà, ajoute Montalvan, la relation de Ludovico Enio, qui fut soldat du roi de France et religieux du même couvent de saint Patrice. Tous ceux qui sont entrés dans cette cave disent la même chose, selon beaucoup de papiers manuscrits qu’ont cette église et d’autres églises de ce royaume, en différentes langues. Comme on le voit, la légende rédigée par H. de Saltrey a été singulièrement renouvelée par Montalvan. La seconde partie, qui est le récit du chevalier Owen, ne présente pas de grandes différences avec la rédaction primitive. Montalvan ajoute l’épisode de la roche qui ferme le chemin ; l’épisode du tourment par la neige ; l’épisode de la maison en ruines ; l’épisode du confesseur et de la cousine dans le Purgatoire.

Certains détails de H. de Saltrey n’ont pas été repris par Montalvan ; l’épisode des bains dans les métaux en fusion, l’épisode de la nourriture céleste.

D’autres détails ont été modifiés par Montalvan ; dans la salle soutenue par des colonnes et ressemblant à un cloître, ce sont quinze hommes et non douze qui apparaissent à Louis ; le pont est un pont de glace ; les deux hommes qui semblaient des évêques sont des archevêques et l’un d’eux est saint Patrice ; Owen, au lieu de partir comme croisé pour la Terre-Sainte, reste au couvent.

Quant à la première partie, on n’en a pas trouvé la source ; on pourrait la chercher soit dans la tradition populaire, soit dans l’œuvre du maître de Montalvan, Lope de Vega ; mais elle peut être née simplement dans l’imagination fertile de Montalvan qui composa trente-six drames et douze actes sacramentaux. En tout cas, les nombreux crimes attribués par Montalvan à Louis Eunius ne sont pas mentionnés en détail par H. de Saltrey et ne rentrent guère dans les catégories générales énumérées par Matthieu Paris : incendies, rapides, violations d’église, usurpations de biens ecclésiastiques.

La légende de Louis Eunius, ainsi fixée, eut un grand succès en Espagne ; on en cite les éditions suivantes : Madrid, 1627, 1628, 1635, 1636, 1656, 1657, 1739 ; Lisbonne, 1646 ; Séville, 1695, 1696 ; Ségovie, 1780 ; Valladolid, 1787. M. Gaidoz signale une édition de 1764a). Elle fut mise sur la scène par Lope de Vega^, et, avant 1635, par Calderon de la Barca(3). Elle fournit le sujet de deux publications populaires : La Cueva de San Patricio, Madrid, 1764, et la Relation ei Purgatorio de San Patricio, Cordoba (1850 ?).

Le livre de Montalvan fut traduit en français, dès 1637, à Bruxelles(4) ; mais la traduction qui eut le plus de succès fut celle du Père François Boüillon, des Frères Mineurs(s>. La première édition parut à Avignon(6) en 1642 (ï) : on trouve citées les éditions suivantes : Paris, 1643, 1651, 1665, 1676 ; Lyon, 1674, 1699 ; Rouen, 1682, 1701 ; Troyes, vers 1730, 1738. J’ai eu entre les mains une édition de Rouen<7). En voici le titre exact : Histoire de la Vie et [72] [73] [74] [75]

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du Purgatoire de S. Patrice, archevesque et primat d’Hibernie, avec plusieurs oraisons mises en François par le R. P. François Boüillon, de l’ordre de S. François et bachelier en théologie. Nouvelle édition’ revûe et corrigée, à Rouen chez J. F. Behourt, rue Ecuyere, à l’imprimerie du Levant. Avec permission. L’approbation placée à la fin du volume est datée du 3 novembre 1751, et la permission du Roi du 12 février 1752. C’est un in-16, sur mauvais .papier, de 141 pages numérotées, plus le‘titre, une dédicace à Mm® Chariot, un avis au lecteur, l’approbation et la permission du roi : L’auteur explique ainsi la composition de son ouvrage : Mon cher lecteur, lorsque cette histoire est tombée en mes mains à la faveur de quelques personnes de mes amis, mon dessein n’étoit que d’en faire une simple version ainsi que j’en avois été prié, afin de satisfaire à la dévotion, ou curiosité de quelques-uns. Néanmoins ayant rencontré quantité de choses excellentes qui venoient à mon sujet, ès Auteurs dignes de créance qui traitent de cette même matière, j’ai été bien aise de t’en faire part. C’est ce qui m’a engagé de m’étendre davantage en certains endroits, que je ne pensois au commencement de mon ouvrage, et, en d’autres, de retrancher par discrétion ce qui sembloit choquer la vérité de l’Histoire, et ainsi je me suis donné plus de licence que ne souffre une traduction, non pas telle pourtant que je me sois éloigné de l’esprit ou du dessein de l’Auteur que j’avois en main dans l’Extrait que j’en ai fait, sinon en quelques circonstances qui ne convenoient pas et qu’il a fallu accorder avec les anciennes Histoires de Jocelin qui a fait la Vie de S. Patrice.

La traduction du P. Boüillon est assez exacte, pour une traduction du XVII® siècle ; elle n’omet rien ; mais elle ajoute quelques détails, et est parfois une paraphrase plutôt qu’une transcription du texte original. Nous avons noté ci-dessus dans l’analyse du livre de Montalvan quelques-unes des différences qu’elle présente avec la traduction littérale de l’espagnol ; le P. Boüillon a conservé les indications de lieu relatives à l’Espagne, mais il a remplacé par leurs équivalents français les noms d’alguazil et de corregidor. Le livre de Montalvan fut traduit en hollandais en 1668, et cette traduction fut encore rééditée en 1756. Ainsi, jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, les aventures extraordinaires de Louis Eunius eurent des lecteurs en Europea). Et, encore en 1735, un dominicain, »

thèques de Rouen, et M. Girard, directeur de la bibliothèque d’Avignon, ont bien voulu me renseigner sur les éditions que possédaient leurs bibliothèques. H. d’Arbois de Jubainville cite sans indication de lieu les éditions de 1643,1659,1665,1675,1676,1689,1752. Revue celtique, t. XXV, p. 358, note. (1) Uet Wonderlyck Leven van den grooten II. Patricius patriarch van Irlandt. Met de vreeselycke ende wonderlycke Historié van het Vaghevier van den selven Ileylïghen. Cf. Krapp, The legend o{ Saint Palrick’s Purgatory, p. 18-19. En Italie, on trouve au XVII® siècle un ouvrage anonyme : Teatro delle glorie e purgatorio di S. Palrizio, Bologna, 1657, in-4o, et, au XVIII® siècle, une Vita del prodigioso S. Patricio, Venise, 1757, in-12.

D. Brullaughan, publia un traité du Purgatoire de saint Patrice (1). Pourtant, dès la fin du XIVe siècle, le Purgatoire de saint Patrice n’est plus seulement considéré comme un endroit où l’on peut éprouver réellement les peines du Purgatoire ; c’est surtout un lieu privilégié où l’on a des visions de l’autre monde. On n’est plus au temps où Caesaire de Heisterbach (mort en 1240) pouvait écrire : <( Celui qui doute du Purgatoire, qu’il aille dans le pays des Scots, qu’il entre dans le Purgatoire de Patrice, et il ne doutera plus des peines du Purgatoire (2). Les pèlerins eux-mémes sont moins affirmatifs sur la réalité des tourments.

En 1394, sir William Lisle, chevalier de la chambre du roi d’Angleterre, visitait le sanctuaire du Lac Derg et racontait à Froissart ses impressions :

« Le Vendredy au matin, écrit Froissart*3), nous chevauchasmes ensemble, messire Guillemme de Lille et moi, et sus nostre chemin je luy demanday se il avoit esté en ce voyage d’Irlande avec le roy. Il me respondy : « Oyl. » Dont luy demanday se de ce qu’on appelle le trou SaintPatris, c’estoit vérité tout ce qu’on en disoit. « Il me répondy que oyl, et que luy et ung chevallier d’Angleterre, le roy estant à Duvelin, y avoient esté et si estoient enclos oultre soleil esconsant, et là demourèrent toule la nuit et lendemain furent yssus hors à soleil levant. Dont luy demanday des merveilles et des nouvelles dont on racompte et que on y veoit, se riens en estoit. Il me respondy ad ce et me dist : « Quant moy et mon compaignon eusmes passé la porte du celier, que on appelle le Purgatoire Saint-Patris, et nous feusmes descendus trois ou quatre pas (car on y descent ainsi que à ung celier), challour nous prist ens ès testes, et nous asseismes sur les pas qui sont de pierre, et, nous illec assis, très grant voulenté nous vint de dormir, et dormismes toute la nuit. « Dont luy demanday se, en dormant, ils scavoienl où ils estoient et quelles visions leur vindrent. 11 me respondy et dist que en dormant ils entrèrent en ymaginations très-grandes et songes merveilleux, et veoient, ce leur sembloit, en dormant trop plus de choses que ils n’euissent fait en leurs chambres sur leurs lits. Tout ce affermoient-ils bien : « Et quant au matin nous feusmes éveillés, on ouvry l’uys, car ainsi le avions nous ordonné, et yssimes hors, et ne nous souvint de chose que eussions veu, et tenions et tenons encoires que ce soit toute fantosme. »

Ces rêves que Sir William Lisle eut pendant son sommeil, un autre pèlerin ne les eut même pas. En 1494, sous le pontificat

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d’Alexandre VI, un chanoine régulier du monastère d’Eymsteede, en Hollande, pour se donner plus complètement aux mortifications, demanda à ses supérieurs l’autorisation de parcourir la chrétienté en moine mendiant. Après avoir traversé plusieurs pays, il arriva en Irlande pour voir le Purgatoire de saint Patrice et y pénétrer. Il exposa son désir au prieur du monastère et celui-ci le renvoya à l’évéque, sans l’assentiment duquel personne ne pouvait être introduit ; après avoir eu peine à pénétrer jusqu’à l’évêque, il finit par l’aborder, et se jetant à ses genoux, lui demanda l’autorisation d’entrer dans le Purgatoire. L’évêque lui réclama la somme d’argent que l’on exigeait d’ordinaire comme droit d’entrée. Le frère répondit qu’il était pauvre et que, même s’il avait de l’argent, il n’oserait le donner, de crainte d’être taxé de simonie. Enfin, après . de longues prières, il obtint une lettre d’admission qu’il devait présenter au seigneur du lieu. Celui-ci aussi lui demanda de l’argent et finit pourtant par l’admettre, non sans difficulté. Lorsque le moine fut revenu, avec ces diverses autorisations, auprès du prieur, celui-ci, à son tour, lui réclama une certaine somme pour le monastère ; le moine s’excusa de ne pouvoir le faire et le prieur consentit enfin à le laisser entrer. Après qu’il se fut confessé, le sacristain, au moyen d’une corde, le descendit le soir dans une fosse profonde et lui fit passer un peu de pain et un petit vase rempli d’eau. Le moine y resta toute la nuit, tremblant et plein d’horreur, récitant de fréquentes prières et s’attendant à tout moment à voir paraître les démons. Au lever du soleil, le sacristain vint l’appeler à l’orifice et lui passa la corde poui remonter.

Le moine s’étonna beaucoup de n’avoir rien vu, rien entendu ni éprouvé pendant la nuit ; il repassa dans sa tête ce qu’il avait lu et appris du Purgatoire ; il ne savait pas, en effet, que l’antique miracle avait cessé et que les habitants du pays n’entretenaient la croyance que pour ne pas tarir leurs revenus. Désireux d’abolir cette illusion de simple, il se rendit à Rome, et, ne pouvant approcher le Souverain Pontife, il raconta à son Pénitencier tout ce qui lui était arrivé, en le priant d’en faire rapport au Pape. Le Pénitencier s’y offrit spontanément, après que le moine lui eut attesté par un serment solennel que tout s’était passé ainsi qu’il le lui avait dit. Lorsque le Pape l’apprit, il envoya une lettre scellée de son seing à l’évêque, au seigneur et au prieur, leur enjoignant de détruire jusqu’aux fondements le lieu dans lequel il y avait autrefois une entrée au Purgatoire de saint Patrice et ajoutant que le porteur de sa lettre devait lui rendre compte de l’exécution de cet «

ordre, ce qui fut accompli de point en point (1>. Mais le sanctuaire ne tarda pas à se relever de ses ruines w. La légende du Purgatoire avait déjà pénétré dans les bréviaires de quelques églises particulières ; on tenta de l’insérer dans le Bréviaire romain et elle parut dans une édition de ce bréviaire imprimée à Venise vers la fin du XVe siècle, mais elle fut supprimée dans l’édition suivante. La leçon de l’église de Paris que l’on trouve dans l’office du saint imprimé en 1622, sous l’archiépiscopat de Mgr de Gondy, est ainsi conçue : Antrum vero pœnitentiale eliamnum visitur quod de ejus nomine seu purgatorium S. Patricii vocatur{3K La croyance aux merveilles de la légende n’avait pu être officiellement sanctionnée par l’Eglise. De leur côté, les écrivains continuaient à critiquer le Purgatoire d’Irlande.

Erasme, dans ses Adagia{i compare la fable de Trophonius à la légende de l’antre de saint Patrice et croit vraisemblable que celle-ci soit née de celle-là. Il ajoute qu’il ne manque pas pourtant en son temps d’hommes qui descendent dans le Purgatoire, mais, qu’exténués par un jeûne de trois jours, ils n’ont pas la tête saine quand ils y entrent. Stanyhurst (1545-1618), le traducteur de Virgile <5), convient que ceux qui s’y rendent n’ont éprouvé, à sa connaissance, aucune terreur, sinon qu’un sommeil lourd les prend ; (1) Acta Sanctorum, 17 mars, t. II, p. 590. Les Annals o{ lister (éd. Hennessy et Mac Carthy, t. III, p. 417) relatent, à la date de 1497, la destruction du Purgatoire, sur l’autorisation du pape, par le gardien du monastère de Donegal et les représentants de l’évêque dans le doyenné de Lough Erne lors de la fête de saint Patrice, parce que l’on avait découvert que ce n’était pas le Purgatoire révélé par Dieu à saint Patrice. L’évêché de Clogher lut vacant de 1494 à 1502. L’histoire du moine de Eymsteede est aussi racontée par Orsini (devenu plus tard le pape Benoit XIII) dans un sermon sur le Purgaloire. Cf. O’Connor, St. Patrick’s Purgatory, p. 109-110. (2) En 1516, un chevalier français vint en pèlerinage au Purgatoire de saint Patrice et fut reçu magnifiquement par O’Domnaill. Cf. Armais o/ lister, t. III, p. 521. En 1545, Jean de Montluc, ambassadeur de France en Ecosse, visita le Purgatoire de saint Patrice. O’Connor, St. Patrick’s Purgatory, p. 118.

(3) Le Brun, Histoire critique des pratiques superstitieuses, t. IV, p. 47. O’Connor, St. Patrick’s Purgatory, Lough Derg, p. 31, cite sans références une vieille hymne de saint Patrice ainsi conçue : « Hic est doctor benevolus, Hibernicorum Apostolus, Cui loca purgatoria Ostendit Dei gratia. Le Père Boüillon cite une autre hymne latine : Magni Patris sunt miranda mérita Patricii : Cui Dominus ostendit locum Purgalorii, Quo viventes se expurgent delinquentes filii.

(4) Erasmi Roterodami adagiorum chiliades quatuor centuriaeque tolidem quibus etiarn quinta addilur imperecta [Venise, Aide, 1520], 1° chil., cent. VII, n° 76.

(5) De vita S. Patricii Hiberniae apostoli libri //. Auctore Richardo Sta nihvrsto Dvbliniensi, Antverpiae, 1587, cité par Ph. de Félice, L’autre monde, p. 70.

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mais il lui parait vraisemblable qu’anciennement des idoles effrayantes et horribles se présentaient aux yeux des pénitents. Rabelais fait allusion à l’obscurité de la caverne : « en cette descente ne nous apparaissoit autre lumière, non plus que si nous fussions au trou de saint Patrice en Hibernie ou en la fosse de Trophonius en Béotie 0). Dans un autre passage, il plaisante sur le mot trou : Leur propos fut du trou de sainct Patrice, De Gilbathar et de mille autres trous S’on les pourroit réduire à cicatrice Par tel moyen que plus n’eussent la toux (î). Pour les auteurs gais du XVIe siècle, le « trou » de saint Patrice devient le sujet de plaisanteries aussi faciles que grossières. On lit dans la Farce de frère Guillebert : Gardez se l’atelier est net Devant que larder le connin ; Car s’en prent en queue le venin, On est pirs qu’au nous saint Patris<3) Foullando in callibistris(4). Et Cliolières écrit dans ses Matinées : Cependant que l’une défend l’entrée du trou S. Patris, l’autre supplée au défaut(S). Dans la Farce joyeuse, à deux personnages, du Gaudisseur qui se vante de ses faictz et ung sot qui luy respond au contraire (#), le Gaudisseur raconte l’expédition qu’il fit au « trou saint Patris ». Pour s’y rendre il a « chevauché la grant mer Rouge(7). Il entre dans un monastère où il rencontre un « beau père qui oncques ne lui sonna mot ». Il descend au « pertuis » où il ne voit « lune ne soleil », puis il se trouve dans une plaine(8) : Là où je souffry mainte peine Qui me fit maistre Grimouart. (1) Pantagruel, V, 36. (2) Gargantua, 2. Cf. Mellin de Saint-Gelais, bibliothèque elzévirienne, t. I, p. 70. (3) « Le purgatoire, le lieu duquel on nommoit le trou S. Patrice et le vulgaire disoit le trou S. Patri. H. Estienne, Apologie pour Hérodote, ch. 39, éd. Ristelhuber, t. II, p. 363. Cf. ch. 36, p. 254. (4) Ancien Théâtre français (bibliothèque elzévirienne), éd. Viollet-le-Duc, t. I, p. 306. (5) Edition Jouaust, t. I, p. 319. (6) Ancien Théâtre français, t. II, p. 295-297. Je dois l’indication de ces textes du XVIe siècle à mon collègue et ami E. Philipot. (7) Confusion avec le lac Rouge (loch Derg). (8) Comparez les plaines où est transporté Owen.

Un <« preud homme » s’avance vers lui et lui demande comment il était entré dans ce lieu et le Gaudisseur lui dit fièrement : « Arrière villain ! » Puis il s’échappe, sort du monastère et s’en va tout droit à Saint-Jacques.

Ces facéties prouvent que le nom du puits ou du trou saint Patrice était très populaire, et aussi qu’il était loin d’être en France un objet de respect. Nous avons vu qu’au XVIIe siècle, au contraire, avec le livre du P. Bottillon, le Purgatoire de saint Patrice a un regain de vénération.

Mais, en 1656, paraissait à Rouen l’Histoire comique des aventures de Fortunatusy traduite de l’espagnol par d’Alibray (,) ; dans ce roman merveilleux, le Purgatoire est une caverne très longue et très profonde située derrière le maltre-autel de l’abbaye ; Fortunatus et son valet Leopoldus y étant entrés se trouvèrent perdus dans les ténèbres et, pour les retirer, l’abbé dut envoyer chercher un vieil homme qui, avec des cordes, avait autrefois mesuré la caverne ; celui-ci, à grand peine, finit par les trouver après avoir longtemps cherché de trou en trou, « et, ajoute malicieusement le conteur, l’abbé en fut bien aise, car si les pèlerins eussent été perdus, il craignoit que par après personne n’y voulût plus retourner, ce qui lui eût tourné et à ceux de son couvent à grande perte et dommage(,). »

En Irlande, dès le XVIIe siècle, le clergé protestant s’efforce de mettre fin aux pèlerinages, qu’il considère comme entachés de pratiques superstitieuses et idolatriques. Les Lords Justices d’Irlande <3) ordonnèrent, le 13 septembre 1632, une nouvelle destruction du Purgatoire, et, en 1704, un acte du Parlement interdit les pèlerinages, et spécialement celui du Purgatoire de saint Patrice, sous peine d’une amende de dix shillings pour les pèlerins, qui, faute de payer l’amende, devaient être publiquement fouettés. A cette époque, il n’est plus question que d’un lieu de pèlerinage et de pénitence et les visions merveilleuses et terribles ne sont plus mentionnées. D’ailleurs, dans les pays même où la légende

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avait eu le plus de succès, elle est vivement prise à parti. En Espagne, Geronymo Feijoo y Monténégro, moine bénédictin, 17011764, dans une sorte de revue critique des idées et des croyances de son temps, expose la légende, examine si elle est en conformité avec les règles de l’Eglise et la déclare pleine d’irrégularités et de fausseté(1>. Un Français anonyme, en 1774, publie un traité intitulé Le Trou de saint Patrice<a), où il soumet l’histoire à un examen minutieux et conclut qu elle a été fabriquée de toutes pièces. En Angleterre, dès 1727, John Richardson(3), recteur de Belturbet, publia un ouvrage contre le Purgatoire qui est, à son dire, l’endroit le plus remarquable du royaume ou peut-être du monde entier, pour la superstition et l’idolâtrie. Il raconta l’histoire d’un pèlerin breton qu’il appelle Ludovicus Pyrrhus qui, vers 1693, entreprit des fouilles sur l’emplacement du prieuré détruit en 1632 et finit par découvrir une fenêtre avec des appuis en fer, sous laquelle on distinguait un trou obscur et où l’on croyait sentir une odeur de soufre. Après examen, toutefois, il fallut se convaincre qu’il n’y avait là qu’un ancien cellier, et on dut renoncer à l’espoir de retrouver jamais la mystérieuse caverne de saint Patrice(4). De nos jours, 111e du lac Derg est encore un lieu de pèlerinage où se rendent, du 1er juin au 15 août, pour accomplir de dures pénitences, plusieurs milliers de personnes(5). L’ancienne grotte a (1) Theatro critico universal, o discursos varios en todo genero de materias para desengaûo de errores comunes, Madrid, 1755, t. VII, p. 156-179. (2) Dublin (I) Cf. l’article de Gaidoz, Revue critique, 1869, p. 256. Voltaire, dans ses Facéties, Questions sur les miracles, 7, mentionne en plaisantant la légende : « Mon avis est qu’on le renvoie au trou de S* Patrice dont il n’aurait jamais dû sortir », et, en note : « Le trou de S‘ Patrice est très fameux en Irlande, c’est par là que ces messieurs disenl qu’on descend en enfer. »

(3) The great folly, superstition and idolatry o/ pilgrimages in Ireland, especially o( thaï to S* Patrick’s Purgatory, Dublin, 1727. Dans le même volume, p. 127-137, on trouve a description o/ St. Patrick’s Purgatory in Lough-Derg and an account o[ lhe pilgrims business there by Rev. Hewson, rector of St. Andrew’s, Dublin.

(4) Richardson, The great (olly, p. 5-6.

!5) Sur les cérémonies au XVIIe siècle et XVIIIe siècle, on peut consulter :

Teatro delle glorie e purgatorio de’ viventi del gran patriarca, ed apostolo dell’ Ibernia, S. Patrizio, Bologne, 1657. D. Brullaughan, In nomine Jesu opusculum de Purgatorio sancti Patritii, Louvain, 1735. Hewson, A description of S1 Patrick’s Purgatory in Lough Derg, and an account of the pilgrims business there. Dublin, 1727 ; W. Carleton, Traits and stories of the Irish peasantry, London, p. 62-%. Cf. Revue britannique, 1842, t. VIII, p. 117-121. C[aesar] 0[tway], Sketches in Ireland, 1827, p. 149. L’histoire du pèlerinage a été écrite par Rev. D. Canon O’Connor, S4 Patrick’s Purgatory, Lough Derg, its hislory, traditions, legends, antiquities, lopography, and scenic surroundings, wilh some account of its more notable pilgrims, and a detailed description of the authorised dévotions performed at its venerable shrine, an enlarged and revised édition, Dublin, 1895. été comblée ; les bâtiments destinés à loger les pèlerins sont des constructions modernes. Mais le paysage, sans doute, n’a point changé depuis le XIIe siècle, et ceux qui le visitent maintenant[85] comprennent sans peine qu’au milieu de ces montagnes arides et fauves, où la bruyère se détache en noir sur le fond d’herbes et de joncs desséchés, dans une lie qui s’élève à peine au-dessus des eaux rougeâtres du lac, parmi la solitude et le silence que seul le vent vient troubler, on ait situé jadis une des entrées de l’enfer.

II

Les mystères bretons de Louis Eunius.

La bibliothèque des écrivains anonymes qui composèrent les mystères bretons était formée de quelques livres populaires, ouvrages de piété pour la plupart ; les sujets, comme l’a démontré A. Le Braz[86], sont tirés de l’Ancien et du Nouveau Testament, de la Vie des Saints, des publications hagiographiques du colportage et de la Légende Dorée, plus rarement de mystères français ; enfin de quelques romans tels que Les Quatre Fils Aymon, Huon de Bordeaux, La Belle Hélène de Constantinople, Geneviève de Brabant ; ou de livres de morale en action comme Les Trois Estats de l’Innocence du Père R. de Ceriziers.

C’est l’ouvrage célèbre du P. Boüillon[87], Histoire de la Vie et du Purgatoire de saint Patrice, qui fut la source des mystères bretons relatifs à saint Patrice et au Purgatoire[88]. De la Vie de saint Patrice, on ne connaît qu’un seul manuscrit ; il a été excellemment édité avec une introduction, une traduction et des notes par J. J. Dunn, en 1909. De même que l’histoire de saint Patrice n’est chez le P. Boüillon qu’une sorte d’introduction à l’histoire du Purgatoire, le mystère de la Vie de saint Patrice, en trois actes, sert comme d’avant-propos au mystère du Purgatoire de saint Patrice, en deux journées, que l’on représentait le lendemain du jour où l’on avait donné la Vie de saint Patrice[89].

Du Purgatoire de saint Patrice, on a, à notre connaissance, plusieurs manuscrits représentant deux rédactions. La première rédaction, qui suit de près le livre du P. Boüillon, est conservée dans trois manuscrits plus ou moins fragmentaires, et un imprimé. La seconde rédaction est conservée dans deux manuscrits et la traduction d’un troisième manuscrit.

Première Rédaction

1o Le manuscrit 45 du fonds celtique de la Bibliothèque nationale se compose de 78 feuillets ; les feuillets 1-69 vo sont occupés par une copie (A) du mystère de Louis Ennius dont le commencement (trois feuillets) manque ; cette copie est due à Jean Conan[90] de

Trédrez, qui mourut en 1834. Le feuillet 70 r° porte le nom Connan, avec la date : Trédrez, 20 mai 1847, et deux vers bretons : hoant plac’h yaouanc so eun tan hac a poaz hoant seurezet so cant goech goassoch boas*1» Traduction des deux vers bien connus de Gresset (Vert-Vert, ch. II) :

Désir de fille est un feu qui dévore Désir de nonne est cent fois pire encore. et qui font allusion au vers 568 du mystère. Luzel, dans une note jointe au manuscrit, certifie que le manuscrit est de Jean Conan.

Au bas du feuillet 69 v°, on lit : J. Marie Guennec . Le 23 Février 1839 ; et, d’une autre écriture : Luzel. Le feuillet 32 r° porte deux dessins grossiers : l’un représentant un homme étendu ; l’autre, une croix flanquée de deux cierges, avec, sur le socle de la croix, l’inscription : Aman a sou asasined eun den, peded Doué vid repos e

e. Amen. Ces dessins sont

destinés à illustrer les indications scéniques qui suivent le vers 1648.

2° Les feuillets 71 r°-78 v° contiennent le commencement de la pièce, d’une écriture et d’une orthographe plus moderne que celle de Jean Conan ; cette copie (B) est plus étendue que la lacune de la première partie. On peut ainsi comparer les vers 113-366 dans les deux copies. Cette comparaison montre que B est très inférieur à A. Les vers 209, 351 manquent ; quelques vers sont incomplets, par exemple 121, 136 ; le copiste ne tient pas toujours compte de la rime ; il remplace tud quer par mignonet 116 ; clcred par malequa 135 ; las caned par las canab 151 ; roud par rouet 352 ; cabared par osteleri 122 ; Doulouse par man 124. Nous ne devons donc accorder du mois d’Octobre » et que Conan avait alors soixante seize ans : bea a zo breman c’huézec via a tri-uguaint

a boe ma voan ganet en Zanté-Croa

Guengamp. Mais, d’après une lettre qu’a bien voulu m’écrire M. le Secrétaire de la mairie de Guingamp, on ne trouve, de 1750 à 1760, aucune mention de la naissance de Jean Conan sur les registres de la paroisse Sainte-Croix. Il serait né à Kérity d’après E. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 253. M. le Maire de Kérity m’a obligeamment fait connaître que les registres de 1745 à 1770 n’existent plus aux archives de sa commune.

(1) Ces deux vers sont de la même écriture que Connan Trédrez 20 Mai 1847, et sont vraisemblablement de la main de François Conan ; tandis que le corps de la pièce est de la même écriture que la Vie de,sainte Geneviève (Bibl. nat. f. celt., 2-4), laquelle est l’œuvre de Jean Conan (1825). L’écriture de Jean Conan est très soignée ; les seules confusions qu’elle offre sont celles de e et de i, parfois de g et de g, de e et r à l’initiale, de l et de t. —

à la copie B qu’une confiance très limitée, là où elle est la seule autorité.

Luzel avait préparé pour l’impression une copie du manuscrit 45 dont il rectifie parfois la métrique et modernise l’orthographe ; cette copie (L) a été déposée par M. A. Le Braz à la Bibliothèque universitaire de Rennes, où elle porte le numéro 12. Elle offre un texte remanié dans le détail, sans qùe toutefois la métrique de tous les vers ait été rétablie n)..

3° En 1871, a paru à l’imprimerie Le Goffic, à Lannion : Buez Ixmis Eunius diientil ha pec’her bras, trajedien en daou act, gant eur proloc vit peb act, in-12 de xn-166 p. Ce texte (C) est assez différent de A. Il s’en distingue d’abord par des omissions : vers 15-18, 347, 350-351, 629, 631, 1401-1402, 1419-1420, 2062, 2161-2162, 2263-2264, 2307-2308, 2345, 2519, 2561-2562, 2831-2832, 2855-2856, 28592862, 2961-2962, 2977-2980, 3001-3002, 3011-3012, 3563-3564, 3628, — et des additions : 4 vers au lieu de 2 après 1427 ; 4 vers mis dans la bouche de Louis après 3634 ; — par des interversions : vers 741-742, 837-838, 853-854 ; — par de très nombreuses divergences de détail portant sur le choix des mots et la construction ; en particulier, C a été expurgé de toutes les expressions grossières que contenait A ; du seul point de vue de la rime, on constate des variantes dans près de 600 vers. Enfin, sur quelques points, le texte de C est tout à fait dissemblable du texte de A : par exemple, le prologue de la seconde journée, 1683-1818 ; le discours de Belzébuth, 10451118 ; le discours de Bérith, 1151-1189, qui dans C est attribué à Baal ; à ce discours en succède, dans C, un autre attribué à Bérith et qui a pour sujet l’Angleterre (voir ci-après Appendice IV) ; le sermon du prédicateur, 1918-2038. Mais si l’on met à part les morceaux qui constituent les parties les plus originales du mystère et qui ont dû subir, au cours des années, des changements complets pour être accommodés au goût du public, on constate que la source commune de A et de C n’est pas très éloignée. Les deux manuscrits ont en commun une lacune après le vers 2062. Les différences de détail que l’on remarque entre eux ne sont pas également réparties sur toute la pièce ; certaines scènes sont presque identiques dans les deux rédactions, par exemple v. 2040-2508. Là où la rime est différente, il n’y a souvent qu’une interversion des deux hémistiches du vers :

/

(t) On pou ! s’étonner que Luzel qui, en outre, avait dès 1865 envoyé au ministère une traduction complète de cette pièce, ne l’ait pas publiée. Dans une lettre du 19 mai 1889, A. de La Bonlcrie la lui demandait pour la Revue de Bretagne. A. Le Braz, Essai sur Vhistairc du théâtre celtique, p. 340, écrit que la mise au net de cette pièce (L) occupa les derniers jouis de Luzel.

breued e toud ma horf o vareges quesec o varegues quezec eo oll ma c’horf brevet me nem deuertisou herue ma bolante vel a mo c’hoant bepred me n’em divertisso rac credin a ra guenin evid on sefian evit bon difial ez oc’h deut, a gredan modered o comgou pe eved diauis mar bec’h re diavis poezet mad ho comzou dleed e boud difun a neb a ja en end na die den mont en hent hep beza difun mad col a ran ma bue gand eun den misirab eun den fall a ra din dont da goll ma buez rac baie mad a red, hac an end a sou uny rac an hend a zo plen, a baie mad a ret potred an actou fos, displanterien ar hroajou torrerien ar c’hroajou, potred an acto faus cals a dore o gouc gand ar hoand da redec cals o c’hoantaat redec a deus ho gouq torret huy neus scuilled o coaid evid ma souetad hac evit ma savetad, e c’heus ho coad scuillet me selebrou beb sun ofem an spered santel ofern ar speret glan bep sun me celebrou me a meus courag vad a Doue rey e gras Doue a reï he c’hras ha me a meus courag. an otro sant Miquel a ma el gardien ha ma el gardien, an otro sant Michel Ar plas man, lad santel, ehe an purgatoair Ar purgator, tad santel, ec’h eo ar plas-man

Souvent le déplacement ou le remplacement d’un mot à la fin du vers entraîne pour les besoins de la rime la modification du vers suivant : 2901 A. En ano an tad, ar mab hac ar Spered santel mo congur dam huitad meueillen Lusifer. C. en hano ’n Tad ar Mab ive ar Speret-Glan m’ho conjur d’am c’huitad meveillen bras Satan, 377 A. hed ma hinderf er jardin da bourmen eun neubed rac ma matenesou a meus hoais da lared C. it eta eun nebeud d’ar jardin da bourmenn da c’hortos ac’hanon d’achui ma fedenn 383 A. Ho ho ! birfiquen ne boueses o pedin Doue hac ar Voerhes, te fad sou disoursy C. O Theodesia ne baouesi james o pedi a galon Doue hac ar Verc’hes

389 A. a hoais mes queres es pou comodite da guitad ar gouand hac ar pedeno se C. C’hoas, mar queres, e vo roet did ar moyen da dilezel couend hac ive ar beden 403 A. achif eo ma euriou eur hardeur hac ouspen mes o considerin en o hantretien

C. tremen eur c’hart-heur zo eo achu ma heuriou mez me zo bet troublet o clevet ho comzou 415 A. Penos, an disiplin ? a huy ve quer cruel da laquad ar sord se da douch ous o crohen , C. Penos an dissiplin ? c’hui a ve meurbed cri o lacat treo quen rust da douch ho izili 453 A. me ja da breparin, a poend eo din rnoned beomb fidel on dou, rac me ne vanguin qued C. me ha da diampeich, poend bras eo din ober bezomp couraj hon daou : vit me rei ma dever. Ces déformations du texte sont dues, sans doute, à la transmission orale. Les acteurs, souvent illettrés, apprenaient leurs rôles en les répétant sous la direction de personnes qui savaient lire et tenaient en main une copie du mystère. Celles-ci, parfois, ne lisaient pas exactement le texte qu’elles avaient sous les yeux ; parfois aussi l’acteur modifiait inconsciemment le texte qu’on lui apprenait. Et quand, plus tard, sous la dictée de l’acteur, on transcrivait une nouvelle copie, cette copie s’écartait, sur de nombreux points, de l’original.

Voici un court résumé de cette première rédaction. Louis Eunius déclare qu’après la mort de ses parents, il va s’abandonner à toutes ses fantaisies ; on le voit se quereller avec des soldats qui jouent aux boules et en tuer deux ; il rosse un sergent, à la suite d’une partie de cartes dans une auberge, et bétonne l’hôtesse ; le sergent se plaint au Juge et au Gouverneur ; et Louis, après avoir en vain tâché d’amener ses domestiques à prendre son parti, cède aux avis de Carnagon qui lui conseille de changer de pays et lui propose d’aller séduire sa cousine la religieuse Théodosia. Celle-ci consent assez vite à suivre Louis par delà les Pyrénées et à emporter les richesses du couvent. Avant d’arriver à l’hôtellerie, Louis tue les deux muletiers qui les ont transportés et les dépouille de leur argent. Il mène joyeuse vie, et quand ses ressources sont épuisées, il contraint Théodosia à se prostituer. Celle-ci s’échappe un jour en son absence et va demander pardon à Dieu des fautes qu’elle a commises. Louis continue sa vie de désordre ; il se dispute à l’auberge avec deux douaniers qui l’ont pris en fraude ; il les tue et force l’hôtesse à se donner à lui. Puis, non sans quelque peine, il assassine un marchand de toile.

Comme intermède comique, les diables viennent alors tenir conseil sur le théâtre, et rendent compte à Satan de la besogne qu’ils ont faite. Astaroth raconte l’histoire de Louis Eunius, Éelzébuth expose l’état, moral de la France et de la Basse-Bretagne, Baalbérith vante l’innocence des sauvages d’Amérique et les mœurs de l’ile de Cythère ; Satan se déclare content de l’œuvre accomplie.

Puis Louis reparaît sur la scène ; il viole une femme, tue un paysan, viole une jeune fille. Un général de France arrive pour racoler des soldats ; Louis s’engage sous le nom de Lamontagne et promet de mettre à lui seul les ennemis en fuite. Il remplit sa promesse devant deux sergents qu’il a emmenés comme témoins et, à force de prodiges, renvoie les Anglais en déroute jusqu’en Mésopotamie. Las d’attendre la succession de son capitaine pour avoir de l’avancement, Louis se décide à l’assassiner, mais pendant qu’il est en embuscade, il voit voler au-dessus de lui un papier qu’il finit par attraper ; sur ce papier il y a le portrait d’un mort avec cette inscription : Je suis Louis Eunius, et au même instant il voit près de lui une croix flanquée de deux flambeaux. Cet intersigne suffit pour le décider à se repentir et à demander pardon à Dieu. Ici finit la première journée.

A la seconde journée, on le voit vêtu en pèlerin, sur la route de Rome. Sans écouter le diable qui vient le tenter, il entre dans une église où un prédicateur est en train de dire qu’il voudrait connaître le plus grand pécheur du monde pour le convertir. Après le sermon, Louis va trouver le prédicateur pour se confesser ; celui-ci lui déclare qu’il n’a pas le pouvoir de l’absoudre, mais qu’il pourra obtenir le pardon en demandant au Pape l’autorisation de se rendre au Purgatoire de saint Patrice. Le Pape remet à Louis une lettre pour l’évêque, et Louis, après avoir lutté avec Satan qu’il renverse par terre, arrive en Irlande ; l’évêque le mène au couvent, et, après un long sermon, le conduit à l’entrée du Purgatoire. Là, le prieur lui donne ses dernières instructions et Louis se trouve livré à luimême. Il arrive, après avoir passé avec peine entre deux rochers, dans une salle où les douze apôtres et saint Patrice viennent l’encourager à poursuivre sa route. A peine l’ont-ils quitté que huit diables accourent ; ils le jettent dans le feu, le pendent, le frappent à coups de hache, le mettent sur la roue, le jettent dans un puits enflammé, le font rouler du haut d’une montagne dans un étang plein de monstres, le plongent dans l’eau bouillante, puis dans l’eau glacée, enfin l’amènent devant un pont de glace sur lequel ils l’obligent à passer. A chaque supplice, le signe de la croix et une courte invocation ont délivré Louis des mauvais esprits. Là

encore, une main invisible le soutient et Louis arrive sain et sauf de l’autre côté du pont, dans le Paradis. Il y est reçu par saint Patrice qui lui annonce qu’il est pardonné et lui recommande de s’en retourner au plus vite. Louis repasse par le même chemin et remarque parmi les âmes souffrantes du Purgatoire son confesseur et sa cousine ; il arrive à la salle où il rencontre de nouveau les douze apôtres et saint Patrice. Le tonnerre gronde, les murs s’écroulent ; il reparaît à la porte de la caverne où l’attend toute une procession qui le conduit en grande pompe à l’église. Là, Louis fait le récit détaillé de son voyage. Le comte de Toulouse, son cousin, vient le chercher pour le ramener en France. Louis refuse, prie le comte de distribuer ses biens aux pauvres et reste au couvent sous un habit de frère.

Quelqu’intérêt que présente cette première rédaction, que l’on trouvera d’ailleurs reproduite toute entière en ce livre, elle n’en est pas moins incomplète sur quelques points, et, comme nous le verrons, les manuscrits de la deuxième rédaction permettent de combler les lacunes ou d’éclairer les obscurités de A et de C. 4° Le manuscrit de la Bibliothèque nationale, fonds celtique n° 39, contient, en tête d’un mystère de Cognomerus et sainte Tryphine, un prologue de Louis Eunius (D) qui y occupe les quatre premiers feuillets. Ce prologue est d’une écriture soignée et très moderne jusqu’au f° 4, où lui succède une écriture compliquée et irrégulière. Il offre, f° 2 v°, la mention suivante : « Fin et fait par moi quément jean fait en 1839. Fin du proloque, salut e révérans ». La pièce, qui suivait ce prologue et qui n’a pas été trouvée, commençait par une scène où le vieux père de Louis déplorait le malheur de sa naissance ; puis le père l’exhorte vainement à changer de vie, et ordonne à deux hommes de le corriger ; Louis les reçoit à coups de bâton ; le père meurt de chagrin. Le reste de la première journée, à en juger par le prologue, était peu différent de A ; on y trouvait la scène des joueurs de boules, la scène du sergent, la scène des domestiques, la scène des maltôtiers, la scène du couvent de Perpignan. Rien ne nous permet d’affirmer que ce prologue fût celui qui fait défaut à la première journée du manuscrit 46. En tout cas, les six pages qui manquent à ce manuscrit étaient aisément remplies par le titre et les scènes suppléées par B. De plus, l’acte qui suivait ce prologue n’était pas aussi étendu que la première journée de la première rédaction ; il se terminait au vers 456 de A ; mais il était plus étendu que le premier acte de la seconde rédaction.

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DEUXIÈME RÉDACTION P.
Deuxième Rédaction

5° Le manuscrit de la Bibliothèque nationale, fonds celtique n° 29 (P), est une rédaction de Louis Eunius très différente de celle que représentent ABC. Les personnages principaux sont plus nombreux ; outre ceux de la rédaction A, il y a le roi d’Hibernie, le prince Théodoso, le duc Alderisa et le baron Tivollia, qui proviennent sans doute de la Vie de saint Patrice (1). Louis est devenu une sorte de champion de la chrétienté contre les Irlandais païens, et les délibérations des princes irlandais tiennent une grande place dans le mystère. La seconde partie de l’action, qui dans A est aussi étendue que la première partie, est, dans ce manuscrit, rudimentaire. Voici une analyse de la pièce. Premier Acte. — Louis Eunius réunit les gens de sa maison pour leur annoncer qu’il va changer son train de vie et jouir de la fortune que lui ont laissée ses parents. Son gentilhomme et son sommelier lui donnent quelques conseils qu’il ne veut pas écouter (f° 1-2 v°). Le capitaine annonce à l’évêque que le gouverneur de Toulouse va venir ce jour même prendre possession de son poste ; les habitants déclarent vouloir lui rendre toute sorte d’honneurs (f° 2 r°-2 v°). Le gouverneur arrive : l’évêque lui offre les clés du château (f° 2 v°-3 r°). Louis déclare de nouveau qu’il veut se divertir ; Jacques Piétro (ou le Diable) fait remarquer que, quoique Louis soit très puissant, la noblesse a choisi un gouverneur sans le consulter ; Louis entre en colère et se répand en récriminations (f° 3 r°-3 v°). Trois cavaliers, Manchot, Bourden et Tarilla, viennent jouer aux boules ; Louis trouble leur jeu et se querelle avec eux ; il tue Tarilla et’Manchot ; Bourden s’enfuit (3 v°-5 v°). Deuxième Acte. — Louis fait part à son sommelier et à son gentilhomme de ses besoins d’argent et leur demande tout leur dévoûment (5 v°-6 r°). P’rançois, le sergent royal, vient offrir à Louis une bouteille de vin nouveau ; après le repas, les deux hommes jouent aux cartes ; Louis perd cinq cents écus, et demande au sergent de lui en rendre la moitié ; celui-ci refuse ; Louis éteint, la lumière et le frappe ; l’hôtesse accourt pour se faire payer ; elle attrape le sergent et l’oblige à lui laisser en gage son habit neuf et son chapeau (° 6 r°-8 v°). Le sergent va demander justice au gouverneur et au capitaine. Ceux-ci le chargent d’arrêter Louis (f° 9 r°-9 v°). Satan conseille à Louis de quitter Toulouse et de se rendre à Perpignan, où sa cousine germaine est religieuse ; celle-ci l’aime et lui donnera (1) Voir par exemple acte 11, scène iv, p. 122-126, où figurent L’empereur, le premier prince, le second prince, le premier page, le second page.

de l’argent. Louis s’y résout (f° 9 v°-10 r°). François donne ses instructions à deux autres sergents, Jacques Piedro et Louis Artilla, pour arrêter Louis ; Louis les bat ; le gouverneur, à qui François est venu rendre compte de sa mission, prononce le bannissement de Louis ; s’il n’obéit pas, il sera condamné à la prison perpétuelle et à la confiscation de ses biens (f° 10 r°-ll r°). Louis arrive au couvent et frappe à la porte. La portière, sœur Olive, l’introduit et va chercher la mère Théodosia ; Louis lui raconte, à sa manière, ses aventures ; Théodosia demande à la Supérieure d’autoriser Louis à rester au couvent ; celle-ci décide qu’il ne verra Théodosia que derrière la grille et qu’il couchera avec le jardinier (1). Théodosia fait part à Louis de ces dispositions (f° 11 r°-12 r°). Deux diables, Lucifer et Belzébuth, décident de tenter Louis et Théodosia. Lucifer va inspirer à Louis d’enlever sa cousine du couvent, et Belzébuth conseille à Théodosia d’aller dans une autre province épouser Louis (f° 12 r°-13 r°). Louis n’a pas de peine à séduire sa cousine ; il décide un loueur de chevaux à venir aussitôt avec lui ; les chevaux sont chargés ; ils partent pour l’Espagne, arrivent à Madrid et descendent à l’hôtel des Trois-Avocats(,> (f° 13 r°-14 v°). L’hôtesse leur fait bon accueil. Pendant que Théodosia se repose dans sa chambre, après avoir remis au loueur un diamant de mille écus, pour qu’il garde le secret de leur voyage, Louis emmène le loueur pour le payer ; ils ne s’accordent pas sur le prix ; Louis le tue et le dépouille (f° 14 v°-16 r°). Théodosia, restée seule, commence à se repentir de son équipée ; Louis lui raconte ce qu’il vient de faire ; après lui avoir reproché son crime, elle lui fait part de ses scrupules et lui demande de chercher un capucin, un récollet ou un autre ecclésiastique pour les marier ; justement, un capucin vient à passer ; Louis lui expose sa requête et le capucin les marie dans la forme ordinaire (3> (f° 16 r°-17 v°). Deux chevaliers, Hylas et Amiédon, entrent à l’hôtellerie pour se divertir ; ils jouent aux dés pour savoir qui paiera la bouteille ; Louis survient et obtient de prendre part au jeu ; il fait apporter une bouteille d’eaude-vie ; il perd cent louis d’or et demande aux chevaliers la permission de leur présenter sa femme. Théodosia lui remet les cent louis d’or qui lui restent (f° 17 v°-19 r°). Les deux chevaliers décident de proposer à Théodosia de les suivre pour faire une bonne farce à Louis ; ils lui offrent de la conduire en un beau château où elle passera agréablement sa vie. Théodosia proteste (1) Le même détail se trouve dans Q. Dans M, c’est avec le père confesseur.

(2) De même dans Q. Il y a quelques années, me dit M. François Gélard, on voyait encore à Tréguier, rue Colvestre, une auberge à l’enseigne des trois avocats.

(3) Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 30-32.

de son attachement à son mari et invoque le secours de Dieu, mais elle suit Hylas et Amiédon. Louis rentre et apprend peu* Belzébuth le départ de sa femme (f° 19 r°-20 r°). Théodosia et les chevaliers arrivent au château. Amiédon fait à Théodosia une longue et respectueuse déclaration d’amour, et Théodosia consent à le rejoindre dans le jardin à une heure du matin pour partir ensemble (f° 20 r°-22 r°). Survient Hylas, qui, à son tour, proteste de son amour pour elle ; Théodosia le repousse. Hylas apprend par un domestique, Urbal, que son cousin Amiédon et Théodosia ont tenu une conversation enllammée ; il prépare ses armes pour aller au rendez-vous. Théodosia arrive au lieu fixé, où Amiédon la rejoint. Hylas apparaît, en colère, l’épée à la main. Les deux chevaliers se battent en duel sous les yeux de Théodosia qui supplie en vain. Amiédon est tué. Hylas emmène Théodosia en Flandre (f° 22 r°24 r°). Troisième Acte. — Le roi d’Hibernie, d’Eleiscia et de la province d’Antioppi tient conseil ; il célèbre le courage de ses prédécesseurs, Tibian, Tiber et Clodius, ainsi que sa propre gloire. Le prince Théodoso, le duc Alderissa et le baron Tivollia renchérissent encore. Mais le roi d’Hibernie leur raconte avec colère que le dieu Mahom lui est apparu en songe sous la forme d’un ange guerrier et lui a révélé que les Français sont jaloux de sa splendeur et ont formé le projet de l’anéantir ; il faut au plus tôt s’armer contre eux, surtout contre le gouverneur superbe de la ville de Toulouse. Théodoso conseille d’envoyer à Toulouse un messager pour dire au gouverneur que le roi d’Hibernie lui déclare la guerre. Tivollia (ici Rivollia) est choisi pour cette mission (f° 24 r°-25 v°). Comme le gouverneur se réjouit du départ du tyran Eunius et que l’évêque en rend grâce à Dieu, Tivollia arrive et leur remet la lettre du roi d’Hibernie, où celui-ci écrit au gouverneur de Toulouse qu’il lui déclare une guerre sanglante, où l’on ne fera pas de prisonniers, parce que sa religion est contraire au grand dieu Mahom. Le gouverneur envoie le messager se rafraîchir et tient conseil avec l’évêque et le capitaine. L’évêque est d’avis de demander la paix pour cinq ans et de profiter de ce délai pour rassembler une armée. Cet avis est adopté et communiqué à Tivollia (25 v°-26 v°). Le roi d’Hibernie commençait à être inquiet sur le sort de son ambassadeur, quand celui-ci ’ arrive avec la lettre du gouverneur. Le roi consent ù attendre quatre ans (26 v°-27 r°). Louis Eunius, vêtu en brigand, revient à Toulouse, et s’embusque près d’un fossé pour détrousser les passants. Passent Théodosia et Hylas ; Louis tue Hylas ; Théodosia se jette à genoux pour demander grâce. Louis lui pardonne et s’endort sur une place de la ville. Pendant ce sommeil,

Théodosia implore la miséricorde de Dieu pour ses crimes ; Belzébuth s’efforce en vain de lui faire croire que sa condamnation est prononcée ; un ange vient chasser le mauvais esprit et dit à Théodosia de retourner au couvent où la supérieure l’accueille avec bonté (27 r°-29 v°). Belzébuth apprend à Louis que Théodosia s’est convertie. Lucifer lui fait connaître qu’on a besoin de chevaliers pour faire la guerre au roi d’Hibernie. Le gouverneur arrive et annonce qu’il est nommé général en chef, et, le capitaine, lieutenant général des armées ; l’évêque conseille de faire un ban dans le pays ; le capitaine envoie un tambourinaire à cet effet. Deux habitants se présentent pour s’enrôler. Le premier est Jaques an dambroghuillet, et le second, Yan Faridibolates, qui a été autrefois au combat de Landagonnec. Le nombre des enrôlés est de cinquante mille quand Louis Eimius, sous le nom de Lamontagne, demande à faire partie de l’armée et s’engage à repousser les Hiberniens à lui seul, à condition qu’on l’assiste de deux témoins ; il exige, en colère, qu’on lui donne plus de cinquante écus (f° 29 v°32 r°). Les quatre années sont écoulées ; le roi d’Hibernie déclare à ses sujets qu’il a grand désir de se rendre maître de Toulouse et des bourgades voisines, et que les Français ont formé le projet de conquérir l’Hibernie. Théodoso et Tivollia protestent de leur courage. Le roi décide de partir pour assiéger Toulouse. A force de marcher les Hiberniens y arrivent (f° 32 v°-33 r°). Les habitants de Toulouse paraissent sur la scène, Conduits par le gouverneur • et le capitaine. Louis ordonne de laisser camper les ennemis et se charge de tout. Voilà les deux armées en présence, les Hiberniens d’un côté, les Toulousains de l’autre, et les combattants s’interpellent ; l’empereur est atteint d’un coup de flèche ; le gouverneur dit aux Hiberniens* de se rendre ; Louis s’oppose à ce qu’on leur accorde quartier ; il les tue tous, y compris Théodoso et Tivollia (f° 33 r°-34 v°).

Pour récompenser Louis, le gouverneur lui offre cinquante mille pistoles par an. Louis le remercie en disant qu’il va partir pour l’Hibernie pour s’y faire nommer roi. Resté seul, il fait un triste retour sur sa vie passée. Au moment où il se préoccupe de trouver une barque pour passer en Hibernie, et d’attendre un homme qu’il veut tuer, un ange fait voltiger un papier autour de lui, et Louis cherche en vain à l’attraper. L’ange lui rappelle ses crimes, et, au nom du Roi du ciel, lui ordonne de lire le papier et de rentrer en lui-même. Louis est troublé par cette voix qu’il entend sans voir personne, et se retire dans son cabinet pour lire le papier (f° 34 v°-35 v°). On voit Théodosia en oraison ; elle prie la Vierge d’accorder la grâce du repentir à son époux Louis. Un ange vient lui annoncer qu’elle va mourir et recevoir dans les deux la cou•

ronne de gloire (f° 35 v°). Louis demande pardon à Dieu et décide d’aller à Rome chercher l’absolution. Lucifer l’assure qu’il ne sera pas pardonné ; Belzébuth lui tient le même langage (f° 361^-36^). Louis arrive à Rome et demande au Pape de recevoir sa confession. Pendant qu’il est seul à, faire son examen de conscience, Belzébuth et Lucifer s’efforcent de le tenter. Louis résiste à leurs menaces. Le* Pape revient pour entendre les aveux de Louis et lui donne pour pénitence d’aller en pèlerinage en Irlande où il trouvera saint Patrice (f° 36 v°-38 r°). Louis remet la lettre du Pape au prieur. Saint Patrice lui indique les pénitences qu’il aura à subir. Après avoir passé dans les cellules, il est conduit à la caverne par le prieur qui lui donne ses dernières instructions (f° 38 r°-39 v°). Les diables Lucifer et Belzébuth reçoivent Louis avec d’ironiques démonstrations d’amitié et finissent par le jeter en enfer. L’ange chasse les démons et encourage Louis (f° 39 v°-41 r°). Louis arrive au Paradis terrestre où il est reçu par saint Patrice, accompagné de deux anges. Saint Patrice lui dit de retourner sur ses pas, et qu’il ne recevra aucune offense des malins Esprits ; Louis craint de retomber dans le péché s’il retourne dans le monde et insiste pour rester. Saint Patrice va exposer sa requête à Dieu. L’ange vient annoncer à Louis que le moment est arrivé où il va voir Jésus, et Louis meurt, content de quitter la vie, et en donnant de sages conseils aux jeunes et aux vieux. L’ange, en quatre vers, conclut la pièce (f° 41 r°-41 v°).

6° Le manuscrit n° 3 de la Bibliothèque de Quimper (l> (Q) est un cahier in-folio originairement de 20 feuillets ; les deux premiers feuillets et le feuillet 5 manquent, et le mystère commence au feuillet 3. Il se termine brusquement vers la fin de la première journée. Il appartient à la même famille que le manuscrit 29 de la Bibliothèque nationale, mais il en diffère par quelques détails. L’évêque part avec ses soldats pour la ville de Rastadt à la rencontre du gouverneur (3 r°). Les trois chevaliers qui jouent aux boules (3 r°-4 r°) sont des chevaliers de Malte ; ce n’est qu’après la partie de boules que prend place la scène de l’entrée du gouverneur (4 r°-4 v°). Suit l’épisode de maître François (6 r°-7 r°). Les scènes relatives au roi d’Hibernie et à sa cour, ainsi qu’au gouverneur et à l’évêque de Toulouse, sont intercalées dans l’histoire de Théodosia. Belzébuth conseille à Louis d’aller se réfugier au couvent de Flus en Flandre (7 v°) ; le roi d’Hibernie s’entretient avec son général et ses soldats, et envoie un ambassadeur à Toulouse (7 v°-9 v°) ; Louis arrive au couvent, décide sa cousine à le %

(1) Sur ce manuscrit, voir Luzel, Revue celtique, t. V, p. 323. Ce manuscrit contient beaucoup d’indications scéniques ; en particulier, à chaque changement de lieu, il est écrit de fermer le rideau (serri ar ridoch).

suivre et retient un loueur (9 v°-12 r°) ; le roi d’Hibernie lève des troupes (12 r°-12 v°) ; Louis et Théodosia arrivent à Madrid ; Louis tue le loueur et force Théodosia à se prostituer ; un ange dit à Théodosia de la part de Dieu de retourner à son couvent (12 v°15 r°). Le capitaine dit à l’évêque qu’il a déjà quatre-vingt mille soldats. La scène change : on voit Alanic ar Haro, de Tonquédec, qui chante, en travaillant, la chanson du cocu ; sa femme lui demande d’aller chercher de l’eau ; il refuse. Entre Conomurus, le galant de la femme, qui menace de battre Alanic s’il n’obéit pas. Exaspéré, celui-ci va s’enrôler et raconte au capitaine les désagréments auxquels s’expose un paysan qui a une trop belle femme tt> (15 r°-16 r°). Belzébuth apprend à Louis le départ de Théodosia ; Louis tue un cavalier (16 r°-16 v°), puis va s’enrôler (16 v°-17 v°). Le roi d’Hibernie s’apprête à partir pour la France ; le général, les soldats, l’ambassadeur, le page protestent de leur vaillance (17 v°-18 v°). De son côté, le gouverneur de Toulouse s’apprête à partir pour la ville d’Hibernie, avec le capitaine, Louis et l’armée de Toulouse. Louis conseille d’envoyer aux Sarrasins un messager qui leur dise de payer tribut au roi de France et. d’abandonner la loi de Mahomet. Le capitaine charge le page de cette mission (18 v°-19 r°). Le roi d’Hibernie renvoie grossièrement le page (19 r°). Les deux armées se rencontrent sur le théâtre ; Louis et le roi d’Hibernie se battent ; Louis est vainqueur et tue le roi ; les Hiberniens s’enfuient ou se rendent. Louis reste en Irlande pour y mettre un roi. Un oiseau vient voler au-dessus de sa tête ; il cherche en vain à l’attraper ; puis c’est une lettre qui tombe du ciel ; un ange vient de la part de Dieu lui dire de se convertir. Louis, touché de la grâce, tombe à genoux (19 r°-20 v°). 7° A la seconde rédaction appartient encore un manuscrit perdu (M), qui, en septembre 1847, fut communiqué pour quelques jours à Luzel par son possesseur, M. Guilmer, imprimeur-libraire à Morlaix. Nous possédons une traduction, par Luzel, de ce texte (2). M est d’assez près apparenté à P. Il présente une lacune de deux pages comprenant la fin de la scène entre Louis, son gentilhomme et son sommelier, et le commencement de la scène des joueurs de (1) Cette scène, remarque Luzel, est imitée de la Tragédien Sant Guillarm condt eus a Poelou, Montroules, 1815, p. 43-44. Voici le texte de la chanson dans Q : Pa nis me quenta da dogan, trala, etc. — ne moa quet a vara dam hoan — breman me debre an bara guen, trala, etc. — elfe guin ardant gant ar veren — ini a hanoch na rofe quet, trala, etc. — evit guin ardant lod e vrec — me meus bet en deman guin ardant, trala, etc. — balamour da ma grec a so coant — nen eus micher evit beva, trala, etc. — vel micher an dogan ar vroman (f° 15 r°). Cf. Soniou Breiz Izel, Chansons populaires de la Basse-Bretagne, recueillies et traduites par F.-M. Luzel et A. Le Braz, Paris, 1890, t. II, p. 40. (2) Cette traduction appartient actuellement à A. Le Braz.

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boules. En général, M est plus proche de la première rédaction que P et que Q.. Il suit l’histoire de Louis depuis son arrivée au couvent de Perpignan jusqu’à la conversion de Théodosia, sans y mêler, comme Q, les délibérations du roi d’Hibernie et de ses princes. Il ne contient ni l’épisode de Hylas et Amiédon (P), ni l’épisode d’Alanic ar Haro (Q), ni l’épisode du capucin (P). Les aventures de Louis dans le Purgatoire de saint Patrice, au lieu d’occuper quatre pages comme dans P, remplissent douze pages ; de même que la première rédaction, elles comprennent une action qui se déroule devant les spectateurs, et un récit de Louis. Mais l’action se compose de dialogues entre Louis et les diables qui l’engagent à retourner sur ses pas ; les supplices, qui sont à peu près les mêmes que dans A, ne figurent que dans le récit de Louis. On peut citer quelques détails qui ne se trouvent que dans M. Astaroth emmène Louis sur le haut d’une montagne et lui promet de le rendre maître de tout ce qu’il découvre s’il consent à continuer à les servir. L’auteur breton se souvenait ici de l’Evangile (Luc, iv, 5). Le capitaine dit au gouverneur qu’il a assisté lui-même aux derniers Etats a). Louis dit à Théodosia que la mode est maintenant, même parmi les princes, d’aimer leurs plus proches parents. Comparaison des deux rédactions

Voici, pour préciser les rapports de la seconde rédaction avec la première, un tableau où sont indiquées les scènes de A et de P.

Première rédaction (A)

Seconde rédaction (P)

I. Louis, le Gentilhomme, le Sommelier. II. Le Capitaine de Toulouse, l’Evêque, les Habitants, puis le Gouverneur. I. Louis. III. Louis,- puis le Diable (ou Jacques Pietro). II. Trois Chevaliers, Louis.IV. Trois Cavaliers, Louis. V. Louis, le Gentilhomme, le Sommelier. III. Maître François, Louis, l’H6- VI. Le sergent François, Louis, tesse. l’Hôtesse. IV. François, le Gouverneur, le VII. François, le Gouverneur, le Juge. Capitaine. (1) Ce doit être un souvenir soit des Etats tenus à Saint-Brieuc en 17681769, et 1770, soit des Etats tenus à Morlaix en 1774-1775.



i

V. Louis, le Serviteur, la Ser- Cf. V. vante. VIII. Louis, Satan. VI. Louis, Carnagon IX. Trois Sergents, Louis (cf. A, XVII). X. Le Gouverneur, François, le Capitaine. XI. Louis, la Sœur Olive, Théo-VII. Louis, Thôodosia dosia. XII. Lucifer, Belzébuth, puis Louis, Lucifer. XIII. Louis, Théodosia. VIII. Théodosia, Carnagon. XIV. Théodosia, Belzébuth. IX. Louis, Théodosia. XV. Louis, Théodosia. X. Louis, les Muletiers. XVI. Louis, le Loueur de chevaux. XI. Louis, Théodosia, les Muletiers. XII. Louis, Théodosia, l’Hôte. XVII. Louis, Théodosia, l’Hôtesse, le Loueur. XVIII. Louis, le Loueur. XIII. Louis, Théodosia ; Théo- XIX. Théodosia, puis Louis. dosia. XX. Louis, le Capucin, puis Théodosia. XXI. Deux Chevaliers, Hylas et Amiédon, l’Hôtesse. XXII. Louis, les Chevaliers. XXill. Louis, Théodosia. XXIV. Deux Chevaliers, Théodosia. XIV. Louis, Théodosia XXV. Louis. XV. Théodosia. XVI. Louis, le Diable. XXVI. Louis, Belzébuth. XXVII. Théodosia, les deux Chevaliers, le Domestique. Louis, le Cavalier. XXVIII. Le Roi d’Hibernie, le . prince Théodoso, le duc Alderisa, le baron Tivollia. XVII. Louis, l’Hôtesse, les Maltôtiers. XVIII. Louis, le Marchand. XXIX. Le Gouverneur de Toulouse, le Capitaine, l’Evêque, deux Chevaliers, puis l’Ambassadeur d’Hibernie Tivollia.

XIX. Conseil des Diables : Satan, Astaroth, Belzébuth, Balbérith.

XX. Louis, la Femme, puis le XXX. Le Roi d’Hibernie et sa Paysan, la Jeune Fille. suite.

XXXI. Louis, puis Hylas et Théodosia.

XXXII. Théodosia, Belzébuth, l’Ange (Voir A, XV).

XXXIII. La Supérieure, Théodosia.

XXXIV. Louis, Lucifer, Belzébuth (Voir A, XVI).

XXI. Le Général de France, XXXV. Le Gouverneur, le Capideux Sergents et un Tamtaine, l’Evêque, le Tamboubour, puis Louis. rinaire, les Habitants, puis Louis.

XXII. Louis, le Capitaine, deux XXXVI. Le Roi d’Hibernie, ThéoSergents. doso, Tivollia.

XXIII. Le Capitaine, les Ser- XXXVII. Le Capitaine, le Gougents, puis Louis. verneur, Louis, les Toulousains, les Hiberniens, Théodoso, Tivollia.

XXIV. Louis. XXXVIII. Louis, l’Ange.

XXXIX. Théodosia, l’Ange.

XXV. Louis, puis le Diable. XL. Louis, puis Lucifer, Belzébuth.

XXVI. Le Prédicateur, puis Louis Louis, le Diable, le Prédicateur.

XXVII. Louis, le Saint-Père. XLI. Louis, le Saint-Père.

XXVIII. Louis, Satan, puis les XLII. Lucifer, Belzébuth, Louis Diables. (et. A, XXVI).

XLIII. Le Saint-Père, Louis.

XXIX. Louis, l’Evêque. XLIV. Le Prieur (ou saint Patrice), Louis.

XXX. Louis, l’Evêque, le Prieur.

XXXI. L’Evêque, le Prieur, Louis

XXXII. Louis, les Apôtres, saint Patrice.

XXXIII. Louis, les Diables : Bel- XLV. Belzébuth, Lucifer, Louis. zébuth, Astaroth, Momon,

Bérith, Satan, Asmodée, Carnagon, Bigoré. XXXIV. Louis, Moïse, Enoch, Elie. XXXV. Louis, saint Patrice, la XLVI. L’Ange, saint Procession. Louis. XXXVI. Louis, le Prédicateur, la Cousine. XXXVII. Louis, les Apôtres, saint Patrice. XXXVIII. Louis, la Procession XLVII. Louis, l’Ange. (Récit de Louis). XXXIX. Louis, le Comte de Toulouse, le Prieur.

Patrice,

On voit dans quel sens la seconde rédaction s’est développée. Pour renouveler le sujet, l’auteur de cette rédaction a utilisé les thèmes ordinaires des romans français que le colportage avait répandus en Bretagne : la guerre contre les infidèles, l’enlèvement d’une belle dame par un galant chevalier ; ces épisodes, étrangers à l’action, défigurent singulièrement une pièce dont le sujet était, à l’origine, d’une claire simplicité. Quelles que soient les différences qui séparent les deux rédactions, on se convainc facilement que l’archétype n’est pas très éloigné, car un grand nombre de vers sont communs aux deux rédactions, à quelques variantes près. En voici quelques exemples : B 55. bonjour gevaillerien terib e hoariet P 4v°. bonjour camaradet terupl e hoariet Q 3v°. bonjour chevaillerrien terrubl e choariet B 58. me mije laquat ma arhant er barti P 4v°. e mije laquet ive va arhant er hoari Q 3v°. me lacquo va arhant ive ebars er hoari B 60. a pa vou achu ar barti man, neuse e hoarifet P 4 v°. pa vo échu oman goudese e hoarifet Q 3v°. pa vo achu oman neuse e hoarifet B

66. mar de da glas labour e och déut aman man ne queret poves a donet da nem den nin a laquai cleve en dom bremesouden P 4v°. ma na gueres paoues a dont de neur den me lacay cleze em dom bremeiq souden Q 3v°. mar deo da glasq affer ezout deut dor havet

B 110. couls noblans a bourhijen pa vo comandet din P 6r°. couls noblans a comun pa ve ordrenet din Q 4 v°. quer couls nobl a partabl pa vo commandet din B 111. hac e meus désir dre ma och redoutet P 6r°. drese emeus dezir dre ma zoch redoutet Q 4v°. dre se emeus désir dre ma zoch redoutet A 120. rac ne dened qued dimb, man na ne diliquat P 6v°. ne deuit quet demp ma nen deo quet délicat Q 4v°. rac nen tennetan quet ma nan de dilicat A 229. douf scoed e ar scoden, conted man nem hredet. P 8r°. trizeq lur eo o cont, contit ma na gredit quet Q 6r°. trisoc livr eo o scoden, contet ma nam credet A 241. sellet penos e treter breman o seruigerien P 9 r°. selit en pe guis e treter oc’h ofliserien Q 6r°. trisec livr eo o scoden, contet ma nam credet A 320. nelfe qued resistan ous an ol en antier a te so reputed partoud vid eur voleur P 9 v°. ne al quet résista deus eur vro en antier a te so reputet gante evit eu laer Q 7 v°. rac eun den ne ell quet résista deus ar bed en antier a te a so reputet gant an oll eur voler A 365. non pas ma hinderf enpechemand ar bed P 13v°. guir eo va hender mes me ne allan quet Qllr®. guir eo va henderv ques na meus moyen a bet A 708. penos ou ar beuan ? non eus peloch netra friped a difriped eo ar vesellio arhand a guemend o poay lairred guechal deus ar gouand P19v°. penos e refomp ni evit beva rac non deus quen netra flippet a disippet eo on ol arhant a quement amoamp laeret deus ar gouant Q14r°. penos e veso gret, ne neus pelloch netra fripet a disfripet eo on oll arhant a quement a moamp laeret deus ar gouant A 788. hed eo dar jubile da nem gonuertisan P30r°. rac et eo de houent de neur gonvertissan A 815. pale charny die ched ary eur hauailler bremesouden vatand me reiou e afer

P27r°. palajarni vantre morbleur cettu eru duont daou cavailier bremeiq souden vantant me a reio o hafer Q16v°. parle chami vantre cetu eur havailler brernan souden vantant me rayo e affer A 815. gand eun ten pistolen a reinquan e lasan P27v°. gant eun toi flech e renquan cavet da eunan evue Q16v°. gant eun ten pistolen e rencan e Iaza A 1374. a bromed evnan repousin an armé P32r°. a bromet e eunan repousin en antier an arme Q17r°. ac a bromet e unan repoussi eun arme A 2073. pardonin a rafe pehegou veniel non pas sacrilegou quer du a quer cruel vel eteus bed groed gand peb falagries pa degoud da anleuin da giniterf gompes P 37v°. pardonni sur a rafe pehejou veniel non pas sacrilegiou quen du a quer cruel evel a heus te gret dre beb falagries pa deujout da enlevi da guininter gompes A 2377. a liser man, autro, a deu dam estonin P 38v°. a lizer man, va map, a deut dam estonni A 2453. a no pou da eb tam olen P38v°. no pezo evit eb tam olen

dibin nemed bara eb guel enan, herue eurs a lesen repas nemert bara eb goel abet enan herves urs ar reglen

Les rapports des divers manuscrits entre eux pourraient être ainsi représentés : X

Etude de la première rédaction

Comme on le voit par ce bref exposé, quelqu’intérêt que présente la variété des épisodes romanesques de la seconde rédaction, la première rédaction n’en est pas moins préférable du point de vue de la composition dramatique. Elle permet, d’autre part, de mieux

apprécier l’originalité de l’auteur breton. Celui-ci n’a évidemment eu d’autre source que le livre du P. Bottillon, et il est facile de • dégager ce qui lui est propre dans la composition et le détail du mystère. Pour la composition de la première journée, l’Histoire de la Vie et du Purgatoire de saint Patrice ne fournissait que peu de matière (p. 79-94). Le sujet de la seconde journée, au contraire, occupait chez le P. Bottillon les pages 94-141. Le tableau suivant aidera à préciser la comparaison des deux textes ; la première colonne contient l’indication des scènes du mystère ; la seconde, l’indication des passages qui en sont la source. MYSTÈRE BRETON

Le P. BOUILLON

Première journée.

d«R

Monologue de Louis Eunius, v. 1-38. Les joueurs de boule, v. 39-98. Le sergent et l’hôtesse, v. 99-239. La plainte du sergent au gouverneur, v. 240-277. Le serviteur et la servante de Louis, v. 278-309. La proposition de Carnagon, v. 310-351. L’enlèvement de Théodosia, v. 352-308. Le meurtre des muletiers, v. 500-520. L’arrivée à l’hôtellerie, v. 521-644. La vie de Théodosia et de Louis, v. 645-736. Fuite de Théodosia ; arrivée du Diable, v. 737-808 Le meurtre du cavalier, v. 809-824. L’hôtesse et les douaniers, v. 825-946. Le marchand de toile, v. 947-1002. Le Conseil des diables, v. 1003-1222. La voyageuse, v. 1223-1282. Le paysan, v. 1283-1310. La jeune fille, v. 1311-1338. Le recruteur ; Louis s’enrôle, v. 1339-1432. Victoire de Lamontagne, v. 1433-1610. L’embuscade et le papier mystérieux, 1611-1648. Repentir de Louis Eunius, v. 1649-1682.

.an, 1751

P. 79.

P. 82-83.

P. 83-86.

P. 86-90.

P. 91. P. 92-94. P. 94.

Deuxième journée.

Prologue, v. 1683-1818. Louis et le diable, v. 1819-1908. Le prédicateur, v. 1900-2162. Louis chez le Pape, v. 2163-2250. Lutte de Louis avec le vieux Satan, v. 2251-2370. P. 97-101.

Louis en Hibernie chez l’évêque et le prieur, v. 2371-2508 .

P. 104. relation de Louis Eunius. L’entrée dans le Purgatoire, v. 2509-2628. P. 105. Rencontre des douze apôtres, v. 2629-2694. P. 107. Arrivée des diables : le brasier, v. 2695-2738. P. 110-111. La potence, v. 2739-2768. L’écrasement des os, v. 2769-2824. La roue, v. 2825-2856. P. 114. Le puits infernal, v. 2857-2904. P. 116-117. La montagne et l’étang, v. 2905-2962. Les deux vieilles maisons, la glace et l’eau bouillante, v. 2963-3022. P. 118 ; 114. Le pont de glace, v. 3023-3096. P. 126-127. Rencontre de Moïse, Enoch et Elie, v. 3097-3134. Saint Patrice et la procession, v. 3135-3160. P. 131-136. Retour de Louis Euniüs, le prédicateur et la cousine dans le Purgatoire, v. 3161-3198. P. 121-122. Les apôtres, v. 3199-3226. P. 138. La sortie de la caverne, v. 3227-3250. P. 139. Le récit de Louis Eunius, v. 3251-3596. Le comte de Toulouse et Louis, v. 3597-3640. En parcourant ce tableau, on se convainc que, en général, l’auteur du mystère a suivi scrupuleusement le P. Bottillon, à l’exception de l’épisode du prédicateur et de la cousine dans le Purgatoire, qu’il a déplacé, et de quelques autres modifications de ce genre. D’autre part, il a développé des épisodes que le P. Bottillon indiquait en quelques mots ; les vols, les violences et les meurtres de Louis Eunius, si complaisamment exposés en une suite de scènes par l’auteur breton, ne sont pas racontés en détail par le P. Bottillon, chez qui, d’autre part, les exploits de Lamontagne n’ont rien de merveilleux. La visite de Louis Eunius au Pape et leur dialogue est de l’invention de l’écrivain breton. Certaines descriptions du modèle sont écourtées, par exemple la vie que Louis et Théodosia menèrent en Espagne, la vision des plaines où gisent les damnés. Enfin quelques épisodes sont modifiés. Chez le P. Bottillon, l’homme que Louis attend la nuit pour l’assassiner n’est point son capitaine ; le prédicateur donne à Louis l’absolution au lieu de l’envoyer au Pape, et ce sont des personnes de la société qui lui parlent du Purgatoire de saint Patrice. Ce n’est pas seulement dans les détails de l’action que se révèlent les facultés d’invention de l’auteur, mais aussi et surtout dans la création de personnages nouveaux. Les diables jouent dans la

pièce un rôle considérable, le plus souvent comique ; on connaît leur nom ; ce sont le vieux Satan, vieillard ridicule et presque gâteux (cf. v. 2358) ; le compatissant Astaroth, l’impitoyable Momon et tant d’autres : Bérith, Bigoré, Asmodée, Belzébuth. Leurs discours^sont d’un bout à l’autre une composition originale. Les acteurs secondaires, aubergistes, soldats, douaniers, passants, personnages familiers de la route bretonne, ont été multipliés presque jusqu’à l’excès ; à défaut de relief, ils ont une simplicité vraie, et leurs aventures sont suffisamment variées ; la résignation passive des femmes a quelque chose de touchant ; mais il en est d’énergiques, comme la dame à qui Louis demande de la monnaie ; les douaniers ne ressemblent pas aux soldats ; les caractères des deux sergents choisis pour servir de témoins à Louis s’opposent suffisamment. Le sous-officier recruteur, dont les paysans bretons du XVIIIe siècle durent souvent admirer la belle prestance, les vêtements dorés et le casque empanaché, a été changé, par le naïf auteur, en général de France ; ce singulier .« général » fait le boniment, marchande la solde et cède aux menaces de Lamontagne. La rencontre de Louis Eunius et des douze religieux (v. 2665) a été transformée par l’introduction des personnages de saint Pierre, saint Paul et saint Patrice. Le sergent aux longues moustaches, objet de crainte et de moquerie dans les campagnes bretonnes, est devenu un type amusant par sa couardise finaude.

Le personnage de Carnagon est singulièrement déconcertant. Il est qualifié (v. 317 b) de fils aîné de Marie Robin, c’est-à-dire de policier ou de gendarme. Or, le rôle qu’il joue auprès de Louis Eunius et de Théodosia est (v. 310-398) celui de Méphistophélès auprès de Faust et de Marguerite. Et, dans l’enfer, il apparaît comme démon (v. 2938-2947). Les vers mis dans la bouche de Carnagon, dans A 2835, sont débités par le diable Asmodée, dans C ; dans M, Carnagon est remplacé par Satan, et dans Q par Belzébuth.

Les personnages principaux dont l’auteur breton avait trouvé le prototype chez le P. Bouillon ne sont pas exactement copiés sur leur modèle. Louis Eunius n’est plus seulement le sinistre brigand w de la légende espagnole, ivrogne, voleur, souteneur, assassin, c’est en même temps tantôt une sorte de Guignol ou de Polichinelle dont il a le langage cru, les saillies plaisantes et le gros bâton ; tantôt, sous le masque de Lamontagne, un matamore de la comédie italienne et un faiseur de prodiges. Il n’est pas jusqu’à Théodosia, dont le caractère était pourtant (1) Le théâtre breton avait un personnage analogue dans Robert le Dia6le.

suffisamment esquissé par Montalvan, qui n’ait, dans l’excès de son malheur, quelques accents personnels et des plaintes touchantes ; au lieu de la cloîtrer dans un couvent d’Espagne, l’auteur breton l’envoie à un jubilé à Sens et s’abstient de nous renseigner sur le reste de sa vie. Mais l’auteur n’a pas osé modifier le récit du P. Boüillon de façon à ce que le personnage énigmatique de la cousine que Louis rencontre dans le Purgatoire (v. 3185-3192) ne fit qu’un avec Théodosia.

Quant à la conduite du drame, elle présente d’assez graves défauts dus à l’inexpérience dramatique de l’auteur. La première partie est constituée par une sorte de pièce à tiroirs où les scènes ne sont pas rangées de façon à ce que l’action suive une progression régulière. L’épisode de Théodosia, qui devrait être le nœud de l’action, est perdu au milieu de scènes analogues qui n’offrent pas le même intérêt et dont deux sont à peu près identiques, la scène de la femme, v. 1250, et la scène de la jeune fille, v. 1311 a). Je ne parle pas des diableries, qui constituent dans les pièces bretonnes un intermède comique indispensable.

Dans la seconde partie, l’auteur breton a trouvé chez le P. Boüillon la gradation des effets dramatiques ; il a traité certaines scènes, par exemple le discours de l’évêque, avec un sens réel de la grandeur tragique, mais il met malencontreusement dans la bouche de Louis Eunius un récit complet de tous les événements que nous avons vu dérouler sous nos yeux. On peut se demander si ce récit n’a pas été introduit pour suppléer aux obscurités qu’une mise en scène moins que rudimentaire devait laisser dans l’esprit des spectateurs, ou même si, à certaines représentations, ce récit ne tenait pas la place des scènes de supplice impossibles à figurer w. Quoi qu’il en soit de ces défauts, le Mystère breton du Purgatoire de saint Patrice est une des pièces qui font le mieux comprendre ce que fut en Bretagne le théâtre populaire ; essentiellement religieux — les prières, invocations, sermons, confessions occupent un sixième de la pièce ; — proche de la vie de tous les jours, dont il met en scène les personnages, reproduit les menues actions, parle le langage ; — pénétré de grosse gaîté et parsemé de scènes (1) Cette_ scène se trouve d’ailleurs après que Louis a déclaré qu’il s’en allait en Allemagne, et il y est question de la ville de Vitré. C’est donc probablement une interpolation.

(2) Toujours est-il qu’il contient un épisode (v. 3379-3385) qui n’est pas dans la pièce et qui ne se trouve pas chez le P. Boüillon. C’est l’enfer figuré par la gueule de Satan dans laquelle entrent les âmes. Cf. la Vision de Tundale, éd. Friedel et Kuno Meyer, p. 39, 134. Cette représentation est fréquenta dans l’art chrétien. On la trouve, par exemple, dans Les très riches heures de Jean de France, duc de Berry, par Paul Durrieu, Pgris, 1904, pl. XLVII. Cf. C. S. Boswell, An Irish precursor of Dante, p. 215, note.

burlesques. « Vous avez bien ri en voyant la Vie de Louis Eunius », dit le Prologue de la seconde Journée ; et le Prologue de la Vie de saint Patrice reconnaît que cette pièce n’est pas encore à leur gré parce qu’elle ne contient pas de farces divertissantes tt). Cette bouffonnerie, élément essentiel des mystères bretons, s’exprime volontiers par le mot propre. H. de la Villemarqué ne connaissait point le Mystère de Louis Eunius lorsqu’il écrivait dans son Introduction au Grand Mystère de Jésus : « Les maîtres de la scène bretonne auraient cru manquer de respect au divin sujet de leur inspiration dramatique en souillant l’oreille de leurs auditeurs par des expressions dont le parfait naturel ne rachetait nullement l’indécence(î)... C’est guidée par le même instinct de pudeur que la muse rustique des Bretons n’a jamais proféré de ces mots(3) qu’il ne faut pas entendre(4). » Renan ne l’avait sans doute point lu quand il caractérisait ainsi la race celtique : « Elle [la race celtique] ne connaît pas ce singulier oubli de la condition humaine et de ses destinées qu’on appelle la gaieté... l’infinie délicatesse de sentiment qui caractérise la race celtique est étroitement liée à son besoin de concentration... nulle autre n’a conçu avec plus de délicatesse l’idéal de la femme et n’en a été plus dominée... jamais peuple ne fut d’ailleurs plus sobre et plus détaché de toute sensualité(5). » Et pourtant, par une coïncidence singulière, dans la première lettre que Luzel adressa à Renan en 1858, il est surtout question du Purgatoire de saint Patrice <•>. La tragédie de Louis Eunius est une de celles qui furent le plus souvent représentées. L’état dans lequel nous est parvenu le texte primitif, que l’on s’efforce de le restituer d’après A ou de le découvrir dans C, montre assez par combien de bouches et de mains dut passer l’histoire orale ou écrite du grand pécheur.

La représentation.

Rien ne ressemblait moins à la représentation d’une tragédie française que la mise en scène d’un mystère breton. Les prologues, les épilogues, les jeux de scènes en sont les caractéristiques les plus curieuses. Le ms. 45 contient le prologue de la seconde journée, et le ms. 39 le prologue du premier acte ; l’imprimé C les fl) Voir ci-dessous v. 1691. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 176, v. 132. (2) Voir vers 168, 1271, 3001.

(3) Voir vers 160, 568, 712, 850.

(4) H. de la Villemarqué, Le Grand mystère de Jésus, 2e édition, p. xcix. (5) Essais de morale et de critique, p. 384, 385, 386. (6) A. Le Braz, Essai sur l’histoire du Théâtre celtique, p. 340. J’ai lu le brouillon de cette lettre qui appartient maintenant à A. Le Braz.

prologues des deux journées. « Chaque acte », écrit Luzelw, « est précédé d’un prologue destiné à donner aux spectateurs un résumé de ce que contient cet acte et à implorer leur indulgence pour l’inexpérience et la timidité des acteurs. Autrefois, ces prologues se récitaient en exécutant des marches sur la scène aux sons d’un biniou et d’un violon. Le personnage chargé de réciter le prologue se mettait à la tête d’une petite troupe de six ou huit hommes et, précédé du sonneur de biniou, il continuait à faire lentement le tour du théâtre suivi de sa troupe, marquant la mesure avec les pieds, déclamant gravement, doctoralement son prologue, et faisant une pause par quatre vers. Le prologue est dans l’opinion des acteurs bretons une chose indispensable ; ils pensent que le public étant prévenu de ce qui va arriver doit tout juger et tout apprécier avec plus de facilité et de sang-froid, n’étant pas à tout moment surpris et étourdi par les nombreux incidents de l’action qui se déroule sous ses yeux ». Les prologues de Louis Eunius ne sont guère ainsi qu’une analyse de la pièce, sans réflexions personnelles intéressantes. On peut noter pourtant dans A les excuses ordinaires sur l’ignorance et la grossièreté du Prologueur(,) ; dans D, les curieux détails sur les remaniements qu’a subis le texte. Nous n’avons conservé d’épilogue que dans la traduction de M. Ce n’est d’ailleurs qu’un épilogue passe-partout, car, sauf quelques variantes et lacunes, il est identique à l’épilogue de la Vie de saint Patrice (3), et il ressemble singulièrement à l’épilogue de Moïsel4) et à celui d’Eulogius(6>. Il n’en est pas moins fort intéressant. L’acteur chargé de ce rôle remercie d’abord les prêtres, puis les nobles, les clercs, les jeunes gens ; ensuite il prévient les critiques des gens malintentionnés, et fait appel à la générosité de l’assistance pour aider les acteurs à payer leur souper : « Aussi je vous en prie, qu’aucun de vous ne reste à la maison, — et dans la crainte que vous ne l’oubliiez, je vous prie aussi d’apporter chacun pour le moins une pièce de trente sols. — Enfin, chers auditeurs, c’est votre devoir ; mais n’eussiez-vous qu’un sol, revenez quand môme, nous ferons notre possible pour que vous vous en retourniez (1) Notes manuscrites inédites sur le théâtre breton, en la possession de A. Le Braz ; — A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p ; 406, 479 ; Luzel, Sainte Tryphine et le roi Arthur, p. xxv ; Revue celtique, t. III, p. 392.

(2) V. 1813.

(3) Publié et traduit par J. Dunn, p. 258-265. (4) Traduit par Luzel, Sainte Tryphine et le roi Arthur, p. xxix-xxxix. (5) Traduit en partie par A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 409, et publié en partie par le même, Textes bretons inédits, pour servir à l’histoire du théâtre celtique, p. 30.

contents. » L’Epilogue se termine par une invocation à saint Patrice suivie assez inopinément de la conclusion suivante : « Enfin, indulgents auditeurs, je vois que je commence à vous ennuyer et surtout ma douce chérie, qui, à chaque tour que je fais sur le théâtre, me sollicite par une œillade. Elle me sourit sans cesse ; elle est impatiente de me voir auprès d’elle. Je finis donc et prends congé de vous jusqu’à demain, en vous priant d’excuser nos fautes. Adieu donc, honorable compagnie, et si je n’ai pu vous contenter, puisse celui qui me remplacera demain être plus heureux 1 »

Les décors, la mise en scène, les machines et les accessoires étaient le plus souvent rudimentaires (1>. Dans la seconde rédaction, un ange descendait du ciel et agitait un papier au-dessus de la tête de Louis. Il est possible que cette descente fût purement conventionnelle. Mais nous aimerions à savoir quel procédé en suggérait l’idée. Dans M, était représentée sur la scène l’entrée de la caverne du Purgatoire ; un rocher s’écroulait sur Louis. «

Les jeux de scène constituaient un intermède comique fort apprécié sans doute de ce public, dont l’attention se serait fatiguée à suivre sans détente le développement de l’action. Il y avait d’abord les jeux, parties de boule ou de cartes(,), les batteries de tambour(3), les coups de fusil(4), qui faisaient partie intégrante de la pièce. Il y avait mieux encore. « Toutes les fois que la scène changeait, un personnage, un vieillard placé dans les coulisses, s’avançait sur le théâtre et disait d’un air débonnaire : Allons, scène ! Aussitôt, tous les acteurs se prenaient par la main et exécutaient une ronde où tous les rangs, tous les pouvoirs, tous les ordres étaient confondus. Dieu donnait la main à un hideux démon velu et cornu ou à un ange, indifféremment ; les rois et les princes, aux gens du peuple ; les fées, les enchanteurs, les magiciens, les sorcières et toute la légion des diables — le monde surnaturel — aux évêques, aux saints ermites, aux magistrats, aux soldats — le monde de la réalité ; — et tous étaient emportés pêlemêle dans une ronde infernale, aux sons d’un mauvais violon, d’un tambourin, d’un biniou et d’une bombarde. Puis la ronde s’arrêtait ; chaque personnage rentrait dans son rôle et la repré(1) Voir A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 474-475. (2) Voir ci-après, vers 40 et suiv. ; 150 et suiv. (3) Voir ci-après, 338 b. Dans M, les trois sergents qui font la publication de recherche de Louis Eunius sont accompagnés d’un tambour qui annonce la publication à trois endroits différents du théâtre. Il en est de même dans la scène de racolage. Dans Q, le gouverneur est suivi d’un trompette. (4) Voir ci-après 818 b. Dans M, il est dit qu’à l’arrivée du gouverneur de Toulouse le peuple décharge ses mousquets en signe de joie.

sentation continuait jusqu’à ce qu’une nouvelle scène les vint encore réunir et confondre(1). » Sur le nombre des acteurs, dans la seconde rédaction de Louis Eunius, nous avons un renseignement précis ; il était de soixantesept, d’après une note du texte breton de M, traduite par Luzel. Dans le texte que nous publions, il était de cinquante-six, sans compter les nombreux figurants des processions : Louis. Le Premier Soldat, Le Second Soldat, Le Troisième Soldat. Le Sergent Maître François. L’Hôtesse. Le Juge. Le Gouverneur. Le Serviteur. La Gouvernante. Carnagon. Théodosia. Le Premier Muletier, Le Second Muletier. L’Hôte. Le Cavalier (personnage muet). Le Premier Maltôtier, Le Second Maltôtier. La Veuve. Le Marchand de toile. Le Vieux Satan. Bigoré. Asmodée. Astaroth. Huit Diables (cf. v. 2694 b). Belzébuth. Balbérith. Momon. Lucifer (muet). La Femme. Le Paysan. La Jeune Fille. Le Général. Le Capitaine. Le Premier Sergent, Le Second Sergent. Le Prédicateur ou Le Confesseur. Le Pape. L’Evêque. (1) Luzel, Notes manuscrites inédites sur le théâtre breton, en la possession de A. Le Braz. Voir A. Le Braz, Essai sur Vhistoire du théâtre celtique, p. 481-482.

Le Prieur.

Les Douze Apôtres.

Saint Patrice

Enoch.

Elie.

La Cousine.

Le Comte de Toulouse.

Quant aux costumes, nous savons qu’ils dépendaient uniquement des ressources locales. Là où les bahuts de famille renfermaient un nombre suffisant d’antiques défroques, ils étaient, sinon conformes au rôle, du moins intéressants par leur archaïsme. Là où, au contraire, on ne trouvait que des accoutrements modernes, rien n’était plus disparate ni plus incohérent : « Les diables avaient des pantalons garance, des queues fantastiquement longues ; et une peau de bélier munie de longues cornes et jetée sur leur tête complétait l’accoutrement(1). » Luzel cite l’exemple de ce Kervoura qui parut sur la scène sous l’uniforme d’un sapeur-pompier de la ville de Paris (,). Les remarques sur les habits plus ou moins bien ajustés des acteurs étaient un des éléments comiques de la pièce : « Retenez mieux vos pantalons qui menacent de tomber », crie Louis aux deux sergents Louis et Jacques qui viennent publier l’ordre d’arrestation(3).

Le mystère que nous éditons ne contient guère d’indication sur l’apparence et le costume des personnages. Le sergent devait avoir d’énormes moustaches frisées (v. 130, 140) ; un paysan porte un pourpoint de toile (v. 1283) ; Louis Eunius, repentant, est vêtu de noir et porte un bâton à la main (v. 1818 a) ; un homme monté sur un cheval paraissait sur la scène (818 b)(4). Mais la richesse du pays permettait-elle de reproduire les somptueux cortèges de féerie qu’indique l’auteur : dans le Paradis, une procession de quelques millions de gens avec croix, bannière et musique ; à l’entrée du Purgatoire du lac Derg, un cortège de prêtres, de moines, de capucins et de gens en nombre infini ? Il est permis d’en douter. (1) Luzel, Notes manuscrites inédites sur le théâtre breton. A Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 464-469. Des descriptions complètes de costumes sont en tête du Mystère des trois rois, publié en 1745 (Revue celtique, t. VII, p. 326-331). (2) Revue celtique, t. III, p. 392. (3) Traduction française de M par Luzel, f°*4 v°. (4) Cf. dans M, le siège du château de l’empereur d’Hibernie : « Le gouverneur, le capitaine et Louis montent à cheval ; les habitants de Toulouse suivent à pied » ; de même, à l’arrivée du gouverneur de Toulouse, le capitaine monte à cheval pour aller â la rencontre du gouverneur qui arrive accompagné de deux princes et d’un empereur. Louis monte â cheval pour se rendre à Toulouse.

Quoi qu’il en soit, l’impression produite était profonde, soit chez les spectateurs, soit chez les acteurs eux-mêmes. En 1865, Luzel, au cours d’une de ses tournées en Bretagne à la recherche des restes et des souvenirs du théâtre celtique, rencontra à Lannion un des meilleurs acteurs de l’ancienne troupe, un vieux tailleur nommé Yves Le Pezron, qui demeurait au bas de la rue de Tréguier. « Quand je lui eus fait part du motif de ma visite », écrit Luzel, « un frisson électrique parcourut tout son corps, ses yeux s’animèrent, il se redressa de toute sa taille », et le voilà contant les rôles où il s’illustra : « Louis Eunius, Monsieur, quel homme ! quel brigand sans âme et sans cœur ! Eh bien, n’importe, j’aimais bien à jouer ce rôle-là. Imaginez-vous que l’on joue aux boules sur le théâtre, et aux dés[91] et aux cartes. Je perds à tous les jeux et, comme je n’ai plus le sou, j’assomme à coups de bouteilles les joueurs qui m’ont gagné mon argent, puis je les vole, je les dépouille de tout ce qu’ils ont sur eux et les laisse à demi-morts sur la place ! Puis, je me fais brigand sur les grands chemins, je détrousse les marchands, je pille les châteaux, je viole les femmes, j’enlève du couvent ma cousine Théodosia et m’enfuis avec elle... Enfin, je suis un vrai démon incarné ! Puis, tout change tout à coup : autant j’ai été méchant et cruel, autant je deviens repentant et mène une vie exemplaire. Pour racheter ma vie de désordres et de crimes, je fais le vœu d’entreprendre le redoutable voyage du Purgatoire de saint Patrice. Il fallait me voir, revenu du gouffre, racontant les peines et les ‘tourments de ce lieu d’expiation. Tout le monde pleurait à grosses larmes. Les Lannionriais n’ont pas oublié et n’oublieront pas de longtemps Yves Le Pezron dans le rôle de Louis Eunius ! Ecoutez ce passage[92]. » Et Le Pezron récita avec enthousiasme à Luzel les vers 3170-3199 du Mystère.

La date, le lieu et l’auteur.

Quelle est la date de Louis Eunius ? Pour trancher cette question, les idées contenues dans la pièce nous seront d’un plus grand secours que la langue. La langue des mystères bretons est en effet une langue assez artificielle où les éléments vivants se mêlent aux archaïsmes[93]. Du point de vue des idées, il faut distinguer

dans la pièce les parties essentielles et les parties accessoires. Ces dernières sont les diableries et les prologues que l’on renouvelait sans doute de temps en temps à l’occasion d’une reprise. Ainsi le mystère imprimé en 1871 ne diffère guère du manuscrit 45 que par le second prologue et quelques discours de diables. Voici les renseignements que l’on peut tirer des diableries. Le discours d’Astaroth dans le manuscrit 45 n’est pas d’accord avec la pièce. Astaroth dit que Louis a tué le sergent (v. 1023) ; or il l’a seulement battu et blessé (v. 253 et suiv.) ; qu’il a tué deux marchande (v. 1024), or il a tué un marchand de toile (v. 981, 1020) ; qu’il a empoisonné l’hôte et l’hôtesse (v. 1030), or il n’y a aucun épisode de ce genre. Ce discours provient donc d’une version différente de la nôtre.

Dans le discours de Belzébuth, il est question : des pommes de terre qui composent l’unique nourriture des paysans (v. 1056). La première mention de la culture de la pomme de terre en Bretagne date de 1779 où M. Vincent Cawiesel, prêtre d’origine irlandaise, curé de Messac de 1771 à 1786, rappelait dans une lettre adressée à Parmentier(1> qu’il avait, dès 1741, cherché à développer dans son pays d’adoption la culture de la pomme de terre, très répandue alors en Irlande ;

De l’arrivée des prêtres parisiens (v. 1072) ; Des pantalons à petit-pont (v. 1095). La mode des pantalons à pont dura de 1768 à 1830 environ(i) ; Des colinettes frisées (v. 1098). La colinette est un bonnet de déshabillé ; l’auteur breton veut sans doute parler des collerettes très à la mode sous Louis XV.

Bérith parle :

Des juges de paix (v. 1142). Ce nom n’est guère connu avant la fin du XVIIIe siècle(3) et les juges de paix furent créés en 1789 ; les procureurs fiscaux, dont Bérith fait mention au même endroit, furent supprimés en même temps que les justices seigneuriales ; De l’Amérique et de l’état heureux des sauvages (v. 1125 et suiv.). Cette théorie du « bon sauvage » que l’on trouve au début du XVIIIe siècle, dès 1704, chez Gueudeville et aussi chez les missionnaires jésuites, est en partie d’origine littéraire<4> ; (1) Guillotin de Courson, Courrier de Rennes du 5 juin 188G. (2) La Grande Encyclopédie, t. XII, p. 1168, 1169. (3) On le trouve, par exemple, en 1789 dans le cahier du Theil (Ille-etVilaine), Art. 24, Sée et Lesort, Les cahiers de doléances de la sénéchaussée de Rennes pour les Etats généraux de 1789, t. I, p. 468. Je dois cette indication à mon collègue M. Henri Sée. (4) A. Lichtenberger, Le socialisme au XVIIIe siècle, Paris, 1895, p. 53-63. Cf. Voltaire, Le Huron ou VIngénu, Œuvres, éd. Garnier, t. XXI ; la première édition de ce conte est de 1767.

De l’île de Cythère (v. 1166). Outre les souvenirs mythologiques et artistiques, il y a peut-être une allusion à l’île de Taïti, dénommée la Nouvelle-Cythère par Bougainville(1), en 1768 ;

De la fin de l’Inquisition en Espagne (v. 1185). La première atteinte aux privilèges de l’Inquisition date de 1768(,).

Dans le corps de la pièce, des allusions à des événements historiques pourraient permettre de fixer une date :

V. 766 : « J’entends dire qu’il y a un jubilé à Sens en Bourgogne. » Il n’y eut pas, au XVIIIe siècle, de jubilé propre au diocèse de Sens. Y a-t-il là un souvenir soit du pardon annuel de Sens, soit de la mission célèbre donnée à Sens en 1741 par le P. Bridaine(3) ? De 1741 à 1778, Joseph-René de Larlan de la Brousse, vicaire général et pénitencier de Sens, fut prieur de Gahard et résidait ordinairement en la terre et seigneurie de la Brousse, dans la paroisse de Laurenan„ évêché de Saint-Brieuc(4>. Est-ce par lui que la notion de Sens pénétra jusqu’à notre auteur breton ? V. 1347 : « Les Anglais sont descendus à Dunkerque en Flandre ». Dunkerque a été assiégé par les Anglais en 1793. V. 1535 : «( Ils ont pris la route d’Ypres et de Fûmes ». Ypres fut pris par les Français, pendant la campagne de Flandre, le 25 juin 1744 ; Fûmes, le 11 juillet. Mais on s’est battu aussi à Ypres et à Fûmes en 1793.

V. 1427 : « dans les hussards Chamborant j’ai demandé à entrer ». Ce régiment de hussards fut levé par le comte Esterhazy en vertu d’une autorisation royale de décembre 1734 et formé à Strasbourg le 25 janvier 1735 ; il passa à l’armée de Flandre au milieu de 1746 ; le marquis André-Claude de Chamborant en a été nommé colonel le 20 février 1761(5). La mention de ce régiment dans le Mystère n’est donc pas antérieure à cette dernière date. V. 3598 : Le comte de Toulouse qui paraît dans la pièce y est (1) Voyage autour du monde par la frégate du roi La Boudeuse et la flûte l’Etoile, Paris, 1771, p. 198, 209. Cf. Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, Œuvres, éd. Brière, 1821, Philosophie, t. II, p. 353-423. (2) H. C. Lea, A History o{ inquisition of Spain, New-York, 1907, vol. IV, p. 389.

(3) Communication de M. l’abbé Chartraire, secrétaire de l’archevêché de Sens. Le pardon de Sens était célébré au mois de mars devant l’abbaye de Saint-Pierre-le-Vif ; il avait été octroyé en 1108 et confirmé en 1061. Les jubilés universels, depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle, furent donnés en 1750, 1758, 1768, 1775, 1792, 1825-, 1829. (4) C’est à M. André Lesort, archiviste d’Ille-et-Vilaine, que je suis redevable de celte ingénieuse remarque. Cf. Guillotin de Courson, Pouillé du diocèse de Bennes, t. II, p. 405. Archives d’Ille-et-Vilaine, fonds du prieuré de Gahard (série H). Ogée, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, t. I, p. 467.

(5) Susane, Histoire de la cavalerie française, t. II, p. 253-256.

sons doute introduit par allusion à Louis-Alexandre de Bourbon, comte de Toulouse, gouverneur de Bretagne de 1695 à 1698, mort en 1737.

V. 1415 : « les déplanteurs de croix, et les fripons qui ont fait du feu avec les saints et les autels ». Il semble bien qu’il y ait là une allusion à quelques épisodes de la Révolution(1). V. 1569 : « le général Cobourg j’ai aussi tué ». Le feld-maréchal Cobourg (1737-1815) prit part à la guerre de Sept ans, mais est surtout connu par les batailles de Nerwinde, 1793 ; Tourcoing, 1794, et Fleurus, 1794.

V. 2188 : « Mon nom est Louis Eunius, fils du duc de Clarence ». Il est possible qu’il s’agisse de Guillaume IV, duc de Clarence, comte de Munster (1765-1837), à moins que ce souvenir ne remonte à la guerre de Cent ans et s’applique à Thomas Plantagenet qui, d’après la légende très répandue en France, demanda à être noyé dans un tonneau de malvoisie.

Si, de ces nombreux détails, nous retenons seulement ceux qui nous donnent les dates les plus précises, nous pouvons conclure, abstraction faite des interpolations possibles : 1° Que les discours de diables ne peuvent être antérieurs à 1770 (fin de l’Inquisition en Espagne) et bien probablement ne sont pas antérieurs à l’institution des juges de paix (1789) ; 2° Que le corps de la pièce ne peut être antérieur à 1761 (hussards Chamborant) et n’est sans doute pas antérieur à 1793(,) (siège de Dunkerque, Cobourg).

Les discours de diables et le corps de la pièce sont donc vraisemblablement de la même date, et ils dateraient l’un et l’autre de l’époque de la Révolution. Depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle jusqu’en 1830, après les proscriptions du commencement du XVIIIe siècle, il semble qu’il y ait eu un renouveau du théâtre breton. Les manuscrits bretons datés qui nous sont parvenus forment la liste suivante depuis 1750 : 1751, 1758, 1760, 1762, 1763, 1765, 1772, 1780, 1784, 1789, 1792, 1797, 1799, 1801, 1802, 1804, 1807, 1811, 1812, 1814, 1815, 1816, 1822, 1825, 1826. (1) Voir aussi v. 1096, où l’on parle des « tyrans », expression courante à l’époque révolutionnaire. Sur le peu d’influence qu’ont eu sur les auteurs et les copistes bretons les grands événements de la fin du XVIIIe siècle et du commencement du XIXe, voir A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 223. C’est à mon ami Georges Weill, professeur à l’Université de Caen, que je dois les remarques sur les faits historiques contemporains de la Révolution.

(2) On pourrait même descendre plus bas que 1795 si le détail du vers 905 : « trois pièces de vingt réaux » appartient au fond primitif. Car la pièce de 20 réaux n’existe pas en Espagne, et il ne peut s’agir que de la pièce française de cinq francs créée en 1795.

Jusqu’à quelle date pouvons-nous descendre ? Au plus tard jusqu’au commencement du XIXe siècle, à une époque où les souvenirs de l’ancien régime étaient encore très vivants et n’avaient pas été remplacés par les idées nouvelles. Cette date, ainsi déterminée entre 1793 et 1800, est-elle celle de la pièce originale ou celle du remaniement qui nous est parvenu ? Nous n’en savons rien et ne pouvons le savoir.

Quant à l’époque de l’année où fut représenté notre mystère, on peut hésiter entre les principales saisons dramatiques : Noël, les Jours Gras, Pâques. Le vers 1121, « à présent que l’hiver est arrivé », indiquerait plutôt Noël. Mais la troupe de Lannion jouâit fréquemment la tragédie à l’époque de la foire de la SaintMichel(l), qui durait trois jours (29 septembre). On pourrait songer aussi à déterminer la provenance de notre Mystère en relevant les noms de lieux qui y sont cités. V. 1315 : « Il y a trois lieues d’ici à la ville de Vitré ». A moins qu’il ne s’agisse d’une ville dont le nom est défiguré, — car Louis Eunius vient d’annoncer qu’il va partir pour l’Allemagne (v. 1307) et nous ne savons s’il y est arrivé, — le nom de Vitré n’est qu’une indication fantaisiste. A la fin du XVIIIe siècle, Vitré était plus connu et presque aussi peuplé que maintenant(,). V. 3067 : « Allons, mouton du Pont-Glas et lutin de Quéribou ». Pont-Glas et Kéribo désignent un village et un château situés commune de Grâces(3) (Côtes-du-Nord). Mais, d’après une lettre que j’ai reçue de M. Le Bivic, instituteur à Grâces, les deux expressions populaires du v. 3067 ne sont pas actuellement connues à Grâces. Vers 1826, vivait dans une allée avoisinant le château un ermite que l’on venait visiter par curiosité ; il est peu probable que ce soit à ce personnage que l’on fait allusion. Il s’agit plutôt d’un surnom désobligeant par lequel les habitants des villages voisins désignaient les habitants de Grâces. L’auteur serait donc des environs de Grâces.

V. 1068 : « comme les lapins dans Roch ar hon(4). » C’est un Ilot situé à l’embouchure du Trieu. Mais ces indications de lieux, au lieu d’appartenir à la rédaction originale, pourraient avoir été introduites à l’occasion de certaines représentations et pour faire rire les spectateurs par des plaisanteries essentiellement locales. Il est sûr, en tout cas, qu’il ne faut •

(1) Manuscrit de Luzel, en la possession de A. Le Braz. (2) Sur le commerce de Vitré dès le XVIe siècle, voir Frain de la Gaulavrie, Les Yitrèens et le commerce international. Revue historique de l’Ouest, t. VI et VII.

(3) Canton de Guingamp.

(4) La Roche aux chiens. Sur l’emploi de con, voir Ernault, Mémoires de la Société de linguistique de Paris, t. XII, p. 306-307.

pas chercher en dehors des limites du Trégor. Non seulement la langue le prouve, mais l’évêché de Tréguier est expressément nommé dans la Vie de saint Patrice(1).

Quel est l’auteur de Louis Eunius ?

Le prologue du manuscrit B. N. 39 parle d’un jeune auteur de trente ans, de Bréhec en Plouha, qui a remis l’histoire en vers d’autre façon qu’elle était parce qu’il l’avait lue en français. Il est donc probable qu’il s’agit du livre du Père Boüillon, et que la rédaction remaniée par notre jeune auteur était celle que j’ai appelée la seconde rédaction, d’où il avait enlevé les épisodes romanesques relatifs à l’empereur et aux princes d’Hibernie. L’auteur de la première rédaction a des lettres™. Lorsqu’il met dans la bouche du sergent les mots : « Monsieur, sergent royal est ma condition dans la ville de Toulouse et partout dans le canton et la juridiction pour exécuter », il se souvient sans doute de quelque comédie classique du XVIII<’ siècle, peut-être même d’une *pièce représentée dans un collège. Il s’en souvient encore lorsque Louis, à l’exemple de Tartufe, dit : « Bonjour ma cousine, Dieu vous maintienne pleine de piété et de dévotion ». Théodosia s’écriant : « ô cruel inhumain, tigre que je caresse, cœur dénaturé », le paysan disant en mourant : « ô malheur achevé, ô fortune détestable », emploient sans aucun doute des formules de tragédie qu’avait retenues la mémoire du cloarek qui rédigea le Mystère de Louis Eunius.

LA LANGUE DU MANUSCRIT 45 <3>

Pour faire connaître la langue de Louis Eunius, il suffit de relever les particularités qui la différencient du breton littéraire W). Ce travail présente quelques difficultés ; car si nous pouvons, soit par les grammaires, soit par l’usage, connaître les dialectes (1) « Car j’ai été me promener par toutes les paroisses de l’évéché de Tréguier », dit Lucifer. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 1G2, v. 775-776. (2) Cf. dans M (récit de Louis Eunius) : « Cicéron, Aristote et Platon, malgré tout leur génie, malgré toute leur éloquence ne sauraient dire ni comprendre ce que je vis alors. » L’auteur de A cite le mene Hellas 2933. (3) J’ai aussi indiqué, à l’occasion, quelques formes de B et de D. Mais mon travail n’est pas une grammaire complète de A, qui aurait exigé un livre entier ; j’ai dû me borner le plus souvent è un catalogue de faits. (4) Pour déterminer ces particularités, je me suis servi du tome I des Leçons élémentaires de Grammaire bretonne, de F. Vallée, excellent ouvrage que je voudrais bien voir achever, et de la Grammaire bretonne du dialecte de Tréguier, par l’abbé L. Le Clerc, qui a bien voulu me fournir quelques indications de particularités dialectales. J’ai comparé souvent la langue et la versification de Louis Eunius avec celle des autres mystères récemment publiés : Cognomerus et sainte Trèfine, de A. Le Braz, Paris.

actuels, nous ne connaissons ni l’histoire de ces dialectes, ni leur état il y a un siècle. De plus, il est possible que, par tradition, les auteurs et les copistes aient introduit dans le texte des graphies ou des formes archaïques qui ne répondaient alors à rien de réel. J’ai néanmoins tenté de séparer, dans l’étude des voyelles et des consonnes, ce qui me semble purement orthographique de ce qui me semble phonétique ; ce n’est là qu’un essai de catalogue que des études plus profondes que la mienne pourront rectifier. Quant à la morphologie, je n’ai que rarement cherché à démêler dans le détail les éléments dialectaux qui y ont pénétré.

ORTHOGRAPHE é

L’orthographe du scribe est très régulière, aussi n’ai-je pas renvoyé, pour chaque exemple, à tous les vers où on le trouve. Elle ne présente pas de grandes différences avec l’orthographe moderne en ce qui concerne la séparation des mots ; on n’a guère à remarquer de ce point de vue que le rattachement de quelques consonnes finales à l’initiale suivante (voir ci-après, Remarque) et la liaison de certaines particulesa) produisant mutation au mot auquel elles se rapportent ; c’est le cas de e verbal et e possessif ; quant à la notation des sons, elle est en partie phonétique, en partie historique, et on ne peut restituer la prononciation que par des conjectures fondées sur la comparaison des dialectes vivants.

Voyelles. a a ai ai

au e u e

= = = = = =

e : pegamand 704. an : veag-ma 3066, tatad 2682, jntaues 931 { tanues 843). a : brais 1742. e (ae) : cair 1915 {quer 347), lairres 20, lair 549, lairgoud 2312. e (eo) ; rair 223 (rer 283). e : triuoaich 526, voailad 990, outai D 63, dai D 86, daiod B 85, groaid 3478, aboay 401. = ei : quaid 733, 1921, tair 204, dairred 508 b. = o (ao) : autro 59, 61, 633,1663, auter 3283 (oteriou 1416), au 737. = eu : en 351, 2944, 3460, orer 259 (horeur 1066). = e : crudulite 2869. = a. Voir ci-dessous.

1904, et Annales de Bretagne, t. XX-XXI ; Le Mystère de saint Crépin et de saint Crépinien, de V. Tourneur, Paris, 1900, et Revue celtique, t. XXVXXVII ; Ar Fumes ac ar Jagrin, de V. Tourneur, Revue celtique, t. XXIV ; La Vie de saint Patrice, de J. Dunn, Paris, 1909, et Annales de Bretagne, t. XXIV et suiv. (1) Mar est quelquefois lié au verbe suivant, par ex. 353, 643.

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e = en = en = ei = ey = eu = eu = i = in =

e muet0) : adieue 1429, 2350. in : end 684, 1060, 1554. eun w : quen 855, 2658, 3295 (queun 3297). e (eo) : reir 168. e : aboey 1072 (aboe 1782). e : eun 3344. u(,) : orguleus 1193, &irs 376, heunan 921, 3435. u : voair nigand 2558, horiplan 3023, gabisuned 3250 b. i : singen 1648 b, vins 608 (vis 129), jnin 714, 948 (jny 1211, 2942), nin 379, 546, 2370, peinin 1730, 1773, 2841. Cet in note sans doute une demi-nasale. in - en : jnclach 917, fnchou, inchou, 17, 2582. î — i : iost 532, aja 2270, jngrad 1280, jened 3001, ehed 139 (iehed 142). oai = oa w : hoaind 1122 (hoand 978), voair 1816 (voar 3365), hoais 1676, voailch 189, 2325, goais 348, doaincd 703, groais 2598, poain 1678 (poan 3178), diuoail 3504, hoairsed(5) 1691. ouw = aou : dou 455, 552 {daou B 43), dioul 1108, 1531, estrou 587, 3267, 3405, strou 3330, fouanc 1091, 1319, anoudouges 1969, doust 1916, gou 262, 1974, 3273, quenou 140, 3384 (heno 3382), soud 1051, moût 3067, poves B 67, chelou 2116, pour 264. o = aou : ganoen 840. o = o : compou 1484. u = i : tu 313, 607 (rime avec eny 608), rugemand 1388 (par interversion pour regumand). u = eu : regur B 73 (rigeur 932), dangur 845, 3196, liqur 343, apupre 3269, furm 152 ((eurm B). ue = oue : guel 2453, guelfed 3149 (voelfed 2012), gûe 2012, huesed 882, huech 525, 619 (hoech 614, 1010), disquem 181, 208, disquened YJ0, ’quesan 2776, guelhed(fl) 1874 (voelhed 1842). (1) Ernault, Revue celtique, t. IX, p. 378. (2) En trégorrois c’est un œ (eu) nasal Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 9, note 3. (3) Sur l’alternance entre eu et u dans l’orthographe et la prononciation, voir Ernault, Glossaire moyen-breton*, p. 163. (4) Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 36-4, remarque l’alternance de oa et de oeren moyen breton. La diphtongue oe = oa est caractéristique du vannetais. (5) Forme du trégorrois. Ernault, Revue celtique, t. XXVI, p. 71. (6) A Botsorhel, canton de Plouigneau (Finistère), ou se prononce ow. Le Gall, Annales de Bretagne, t. XII, p. 424-428 : goxvt Jgaout), zowlagat (daoulagat), dowst (daoust). (7) Cf. Ernault, Zeitschrift fur Celtische Philologie, t. II, p. 511, 512. (8) Forme du moyen breton et du trégorrois. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 303 ; Revue celtique, t. XXVI, p. 80.

v = u : evs 844, vgand 553, vnion 582, evnan 1374, poves B 67, vnure 1988. y = i : dyn 3549, dey 341, hy 1494. Consonnes. I = il : rulal 1565, cf. dilad 3431. i = Il : ruied 1596 (rulled 3402). Il, ill = li : tollo 3321, dollo 3402, heullou 1495, doillou 218, deillou 1999, butuiller 536 b, meueillen 2902, fillor 262. Le son noté est sans doute l mouillé que l’on trouve en petit trégorrois a). n = l : prion 2430. ng = gn (fl) : soaing 162, Alamaing 1307, ding 2111, ping 299. n = gn (fl)(,) ; quined 2350, jndin 673 (jnding 2820), daspuned 184, 313, Spain 1185 (Spaing 1190), pinal 3395 (pigned 129), stinan 353, dispined 1233, montan 3395, anseinin 1950. g = gn (fl) : migoned(9) 2297, vigon 2756. mb = m final : chomb(4) 649. n = m : asanbles 750. n = nn : hanan 690. u = v : souaged 1128, auertisan 1340, uasacrin 1402, uoair 3061. o = w : goerhes 3075, hoech 1010, goir 2460 (guir 2494). vo = w initial : voir 212, voin 1576, voeen 2004, voien 3377, 3571, voirione 1461. { final : ourf 1140, 1571, 3637, douf 229, pourf 800, 1070, 2515, 2563, 2614, 2623, 2800. m = v <5) : er meag 730, eur manden 1531. c = qult) : cerset 1820 (quersed 3438), sceud 2008, sciend 1001, scein 2366. qu = c, k : quased 1978, quais 466, quanon 1527, quasly 2283, quoi 1613, quoan 596, quanan 848, quared 1332, quaed 1571, disquen 1476 b, quair 417, quomans 2785, quechond 3337, quouc 2876. qu = eu (kiu) : quase 2438 (ne goase 3096 b), disquised 649. q = c : couq 3052, (1) E. Emault, Zeitschrift für Celtische Philologie, t. II, p. 386. Cf. i vévéyen à Kérity, 22. (2) Cf. Ernault, Glossaire*, p. 183. La Vie de saint Patrice, p. 74, v. 873, écrit qtnied. (3) Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Trèfine, v. 1405. (4) Cf. E. Ernault, Revue celtique, t. XVI, p. 321. J. Loth, ibid., p. 201-204. (5) Cf. E. Emault, Glossaire *, p. 430. (6) Cf. Ernault, Revue celtique, t. XXVII, p. 135.

gu = g : groaguê 221, guir 3273. d = g : doude 1818. h = c’h 0) : à l’initiale hoarsin 1092, hoary 568, hoan 1239, a houlou 1240, nem hopra 289 ; à l’intérieur des mots : pehed 698, verhed 493, jehed 139, marhad 976 ; à la fin des mots on a ch : oufech 704, voailch 2274, merch 1319, plach 1311. c = c’h m : froc 1277, ousoc 1471, nac 407, noc 2226, jac 2824 b. ch = c : stanch 2572. c = ch : courac 3474. c = s : renonc 69 (Tenons 1896), Franc 1034 (Frans 1103). sch = ch : schans 1610. ss = es : venedission 2528. Chute de c final : clas 1058. 5 = c/i, /(3) ; sons 1847, gus 1142 {juge 259 b), langas 1043, chans 1595, chas 2759 (chache 3330). Interversion de s et ch : rafrisichan 825. g = i : pehegou 1936, bongour 361, seruig 459, gueg 2134 (guech 3434), veg 1879, goay 2232, gogo 2262, gus 1142, congur 2630, dega 2661, dianpeg 1546, lergond 3291, 3295, song 3391. h manque : enes 265 (henes 2809), eman 554, heman 2794, oman, onond 1155. t adventice(4) : veint 3273. Chute de t (d) final : hen 1682, quemen 2358, res 3612 (rest 3616), groeon 1582, gredon(5) 1058, dreis 2094, jus 550, sis 829, quen 1588, poen 312, sor-se 961, uadian 2120 ; voir ci-après. d adventice : confusiond 2920, e voaind 1549. dr = gr : droe 2844 n. s = z : cos 226, fenos 590, madeles 590. s, z adventice : dez B 2, joais (,) 2289, aboeis 529, huis 757, boais 1714. Chute de b final : poainom 1953. pp étymologique conservé dans : beppred 2108. p = b : panniro 3134 b, memprou 3274. b = p : harb 1648 b. (1) C’est le même usage que dans Ar Fumes ac ar Jagrin, éd. Tourneur, Revue celtique, t. XXIV, p. 256 ; et dans La Vie de saint Patrice, éd. Dunn, p. XXV-XXVI. (2) Cf. dac, diquenac, doc, pelloc, Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 845, 1384, 1492, 1059. (3) Sur la confusion de ch, j, cf. Ernault, Revue celtique, t. XVI, p. 184. (4) Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 4 du cinquième prologue, note. (5) Cf. gredon, Tourneur, Vie de saint Crépin et de saint Crépinien, v. 422. (6) En moyen breton ioaz, plur. ioazou, ioezou, Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 318.

Remarque sur les Consonnes finales

A la finale, on trouve le plus souvent les sonores d, b, très rarement f, p : sant 2607, cf. sand 2505 ; ent 1310 b, cf. end 1282 b ; boutailat d- 113, cf. boutailad e- 116 ; dit 803, cf. did 801 ; dut 915, cf. dud 1106 ; tout 949, cf. toud 1085 ; deut 1353, cf. deud 1434 ; tat 2425, cf. tad 2423 ; pont 3068, cf. pond 3080 ; exat 1193, cf. ingrad 1280, crueldet 1651, leaneset 2954 ; bep ma 474, cf. beb ma 1238 ; bep s- 1671, cf. beb e- 1725 ; dimp 2562, cf. dimb 120.

Mais on a toujours t dans le groupe st et à la finale des impératifs en -et suivis des pronoms régimes -an, -e.

De même aussi g = j, rarement ch : coaich 1077, cf. coaig 1074 ; guech 3370, cf. gueag al 2588.

Mais on trouve ch dans quelques mots français : demarch 1482, lach 1510, farouch 2001.

Mais on a toujours c et jamais g : fatic 637, grouc 299, doue 1093, reine 228, groec 133, couc 141, dirac 164.

De même f et très rarement v. Voir ci-après. EnAn s et jamais %.

L’aspiration de och est reportée sur le mot suivant o heus 190 etc., do hasistan 224, o hober 1211, evid mo haneuin 1493, o hine 2452, o her 1321.

De même la nasale est redoublée : en negart B 53, en ne roud 142, quen nou 1245, en no ty 831, eun noten 1568, eun nomb 1100 ; eun noan 136 ; — ou reportée à l’initiale : a ninin 1236, 1937, a nend 2500, da nol 395. On trouve de même r redoublé : voair red pour voair ed 1460, 2608.

Au contraire, la nasale initiale est supprimée : en os 556, 1634 (nos), eun omb 1548 (nombr), en eb 1891 (neb), an atur 2345 (natur), eun eubed 413, 2713 (neubed).

Il en est de même du b de neb : ne blech 146, 1148, 3154.

PHONÉTIQUE

Voyelles.

a = aa : voailad 990.

a = oa : bla[94] 1126, glaged 1225.

a = ae : gad 1407 (cacd 1399), laquad 597, 2488, 2699, 3404, peut-être boetad 465, hoesad 972.

a = e : ac 539, 2680, -ach désinence 2e p. pl., banach 984, 1833 (banech « 3268), abars » 2725. a = o : arsa 2563. e = a (3’ ; er 1066, 1932, guel 842, eched 2472 {ache 3339), eru 1747, 3172, queuomb 2030, diges 2374, geromb 586, me 1072, 2703, 2796, laqued 281, buenw 3204, vahed 698 b, envel 1700, lecfomb 2784. Voir ei. e = o : e, eh particule verbale(5) : e chom 1000, eh or 3580. e = i : deferin B 71, emitan 1065. e — ei : res 1305. e — oe : malles 207 (valos 1890), gret B 61 (groet 2087). e = eo : e 2205, etc. (eo 1191, etc.), emb 575, demb 583, remb 1952 (reomb 3306). e = eu : breuder 1, 2545, per 961 (peur 211). ee = ae : bahateed 253. ei = ai : reiou 816, rey 1270, eiou 572, ey 1273. eu = e : neubedw 1581. eu = oe : difreused 3407. en = é nasal ou éfl dans men(7) 1688, 2138. e = env (8) ; creoch B 24 (creuoch 1224, crenf 1345), evou 2156, 2544, 3198 (en/ 2252, 3075, 3134). queuer 2040. enveL, anuel{9) 2639, tenual 3235, tenvoait 2209, deualligen 3564 ; diadrenf 295 (rime avec didalfe). i = e : gir 306, 851, min 2883, me 1274. «

(1) Bannech est la forme en moyen-breton. Ernault, Dictionnaire étymologique p. 223. (2y A barz et ebarz sont usités également en moyen-breton. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 193. (3) Er avec un son intermédiaire entre e et a à Kérity.- Sur e = a, voir Ernault, Glossaire moyen-breton, 2« éd., p. 47, azeul. (4) Buen est la forme du Goello, par ex. à Kérity. (5) Voir ci-après. (6) Forme du trégorrois pour nebeud. (7) La forme méfi est connue en bas-vannetais : mégn. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 374, v. 17 ; cl. p. 497 ; on la trouve à Quimperlé, Guilligomarch ; mé avec é nasal a été signalé à Botsorhel par M. J. Le Gall, Annales de Bretagne, t. XIX, p. 252 ; il existe dans le voisinage de Pleubian, à ce que m’écrit M. P. Le Roux ; à Plouézoc’h, Saint-Gilles--Pligeaux, Trégunc, Plougonvelin, Pleumeur-Gautier, Plougonven, Penvénan, Kérity (notes manuscrites de J. Loth). (8) Sur les variantes dialectales de nv = m, avec ou sans nasalisation, voir Ernault, Annales de Bretagne, t. XVII, p. 523-524. Les formes en env (par é nasal) sont caractéristiques du trégorrois.- Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 8, note 3. A Kérity, on dit név 21 = env avec un é demi-nasal. (9) Ernault, Glossaire *, p. 314.

i = in = iu = i= o =

ui : mioch U) 2475, cf. muoch 1102. i nasal ou ifl dans nin(,) 379, etc. -in terminaison de l’infinitif. iou : diustu 1175, diusin 3345. u : librisite 2789. ao : penos 2719, dol 789, oteriou 1416, od 1160, a roc 1500, losque 12, otrol,) 195, potred 1415, hoter 1123 ; mais naontec 687, 2837. o = ou : trohan 1530. o = oa (4> ? ; or 881 ; voir note. on = ou j ontan 817. o = a : arsa 153. o = e : bob 1556, bomde 698, 2404, 2456 [bemdc 388, 1725). oe = e : scroech 125. oe = eué (ue) : loé 807. oe = oue : hoesad 972 « flairer », voeled 518 (guelfed 3149), hoech 614, toes 3620. ou = o : sou(5) 1179, -ou 36 p. sg. futur, pouner B 38, brou 518, anou(,) 2609, cous D 38. ou = oe : barous 1915, gantoul 2628 b. ou = u : trougare 143 (drugare 627). oun=ou : estroun a) B 61 (eslrou 587, 3267). oui = ui : scouis 691 (scuisan 1808, cf. quid 2752). u = i : posub 1333, gabusuned 2532, gopu 3633, druchery 195 (treuchery 205). u = eu : ur B10, un 12 (eur 16, 24), regur 73, dangur 3196 n. ue = o ; guenf 1108. Contraction d’une voyelle finale avec une voyelle initiale. da (particule verbale) : do 3159. da (préposition) : dam huitaed 780, dantren 575. (1) Mioc’h existe à Botsorhel, J. Le Gall, Annales de Bretagne, t. XII, p. 426. (2) Nign = nini. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 497, au mot me. La forme nirl est connue à Plougastel-Daoulas, Sizun, Pleyben, Tréboul ; ni avec i nasal est connu à Botsorhel ; Annales de Bretagne, t. XIX, p. 252 ; à Pleumeur-Gautier, Plougonven, Plouezoch, Penvénan, Kérity, Carnoët (notes manuscrites de J. Loth). Cf. Err.ault, Annales de Bretagne, t. XVII, p. 532, 533. (3) Voir sur ce mot Ernault, Annales de Bretagne, t. XVIII, p. 371. (4) Ernault, Revue celtique, L XVI, p. 200 (5) Zou 31 à Kérity ; ces formes en ou sont caractéristiques du Goello. L. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 65. On les trouve aussi en vannetais. (6) Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte 7 réfine, v. 881. (7) En trégorrois, on emploie la forme sans nasale traou ; en léonnais, la forme traon. Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 9, note 2.

me ma na

pa

pe

des 2708, 2824, 2935. doh asistan 224, do peden 399. don ataquin 556. dober 2270, defasin 2516, defan 3108. (conjonction) : malfach 602, malou 346. melfed 2575, men guelin 1259, dre me 282, 1083, me moay 2665. me quar 2795, mes pige 2898, meomb 472. mo pige 1279, mo pou 486, moch 1922, 3584, mon a) deus 2429. mou groed 872, moud 2892, mon ary 3173, mo defoay 3354. . (pronom sujet) : mo laquay 542, mo lese 3327. (possessif ou pronom régime) : madversourien 3170, mavertised 1541, manquoaed 3223, mancouragin 185.

naneuer 1151, nalan 2141, nariou 598.

ney 2809, neus 1135 (ne eus 440), neler 426, nem sicoured 1662, ne 867, nés poay 1296, nen 8149, nele 1017, nesperan 1227. ne nem fiomb 1925, nend 2201. ny 896, ny 2696. no pige qued 1280, no pou 316, no heus 290, non deus 722. no fsplicfen 3582, no les en 3046. noufed 155, nouind 446, non 643, cf. 277.

parifed 1430, parifes 2805.

pe 117, pen rancontis 266. po heus 977, pon eus 1499, po hleuis 3335.

pes lesin 2999. •

Suppression d’une voyelle initiale(>>.

e : man 2137. e, en :nan 1251. ne 2028, 2518, 2747, 2749. neur 542, 1045, 2770, nen = neun 585. no 72, 850, non 1701. lech 1627. bars 1716. e : neus 988. e : nem 529, 545, 654, 657, 2762. »

Consonnes. ê

Chute de l dans les groupes pi, bl, fl, cl : demp 3315, miprisap 1102, nob 1232, doub 1141, pob 2509, credab 164, simb 1812, misirab 1964, incapab 1814, tretab 1338, quapab 802, 1341, terib 513, posib (1) Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 28, v. 336. (2) Cf. Ernault, Glossaire *, p. 324.


I

1497, exsemb 1710, charitab 2157, orub 433, tref 191, gonif 1248, mirac 3101 ; dans couscoude 737. Chute de r dans les groupes(l) pr, br, fr, tr, dr, cr ; prop 279, dibin 126s daramb 607, gamb 705, omb 1029, 1979 (nombre 1977), souf 2416, monst 2345, sist 1113, flast 3236 b, rancontis 266, tead 508 b, masac 1408 ; dans rf : bafier 1567 ; dans voairlech 2017. tr = tn : estrou 587, 2768 b.

r = tr : pera 2786.

r = l : dar 2815, fillor 1232, percar 1097, pourmenic 1637, Danier 1990. ’

r = n ; escroech 125.

I = rm : priol 2431.

I adventice : dromplan w 1325 (tronped 152). r adventice : guersed 533 par influence du français gars(s). r = z (dh) : frie <•> 2010.

n = z : trene 665, entrene 3390 (entrese 1015), disquened(7) 1259. Dissimilation de r ; gourdous 2912. n prothétique : noaid 1001, 1850, 2365. m = bw : mated 405, cf. manden 1531. rf = vr : lirf 180, 202.

v initial :.vuelan 1884. C’est peut-être simplement une graphie archaïque{#).

v = 2 (10) : gleue 888 (cf. hlenfe D 64) ; beui (u>, veuy 1292. /a» = v final (v, ic, o) ; dif 1094, 2773 (diou B 32), pif 244 {piou B15), achif 403, lif 1286, mef 698 b, clef 2715, tref 358, bief 3437 (Ibleuen 3002), vef 1168, lef 510, bef 368, naf 3371, nav 2553, saf 2900 b, gaf 1648 b, ansaf 423, braf 3387 (brav 297), anaf 1963, varf 8, galf 1725, intanf 790, enf 3134, clanf 1648 b. mef 1237 rime avec gante.

(1) Gôp 15, débè 16, débomp 23, à Kérity. (2) Emault, Glossaire *, p. 468. (3) Emault, Glossaire », p. 572, reter. (4) Cf. trompled, J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 22, v. 261. (5) Cf. Emault, Annales de Bretagne, t. XIV, p. 524. (6) Cf. Emault, Revue celtique, t. XXV, p. 65-66 ; t. XXVII, p. 212î (7) Diskoen, diskonn en petit trégorrois (pays de Guingamp), d’après Emault, Revue celtique, t. XIX, p. 199. Cf. discoel qui est la forme ordinaire dans C*

(8) Emault, Glossaire *, p. 50 ; Annales de Bretagne, t. XVII, p. 518, n° 68. (9) On lit vuhel dams les Anciens Noels bretons publiés par H. de la Villemarqué, Revue celtique, t. X, p. 33, v. 1. (10) Emault, Glossaire*, p. 65, bez. Annales de Bretagne, t. XVII, p. 59-61. (11) Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 441. (12) C’est un exemple de l’assourdissement des consonnes finales. Voir p. 75. Il ne peut s’agir ici du son intermédiaire entre f et v sur lequel on peut consulter Annales de Bretagne, t. XII, p. 4 ; t. XIX, p. 266. On a marf à Kérity, J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 369, v. 32 ; beef. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 69.

{ = v médial ; ifinou 2346, birfiquen 383, 2388, dalfou 2506. f — v initial ; e /in (1> 979 n, fad 1261, fou D 74. f = hw : difun 1002, difuned 995. Chute de f = v devant consonnes : discoay 2760 (difscoay 2773), arichen 3503. qu = ti (î> ; antique 114, 269, bique 362. • g intervocalique tombe : diant D 50. cl = tl : clefoais 2745 (lie 578). gl = dl : gleed 1392 w (dleed 1002). dl = gl : die 3265. g (i) = * : glaged 1225. Chute de c entre deux consonnes : vanfe 3582, reinchen 3294, disfed 299. ch (c’h) = sc : fnclach(5) 917. ch (c’h) pour l’euphonie : hich a sou B 36. ch = bi : hamcho 3607. ch = (di), ti : inchou<•> 520, aparchanchend 1982, desercho 1128, lourmanchou 1754. stri(7) ; prenescho 3113, raconcho 1227. si : comercho 2931. i = di (ti) : pehegou 1877, hoagou 2014, speregou 2080, segregou 364. zi (si) : gogo 2262, comgo 884, negou 2000, anterprigou 1514, hroagou 1415, begou 1490, ligo 2628 b, marmougen 1161. ch = s : cheloued 1684 (seloued 2382), chas 2759 (de sacha). h — z intervocalique l8) : lahan B 20, loch D 66 (lased 685, 996, lasan 188), rahed (9) 1106, pluriel de raz, bahad 982, bahadou 263, vahata 439 (cf. bas). Chute de t entre consomma : senfen 806, tisroou 2900.

(1) Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Trèfine, v. 301. (2) Pet. trég. divun, Ernault, Glossaire *, p. 169, cf. 377-378 ; difunin, Dunn, Im, Vie de saint Patrice, p. 138, v. 503. (3) Cf. la finale des terminaisons verbales en -int qui devient k palatal à Penvénan, Plougonven, et û Ign français) à Pleubian. (4) Forme trégorroise ; Ernault, Glossaire moyen-breton, p. 190. V. Tourneur, Revue celtique, t. XXIV, p. 265, note 2. (5) On a en vannetais klah et klask, qui n’ont peut-être pas l’un et l’autre la même origine. (6) Cf. Ernault, Annales de Bretagne, t. XV, p. 205. (7) Ces formes sont caractéristiques du haut-trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 58. (8) Lac’het à Kérity. (9) En trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 191.

Chute de t, d final : ma 381, harlef 3455, dreis w 2094, quemen 0) 2358. b = v : beag 2160. Chute de z intervocalique(4) : dimeond 1138 (dimeset 387), asein 595, aseed 2438, quean 3453, queend 3357, queen 3373, coed 819, 3066 (que s an 3452, guesou 1960, quesas 3315), voeen 1997, gouc 1424 [gousouc 2098), eom 641 (esom 1685), sun 2145, och 1112, goud 1539, 1648, aneuin 1493, uadian 2120, goneed 252. Chute de z final {dti) : corto 785, dé 802, guirione 801, bue 3616 (buez rime avec yve B 84), neue B 1, scoay 1772, 2773, carante 2523, quase 2438, herue 1391, fé 1945, die 3265, hourve 644 ; e suffixe du pluriel : otrone 137. Mais s final ($s, th) subsiste : peheres 742, males 1148, compannones 589, madeles 590, rouanleles 1055, falagries 2075. De môme aussi deues 2513. Chute de s entre consonnes : e rennonfes 2558, e comanchond 1566, . prononchond 3450 ; devant consonne : lechen 3297. Chute de v intervocalique : quaed 1571, dried 2022, driet D 72 (cf. dairred 508 b), laras 3527 (lauaras 3516), aried 467. Chute de v après consonnet5) : hoare 63 {hoaruesed 2029) ; devant consonne : arichen 3503. Contractions diverses : me saon 194 pour me meus aon. biquen 658, 1220 (berfiquen 1265). or 1336 (ober 1280), disor 1792. pinic 1070, binic 1087. beuien 1253. goulomb 2628, houlan 756, 2489, gouled 3224.

Mutations initiales des consonnes. Les mutations initiales sont en général régulièrement écrites. Voici quelques exceptions : 77 a preposou pour a breposou. 128 ne goulenan pour ne houlenan. (1) Ernault, Glossaire moyen-breton, p. 3%. Cl. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 142, v. 554. (2) En vannetais dres, Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. X, p. 329. (3) Kémè se, v. 26, à Kérity. (4) Ehom 14, digouè 12, à Kérity. (5) Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 465. 6

2106 1434 1202 2383

dre gras pour dre c’hras. o bete pour o pete. ne quar qued pour ne gar. no disalian pour no tisalian.

Après e, t pronom personnel de la 3* p. sg. f. -

K P T

^—

mar e havan 342, mar ny heved 896, de haed 1250 b, e sapoud 353, e sentin 340, e foneraiou B 38, e flantan 1282. K

P

T

Après en0) pronom personnel de la 3* p. sg. m. —————— : den honserf 2536, den hondamnin 1701, men en hleinquou 1627, en hesin 3055, me en hasou 1624 ; mais p persiste dans : en pedis 267, den pedin 2511 ; ntn en srainou 2816 ; mais t persiste dans : pif benac en tremenou 2119, me en toue 123 ; de même nen guelfed 3149. Après e adjectif possessif de la 3* p. sg. m. : e galon 1739, 1900, de grougan 2775, e giniterf 1025, e goase 3096 b, e dad 3300, e dremen 3455, e dapoud 1645, e dron 1882, de bedin 1805, e breinsed 2022, e blantan 822, e hourue 3379, e houe 3085, e dom 1818 b, e discoay 2760, e deillou 1999, e vue 2764, e valos 1890, e vadeles 3603, e veulin 1134, e veprisan 1891. Ce sont les mutations régulières. K

P T

Après d’am, em : ——— - : em sole 254, 3363, dam sro 2334, em r

CU FS

si 237, 287, dam hanan 690, dam hichcn 3290, em halon 839, dam hamarad 527, dam fehed 1672, dam friuan 422, dam fromese 1839, mais(,) dam pried 852, dam pen 968, 990, dam protefin B 28, em pouar 2410, am preseruou 2333 ; au contraire après ma : ma fias 3031, ma fech 353, ma fried 645, ma (iningen, ma fehed 1697, ma foain 1943. K P T Après hon{>) : - - ■ — : on halon 854, 2621, on haquetal 2838, 6H b S zhegou 1874, on fouar 2402 K P T GUr Après dou, dif

dou hand 252, 3375, dif harec 3280,

CVB B D W A

dou bres 609, dou voele 609, dou dy 2981 ; — dou gy 1090.

(1) D’après Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 107, K

cette mutation ne se fait pas en trégorrois. On trouve en léonard —— Jz après er. (2) Le même fait d’incertitude pour p a été relevé dans des textes du XVIII* siècle par M. P. Le Roux, Annales de Bretagne, t. XII, p. 8-9. (3) Ces mutations de hon existent à Plougonven, Pleumeur-Gautier, Penvénan, Kérity, Carnoêt, Glomel, Plumergat, Séné (notes manuscrites de M. J. Loth) et dans tout le Trégor. j

Après triU) ; try harlef 3455, try {es 905, try hardeur 401, 3269. Après pevar(,) ; en pevar horn o ty 945. Après naf : na{ de 2448. Après dec<8) : dec quenec 907. Après tregont : da dregond via 2754. On trouve h à l’initiale des mots commençant par une voyelle : après es dans es hine 1274, des hopos 2097. ne se fait pas dans plach : eur plach 3012. Les mutations

S

F

et — ne se font pas : e fry 3322, da sotis 2260,

AV*

F

a {ontou 1123. On a peut-être — dans o vonnan 1739. G

La mutation — se fait dans vroec 2980, vroaige 746 (cf. groec 557, groage 1012), vroaich 294, voaid 2113 (goaid 1596). D

se fait dans an oregou 944, 1413 (sg. dor), an or 1772

N .

cf. en

esped pour en despet 3088. D

——ne se fait pas u) : da dougen 659, da dremen 3473, ne deugen A

255, nem deuertisou 796, me discleriou 3257, a die hac a deou 3267, a disquaras 3273, da diframed 2344, da droaid 2340 ; mais do se{ian 1409, on se{ian 873, comme si ce mot commençait par un t (5>. D

se fait après la particule verbale e : e tle 578, e tesiran 1436 n,

e tisroas 1717, e tlean 2208 ; après o : o tifenou 2240, o tepechin 2241, o ten 925, o toare 1043, o tou 2437 ; après ma : ma tes 3271, ma tegond 3290. Elle manque dans no disalian 2383. Remarquer mab cast 1124, me o crey 936. Pluriel des noms. Les pluriels en -ou, -o(#) ne présentent d’autres particularités que l’extension des formes en -chou, -jou aux mots en -sfr, -fr. (1) Pour fri et pevar, cf. Hingant, Eléments de la grammaire bretonne, p. 40. (2) Cf. Hingant, Eléments, p. 40. (3) Cf. Hingant, Eléments, p. 42. (4) Cf. P. Le Roux, Annales de Bretagne, t. XII, p. 17. C’est une caractéristique du trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 23. (5) Cette particularité a été signalée par Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 190, qui l’a constatée à Tressignaux, en Goello. (6) Mélangés à Kérity : boto 22, derveiou 13. D’après L. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 33, note 1, on dit ou en grand-goello et aou en petitgoello.

On trouve le plus souvent ou, tou : moustagou 174, hrimou 1871, actou 2064, sellou 132, banahou 139, crasou 144, hartou 150, bersudou 232, codelou 233, bahadou 263, deuosionou 362, plasou 794, madou 627, canvou 848, armou 1341, dioulou 1409, helou 1430, tenon 1527, liseron 2242, potou 1464 (sg. botes 572), tadou 2493, pedenou 2514, chadenou 2672, hourdousou 2326, hribinou 2847, boelou 2848, gourhemenou 3123, blenou 3495, obcrou 1814, humnon 3568 ; — galeou 876, alhucou 3574,

eou 2915, amieou 1563, falenteou 1887, lubricileou 698, galeou 876 ; — deiou 1623, euriou 403, vesseilliou 449, broiou 1063, i(emiou 1410, oteriou 1416, anoiou 1841, letaniou 2057, joaiiou 2082, murion 2134, mogeriou 3217, veuiou 2175, doillou 218, doliou 1604, deillou 1999, poainou 2276 ; — hroagou 1415, segregou 364, paquagou 479, torogou 901, meugou 1069, droegou 1183, gomgou 1876, gogou 1118, bejou 876, begou 1490, pehegou 1877, negon 2000, speregou 2080, anlreprigou 1516, hoagou 2014, moegou 2554, houanchou 2461,

chou 797, tourmanchou 1754, forechou 3346, prenechou 3491.

On rencontre plus rarement le pluriel en -o, -io, caractéristique du dialecte de Tréguier : moustago 130, 1093, artifiso 777, peinso 786, tanteno 1523, /lamo 1524, huruno 1529, baruo 1568, sesto 1578, gri/no 1653, bapero 2272, chadeno 2747, letreno 1742, muraillo 3215, modo 3619, gourhemeno 3621, helo 1538, galeo 877 ; — deio 392, broio 461, bragoio 1094, /aveurjo 3206 ; — efego 599, fehego 751, comgo 884, gogo 2262, jligo 2628 b, norogo 3492 ; — jncho 726, 2169, desercho 1128, raconcho 1227, prenescho 3113, comercho 2931, hamcho 3607. Il faut remarquer dref 506 pluriel de Ira.

OA trouve quelques pluriels internes : lern 1162, esech 1854, sent 2232, menech 2273, ebeslel 3076, esquem 2819, 3589, dreid 2843, dend 2346, mein 313, 2107, quesec 465. Au lieu du pluriel externe en -i, on a un pluriel en -o, -ou dans liserona> 2225, mais on a conservé : gisty 574, bleidy 1161, 3465, jsily 2792.

Pluriels en -e : hotrone 240, ele 2232, rouane 1979, groagé 1012, 1188, bugale 1926. — On trouve aussi des collectifs en -es provenant du français : piques 181, gainnailes 1105, castrilles 1164w. Pluriels en -ed : guersed{3) (sg. goais 1136), guerset B 36, merhed 2696, oursed 1161, leoned 1161, honifled 1162, somoned 1163, leanesed 2531, gabusuned 2532, bastardesed 1079, diranted 1096, (riponed 1416, potred 1415, enemied 1522, poultroned 1617, pesqned 1836, profedet 1974.

(1) Lizero est propre au trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 54,

note 9.

(2) Sur ces mots en -es voir Emault, Revue celtique, t. XXVII, p. 65. (3) Caractéristique du trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 68.

Pluriels en -terU) ; hleier 2554, cleueier 883, bistolenier 799, seier 445. Pluriels en -on : gedon 1162, lairron 1087. Pluriels en -ten : beleien 2273, beherien 2482, christenien 2615, ofiserien 2728, bastardien 1079, intanfien 849, meuien 899, bevien 3627 ; on trouve dioullien 2122 à côté de dioulou ; sorserien 1641, afronterien 1087, marmougen 1161, prisonierien 1413, galeourien 1414, quigirien 3338, vourhigen 648, veuierîen 1109. Article. Devant

a loden 1561, a loened 2012, a leanes 2928, a loir 986,

2926, ar lair 2947, a User 2377. Devant r : a re al 3330, a roue 1995 ; el = en al : el lanec 1338 b, cf. 1336, e User 1737 ; er = en ar : er bligadur 2290, er roud 529 ; en = en an : en arme 1507. Emploi de l’article : ar sin ar groais 3218, ar gras a Doue 3168, ar moged butun 968, pod ar porpand lien 1233, ar goasan ar beherien 2046, dar ger « à la maison » 997, dar ger a Vitre « à la ville de Vitré » 1315, en quer « en ville » 825. »

Superlatif. Le superlatif,, qui est en -an(3), fait fonction d’exclamatif w : coantan predicator ! 1899, agreaplan eun drous ! 3107, cairran ruselen dour ! 3108, oruplan tourmancliou ! 2828, 3023, pes contantamand a brasan carante ! 2523 ; suivi de ma, il n’est plus compris par le scribe qui l’écrit ainsi : prob a ma vou galled 1312, guel a ma hellen 3319, neubed a melfed 2575 ; au contraire on a : ar guellan 489 comme ar muan 489. On trouve le superlatif sans article : da goues falan den 2051, me gare rancontrin brasan peher 1942 ; mais an dam vuan 1486. Comparatif. En -ochlS) : neubetoch... vid 1706, peloch 708, muoch miprisap 1102. Comparatifs irréguliers : guel 145, goais e se évité 918, evidomb 3084, goais vid eur hy clanf 1494, me e goais ar peher 2042. (1) Cf. E. Ernault, Zeitschrift fûr Celtische Philologie, t. I, p. E32-244. (2) Cf. E. Ernault, Glossaire moyen-breton*, p. 7. (3) Cette nasale est caractéristique du trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 89. (4) Cf. E. Ernault, Glossaire moyen-breton, 2* éd., p. 272. Hingant, Eléments, p. 196-197. (5) Cf. Ernault, Revue celtique, t. XXII, p. 379-380, dans une étude générale sur le comparatif breton.

Comparatif d’égalité : quer ... a 2585, 2733, quer ... evel 2074, 2628 b, quen ... quen ne 667. Adjectifs possessifs(1). l^p. sg. ma(t) : 2769, etc. : cm = en em : 735, 1679, 1889, 2410. m’ : m angagemand 1441. am : dam pen 968. 2e p. sg. da : 1295, etc. ; es = en es : es pouar 2713, enes 1292. 3® p. sg. e : 2302, etc., eh f. devant les voyelles : 90, 772, 1286 b. lwp. pl. on : 274, etc. 2e p. pl. o ; 2233, etc., oh devant les voyelles : 1369, 2235. 3® p. pl. o ; 3495. Devant l’infinitif<3) on emploie en pronom 1701, ou e adjectif 3455 (Voir les mutations et les pronoms régimes). Pronoms personnels sujets. lr®p. sg. me devant les consonnes : me debrou 643, me sou 302, me larou 283, me mar e havan 342, me gred din 960. me devant les voyelles : me ameus 1579, 2204, 2397, me a sou 303, 951, 1438, me o 474, me en 494, me es 344. men<4) devant les voyelles : men ameus 2165, men a anaf se 2900, men o seruigou 137, men a Tenons 3622, men en hleinquou 1627, men a mou 2138, men a sou 3195. men devant les consonnes : men siuoais 1688, men ne meus 2087, men sou 2486. 2° p. sg. te 866, rauodes te 2807. 3® p. sg. m. enf(5) 1034, en( 1526, 1648, 1986, 2602 ; ma selin hoc enf a sou arhand 552, cf. 820 ; vid en (,) o tianpechin 1300, hac en{ a sou on mest er prosesion presaht 3624, ar voeen se a voay enf evnan 2004. (1) Cf. Ernault, Revue celtique, t. XVIII, p. 207-211. (2) Forme spéciale au trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 97. (3) Sur l’emploi respectif du possessif et du pronom régime, voir P. Le Roux, Annales de Bretagne, t. XII, p. 14-16, 24. (4) Voir ci-dessus voyelles. Dans la Vie de saint Patrice, on trouve me et men. (5) Henv par é nasal est la prononciation du trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires, p. 8, note 2. (6) Sur cet emploi de en devant le régime, voir J. Loth, Chrestomathie, p. 476, col. 1 ; Ernault, Glossaire *, p. 209.

3® p. sg. f. hy : 3509. l^p. pi. mn(1) ; 460, etc. C’est la forme ordinaire dans notre texte devant voyelle ou consonne. ny : 1495, 2759. 2® p. pl. huy : 1491, etc., huy vanc dach 891. hu : seulement dans ochu 783. 3® p. pl. d : 1578, hind 3308 ; hich B 36. Pronoms personnels régimes ®. l”p. sg. am : nam hleuer 2136, na manquoaed qucd 3223, dam souten 3164, am preservou 1873, dam lonquan 2172, dam preseruou 2709, dam huitad 2902. em : neuse cm jnstrufed 2376, emeus hoaind em lesach 1122. ma : aneus ma aneued 3576, po heus mavertised 1541, aneus bed ma galued 2302, e songou ma laqued 281, ma sicoured 2493, 2970, ma hondued 3250, evid ma honsolin 3290, te vanc dit ma lasan 728. 2® p. sg. es : me es tigemrou 808, ones es quar 332, me es ped 344, es tispennou 2943, des tigemer 2935, es poniardou 3068, des hopos 2097, es cortoer 2100, des lonquan 1872, des conduin 2290 n, des rostan 2708. da : ne houl qued da voeled 1870, ne meus bed da greded 2710, ober da daspun 313. 3® p. sg. an : aneus an estropied 1014, o pigean cabtiued 1883, moaian tened 999, ne meus-an jnvanted 1104, dan gueled 2562, lenetan 1441, lestan 2367, examined tan 2435, digesan 3005, amaran 2843, cf. chedean ,3) 3091, chetuan 1710. en : men tanvain 832, nin en srainou 2816, nen ofansed 3128, men en hleinquou 1627, den j mi tan 1694, den jntrepretin 1990, en reseuas 2028, nen nahan 2287, den gueled . 2628, en goud 1935. e : e imiled ameus 1689, a reinquan e lasan 818, evid e abssolvin 1797, evid e supplian 3079. (1) Voir ci-dessus voyelles. Nin est la forme de la 1™ pers. plur. sujet chez Le Fèvre (de Plougrescant). Grammaire celto-bretonne, Morlaix, 1818, p. 16, cf. 35. Elle est employée à l’exclusion de toute autre dans la Vie de saint Patrice. La forme ordinaire dans P est nimp ; on dit actuellement nirnp à Penvénan, Pleubian, Pleumeur-Gautier. (2) Cf. J. Loth, Revue celtique, t. XVII, p. 423-424. Ernault, Revue celtique, t. XVIII, p. 199-211. (3) Sur chede, chetu, voir Ernault, Zcitschrilt für Celtische Philologie, t. II, p. 521.

3e p. sg. f. e (ec’h) : me e (oneraiou 896, mat e hauan 342, de hor 2219, e hanleuf 1338 b. i : aneusy bed groed 2127, cf. chetu y 972, chedy 2066, ny heved 896. lwp. pl. on ; on hefcd 468, don gueled 2798, don haed 2704. 2*p. pl. o : me meus o peed 1390. 3* p. pl. e : quesete 479, lenete 2375. o : me o hlef 2986, evid o chaseal 3343, me o efasou 1670. ind : rented ind 1194, digesed ind 477, emeus ind goneed 212 ; cf. chetu-ind 1722. Mais on trouve aussi quelquefois comme régime direct les formes pronominales combinées avec la préposition ahan (an)a) : lwp. sg. quechond ahanon 3337, entend anon 3393, eun dour a neus ma rasasied a discuiscd ahanon 3110, ne gen qued ahanon 673, cred anon 2271, asisted ahanon 2938. 2«p. sg. me resped anoud 2892, me a vourefou anoud 2740, me fond goaib a hanoud 888. 3* p. s. m. a recompansas anean 2018, nin exersou anean 2370, ma sam anean 486 b, ma plantin anean 3008. 3* p. sg. f. Louis a dol anei 60 b. 2* p. pl. beued ameus anoch 535. 3*p. pl. lened ane 2440, voersed ane 631, e tispinfes ane 804, e hanbandon ane 1196. Pronoms personnels combinés avec les prépositions. lrep. sg. ahanon 673, anon 3393, evidon 1823, eveldon 2867, dindanon 3102, voaimon 3362. ousin 307, 2095, diousin 3469, diusin 3345, din 700, 2394, guenin 751, 952. dime 101, 215, 525, diganimé 236. 2e p. sg. ahanoud 888, anoud 2892, enoud 2339. did 293, dit 332, ousit 1855, 3000, guenid 804, 2759. dide 63, 2979. 3#p. s. m. ontan 817, oulan D 42, diontanu> 1740, diantan D 79, (1) On trouve cette construction dès 1693. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 331,1. 1. Elle est employée dans le dialecte de Tréguier. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 52. (2) Ces formes en on = ou appartiennent au trégorrois populaire. Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 109. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 62, v. 737 ; p. 82, v. 943, note.

gantan 258, 821, dean 1013, voamean 252, voaiman 247. diuoaiman 3042, dindan(n)an 1979, 3043, enan 2110, evitan 2518, anean 1635 ; dan D 48, 78 ; 3006 ? bete hen 929, cf. evelen 461, 516. 9* p. sg. f. onty 3547, dey 343, 349, 1171, desy 3284, aney 355, eny 2005, evity 624, dindanin 2002, dindany 2006, voairney 2380. l^p. pl. anomb 1703, evidomb 1924, 3084, voaimomb 3594. ousimb 680, dimb 120, 1010, dimp 2562, ginimb 469. 2e p. pl. ahanoch 3426, anoch 535, evidoch 163, diraoch 1183, dirasoch D 10, voaimoch 2036, enoch 2048. • guenech 1006, guenach 735, 1269, dach 935, 1045, dech 1391 n, diousach 2150, ousach 760, diganach 3637, diannach D 35. 3e p. pl. gonte 3433, gante 207, 1577, digante 1187, anese 210, ane 631, 1508, onte 205, outai D 63, dindane 3275, voaime 904, voame 962, évité 918, cvelte 2270, de 29, 1130, 2390, ene 2449, entrese 1015. Pronoms relatifs. a : voair a voelan 990, Doue a vanquas dean 1731, quemend a 612 « tout ce que », a voelan try den eny 3115, eur propos a soutenou 1766. hoc a : eur polison hac a gond 544, 1789. peinin 0) : e gabiten peinin a voay 1730, cf. 1773, ous peinin 2841. a gemend * ; den a gemend on aneuou 448, cf. 440. quemend : tud quemend sou 1351, quemend a res 398, toud quemend a 483, cf. 1159. (or) pes : conprened pes sou scrifed 1442, pes a 1335, 1551, 2090, ar pes a sou 161, 1520, or pes o heus prometed 1445 ; petra : e voelan petra a voay dleed 2829. «

Adjectifs et pronoms interrogatifs et ezclamatlfs. pii 244, petra 567, 793, 963, 1157, 1578, pera » 2786. petore w : de betore bro 455. pesord : neus quas pesord pen 1419, cf. B 98, 659. pes : pes contantamand ! 2523, a bes bro ? 511, voair bes condision 537, en pes gis 2458. (1) Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 1198 ; pini, Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 264, v. 1192. (2) Cf. Emault, Glossaire *, p. 534, 1. 5. (3) Voir ci-dessus, consonnes. (4) Pesort et petore s’emploient couramment dans le sens de « quel » en haut-trégorrois et goello. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 56.

pebes : pebes glahar ! 2521, pebes eur maleur ! 661. pe : pe da fin ? 1501, pe da gouls 233. ped : ped corn ? 700, ped plach ? 1852. Adjectif8 et pronoms démonstratifs. hinin 2693, ne meus groed biscoais jnin 1782, an jny 1211. homan 352, oman 1155, onond 1155, eman 886 ; heman sou eun toi jusl dimb 926. hones 2240, ones 800, enes 2602, henes 2329. re : vel re eur higer 1596, re al 745, re se 1199. quemend se 867. se 920, 1666.

Adjectifs et pronoms indéfinis.

neb : na momb a neb vely 3096, non deus a neb micher 722, cf. 678, ne ris que d an nep tra 1463, neb juin 397. man 1581 <c rien », ne reinquan man dean, netra « rien » 1073, evid netra 1156. quemend se a langag 2893, quemend man 1649, quemend a boain 2906, quemend bleuen 3002, quemend ofans 2086. eveleb 3460 « tel » : nen eveleb tourmand. eun « un », eun Doue(1) « Dieu » 2693, eunan deus o qucned 409, peb eunan 1178. eur s’emploie avec des pluriels : eur re 1310, eur huruno 1529, eur milionou 3134 b, eur moego 3134 b, eur hartou 155, eur balustrou 3284, eur poainou 3313, eur letaniou 2067 ; eur try hardeur 3269, en eur feson a 2397 « de telle façon que », eur groed mad 1700 ; eun dou hand pas 3375 ; eur harlef « à un quart de lieue » 1625. peb a 45, 868, 1741, 3496, 3033, a bob eil » 1556 <« à tour de rôle », peb fnin 471, 1158. cals deus a re al 683, da gais a re al 746. an ol « tout le monde » 1244, en no hol behegou 2056. ar sord se « de tels gens » 1206, 1222, ar sord dach « tels que vous » 1266, ar sord tud se 1965. diuoair an eil de ben 1067, cf. 1526 ; an eil ous e gile 2033, -da e gile 396, deus an eil prison d’e gile 2673. al : me sou eur pod al 1682, quemend al 906. ma eunan 919, o heunan 921. benac « quelconque » B 16, 585, 1699, 2197. (1) Ernault, Revue celtique, t. XXIV, p. 431. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 100, v. 48. (2) Ernault, Glossaire *, p. 479.

Particules verbales.

La particule a ne donne lieu à aucune remarque importante ; elle manque souvent : me reine 1363, quemer helles 64, me deiou 382, credin eled 579, me gred 563, me bromed 246 ; elle est parfois écrite ea) ; parfois aussi elle remplace e : a refed 2232, a chomfe B 54, groed a hc 2938, a voay ar vanité 3549. es : es omb 1472, es och 1291, cf. ma soch 401. eh (,) : e han 286, 2350, e hagen 3360, e homb 646, e hariuas 3308, e he 986, e hanbandon 1196, e hefemb B 116, e hordrenas 2374. e : e omb 507, e och 511, 909, 3586, e teuas 3314, e seuemb 3366, e punised 3367, e queen 3372, e tremenchen 3458, e ris 3468, e cornmansin 1452, e vomise 3383, e voelan 2981„ e ven 54, e fel 73, e ousoch 297, e sou 2764, e tispinfes 804, e chomy 2286, e helomb 486, e laquagach 2045.

Cette particule tient lieu d’une conjonction dans les propositions complétives : laran dach e reinqued 935, ne ententan qued erafach 937, me bromed e vin 962, hoaind ameus e contfach 1004 ; elle manque dans me song voais retomed 3391, gueled a ran on ary 3201. da(3), pe da pour l’optatif : pe da vin 1261, 1275, 2955 ; da ved glorified 2251, do conduou 2694, Doue do pinigou 3159, Doue do quendelhou 3629, dam preseruou 2709. o, ew, oh, eh pour le participe présent (actualité) : e voud groed 2672, e tond 2741, e hantren 3382, e song al 2680, o lared 3502, o hober 1211 ; o manque dans nin sou honid 461. On trouve quelquefois la forme archaïque ous(5) 1031, 1599, 1891, 3503 qui s’est conservée quand l’infinitif est précédé d’un pronom régime. en emlt) = en eur pour le participe présent (simultanéité) : nem ober 529, 1658, 3292, nem gastian 2216, ous en em lared 2340 b, en em drainan 2354 b, nem vond 3277, nem redec 3317, nem lared 3421,

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en em ganan 3250 b, en em bedin 3347 ; on trouve aussi en en : nen griai 1908 b, cf. en em grial 2874 b. (e)n em, parfois (e)n ena), pour le verbe réfléchi : nen dibin 1061, nen gontantin 3638.

VERBES REGULIERS

Temps et modes personnels.

Présent de l’indicatif impersonnel : cortoer 2100, reinquer 310, tisquer 1001, geser 1053, exerser 1082, voeler 1109. Futur-Subjonctif tt) : 1M p. sg. en -tn. 2* p. sg. en -i. 3e p. sg.(3) en ou : ligemrou 808, larou 963, disquou 293, lorou 2810, sauou 2759, protegou 2756, grogou 2749, conduou 2705, bresantou 2601, bedou 2565, antreou 2555, chelouou 2058, daillou 215, digesou 449 n, aneuou 448, voellou D 38, tisroou 2900, {oneraiou 896, diueraiou 1623, gastiou 1753, houlou 1240, drohou 2346, tispennou 2943, ariuou 3028, foumisou 3608. En -i : dostay 273, laquay 542, hoaintai B 32, gouesey 2477. Impersonnel : hleuer 2136. 1N p. pl. en -{omp(4) ; cosefomb 1556 n, lecfomb 2784, rendfomb 3634, partifomb 499, reinfomb 900. En -homp ; hellehomp D3, helhomp D7. En -omp : petomb (5> 3425, geromb 586, tapomb 2783, sortisomb 2679, elomb 486. 2* p. pl. en -fed : chomfed 277, lerfed 200, voelfed 175, houlfed 612, peurfed 2014, chasefed 2150, antrefed 2593, colfed 2593, disfed 299, honefed 187, grcdfed 3255, instrufed 2376, gerfed 650, 2392, haproufed 2877, arifed 3519, desirfed 3608, chasefed 2150. En -edw ; perised 3426, soufred 2455, 2503, sortised 2682, gered 467, 1184, voersed 631, quered 462, surmonted 2668.

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3* p. pl. en -ind : quitaind 1965. En -ouind : quelouind 3143, chomouind 2533 n, redouind 3143, hariouind 2679.

Passé défini : en j : lairgoud 2312, anlefgoud 2311, harifgond 3424, lergond 3291.

En ch : lampchond 3328, quechond 3337, redchond 3344, soufchond 2130, techchond 3332, comanchond 1566. Imparfait : caractéristique e. Il n’y a à remarquer que : llefoain(1) 3286, tlefoais 2745, dlefoay 329, par analogie avec l’imparfait du verbe bout.

Conditionnel « : 1° irréel en h : ma halhen 970. Cet h ne s’écrit pas d’ordinaire en sorte que le conditionnel se confond avec l’imparfait : gare 385, 839, 1942, gered 479, quarach 413, desiren 366, lesen 3046, efemp 116, mais dans les verbes à consonne sonore, il est caractérisé par la sourde : depe 2321, crete 2866, cf. 677, greten 2257, varfe 2062.

2° potentiel en / : isplicfen 3582, elfe 320, alfach 602, glemfe 418, dlefen 685, vanfe 3582, senfen 806, retomfes 2322, chomfemb 528, tispinfes 804, contfach 1004, lacafe 1943, quitafes 2257, dorfend 2599, colfe 2702, felfe 721, 3045, larfe 2895, voelfes 1968. 3° irréel en ch : gredchen 1265, scrifchen 2064, respetche 2365, chomchen 3298, guelchen 3526, tremenchen 3458, arichen 3503, guechach 3520, reinchen 3294.

4° jrréel en j : laquagach 2045, quargach 2046, droge 1607, alge 1018, felgé D 88, gargen 3326, frofange 1985. Impersonnel : clefged 3252 n.

Impératif : lpe p. pl. -omb : efomb 139, coseomb 402. 2e p. pl.(3) -ed : chomed 159, gefed 158, gouled 3224, tanvaed . 895, cheloued 2213, debed 635, lequed 188. -id : sceid 2793.

-t : lest <*> 412.

Remarques sur l’emploi des voix des temps et modes personnels. Intransitif au lieu du réfléchi : prosterned dan doulin 749, pa non troed 957, huy e a sou tromped 547, me gouesey 2477, fachan 1396. [107] [108] [109] [110]

Impersonnel au lieu du personnel : nin ne moamb an nached nemed eur veg... hac a sou darnned 1220, cm ber in... hac a houlou pe me laquay 1240.

Impersonnel passif : dleed e boud difun 1002, gand henes a vou groed 1152, henon e voaid er sermon 1771, ou gueled 540, gouled voay diganin 3359, jspliqued a voay 3451. Présent au lieu du futur : biquen ne vanquan dach 736, aman e teud 1336, biquen ne ra se 1468, biquen nalan achab 3432. Imparfait au lieu du ^conditionnel : mar be huy a daillou... onest a voay 216, ne veritan... er hontrel me dlefoay 329. Imparfait au lieu du plus-que-parfait : ma rend memes tra vel ma rend 3442.

Plus-que-parfait : au sens conditionnel, ma halhen o sicour asured emoay groed 970, pa ne vid da armou... nés poay qued... ma lased 1295.

Conditionnel : 1o dans les propositions conditionnelles : A. ne meus quen... mar bech 424, contand on... ma ve 675, ne ententan qued e raiach 937, nin eus... pa chomfemb 628. B. mar bech... o pou 1365, mar be mad... ehin 197, mar en defe... e hefasou 1801, mar nefe... me douchou 956, mar me... me rcy 2249, cf. a me soufrou... pa dlefcn 685, pa memb goneed... e retornomb 518.

C. me quarach... ne vech 413, malfach... e vemb 602, mo pige... no pige 1280, ma me... me a ve 1945, mar mige... e chomchen 3297, man ne gargen... e vigen 3326, ma vemb... e ve 500, ma migemb... ne ouchemb 1709, ma mige... e scrifchen 2063, cf. pa ve... e tispinfes 804. D. ma vemb... e voay 1705, ma halhen... e moay groed 970.

2o Dans les propositions complétives : guelomb ma nefe 9Q6, o heus bed lared e laquagach 2046, eston a moay na droge 1607, e ven contant e chomfe B 54, lequed eves... nope 263, a grede din a nige 2772, ne gredchen... e vige 1265, a respontas... men nen guelchen 3526, e songal en pes gis e tremenchen 3458.

3o Dans les propositions indépendantes : an en{ a nem glemfe 418, me lacafe 1943, penos e {elfe ? 721.

Conditionnel imparfait d’habitude : quaid a ma vige 1733. Infinitif.

Les diverses formations de "l’infinitif0) sont : 1o La formation identique au radical, soit originairement, soit [111] par suppression du suffixe primitif : hoary 147, 1401, nem glem 198, 748, ping 299, daspun 313, 1574, quomans 2785, goulen 760, goul 1993, bourmen 377, 647, chom 439, 919, cf. chomel, quas 991, respond 538, 3062, dammal 570, daramb 607, Ircmen 607, 2368, gemer 641, 1393, resef 2478, recour 672, 1666, clasc 1790, 3090, disping 802, gourdous 890, difen 1017, compren 1066, renons 1116, baie 1316, coms 1474, repos 1595, 2625, chans 1595, quoi 1613, disquen 1644 (descendre), douch 1728, retorn 1906, 2249, souf 2125, 2416, diges 2432, ordren 2531, honserf 2536, presec 3038, espos 3196, discour 1301, gomford 941, barland 1812, adres 605, aprou 2504, disquen 2587, 2735 (montrer), opos 1532, entend 1602, pad 568, chelou 2116.

2o Avec le suffixe -a ; priata 158, vahata 239, nem hopra 289, danva 343, fourg ata 2846.

3o Avec le suffixe -an (1) (a nasal) : taquan 141, effan 149, 1546, deuertisan 150, asistan 224, rentan 263, nem asosian 264, boutan 283, fean 290, anuian 208, dromplan 314, 545, 1325, resistan 320, manquan 344, stinan 353, gomuniquan 364, visitan 370, agisan 375, disiplinan 413, friuan 422, sortisan 426, 2658, saman 464, partian 498, ruinan 533, vreinan 542, aparisan 562, crenan 563, disaman 594, rafrechisan 596, 825, 1447, logan 616, guersan 630, 1135, prenan 1135, las an 689, 728, 1422, hanan 690 (battre), beuan 721, blantan 822, cf. 1282, canan 1272 (chanter), cf. 848, spontan 893, 2680, blesan 916, sefian 873, gonuertisan 788, 2230, forsan 1028, ratifian 1035, emitan 1065, imitan 1694, atisan 1122, manian 1288, avertisan 1340, 2298, leinan 1353, scrifan 1369, scuisan 1496, 2785, tenan, trochan 1528, crenan 1531, quesan 2776, goainan 1625, sinan 1636, dispaquan 1647, punisan 1699, crougan 1708, umilian 1726, 2031, apuian 1745, viprisan 1824, ispliquan 1944, gastian 2216, regouisan 2229, badinan 2255, frotan 2264, dorchan 2272, finisan 2457 n, unisan 2514 n, tiframan 2570, rostan 2708, perisan 2940, plegan 3048, suplian 3079, brallan 3167, soufan 3301, cf. souf, dougan 3470, sortian 3508 n, cf. sortisan 426 ; jspliquan 3579, disitan 1100, as tan 3199, discuisan 3640, fachan 1395, huesan 2995.

4o Avec le suffixe -in (i nasal) qui a empiété sur l’ancien domaine de -an (m. br. aff) : recrein 148, esequitin 221, tretin 245, disquin 291, ambetin 318, anleuvin 337, 1789, sentin 340, represantin 341, andurin 342, pedin 383, cf. 1515, abregin 392, considerin 404, breparin 453, rentin 514, 2446, credin 1534, iscusin 578, dibin 126, violin 689, maltretin 692, subvenin 720, nem resoluin 723, nem anbandonin 724, doublin 738, efasin 751, pehin 2226, hontantin 858, formin 879, diuisquin 903, recrein 947, forsin 1012, rentin 1044, 1703, gangolin 1064, 2696, hoarsin 1092, 1606, jnvantin 1101, vlasfemin 1110, rein 1130, 1376, commandin 1184, instruin 1186, corne

[112]

tin 1208, 1692, conduin 1233, 2290, deuin 1241, continuin 1246, poultronin 1250, 1454, jnporlunin 1253, varboullin 1299, saludin 1312, ofansin 1326, 2277, disinorin 1328, ravagin 1349, anulin 1349, esposin 1446, repousin 1458, gonbatin 1460, prouvin 1461, aconpannin 1481, maneuvrin 1489, ataquin 1508, reconpansin 1554, reposin 1597 (cf. repos 1595), exersin 1599, disesperin 1613, damantin 1672, oblenin 1686, hondamnin 1701, preservin 1731, prometin 1749, absolvin 1797, ataquin 1829, pardonin 1877, boainin 1907, rancontrin 1942, anseinin 1950, instruin 1954, 2194, acordin 2142, respetin 2190, consolin 2235, soufrin 2276 (cf. soufan), menasin 2325, insultin 2337, 3309, scein 2366, estonin 2377, andurin 2448, drehin 2464, reparin 2530, terin 2801, etoufin 2885, ennulin 2887, gonparegin 2941, acustumin 3018, bresin 3034, saludin 3118, gometin 3232 n, vilapantin 3309, honsomin 3310, garotin- 3349, ancouragin 3462, armin 3467, aretin 3554, rein U) 114, dimein (2 syll.) 1069.

5o Avec le suffixe -en : antren 575, 2324, dougen 659, 1341.

6o Avec le suffixe -al : songal 290, 421, pillai 569, goseal 834, criai 1110, 1605, rulal 1565, furchal 1575, chaseal 3343, pvnal 3395.

7o Avec le suffixe -el (er) ; chomel 603, 3614, cf. chom, meruel 664, 1454, heruel 787 n, tehel 1175, lemel 1187, 1882, deuler 1530, 3231, lesel 1630, 2362, sevel 1644, derhel 3502, envel 1709.

8o Avec le suffixe -ad : pilad 328, guitad 390, laquad 416, 544, 1350, roulad 688, voailad 990, lampad 1642, 3401, souetad 1824, netad 2222.

9o Avec le suffixe -ed, -et : gueled 195, 1867, quitaed 311 (<quitad 2300), gousqued 313, 636, cared 380, selled 665, 2549, honed 725 n, cleued 1351, caed 3090 [gad 1407), cerset 1820, maned 3347, tostaed 1918, toueedw 3053, doned 370.

10o Avec le suffixe -id : gonid 461, 1854, 2546, cf. honed.

11o Avec le suffixe -oud(3) : seruigoud 427, pligoud 431, 662, gousoud, goud, esperoud 678, meritoud 693, tachoud 770, galoud 971, 1376, tapoud 1304, aneuoud 442, anavoud 3240, sanloud 3316.

12o Avec le suffixe -s, -es : hortos 620, lairres 569.

13o Avec le suffixe -ec : redec 1562.

pour un mode personnel : ne quar qued Doue na quared e nés an 1202, huy aneus coled o ten a me a gol ma groec 925, mar antreed a bars a dond quen dach 2387, e houlas pardon a prometin 1749, noiansond qued Doue nac e veulin yve 1134, me gouesey a resef 2478, ne un pelech moned na goud 3248, Emploi de l’infinitif (4) :

[113] [114] [115] [116]

a rese a e/ou ar guin a /rotan ar merhed 2264, mar on les da vond quid, a dond quen dach goude 2659, e respetche e noaid nonpas scein 2366, mar quar prometin e retomou quid a moned 2753, a me rey da leinan... a rodai portion 1354, nebon galoud a voailch 971, mes a meus... a goul 772.

Infinitif de narration : a me da nem armin 3467, a me antren 3282, et même : a boetad a quesec 465, si boetad n’est pas pour boetaed ; quemer... a moned 1309, cf. 2217.

Pour l’optatif(1) : Doue da voud meuled 3110, Doue da voud glorified 2633, ma redemptor Jésus da rein din e sicour 2663, ma benedicsion da vond guenech a bed fidel 3125.

Explétif(,) : goud ouses 2339, bean a sou 1256, galoud ellomb 3093.

Avec la préposition quen, quend : quen scrifan 1363, quen mond 1754, quend(3) cometin 2865, quend dond 465, quen meruel 1750, quend evid portion 3171, quen vid en em auans 3468. Avec eb : eb dremen 607.

Avec vid : vid ma boud(i> 1007, evid bean bras on poain 3182, evidomb da voud 1924, vid ma ancouragin 3462, ne non qued vid {inval 911, vid mired o arhand 1060, arbad e sponstan vid gueled dioulou 2417, a ja vid lampad 2350 b, vid boud rust ar veag 2203. Avec gant : gand sou{rin pasiand 2667, gand ober piningen hac ar gontrision 759, gand e gared 1876.

Avec da : ehemb d’antren 575, elles da gredin 2945, voair ar poend da voud 1290, poainou a reinquin da sou{rin 2276, no petomb quen da retom 3425, eon contand da vond dy da logan 616, tigesis da sons dean 1017, ve quer cruel da laquad 716, nem lesomb da veruel 1940, me a rey dach da houd 2162, ar plas da netad 2222, mar les ahanon da veuan 2479.

Avec a : a ra di{en ousimb a gol pasianled 680.

Avec ous : ous ma auertisan 3503, ous o corto 785, me sou ous e heul 1031, ous o quitaed 3623.

Comme sujet ou attribut : ar viol hac an tan a lemel ar vue 2181, onest a voay dach goned 216, a lar eo rentin justis 1703, horeur eo compren 1066, e voay jnposib tremen 3451, ma vige permeted doned 370.

Comme complément d’un nom : po heus hoand pilad 978, cf. 2591, heman sou eun toi fust dimb bean nem gaed 926, dar gond bean 2910, en esper ma spontan 893.

Comme régime direct ou indirect d’un verbe : en couls da gomans

[117] [118] [119] [120]

ober hend 472, ma religion a di{en ousin se disinorin ma den 1328, quomans a ra scuisan 2785, no heus nemed songal ma fean 290, criomb dar Voerhes pidin 2541, asted formin 879, a bromed evnanrepousin 1458, cair a nefou ma gourdous 2912.

Le pronom personnel de la troisième personne du singulier complément d’un infinitif s’exprime soit par l’adjectif possessif e, soit par le pronom en (Voir les pronoms régimes).

L’infinitif avec un pronom personnel s’emploie au sens passif : andured o quared 1332.

Participe présent.

Voir ci-dessus les particules verbales. ne boueses o pedin 383.

Participe passé.

Remplaçant un mode personnel : pa voain ed dan doulin, comansed ma /eden 3287, peger pront e tehis goude ma voan tented a peh’ed 763, mo pige consanted a bet muoch tretab 1279, eur veag antreed 2217, chadenet... a trohed ma /en 2674.

La plupart des indications de jeux de scène sont au participe passé.

Verbe BEAN

Présent de l’indicatif :

1M p. sg. on 406, 434, 3263, me e 16G1, me a he 2164. 2e p. sg. (mar) doud 994, 2817, te e 2275, te sou 235, 2276. 3e p. sg. e, eo, sou, (mar) de B 66.

Impersonnel : eus 624, 829, beau a sou (1) 1256, cf. bed a sou 2127, mar sou 964.

Impersonnel passif : (e) ver 1917. 2* p. pl. och 511, (mar) doch B 74, 165, 456.

Présent d’actualité :

3e p. sg. emedy 2245, medy 992, man 289, 2115, 2137, eman 886, 2284. 3* p. pl. emaind 1057, emand 1096.

Futur-Subjonctif :

1" p. sg. vin 211, 1275, me ou 1894. 28 p. sg. vy 2324. [121]

3e p. sg. vesou 50, vou u> B 49, 450, etc., vo B 110, ou 351, 450, 1191, gou 435, ma vou 468=mou 872, ne vou 614=nou 643. 1” p. pl. vefomb 620, veomb <*> 618, 1952, 2544, 2808. 2® p. pl. veed w 457, 635, 2124, 2505, 3306, ved 921, 1318, 2456, 2604. 3® p. pl. vouind(1> 446, 458, 618, ouind 1357. Passé défini :

Se confond avec l’imparfait(5) : voay était 3268, voain je fus 3279, 3288, voan j’étais 3336, voay était 3339, evoay était 3382, voain je fus 3339, voan je fus 762. Remarquer mar boay (s> 2170.

Conditionnel (irréel) :

1M p. sg. vigen 566, 3326. 2® p. sg. viges 387. 3® p. sg. bige 388, vige 1713, 2366. 2® p. pl. vijach{7) 57. 3® p. pl. vigend 3556.

On le trouve employé comme imparfait d’habitude : pa vigen ary me{ 1237, heman vige guechal 2794.

Conditionnel (potentiel). Par suite de la chute du z, le présent d’habitude se confond avec ce mode : 1M p. sg. ven B 54, 308, 958. 2® p. sg. ves 2069. 3® p. sg. be 197, 271, 590, ve 675, 2394. Impersonnel : e ver 480. 1” p. pl. vemb 500, 602, 1706, bemb 2543. 2® p. pl. bech 424, 1366, vech 414, 3139. 3® p. pl. vend 631. Impératif :

1*® p. pl. beomb 461, 2033. 2® p. pl. besed 1039, beed 2677, 3145, bed 2147.

Emploi de bean auxiliaire à l’intransitif : comansed on da hoary 278, cf. 186, pa non troed dar /al 957, huy e a sou tromped 547, manqued on bed 999, cf. 2341.

[122] [123] [124] [125] [126] [127] [128]

Verbe AMEUS

Présent de l’indicatif :

1™ p. sg. ameus 954, (ne) meus 953. 2® p. sg. (pe) teus(1) 117, eteus 312, 2741, te neus 887, te aneus 2310. 3* p. sg. m. en dettes w 3054, en deus 1021, 2754, 3068, (ne) neus 3143, aneus 995. 3* p. sg. f. e deus 791. 1M p. pl. on deus 509, 1685, on eus 1727, nin neus 627, nin a neus <*> 459. 2® p. pl. o heus 190, 561, huy a neus 757, 761. 3® p. pl. o deus 1565, 1578, 3424.

Futur-Subjonctif :

1" p. sg. (a) mesou 156y 1455, 2839, (na) mou(4) 211, 2840, emou 823, 980, (pa) mou 934. 2® p. sg. es pou(6) 333, 787. 3® p. sg. en de/ou 2751, o ne/ou <•> 273, 1459, 1966, 3262. 1” p. pl. (a)momb (7> 508, 1214, 3633, emomb 626. 2® p. pl. o peou 2108, o pou 622, 736, 1365. 3® p. pl. o de/ou 326.

Imparfait-Passé défini :

1" p. sg. emoay 970, 3280, moay 3295, me moay 753. 2® p. sg. es poay 1295. 3® p. sg. en defoay 1779, nefoay 753 n, 1988. 1M p. pl. moaimb 1879, moamb 1219 <*>. 2® p. pl. o poay 717, huy nefoay 2973 n.

Conditionnel irréel :

lr® p. sg. (ma) mige 565, 2063. 2® p. sg. es pige 387. 3® p. sg. a nige 2772. [129] [130] [131] [132] [133] [134] [135] [136]

lw p. pl. migemb 1707. 2* p. pl. o pige 1279, 1280.

Conditionnel potentiel :

3* p. sg. en defe 1801, nefe 906, 956.

Conditionnel-Présent d’habitude :

1" p. sg. a me 1303, 1945, mar me 2249. lre p. pl. memb 517. 2* p. pl. o pe 263, 521. Impératif :

2* p. sg. (n)es pe 2844. 2* p. pl. (n)o ped 1485, 2590, bed 2239. Remarque. — Employé comme auxiliaire, le verbe ameus est souvent renforcé par le participe passé beda) : hui aneus bed lared 757, cf. 2044, me moay bed renonsed 2665, eteus bed groed 2075, aneus an bed tened 1020 ; Doue aneus bed ma hroued 2178, aneus bed ma galued 2302, pa meus bed entented 3574, ma hor( inding a neus bed toud soufred 3260 ; or sergand e teus bed masacred 312 ; mo pige bed gaUed 1882, ma migemb bed gueled 1707. Verbe OBER Présent :

lw p. pl. reomb 3306, remb 1952. 2* p. pl. red 195. 3* p. pl. reond 3134 b, rend 1960.

Imparfait :

3* p. pl. rend 3442.

Passé défini :

1” p. sg. ris 2468. 3* p. sg. res 1717, 1983. 3e p. pl. regond 2084. Futur :

1™ p. sg. rin 1343. 2* p. sg. ry 318, 394. 3a p. sg. reiou 274, 816, rey 170, 213, 732, 1270, 2919, crey 936 (me o crey). 1" p. pl. refomb 473, 2611, reomb 490, 721, 1272. 2* p. pl. refed 2232, 2392, reed w 166, 199, 3036. 3* p. pl. reind 141, 1454 n.

[137]

[138] VERBE MONT.

102 Conditionnel :

1" p. sg. raen 2226, rafen 824. 3e p. sg. rage 1750, ra{e 2073. 2* p. pl. rafach 937, 966. 3® p. pl. ragend 3296. Impératif :

2® p. sg. groe (ms. droe) 2844, groe 807, 2299, 3009. 2® p. pl. groed 1264. 3® p. pl. groeonw 1582. Emploi de ober au sens impersonnel : auans a ra dan de 498. Si le texte est correct : e ra eman ar vins 608, credin a ra guenin 873. Ce verbe se confond dans notre texte avec rein « donner » par ex. au présent : ran 2036, ra 2126, 3220, reond 1196 ; au futur-subjonctif : rin 1343, mais rein 343, rey 1353, 2162, 2250, refed 1479, 2232, 2243, reed 3632. On dit à l’impératif : reeid 1394, reid 1377, 2825, 3164. Le présent est me a ro B 50. Verbe MONT Présent de l’indicatif :

, 1*® p. pl. emb 575, 2685. 3® p. pl. (mar) geond 141, eond 1074, end 1064. Futur-Subjonctif :

3® p. sg. jalou 462, iellou 439, jal 276, 1184, jel 497, 1160, eiou 572, ey 1501, 2896. 1” p. pl. eomb 519, 2034, 3303. 2* p. pl. eed 630, 636. 3® p. pl. eind 3140. Passé défini :

3® p. sg. jes 1778, 3317, hes 3470. 3® p. pl. hegont D 119. Conditionnel :

lr® p. sg. agen 3360. Impératif :

2® p. sg. que 336, 993, 2894. 2® p. pl. hed 377, ed 638.

[139]

[140]

Verbe DONT Présent de l’indicatïf :

3* p. pl. tevont 953. Imparfait :

3* p. sg. deue 2002, de(l) 2000, 2746. Futur-Subjonctif :

2e p. sg. dy 890. 3® p. sg. deiou 934, 1355, deuou D 44, dey 438, 2053, tey 1032. 1" p. pl. deomb 1498. 2® p. pl. deufed 2388, defed 2123, ted 650. Passé défini :

2® p. sg. degoud 2076. 3® p. sg. teuas 3314, tes 3271, 3411. 3* p. pl. tegond 3290. Conditionnel :

1*® p. sg. deufen 1808, teufen 538, 1775, deugen 255, teugen 3359. 3® p. sg. deufe 676. 2® p. pl. deufach 444, tevfach 420. Impératif :

2® p. sg. 3® p. sg. 1M p. pl. 2® p. pl.

deus 2099, des 3007. deud 284. demb 2360, 3436, demp 2427. deud 113, 499, ded 157.

Verbe GOUSOUT

Présent de l’indicatif :

1™ p. sg. on 659, 2191. 2® p. sg. ouses (J) 2263, 2339. 3® p. sg. voar 942, voair 1217. Impersonnel ouser 2851. 2® p. pl. ousoch 297, goud a ousoch 577. 3® p. pl. ousond 949.

Futur-Subjonctif :

3® p. sg. oufeou 901. lre p. pl. oufeomb 1483.

[141]

[142]

2e p. pl. goufeed(l) 3038, oufed 146, 833, 3028.

Imparfait :

1" p. sg. voien » 3377, 3571.

Conditionnel :

lw p. sg. oufen(8) 152, 407, 1601. 3e p. sg. oufe 3229. l” p. pl. ouchemb 1709. 2e p. pl. oufech 704, ouchech 605. Participe passé :

goufeed 565.

MOTS INVARIABLES (4)

Prépositions simples.

a « de » : ne meus a neb eston 2687, na momb a neb vely 3096, achou a begou 1406, cf. 1490, eb dougans nac eston a Doue 2166, pa dey sons dean a valait 1612, den selled a drue 1748, cf. 3073, a ra difen ousimb a gol pasianted 680, mar dnud sur a debag 994, ma vou comset anon 1418, a vahadou 880, a vandenou 1198. bete « jusqu’à » : o bete 1434, o pete 1817, 2373, bete hen 929, bete ma maro 752, bete ar veselliou 1026.

da « à » : red e din mond da lair 810, cf. 1028, me meus glahar a voailch dam pried 852, caed quen na regred deur go s hast 856, voailad dam peu 990, da nos 1158, 1626, ar sord dach 1266, quapab da dougen 1341, damantin dar boain 1672, arhand sou em godet da bean 870, mab dan duc 2188, a fel dean pardon 2550, me gred din 960, en durand da 2084, non nobstand da 2081, da dioul eha 1108. dre « par » : dre e natur 1865, dre an desercho 1128, a sllabe dre « épars à travers » 3590. dreist <« par dessus » : dreist peb tra 1216, 2236 n. dindan « sous » : dindan o dif gasel 1094. e, en « dans, en » : huesed en vanité 1091, ne gredchen e vige ar sord dach en volerien 1266, partisipand en boneur 2543, considerin en o hantretien 404, en tronos 2628 b, beued no tiscrision 1594. en(5) (ancien ent) : en bras 999, cf. er fad. [143] [144] [145]

[146]

[147]

entrew « entre » : 1830, 2337, 2617.

etrid « pour » : auoquad evid ar beherien 1718, evid pligadur e vend dedied 1180, evid ar bla presand 1126, vid an deiou nebon 691, vid ar sun dremened 1225, vid mad 791, vid brauoch evity na neus qued 624, evid bean bras o poan 3178, vid ma boud malerus 1007, evid poan na miser 2990, ne non qued vid {inval 911, cf. 1101, pa ne vid da armou 1295, goais e se évité 918, muy vid on deus groaid 3478, evid quemend se 274, 1925, evid gand eman 554, ne voais evid pad 568.

gant « avec », « de », « par » : ma cleuin guenech 1003, beb marivin gante 1238, bean sou guenin 1256, col a ran ma bue gand eun den misirab 1294, exanted gand justis 2180, e vou vaqued guenid 2323, nin ary gand ar vutullerien 503, nariou neb ofans gante 598, pa songou guenach 2597, a deu gand an end 1282 b.

goude « après » 1362, goude se 1818, o coude 1432.

heb « sans » : eb bean disoursy 1956, eb mar 1932, eb quen « seulement » 1219..

herve « selon » 796, 1397.

quend « avant » : quend ar fin 1980.

nemed « sinon, sauf » 3589.

ous « contre », « à », « en » : anuel ous quigirien 3338, cf. 2639, ous(,) ma eul 3270, voir o, och ; ma senfen ous ma meur 806, aneus eston ous ma falagries 1306, difen ousin 1327, da selled ous ar pelerin 2550, heiou ous 572, gonparegin ous 2941 ; os croech 227 b.

ves « de » 628, 1316, 1821, 2133, 3612, D 25.

voair « sur » : manqued och voair o roud 2875, mest e voair e enemied 1522, mar manc voair e dol 1512, me ou quabiten voair ar friponed se 1417, voair ma hond 1412, tref a gonsequans a meus voair ma spered 358, voair e dro 820, rein e venedicsion voair ar penitand 2623, amared voarnoch 2450.

Prépositions composées.

ahan « de », avec les pronoms : me o ped sons ahanon 2158, coms ahanoch 2192, ne soursy qued ahanoud 2309. chede « voici » 800, chetu 155, cf. sel 166. dious « de » 798, aman ouser diousach 2851, diüs 469, evid acustumin dius poan 3018, dus(4> 296, 713, 3315. diues « de » B 102, 133, 888, 2058, 3515 n, diues hac 423, diues a 218, dimes(5) D 69, D 93, cf. ves.

[148] [149] [150] [151] [152]

diues an dé « par jour » 523. deus « de » 374, 674, 710, 714, 892, 908, 1398, 1525, 3375, 3422, ne teus qued soufred a voailch deus eteus merited 3030, deus a ; pa sellan ous da /as, deus da voustajou B 105. dirac « en présence de », « devant » 355, 2238, 2601, 2720. diuoair « de dessus » 1067, 1754, 1910, 3452. entrenec(1) dach « vers vous » 1492, trenec an enf 2627, entrene din « vers moi » 3390, entrene ar hastel 3506, trene din 3117, trene an enf 665, trene scroech 305.

Locutions prépositives. aboe (a pa we) « depuis » 1782, aboey 1850. balamour (fr. par amour) : balamourd da « à cause de » 470, 1186, 1188, 1954. biou : a biou da « à côté de » 1770. quever : en queuer « à l’égard de » 1838, cm heuer <« auprès de moi » 2403. creis : en creis « au milieu de » 981, 1173. digare : voair digare « sous prétexte de » 813. ed « pendant » 1418, 1776, 2498, voar ed guel « à portée de vue » 1460. eneb : a eneb « contre » 1888, 2178. ge (gaed) « vers » : da ge w ma bro 3611, do que 701, cf. da gaed an or 3250 b, da gaed 2139, 3530, do caed 2431. guis : en gis « en manière de » 1096. hely(,) •< par » : hely da housouc 2098, hely e dreid 2843. lerch : voair e lerch « à sa poursuite » 2783. mes : ar mes deus « hors de » 1025, 2303, 2388, er mes a 502. melon : non metou « parmi nous » 2717, cf. en mesc an dud 724, cf. 1118, dre vesc 1567, mesc arme 1428, mesc a re dimed 1080. pad{&) : en pad « pendant » 2526, 2533, pad pemb bla 1716, pad an etemite 3298. pars : ebars en « dans » 146, «395, bars er 3360, voar bars eun eur « dans une heure environ » 382.

[153] [154] [155] [156] [157] INTRODUCTION.

peurs : abeurs « de par »

866,

107

deus abeurs

1433,

diues abeurs

1667, 2371.

peu : ben ft> an de 508 « d’ici le jour », ben arhoais 923, ben eur momed 3389, ben neubed a amser 1587, ben diueur 1318, voar ben end da « au devant de » 1626, en peu da « à bout de » 339, ous pen « outre » 845, « plus de » 3434. poes ® : voair boes « sur, à » 1099, voair boes scroech « vers en haut » 2759, voair boes ma bue « au risque de ma vie » 2211, diuoair boes ma bief « par mes cheveux » 3437, dyvoar da boes « à ton risque » 336, a boes o fen « à tue-tête » 1110. tal : en tal « en face de » 3162, da dal 595. toes : en toes « parmi » 1080, 1190. lost : dost da « près de » 3201. tremen(3> « passé », « plus de » : tremen pevar mil scoed 485. tro : en dro da « autour de » 225, 3217 ; voair e dro « sur lui » 820. treus : a dreus da « à travers » 889. tu : eun tuond w da « en plus de », « au delà de » 1583. vst(5) da « au dessus de » 3456.

Adverbes et locutions adverbiales. Adverbes de lieu :

pe lech « où » ? 783. aman « ici » 3477, ase « là » 872, 1278, (h)enon « là-bas » 440, 1175, dy « y » 768, 1417, -man « -ci » 1074, -ond « -là » 1074, -se 2133, 2247, du-se « là » 129, 3033, du-ond 2981, eno 3365. lech ma « où » 3354, lech na 1627, neb lech « nulle part » 146, a lech « d’où » 284. a lesman « d’ici » 450, 506. ahan « d’ici » 767, 1045* 2503, ahan da « d’ici à » 1045, ahane « de là » 255. escroech « en haut » 125, 305, cf. da nech 3267, aroc « devant » 1500, estrou « en bas » 2768 b, 3267, dious strou 3330, deus estrou 587. ebars 188, abars 179 « dedans », da goste « du côté de » 439,

tost « près » 963, 998.

er mes « dehors » 1082.

voair lerch « après » 2771. [158] [159] [160] [161] [162]

Adverbes de temps :

pe da gouls « quand ? » 233.

frie « aujourd’hui » 828, etc., {ete « ce jour » 838, fenos a) a cette nuit » 617, 1453, en voaism « cette nuit >» 1550, breman « maintenant », er veg man « cette fois-ci » 723, eur veag » une bonne • fois » 950, evid er vegman « pour cette fois » 2281.

guechal 2794, gueach al 1075 « autrefois », dech « hier » 3586.

an de voair le[r]ch « le lendemain » 1159, 2023, arhoais « demain » 731, 936, 1157.

hoais « encore », « pourtant » 531, 742, 3234.

neuse « alors » 333, voar eun dro(3) « en même temps » 3365.

diagend « auparavant » 3316, quentan 266.

abred « tôt » 2300, abred pe divisad « tôt ou tard » 1298.

quer quend « aussitôt » 501, 2604.

diustuw « tout de suite » 768, 1361, en ber6) « bientôt » 1626, em ber 880, 1239, aboe « depuis » 688.

bremeson « tout à l’heure » 1449, 2428, bremeson vatand 3061, bremesouden vatand(,) 202, ractal «< tout de suite » 1258, 1362, 1796.

ergentou™ « tantôt » 250, 2991, souden « bientôt » 540.

pel « longtemps » 785, 1332, pel sou « depuis longtemps » 234, 2745.

bepred « toujours » 354, 2738, biscoais « jamais » (passé) 967, an dut fur a viscoais 915, lared e a viscoais 2205, birfiquen(8) 1265, biquen 967, 1220 « jamais » (futur), vid famés 2279, 2890, famés 372,

ordinal « toujours » 522, 690.

alies « souvent » 1210, 2607.

adare « de nouveau » 3228 ; are 199.

goude « après » 1028, 2816.

Adverbes de cause :

Au lieu de perac « pourquoi » on a petra so quiriec ma 3185. [163] [164] [165] [166] [167] [168] [169] [170]

Adverbes de manière :

penos « comment » 415, 877. couls a (hoc) « aussi bien que » 436, 1352, 1715, 3028, couls a voa dach bean chomed aman B 89, couscoude « tout de môme » 561, couls... evel 1070. er hontrel « au contraire » 329, 366. asanbles « ensemble » 1448, 1456 ; voar eun dro 3365. evelen « ainsi » 461, 516, vel quend « tout de même », « toujours » 117, 1545. evelse « ainsi » 719, 1697, 2683. erfadw « bien » 995, 1442, fad 384, 2716, mic : teued mic 306, veruel mic, maro mic 549, clos : prest clos 437, 2935, per-, peur-w 961, 211, 2278, res 1305. en bras « grandement » 999. guel « mieux » 469, 422, 1307, guel « très », « bien » 1000. goais « tant pis » 918. dre gair pe rigeur « de gré ou de force » 943, — pe dre clc 539. en ven « en vain » 781. dreist oll « pardessus tout » 3210, dreis peb tra 2094. a bob eil « alternativement » 1556. er fin « à la fin » 1717, anfin 270, a la fin 1223.

  • mandiS) sert à former des adverbes : mesusamand 564, memesemand 1868, sur le modèle de seulamand 2318, malerusemand

2088, prontamand 1019, antieremand 3264, etemelemand 3352, etc. Un grand nombre d’adjectifs s’emploient adverbialement : ardy 246, braf 346, leal 871, fust 926, sur 1200, flam « flambant » 155, prop 279, malerus 1652, terib 1446, goustad 834, pasiand 2778, eun 3344 droit ?

Adverbes de quantité :

pegen, peger « combien » 762, 771, 2209, 2210, 2762 devant les adjectifs ; doust peger « quelque... que » 2396. pegamand a « combien de » 704. pegeid « combien » ? 1314. [171] [172] [173]

quen « plus », ne quen « ne que » 3454, a gen « de plus » 400, quen a « plus de » 424. quen, quer « si » 1149, 1296, 1871, 2944, quer... vel 1149, quer... a « aussi que » B 21, 414, quen... da « assez... pour » 415, quemend evoain jntourdied quen na moay 2963, quemend hoc « autant que » 2283. cals « beaucoup », cals a « beaucoup de » 524, 876, 2485, creoch cals B 24, quais hend 466, cals deus a 683, eun toulad money 231, cf. 1242, eur bem goaid 984, — bahado 1015. quen neubed « non plus » 1832, neubed a dra <« peu de chose » 858, dar bianan « au moins » 1308, neubetan <« le moins » 1829. nemeur a dra « pas grand chose » 1337. quercouls « autant » 719, couls a 1719, 3028. queid... evel « aussi grand... que » 130. avoailch « assez » : quantoullenou a voailch 857, ma goailch 1008, doained avoailch 703 ; ne qued avoailch se 2701. voair dro « environ » 3269, quasy vel « quasi comme » 3278, cf. 2406. bepred « toujours, environ » 3375. ouspenn « en plus » 403. re « trop » 785. Adverbes de négation :

nana> « ne pas » : nan emeus qued 1254, nan end 1554, nan aneueond 1062, nan eus 795, a se a sou bed cos nan on qued punised 2189. nen « ne pas » : nen on 176, nen ey 295, nen oud 885, nen eus 914, 2113, nen in 2775, nen a 1069, nen e 1050. Dans quelques cas il y a sans doute des traces du pronom de la 3# personne soudé à la négation. ne « ne pas » est la forme la plus commune dans notre texte : ne och qued 221, ne eus 440, 844, 1453, 2043, ne on 2636, ne dremeni 1285, ne neus 688, vid ne antrein 944, teuled pie ne deufavh 943, ne lered (impératif) 913. n’ <« ne pas » devant voyelle : n och 2820, n on 1395, n eus 1419, n alan 1465. Ces négations peuvent s’employer comme conjonctions (voir ciaprès) : nan « que ne » : se a sou bed cos na non qued punised 2189. ne « pour que ne » : no contrarijn qued ne guese 3625.

Suppression de ne : vin qued 1432.

[174]

nonpas(1) : nonpas da gobalin 1460, cf. 2324, nonpas dre an

chou 520, nonpas scein 2366. nue « ni », « et » : nolansond qued Doue nac e veulin 1134, ar pab nac an escob 2262, e rafach... nac e vech 937, e rennonfes dar guin nac yve dar merhed 2258. na « ni », « et »(,) : ne gredan qued... selled... na pronons 665, neb interest na neb anbision 1132, cf. 1136, 1143, 1148, na hui B 87, 300, na penos 919, retom na doned 2354, vid pilad na blesan 916. ma gourdous na ma flatal 2912, piou allou résistant na dont B 26, evid ma houfeomb pesord posicton na voair besord coste 1484, na den ne neus gueled 914. na ne « ni ne », « et ne pas » 792, 967, 1221, 1140, 1157. na nen : na nen eus gleed 1392. a rese a sou visou na ne pardonou qued 1863. nemed, med « sinon » : ne noud med cur fripon 885. non « non » 115. Adverbes d’affirmation :

ja « oui » 123, etc., gou « si » 435, ja da « oui dà » 639. eb mar « sans aucun doute » 1932. ne teus eom « tu peux être tranquille » 2323, cf. 2369. nebon « n’ayez pas peur », « dame I », « ma foi I » 671, 691, 971, 977, 1280.

Auxiliaires de la négation et de l’affirmation : qued « pas », qued a « pas de » 531, 561. banach « goutte » : tan ne meus banach 965, na banach ne voelan 984. man « rien » 1581. tam <« morceau » : se ne maflig tam 1073, ne nem fiomb qued tam 1925. [ne)med « que » : nen oud med eur fripon 885. quen « plus » : na ne meus gleed quen 1392 ; « rien de plus » 193. peloch « plus » : nele peloch difen 1017, naneueond peloch 1062, ne glesquin pelloch 1678. nemeur « pas beaucoup » : sort ne neus qued nemeur 1488. inin « en » : mes pic ne meus inin 182. cren : a grenn « fermement, tout à fait » 2211, cren 1048, 1349. a bed « au monde », « du tout » 489, 758, 2590, 2895, cf. er bed « dans le monde » 1942, e neb faeson a bet B 6.

[175] [176] Adverbes de doute :

martese « peut-être » 200, 1898.

mechans « sans doute » 1901.

mesaon « je crains » 194.

Adverbes d’interrogation :

a « est-ce que >» 119, 783. ha 228. Cet adverbe est rare dans notre texte.

Interjections.

allon « allons 1 » 77, etc., allon ta 131, alon 2777.

siuoais « hélas » 1652, siuoais din 2164.

allas u hélas 1 » 425.

ho « ô » 559, 2133, au 737. ho ! ho ! 310, 383, 699, 783. holà 819. ha ! 411.

peuch « paix 1 » 306.

fors « force ! », « à l’aide 1 » 222, etc. ebien « eh bien » 169, 867, he bien 475, he bien cta 543. ma 0) <( bien » (consentement et indifférence) 381, 655, 939. nainpord 2203. dal « tiens » 86, etc., daled <» tenez » 199, sel « regardez ! » 1618. • arsa « or ça » 1319, horsa 91, harsa 147.

nebon(,) « ne crains rien » 175. harao 2951, haro 3033..

voair ma nosiagren 985.

salud 589, 2431, etc., bongour 2835, bonjour 55, quen a vou « au revoir » 1431, 1818, quen a vou ar hentan 969 ; adieue 1818. ma jné « sur mon âme 1 »> 891, 2925 ; sur les jurons, voir le Vocabulaire.

CONJONCTIONS

Conjonctions de coordination.

a, ha devant les consonnes « et » « même » ; a goul 772. hac devant les voyelles «< et », « même » : hac a re gruelan 2001, cf. 2480.

[177] [178]

ive « aussi » 1329.

pe « ou » 1513, 1614, 3060, 3352, pe otramand, potremand 1502, modered o comgou pe e ved diauis 884, pe... pe 615. rac « car » 902, 1317, etc. mes « mais » 1513, 1543, 1550, etc., er hontrel « au contraire » 329. sepanand « cependant » 955, vel quend « néanmoins » 117. couscoude u tout de môme » 1533. (e)ta « donc » 394, 1125, etc.

Conjonctions de subordination.

e particule verbale, voir ci-dessus.

a, hoc « si » interrogatif : ne on qued a me grete 677, cf. 1006 ; ma selin hac en{ a sou 552, cf. 1648, 1916 a alors que », « même si » : hac e ven den onest 958, hac a ve danternos 438. ma « afin que » 170, 774, 910, 1418, 1426 ; « que » 406, 1615, 1676, 3180, 3331 ; « de sorte que » 3328, 3332, 3344, 3378. Dans le récit de Louis ma répété est presque l’équivalent de ha « et ».

ma, me « si » : ma ve 675, ma mige gou{eed 565, ma senfen 806, guelomb ma ne(e 906. On a mas dans mas och 401.

ma « où » : en Americ on bed ma meus nem abused 1127 ; cf. 486.

man « si » 120, 1242, 1260, 1960, 3326.

mar « si » 165, 197, 571, 576, 584, 613, 885L etc.

balamourd ma « parce que » 869.

beb maU) « à mesure que », 474, 1238, 1424, 3370.

ben ma(a) <« d’ici que » 450, 468, 2220, 2842.

bete ma(3) « pourvu que » B 30, bete goud ne « de peur que » 1539.

(a)boe ma « depuis que » 844, 1421, 2168, aboey me 1072, 1708.

adal ma{i) « aussitôt que » 1179.

deus ma « en proportion de ce que » *694. dre ma(5) «« parce que », « de ce que » 2288, 3572, dre ne 703. eb ma « sans que » B 94. (e)vel ma « comme », « tant » 622, 911, 2557, 3442, evel ma... pe pa « soit que... soit que » 1590 ; euel a gered 939, « dès que » 2243, 3471. (e)vid ma « pour que » B 37, 832, 1005, 1483, 1493, 3064, 3134, vid ne « pour que... ne » 823, 944. [179] [180] [181] [182] [183]

dar gond ma 3180.

goude ma « après que » 762, 2522 n.

guel a ma « du mieux que » 1497.

herue ma « selon que » 1895, 3225.

er momed ma « au moment que » 3263.

(ne)med ma « sinon que » 1838, 1839, 1911, 2344, med na 482.

moienan me 1375.

quaid a ma « tant que » 736, 954, 1423, 2518.

quemen... ma « si... que » 2358.

quen{d) ma « avant que », <« jusqu’à ce que » B 34, 247, 1032, 1588, 1658, 2840, 2896.

quen naw «< jusqu’à ce que », « au point que » 381, 1246, 1498, « tant que » 1032, quen a 969, quen ne 1842, 3434, quen a vou 3160.

quen vid « avant que de » 3468, quend evid ma 213, quer quend a ma « aussitôt que » 827.

penos{t) « que » complétif : scrifed ase penos 1374, e cheblant din penos 106, neus bed lared penos 758. rac ne « de crainte que » 359 ; rac aon ne 617. doust a « savoir si » 878, doust penos « savoir comment » 1226, 2325, doust pe... pe 1248 « savoir si... ou si », doust peger poainus ehe 2396, doust petra a sinify 1643. pan(3) « lorsque » pan cy 2847 ; « que » breman pan e sclased 3007 ; « puisque » pan och 1270, 2016, pan on 186, 946, pan omb 849. pan si » devant consonne : pan na gérés 2706.

pa « lorsque » devant consonne : partied pa gered 2152, pa gerfed 650, pa voain 3287, 3313, pa nem voelis 3331, « puisque » pa medy en quichen 992, pa meus ma {apero 2254, a pa « quand même » 767, 795, cf. 3045.

pa « si » : ou ned a behed... pa tremen 2121. p’ devant voyelle : p’arifed 1430, p’ o heus 3139. pa ne vid ma w 1016 <« si ce n’était que », pa ne vid ma 996 n, 1016, cf. pa ne vid da armou... nés poay qued 1295, pa ne vid se,

voain 1616, evel pa « comme si » 406, 631.

quemend hac a gery 2283 « autant que tu voudras ».

quemen... ma 2358 « si... que ».

quer... a 2733 «< aussi... que », quer... a ma 2779.

[184] [185] [186] [187]

VOCABULAIRE

Le vocabulaire des mystères bretons est, comme l’a remarqué A. Le Braz a>, tout pénétré de mots français par lesquels l’auteur croyait rehausser l’éclat de son texte. Il n’y a point de vers qui n’en contienne. Un assez grand nombre de vers ne sont guère composés que de mots français parfois habillés à la bretonne ; par exemple :

me sou quer puissant a nob em halite piou allou résistant em (as pa vin (achel allon eb complimant neus quet a preposou sel plesant eur bougre a meus me rancontret autro sergant roiel eo ma hondision non non ma migon na ne qued neseser doust penos evou cond quend (in ar barty man te sou eur hriminel, selerad, a voler a me bromed ardy, dre ma otorite ne veritan neb blam vid pilad serganted coseed brav, Louis, modered o (ury a reid dey da entend ehe eur /eumelen charmand ma (usul sou quarqued a bepred en etad er hontrel o presans a desiren bepred charmed on en antier o ueled o pigas me breparou quesec, eun equipag prest clos ne vanquou biquen dach ma jnor ma resped justis a sou parloud a souden ou gueled he bien eta camarad chede aman eur polison sel brauan eur chifon a meus dam homandin me ou vid eur (aines punised malerus

Quelquefois le mot français et son équivalent breton sont juxtaposés : 2425 2549 3045 3053 1420 1518 1879

a huy tat santel charitab a trueus da selled a drue hac a gompasion ci. 2549. breman pa felfe dach retorn a mond voair o, quis me car prestin seramand ja a toueed groed on lair a voler ma renou ar pcuch, an vnion en rouanteles Frans nin ne moaimb seulamand nemed eur veg desobeised

[188] [189]

L’auteur confond attention et intention 114, comporter et conforter 941, consumer et consommer 3310, approuver et éprouver 2504, 2877, cf. 2175, ravauder et radoter 2807, conversion et conversation 372, collier et collet 890 b. Mélangées à cette langue savante, les expressions populaires ne manquent pas. Telles sont, sans relever en détail les expressions grossières qui ne sont pas rares(1), les expressions suivantes : pod a voailch 1223, mineled 3044, eur pod al 1382, mar sou dir voair o fas B 71, re hir eo da daoid 85, males diner 217, mab enan Mary Robin 317 b, an dioul do harigelou 1558, ne neus den march Amon 1137, reid bech do potou 1464, dend genuer 3000. On y trouve même quelques proverbes : ar pourf pa biniqua a guenf en vanité 1108, dleed e boud difun a neb a fa en end 1002, neus quas pesord pen deus ma bas a lequin er fane 1419 ; des jeux de mots : mad esoch gand eun tam coaid, mes... e veuy enes coaid (â).

Voici les principaux mots ou expressions qu’il importe de noter(3) : «

%

abus en 363, dans le sens de « faire perdre le temps ». al « d’une autre espèce [que les autres] » : me sou eun pod al 1382. amared 2450 « amarré », « lié ». Cf. Ernault, Archiv für Celtische Lexikographie, t. I, p. 607.

anpoeson 2720 « charogne, pourriture », actuellement, en Goello. anvoaisan (nem) 2913 « je me chagrine », actuellement usité. arbad 448, 869, arabad e 3208 « il ne faut pas ». Cf. Ernault, Glossairea, p. 35.

arsod 2267 « espèce de sot ». Cf. Ernault, Glossaire *, p. 34, sur l’usage de ar- en petit-trégorrois. bagag 1078, 1175. Voir stran. Cf. Soniou Breiz-lzel, II, 228. bec : a vec troait B 88 «t sur la pointe du pied ». boed ar vud 168 « proie de la ( rage) muette » ; cf. ar gonnard vud chez Grégoire de Rostrenen (communication de M. Ernault) ;

[190]

[191]

[192] INTRODUCTION.

117

on dit de même par atténuation ar gounnicq (E. Ernault, Annales de Bretagne, t. XVII, p. 66). bourdet 918, 1016 « arrêté », « attrapé ». Cf. bourdein « s’arrêter court ». Ernault, Dictionnaire breton-français du dialecte de Vannes, p. 28.

butulier 468 b « muletier ». Le b est venu de ar vutulierien. calquen 232 « femme de mauvaise vie » ; à Trévérec, « grande fille ». Ernault, Revue celtique, t. IV, p. 157. candeuden 3001 « membre viril » ? cantoulien 167, quantoullenou 857 « salope » maintenant en Goello. caquetai 2838 « blâmer ». Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 242.

carigelou 1558 : an dioul do harigelou « brouetter » (Grégoire de Rostrenen).

chaquached 2742 « saccagé », influencé par chaka. conduite 1386 au sens spécial de conduite de gens de guerre. cont : dar gond bean 2910 « au compte d’être, au prix que sont ». corueen 2878 dérivé de « corvée » br. corve (Grégoire de Rostrenen). dar 2815 « tiens » en petit-trégorrois. Ernault, Revue celtique, t. XXI, p. 141.

darbad 3453, 2280 : darbad e dit ma hol « tu as failli me perdre », darbed 1013.

davidoch 438 « vers vous » ; cf. daved, deuad, J. Loth, Chrestomathie, p. 343, 350. Mais vid est employé comme verbe 460. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 248, v. 1026. debag 994 « manger ». Cf. Ernault, Glossairea, p. 163. ded 157, det 832, 1263 dans le sens de « donnez » est d’un emploi courant en bas-trégorrois. Ernault, Glossaire *, p. 326. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 86, v. 1004. dent guenver « dents de janvier, aiguilles de glace qui pendent aux toits » 3000. Cf. Sauvé, Revue celtique, t. III, p. 60. diampechin 1300 « dépêcherai ». Saint Crépin et saint Crépinien 186. Cognomerus et sainte T réfine 238. Cf. Ernault, Glossaire*, p. 160.

dibarfreuset 2991. Cf. difreused. diframed 2344 « démembré ». Cf. Saint Crépin et saint Crépinien, v. 1678 ; Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 268. difreused 3407 « déchiré », actuellement usité en Goello. digonsians 1033 « sans scrupule ». disoursy 384 « sans souci », de sourd « souci », Ernault, Annales de Bretagne, t. XIV, p. 525.

disvroedy 555 « étranger ». Cf. divro, Ernault, Glossaire *, p. 158. Sur di~ dis- cf. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 275-288. Ü8

VOCABULAIRE.

diuudy 2817 « ferai cesser d’être muet », composé de di- et de muda. domisaed 2896 « dompté ». Ce mot est particulièrement employé en Goello.

dres 2361 « arrangement », nem drcsan 620 « s’arranger ». eilpened 2774 « culbuté », actuellement usité ; eilpennein « bouleverser », Chalons, dict. ms. chez Ernault, Dictionnaire breton{rançais du dialecte de Vdnnes. einc : me laquou einc voaiman 247 ; en/c « oppression », Ernault, Dictionnaire breton-français du dialecte de Vannes, fe 2948 : eman e fe gantan « il fait fi de, il ne daigne pas ». Cf. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 98-99. • fend 1533 « amusement », cf. Ernault, Revue celtique, t. IV, p. 153, qui l’a relevé à Lanrodec.

foeld 1403, 1637 « mauvais garnement », maintenant en Goello. Cf. Ernault, Glossaire *, p. 406 mar, 242 forz. fonnan : è galon o vonnan 1739. On peut songer soit à fenna « couler par dessus bords » (Troude), soit à vaenat « défaillir » (Ernault, Glossaire*, p. 735).

gai 1632 « sot », à Trévérec. Ernault, Revue celtique, t. IV, p. 154. gardis 3214. Ernault, Glossaire moyen-breton, p. 253. glaged 1225 « en grande souffrance ». Cf. gloas, Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 295 ; gloaset, J. Loth, Chrestomathie, p. 299, 301.

guel 1460, 2608 : voar (r)ed guel « à portée de vue ». guel 842 : eur guel gol « une mauvaise perte, une forte perte ». Cf. goall, Ernault, Dictionnaire étym., p. 296. heurted 220 « entêté » ; cf. auurtet, Mystère de saint Crèpin et saint Crépinien, 312.

heuteur (huy) 421 « vous voulez ». Cf. Ernault, Glossaire *, p. 153 : Revue celtique, t. XI, p. 475. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 136, v. 484.

huil : mam ar huiled 230 « mère des escarbots » ; à Paimpol ce mot signifie « homme lubrique ». Ernault, Annales de Bretagne, t. XVI, p. 583.

iosl 532 « fatigué », à Perros. Ernault, Revue celtique, t. IV, p. 157. lapasad 327 « coup », cf. labeza «< lapider, frapper » ? males diner 217 « pas un rouge liard », actuellement usité en Goello ; males est ici employé comme juron négatif. march Amon 1137, avoir le cheval d’Hamon signifie « être jaloux de sa femme » ; Sauvé, Revue celtique, t. II, p. 238 notemated 405, variante de trég. batet « étourdi, assommé ». Ernault, Dictionnaire étymol., p. 221 ; Annales de Bret., t. XVII, p. 514. messes 619, cf. mizes « durée d’un mois » en petit-trégorrois : Ernault, Glossaire *, p. 421.

morisclo 937, pluriel de moriscl « grimace », cf. moriscleu « grimaces », chez J. Loth, Dictionnaire de Pierre de Chalons, p. 103. E. Ernault, Revue celtique, t. XXI, p. 142-143. moul da geue 1640, déformation de « mort de Dieu » (communication de M. Ernault) ; cf. bouldachou, juron cornouaillais ; Ernault, Mélanges //. d’Arbois de Jubainville, p. 69, cf. 67. nanf 1500, voair o- nanf « doucement », usité en Goello et petittrégorrois sous la forme nan (par a nasal). nosiagren 959, 985 : voair ma nosiagren, déformation d’un juron de reniement : me a renonsi agren (communication de M. Ernault), cf. v. 69 ; J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 142, v. 555. or 3114, eh or ar prenescho = oc’h ober ? « en guise de » • ordinal 522 « toujours ». Ernault, Glossaire *, p. 452. persou 881. Peut-être pour pel sou.

quempen 286 « tripot », à Trévérec. Ernault, Glossaire *, p. 535 ; Revue celtique, t. IV, p. 158.

quese 3625 « tomberait », dans le sens de diguese « arriverait ». Ernault, Dict. étym., p. 249 ; Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 80, v. 926.

quen 193 « guères » ; a gredan ne och quen. Cf. J. Loth, Chresto■ mathie, à l’index. quiniged 2845, sans doute pour quigined « cuisiné » en petit-trégorrois ; Cf. Ernault, Glossaire *, p. 526. rangoulliar 2955, dérivé au moyen du suffixe -ar (fr. -ard) de rangoul « eunuque ». La Villemarqué, dans le Dictionnaire bret.-fr. de Le Gonidec, d’après le P. Maunoir ; cf. Le Pelletier, Dict., col. 735.

remsy 492 « temps ». Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 369. rouly 691 « roulis, action de rouler ». sclusen 2447 « cellule », confusion de selulen avec scluzen « écluse ». scroech 305 « en haut », avec un s initial provenant sans doute de l’expression ous croech. Ernault, Glossaire2, p. 347. son 2939 « à pic », en petit-trég. Ernault, Glossaire *, p. 634. Le Pelletier, Dict., col. 820.

soubled 2998 « trempé » pour soubed. Ernault, Glossaire2, p. 635636, cf. 18. stad 280 : neus qued a stad enan « il n’est pas enchanté, fier ». Cf. Ernault, Glossaire*, p. 652.

stlabe 3590. Ernault, Glossairea, p. 656. Revue celtique, t. XXVII, p. 73-74. Le Pelletier, Dict., col. 836. stran a bagag ? 1078, 1175 ; sur strana « coire », cf. E. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XI, p. 111 ; ce mot, de môme que straner, stranerez, est encore vivant en Goello, dans le sens de tromper. A Molène, strüna signifie « far

fouiller » ; à Sein, strédna « coire ». Quant à bagag, peut-il signifier « grossesse » ?

terfou ? 979 : aman emou ma serfou. trelanqued 2761 « engoué » ; cf. trelonquein, Dict. de Chalons, publié par J. Loth, p. 106. Ernault, Glossaire *, p. 679. lis 2706 : tis glou « tison ( ?) de charbon ». trib : evn toi trib carten 148 « la triple carte », terme du jeu de lansquenet.

vst 3456 « au dessus de ». Ernault, Glossaire », p. 731. Les remarques qui précèdent permettent de déterminer d’une manière générale le dialecte ; il s’agit sans aucun doute d’un dialecte trégorrois au sens large du mot. Certaines particularités comme sou = zo, reet = re/et, rein = rei, bout = beau, -ouind = font, -oint, •homp = fomp, cleve = cleze, gourdous = gourdrous, -{ = w, ou, o final, trenec = trezec, rn’ = ma devant voyelle, domisaed « dompté », tana = tano, a heli = voar boues, indiquent le dialecte du Goello(1).

Mais la langue n’en est pas moins composite ; il est impossible de réduire à un seul type les pluriels en -o et en -ou ; la rime de preposou avec maro, de dioulou avec dro semblerait indiquer que la forme originaire était en -o ; au contraire, la rime de efego avec goainou serait en faveur de -ou. D’autre part, bomde, amomb, eur devant un pluriel, hano, maro au lieu de hanv, marv, hirie au lieu de hidiv, pera — petra sont trégorrois au sens restreint du mot. La date de la langue est plus difficile à préciser, car nous n’avons aucune étude sur l’histoire de l’orthographe bretonne et sur ses variations dans les dialectes. L’orthographe de Louis Eunius est beaucoup plus archaïque que celle de la Vie de saint Patrice, où d’ailleurs les particularités dialectales ne sont pas les mômes.

LA VERSIFICATION

La versification ne présente pas de trace d’archaïsme ; il n’y a point de rimes internes. La rime interne avait disparu en 1683 à la mort du Père Maunoir(,).

[193]

[194] INTRODUCTION.

121

Le vers est semblable à l’alexandrin français classique de douze syllabes. Il n’y a pas, comme dans d’autres mystères, de vers de huit syllabes, à l’exception peut-être de : 3025 ho Jésus Christ crusifled 2904 retorn na doned do credin * La coupe du vers de douze syllabes est placée après la sixième syllabe. Les vers dénués de coupe après le premier hémistiche sont rares et, encore, il est possible qu’ils soient altérés. 241 527 618 1419 712 2506 3620 3637

selled penos e tre|ter ho servi geri en (d’après C.) a quemend al dam ha|marad a de gesec a pa veomb enon | hamb e vouind dispaqued neus quas pe sord pen deus | ma bas (a) lequin er fane da hoary eun toi gand | quemend a nefou hoaind ne dalfou qued dach son |gai retorn voair o quis en toes ar beuien a | re muan eomec nan exgigomb diga|nach nac ourf nac arhand

Dans le vers suivant le déplacement de la coupe est dû au partage du vers entre deux interlocuteurs : 865 Abeurs ar roué ! — mes petra (a) sinify sé ? Il n’y a guère d’enjambement d’un vers à l’autre, cf. pourtant 109, 326, 2941.

Chaque vers se termine par une rime ou par une assonance. Les assonances sont plus nombreuses que les rimes complètes. Voici la liste des plus intéressantes : Assonances vocal ! que s.

t — in : fantesi 13, din 14 ; — hoary 147, recrein 148 ; —<■ fury 346, andurin 347 ; — huy 455, feurmin 456 ; — disvroedy 555, ataquin 556 ; — rouly 691, maltretin 692 ; — ty 831, tanvain 832 ; — money 1248, poultronin 1249 ; — ry 1847, din 1848 ; — Patry 2606, protegin 2607 ; — voely 2803, soufrin 2804 ; — sy 1553, reconpansin 1554 ; — sinify 1643, guenin 1644 ; — jmpy 1679, ofansin 1680.

in — i : homandin 573, gisty 574 ; — jnin 397, jnpocrisy 398 ; — reposin 997, fry 998 ; — guenin 1375, desteny 1376 ; — esposin 1506, enemy 1506 ; — abssolvin 1797, Patry 1798, bedin 1805, Iberny 1806 ; — din 117, ostelery 118 ; — pedin 383, disoursy 384 (cf. 1955-1956) ; — jnin 1209, dry 1210, din 3283, desy 3284 ; — din 1251, mony 1252 ; — jnportunin 1253, mony 1254 ; — guelin 1259, vony 1260.

e = eu : ger 381, eur 382 ; — amser 1587, faueur 1588.

e— enf : pue 3133, enf 3134 ; — didalfe 294, diadrenf 295. enf — e : enf 665, doue 666. e — ai : ger 222, rair 223. e — a : marued 1823, souetad 1824. a — e : sal 3201, ebestel 3202. o — on : bahado 1015, enon 1016. oun — ou : estroun 61, vaillantisou 62. ou — on : curunou 3271, voaimon 3272. on — ou : ahanon 673, soufransou 674. ou — o : preposou 77, maro 78 ; — voelou 819, dro 820 ; — dou 1541, otro 1542 ; — poainou 2507, pro 2508 ; — dioulou 3086, dro 3087 ; — voustajou 105, autro 106 ; — veuiou 2175, maro 2176. o — ou : dro 95, vahadou 96 ; — vro 447, aneuou 448 ; — efego 599, goainou 600 ;—vro 1511, golou 1512 ;— grimo 1653, evou 1654 ; — vro 697, lubrisiteou 698 ; ►— otro 875, galeou 876 ; — dou 1543, otro 1544 ; — tro 1037, vailantisou 1038 ; — sro 1429, helou 1430 ; — sro 1455, goainou 1456 ; — tairro 2107, peou 2108 ; — dro 2325, hourdousou 2326. a — ai : camarat 87, troait 88 ; — bas 218, 895, hoais 219, 896 ; — Teodosia 356, joais 357 ; — bras 3313, groais 3314 ; — pas 3375, hoais 3376 ; — contand 711, hoaind 712. ai — a : hoais 531, bras 532 ; — victoair 1605, douar 1606 ; — voaid 2113, vad 2114 ; — troaid 3322, lagad 3323 ; — groais 2239, plas 2240 ; — coait 31, vahat 32, cf. groais 1741, brais 1742. a — an : Teodosia 334, 645, vroman 335, 646 ; — Teodosia 587, logan 588 ; — netra 1073, man 1074 ; — eta 2195, man 2196 ; — netra 47, guentan 48 ; — Teodosia 551, man 552 ; — Teodosia 655, deuertisan 656 ; — feadra 1233, efan 1234. an — a : efan 733, Teodosia 734 ; — deuertisan 2753, via 2754 ; — aman 3057, via 3058 ; — aman 157, priata 158. anf— an : gouanf 1121, tan 1122. an — anf : partian 1497, nanf 1498. La plupart de ces assonances vocaliques0) s’expliquent facilement. Ce sont, d’abord, des rimes véritables que l’orthographe a transformées pour l’œil en assonances : ai avec a, car rien ne nous atteste, dans ces rimes, la prononciation ai (é) ; il est probable que l’écriture hoais : bras est aussi peu exacte que l’écriture groais : brais, et que, dans les deux cas, il s’agit de a noté ai ; il en est de même de e : ai qui représentent l’un et l’autre è.

[195]

Puis des nasales ou. des demi-nasales qui assonnent avec des voyelles pures : i avec in, o avec on, a avec an, ou avec oun ; dans quelques cas l’orthographe pourrait égarer : au lieu de curunou, qui assonne avec voaimon, il faut lire curuno ; de même soufranso : ahanon.

Il est possible que les assonances enf : e soient du même genre et qu’elles notent simplement la rime de é nasalw avec d, sans que le / = v soit autre chose qu’un souvenir de l’orthographe du moyen-breton. Quant à partian : nanf, il est possible que { ne soit qu’un archaïsme orthographique et que la forme connue de l’auteur fût nan ; gouanf : tan est sans doute de même l’assonance de a nasal avec a demi-nasal suivi de n. Il ne resterait plus à expliquer que e : eu et e : a ; ces assonances sont sans doute de mauvaises leçons (voir les variantes de c), à l’exception de amser : faueur où C écrit faver et où e = eu.. Assonances consonantiques.

r — l : breuder 1, mervel 2 ; — douar 19, fall 20 ; — hrouer 2651, ebestel 2652 ; — puniser 2865, 3229, mervel 2866, 3230 ; — quer 3251, vniversel 3252 ; — hardeur 3269, eul 3270. I — r : voailch 1223, march 1224 ; — jdromel 1113, ger 1114 ; — selestiel 2165, crouer 2166 ; — santel 2553, hleier 2554 ; — guel 145, hartier 146 ; — criminel 1893, saluer 1894 ; — santel 2145, neseser 2146 ; — santel 2149, 2901, Lusifer 2150, 2902 ; — santel 3221, ober 3222. Ich — Tch : a voalch 23, march 24, cf. 1223-1224. I — n : cruel 415, crohen 416 ; — santel 1725, 2499, piningen 1726, 2500 ; — santel 3081, gardien 3082 ; — guel 2453, lesen 2454 ;

— santel 3227, deualigen 3228.

m — n : Rom 2741, fripon 2742 ; — frim 2997, jndin 2998. n — m : piningen 747, 755, glem 748, 756 ; — libertin 2745, grim 2746.

nd, — n : constand 2677, Satan 2678, cf. man 3177, tourmand 3178. n — m : disordren 806, esquem 806 ; — piningen 2197, 2445, 2949, jfern 2198, 2446, 2950 ; — monden 2813, jfern 2814 ; — jnumen 2879, jfern 2880 ; — ten 1197, jfern 1198 ; — dremen 3455, jfern 3456.

m — n : jfern 3475, fen 3476 ; — jfern 3035, souden 3036. n — r : tremen 1733, paper 1734. ne — n : stanc 2967, Satan 2968. n — ng : Satan 1189, Spaing 1190. ng — n : Bourgong 765, pardon 766. [196]

c — d : couc 141, 1903, roud 142, 1904 ; — gesec 527, dleed 528 ; — quenec 907, miliged 908 ; — scairlec 2919, profed 2920 ; — drouc 1937, toud 1938 ; — .stanc 2993, feneand 2994 ; — jouanc 1155, peamand 1156 ; — fane 1419, jnpertinand 1420 ; — stanc 3397, jnosand 3398 ; — groec 925, gaed 926 ; — stanc 1021, arhand 1022 ; — benac 1699, mad 1700 ; — lanec 3323, crouqued 3324 ; — quesec 1051, ed 1052 ; — quiriec 165, songed 166 ; — gesec 591, peed 592 ; — pemsec 767, moned 768 ; — presec 1773, bed 1774.

d- c : moned 469, hesec 470 ; — friponed 553, pemsec 554 ; — gered 1335, lanec 1336 ; — erfad 1451, atac 1452 ; — galloud 1423, gouc 1424 ; — roud 2875, quouc 2876 ; — fehed 2485, quiriec 2486 ; — vatand 3051, stanc 3062 ; — ned 1613, redec 1614 ; — houesad 3537, estomac 3538 ; — beed 3619, eomec 3620 ; — cleinqued 557, hesec 558 ; — pried 593, quesec 594 ;

— dispersed 1561, redec 1562 : — enoud 2339, gouc 2340. t — c : gret 49, daousec 50 ; — lavaret 53, daousec 54 ; — tout 949, gouc 950.

c — t : stanc 3406, puant 3407. c’h— s : guenach 1313, biscoais 1314. s — c’h : bras 2635, banach 2636. g — ch : gourag 1509, lach 1510. ch — g : coaich 1077, bagag 1078 ; — choaich 3143, outrag 3144. g — s : dauantag 407, pigas 408 ; — seruig 883, diauis 884 ; — veag 2203, gras 2204.

s — g : Louis 559, servig 560 ; — siuoais 1217, dianvatag 1218 ; — biscoais 3093, gourag 3094 ; — gras 3517, veag 3518. b — d : favorab 93, coaid 94 ; — partifomb 499, hond 500 ; — miserab 549, doulagad 550 ; — tretab 1279, jngrad 1280 ; — posib 1497, quid 1498 ; — quapab 1159, hoaid 1160 ; — capab 1343, vad 1344 ; — gamb 1993, puisand 1994. d — b : defod 1229, prob 1230 ; — noaid 2365, capab 2366 ; — goaid 3257, veritab 3258 ; — dilad 3131, achab 3432 ; — selerad 665, misirab 566 ; — droaid 1757, pab 1758 ; — fad 2109, detestab 2110.

c — b : mic 2597, lib 2598.

/— : mef 1237, gante 1238 ; cf. ci-dessus cn(—c. Les archaïsmes orthographiques sont plus rares parmi les assonances consonantiques(1> que parmi les assonances vocaliques. Le cas le plus simple est l’assonance de la consonne sourde avec la sonore du même ordre ; par exemple : ch : g (j) ; d’une liquide [197]

ou nasale avec une autre liquide ou nasale ; par exemple : l : r ; m : n. Mais on trouve aussi l’assonance d’une liquide avec une nasale, l : n ; d’une gutturale avec une dentale, c : d, c : t ; d’une labiale avec une dentale, b i d, et, exceptionnellement, d’une gutturale avec une labiale, c : b. Les groupes de consonnes ne comptent souvent que pour l’un de leurs éléments, nd : n, ne : n, rn : n. Enfin 5, z assonne avec cft, f et c’h. Quelques finales semblent avoir été modifiées pour les besoins ’ de la rime a) : 1428 1794 2593 3564

Sosen pour rimer avec anfren, au lieu de Soudan pour rimer avec Satan, au lieu de sclerigon pour rimer avec daston, au lieu deualligon pour rimer avec benedicsion, au

Soson. souden. de sclerigen. lieu de deualligen.

Par ailleurs, la substitution d’un mot à un autre a supprimé la rime : 9 11 45 97

jenet au lieu de languissant, pour rimer avec sant. radodet au lieu de radotai, pour rimer avec al. a re au liau de a hinin, pour rimer avec din. divertisan au lieu de recrein, pour rimer avec din. m

Le nombre des syllabes semble variable dans quelques mots. Cela tient aux éléments composites de la langue des mystères bretons. L’usage et la tradition — une tradition qui remonte au moyen-breton — sont souvent en conflit. La difficulté ne porte d’ailleurs que sur les mots contenant des diphtongues ou terminés par une semi-voyelle(,) : ae : la-qua-ed(3) 242, qui-ta-ed 311 ; hui-taed 780, 2102 ; gaed 3530 ; quaed 1860 ; caed 2719, 3090. aiw : tra-i-ned 225, 3354, 3437 ; tra-i-nou 2099 ; trai-ned 3323, srainou 2816. C’est la prononciation actuelle. — qui-ta-ind 1965. aon : aon(6) 482, 836, 1818. C’est la prononciation actuelle. ea : le-a-nes{t) 571, 699, 1028, 2531 ; le an-dy 386, pe-a-dra 464, 732, [198] [199] [200] [201] [202] [203]

733 ; gue-ag (1) 1735 ; guc-a-chal 2315 ; pe-ag 2879 ; ve-ag ® 2125. C’est la prononciation actuelle en Goello. — lea-nes 337, 339, 2401, 2928 (Voir Troude) ; real 905. eau ; fe-ne-and 2994, be-an 421, etc. C’est la prononciation actuelle.

— dean 1798 ?

ee : re-ed 3036 ; e-ed 636 ; an-tre-ed 2437 ; a-se-ed 2438 ; ve-ed 2444 (prononciation actuelle) ; be-ed 3145 ; reed 199 ; an-treed 2387, 2614 ; veed 2603, 3636 ; beed 2677.

ex : pe-i-sand 1124,1291 ; te-so-be-i-sans 1881 ; trei-tour 1862 ; reid 2825 ; sceid 2793 (prononciation actuelle) ; de-so-bei-sed 1879 ; peinin 1730 (actuellement pini). eo, eou : ar-me-ou 1515 ; j-ne-ou 26k), 3024, 3180, 3223, 3475, 3542 ; ga-le-ou 876 ; lu-bri-si-te-ou 698 ; va-ni-te-ou 2013 ; re-omb 1272 ; de-oc 1143 ; e-om 641 ; de-omb 1498 (prononciation actuelle) ; eol 3112 ; j-neou 2915, 3077, 3193, 3356. C’est Ja prononciation actuelle.

eu : a-fre-us 2210 ; tru-e-us 3099 en trégorrois, vannetais, comouaillais (Troude). ia : i-a <»> « oui » 127, 151, 180, 202, 324, 639, 651, 1313, 2123, 2907, 3149, 3173, 3181 ; i-ach 2600 ; di-a-gend 3316 ; cri-al 2884 ; ia 19, 1597, 1903 ; iach 654, 3218, 3316 ; iarii va » 453, 487, 588, 735, 903, 940, 1500, 2097, 3395 ; criai 1110. ian ; pa-si-an-ted 1320, 2825 ; pa-si-and 2578 ; di-gon-si-ans 1033, 1487 ; con-si-ans 1086 ; ma-ni-an 1288 ; par-ti-an(4) 498, $upli-an 3079 ; gas-ti-an 2216 ; fians 2048 (Troude). ie : -rie 828, 2010 ; qui-riec 165, 3547 (prononciation actuelle) ; glebien 2107 ; fier 2918 ; ra-sa-sied 3109 ; an-sien 3037, 3494 ; sciend 1001 (Troude) ; i-er “> 167, 1193 ; (i-es 318 ; pri-ed 388, 843, 848, 852 ; li-es 122, 1210, 2607 ; li-en 960, 1014 ; ve-ni-el 2073 ; sci-end 1816, 1613.

io : vi-o-ler 2748, vi-ol 2181.

ion : suffixe abstrait : con-di-si-on 107 ; re-li-gi-on 696 ; a-tan-si-on 2199 ; suffixe du pluriel : je-ni-on 1832 w ; dion-tan m 1740. [204] [205] [206] [207] [208] [209] [210]

iou : diou-sach 150, 2851 ; dioul diou-lou 1531, 2570, 3085, 3380, 3476. C’est la division actuelle des syllabes. — di-ous 798, di-ousin 3469 ; di-oul™ 803, 2068, 3308, di-ou-lou 27, 2349, 2355, 3085 ; bi-ou 1770. Il semble qu’on ait gou-li-ou w 2357 comme le-ta-ni-ou 2057.

iu : dius-tu 1361, 1364, 2599, 3219 ; jun 2533. C’est la prononciation actuelle. — di-us-tu 276, 293, 900, 1384, 2699, 2750, 3153 ; vic-to-ri-us 1828 ; gra-si-us 3516 ; an-vi-us 1213 ; di-us 469. oa : goaid 1596, 2113. C’est la prononciation actuelle. — go-aid(3) 259. oe : ro-ed 162, 2554 ; ca-ro-en 182 ; troait B 88 ; groed 508, 633, 789, etc. (prononciation actuelle).

oua : pou-ar

2115, 2712, 2877 ; rou-a-nes <5> 1146, 1659, 2827, 2970 (prononciation actuelle) ; cf. rou-an-te-les 1103, 1488, 2187 ; dou-arw 1872, 1920, 2172, 2252, 2328, 3236 ; dou-arn 1337, 3311 ; lou-ag 1309 ; rou-a-ne 3512 ; pouar 1797, fouar 2402 ; rouannes 671, 772 (Troude) ; groua-dur 1866, groua-du-res 335 (prononciation actuelle).

ouan : cou-ant 390, 568, 662, 710, 718, 1025 ; gou-end 2428, gou-and 2539 (prononciation actuelle), e-pou-an-ted 1524, 3399 ; e-pouan-tab 3423 ; gouent 351, gouand 3612, couand 2245 (Troude). oue : Dou-e 675, etc. ; rou-e 2315 ; crou-ed 1819, 2328 ; Doue <7) 747, 1215, 2510 ; peut-être roue 1976.

oui : Lou-is (8) 2694, 2703, 3137, 3153 ; lou-is 905 ; re-gou-i-sed 1519 ; Louis 310, 1869, 2255, 2270, 2272, 2683, 2700, 2803, 3044, 3095.. C’est la prononciation actuelle. — re-goui-san 1868 ; Louis Eunius : 3 syll. 1692, 1738, 1791, 2188 ; 4 syll. : 1708, 2199 ; 5 syll. : 1008, 1040.

-ouind : -ouind 2679 ; que-louind 3143 ; vouind(9) 446. C’est la prononciation actuelle. — cho-mou-ind 2533 ; nou-ind 447 ; vouind ll0) 458 ; ouind 1536.

uan : puand(U) 2935, 3406.

ue : drue-e 2844.

ui : scuis 532, 2999, 3000, 3010 ; scui-san 1808, scui-sen 369, scui-set [211] [212] [213] [214] [215] [216] [217] [218] [219] [220] [221]

2683. C’est la prononciation actuelle. — pu-is-sant a) 21, 23, 319, 1034, 1361, 1436.

ma-ro n. 752, 1704, 1842, 1923, 2175 ; adj. B 80, 549. a-no 1368, 1840, 2606 ; a-nou 2609. maro w adj. B 1.

ano(,) dans en ano Doue 754 écrit en an Doue 841, cf. en an(o) crouer ar bed 2423.

chetu w 18, 135, 479, 883, 1996, 2151, 2789 ; chede 2343, 2357 ; ched 815. che-tu 507, 549, 634, 1577, 1915, 2061, 2407, 2429, 2440 ; che-de 2285, 2356, 2701.

Groupement des vers.

Les vers sont groupés en quatrains dans les prologues, et, dans le manuscrit 45, ces quatrains sont numérotés et séparés par des traits ; dans le manuscrit 39 l’initiale M, qui signifie marche, est écrite en marge à la suite de chaque quatrain. Le prologue de la deuxième journée compte 59 quatrains. Mais la disposition en quatrains, qui aidait singulièrement la mémoire, est très souvent reproduite et indiquée par des traits dans les monologues et dans les dialogues. Ainsi le récit de Louis Eunius 3251-3596 compte dans C 344 vers, soit exactement 86 quatrains. Dans A, le discours de Belzébuth 1045-1124 compte 20 qua’ trains ; le discours du vieux Satan 1191-1222 compte 8 quatrains ; le monologue de Louis Eunius 1223-1250 compte 7 quatrains ; le récit de Lamontagne 1555-1582 compte aussi 7 quatrains ; l’invocation de Louis 1655-1682, 7 quatrains ; la prière de Louis 1819-1846, 7 quatrains ; le discours du prieur 2441-2468, 7 quatrains, séparés par des traits ; la réponse de Louis, 8 quatrains ; le monologue de Louis 3097-3124, 7 quatrains ; le sermon du prédicateur 1919-2038, 30 quatrains séparés par des traits. La disposition des vers dans le dialogue est le plus souvent symétrique ; le personnage qui donne la réplique débite le môme nombre de vers que celui qui dirige la conversation, et le plus souvent un nombre pair. Il est rare que deux vers rimant ensemble soient répartis entre deux personnages. Voici, à titre d’exemple, les schémas de quelques scènes : [222] [223] [224] [225] Les joueurs de boules

A 4

B —

C —

L —

2+2 2 4 4 4

— 4

4

3+3 Cette scène se décompose en deux séries de cinq quatrains suivies chacune de 6 vers. La partie de cartes

L. 8

S. 4

4

_

L.

S.

O.

8 4 4 -

4

4 -

— 4

4

4

-

2

6

4

4 4

4

2+6 4

1 1 ’édition du texte. L.

S.

O.

1 1 4 1 3

2

2

m

4 1

1 1 1 1 1/2+1 6

2 8 1 5 4 4+2 Cette scèièe, longue et mouvementée, comprend : 1° Un dialogue entre Louis et le sergent, de deux séries de vers : 8+4+4. 2° Un dialogue avec l’hôtesse : deux séries de 4 + 4+4 ; puis 4+4+2 ; enfin 4+6+2. 3° La partie de cartes ; première manche : 6+4+1+ 1 + 1 + 1 ; seconde manche : 4 + 1 + 3 + 2+2 ; troisième manche :*4+l + l + l + l + 1 + 1 ; discussion : 6+2+8 + 1 + 5+2+4 + 4 + 2. Ces exemples suffisent à démontrer que si, en général, l’auteur recherche la symétrie stichométrique, il ne craint pas de s’en départir quand l’action plus vive ne peut s’exprimer par des séries monotones.

L’EDITION Du vers 1 au vers 112, notre texte est la reproduction de la copie B du ms. 45 ; du vers 113 à la fin, j’ai transcrit la copie A du môme manuscrit. Du point de vue grammatical, ces textes sont généralement corrects et il n’y a à relever que quelques inadvertances du scribe (Voir ci-dessus, orthographe). Mais il n’en est pas

de même de la versification. Un grand nombre de vers (environ la moitié) ont moins ou plus de douze syllabes. J’ai tâché de les corriger en utilisant le texte imprimé et la transcription de Luzel. Pour ne pas trop altérer l’aspect des manuscrits et ne pas être obligé de prodiguer les notes critiques, lorsqu’il s’agit de changements insignifiants, comme par exemple la suppression ou l’addition des particules verbales a ou e, j’ai eu recours à deux procédés typographiques :

1° Entre parenthèses ( ) sont les mots Ou les fractions de mots du manuscrit qui ne doivent pas compter dans la mesure du vers, d’après la restitution que je propose. 2° Entre crochets [ ] sont les mots ou les fractions de mots que j’ai dû restituer pour parfaire la mesure du vers. Les suppressions sont plus nombreuses que les additions, car les acteurs et les copistes avaient, semble-t-il, le besoin d’expliquer et de développer le texte qu’ils devaient reproduire a). Quant aux mots que j’ai dû remplacer par un équivalent, ils sont relevés en note. Ces mots sont souvent des synonymes français que le copiste ou l’acteur breton a introduits, au lieu des mots bretons, pour donner une apparence plus savante à ses tirades, sans se préoccuper de la mesure, par exemple : 3500 benedicsion au lieu de bennos, 492 fe,umelen au lieu de plac’h, 2302 visiricord au lieu de drue, 3474 achiuin au lieu de ober, 3281 coste au lieu de tu, 1604 on quapab au lieu de gallan. Je n’ai pas relevé dans* les notes toutes les variantes de C ; mais seulement celles qui pouvaient présenter quelque intérêt, et pour les vers faux dont je ne puis être sûr d’avoir restitué la forme primitive.

Je n’ai pas modifié l’orthographe des copistes ; mais je ne me suis pas fait scrupule de mettre des majuscules aux noms propres et d’ajouter tous les signes de ponctuation qui pouvaient aider à l’intelligence du texte.

Etant donné les faibles ressources dont je disposais pour la restitution du texte, je n’ai point d’illusion sur la sûreté de cer-. taines corrections. J’ai tâché de ne modifier les leçons de A que là où il était indispensable de le faire. Pour corriger A, je me suis d’abord servi de C, qui est d’ailleurs aussi incorrect du point de vue de la versification, mais qui représente une tradition indépendante de A. Là où ni A ni C ne fournissaient une leçon correcte, j’ai essayé d’établir le texte soit en opérant des contractions,

[226]

soit en supprimant des particules ou des mots inutiles au sens, ou au contraire en les ajoutant, soit enfin en remplaçant peu’ des synonymes les mots qui rompaient la mesure des vers. Je n’ai point, en général, introduit de formes ou de mots dont le ms. 45 ne m’offrait point, d’exemple.

Je ne me dissimule point que les procédés que j’ai employés donnent au texte une apparence d’incertitude ; mais quel était au fond le plus réel, du prototype anciennement correct, ou de la reproduction incorrecte, mais vivante, qu’en faisait l’acteur ? Le commentaire grammatical, littéraire et historique du texte, au lieu d’être dispersé dans les notes, a été présenté dans son ensemble dans la seconde partie de cette Introduction. On ne trouvera donc dans les notes que quelques renvois indispensables et quelques remarques de détail qui ne pouvaient trouver place dans un exposé général.

LA TRADUCTION

Au folio 2 du manuscrit 45 (Bibl. nat., f. celt.) est jointe une note de la main de Luzel : « J’ai déjà envoyé au commencement du mois de juillet 1865 une traduction complète de cette pièce(1) ». Cette traduction est maintenant conservée à la Bibliothèque nationale, fonds français, nouvelles acquisitions, 351. Elle forme un volume in-4* de 105 pages numérotées ; la signature de Luzel est au bas de la page 105. Elle a pour titre : Louis Eunius ou Le Purgatoire de saint Patrice, mystère breton en deux journées, traduit du breton. Il n’y a aucun doute que cette traduction ait été faite sur le manuscrit 45. Les quelques lacunes qu’elle présente ne sont que des inadvertances du traducteur, par exemple v. 358359, 487-490, 2620. D’autre part, la traduction ne semble reposer sur un texte différent du nôtre qu’en deux endroits : v. 435, 2825. Elle est, comme les autres traductions de Luzel, assez proche du texte sans en conserver toujours l’originalité et la saveur. Elle ne m’en a pas moins été fort utile pour l’explication d’un certain nombre de vers obscurs, et si je ne l’avais pas eue, je n’aurais pas tenté un travail, nouveau pour moi et auquel mes études

[227]

antérieures ne m’avaient point directement préparé(2). J’ai tâché de transcrire en français le plus exactement possible le mystère breton, en faisant appel aux dialectes français de l’ouest, là où le français classique ne calquait pas suffisamment les tournures bretonnes.

[228] VIE DE LOUIS EUNIUS

Gentilhomme et grand pécheur


LOUIS

Or çà, mon père est mort, et ma mère et mes frères ;
la bénédiction de Dieu soit avec eux, il était temps qu’ils meurent !
la bénédiction de Dieu soit avec eux ; j’ai ma liberté !
mon père était si vieux, déjà il radotait ;
ma mère, la même chose ; si je l’avais crue
je n’aurais eu aucun plaisir en aucune façon au monde ;
ils sont tous partis et allés à l’autre monde :
les honnêtes gens meurent tout comme les méchants.
J’étais rendu par eux si sec et si languissant ;
si je leur avais obéi, je serais maintenant un saint ;
mais la coutume des vieilles gens est de toujours radoter ;
je recevais par une oreille et lâchais par une autre.
Ce n’est pas par là qu’est maintenant ma fantaisie :
les dés, la bouteille et les filles me plaisent ;
quiconque aura volonté de me trouver
ce sera dans les hôtelleries, ou en quelque bordel,
ou sur les grands chemins à violer les filles ;
voilà les endroits où je serai le plus souvent trouvé ;
oui, j’étonnerai le ciel et la terre
en tuant, en volant ; je ne chercherai que le mal.
Je suis aussi puissant que noble de qualité
et en plus de cela encore je suis filleul du roi,

12 gant eur B. 14 Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 256, v. 1223. 15-18 Ces vers manquent dans C. 15 dan haet B. 16 hosteleri L. 18 Sur chetu en une syllabe, voir Introduction. 19 ya me estonou C. puissant en tout point, assez de courage et de force, je suis beaucoup plus fort que ne serait un cheval. Qui pourra me résister en face, quand je serai fâché, et venir m’entreprendre devant la justice du monde ? Et en plus il y a encore que je prie les diables de venir me protéger dans les plus grands besoins ; je leur donnerai pour prix mon corps et mon esprit, pourvu que je puisse trouver mon plaisir dans le monde. J’ai façonné un bâton, je ne sais de quelle sorte de bois ; je crois qu’on ne désirera pas en avoir deux coups ; il suffira d’un seul, bien appliqué. Avant qu’il soit nuit aujourd’hui, il faut l’éprouver. Mais que vois-je venir en courant vers moi ? il faudra que je sache s’ils sont des hommes pour que j’éprouve sur leurs cous mon bâton ; et s’ils ne le trouvent pas lourd, je l’alourdirai encore.

Scène ; trois soldats entrent.

LE PREMIER parle :

Si vous voulez, camarades, nous ferons une partie ; jouons aux boules, puisque nous voici trois, plus court sera le temps en nous divertissant, jusqu’à ce que soit venu pour nous le moment d’aller dîner. LE DEUXIÈME SOLDAT parle :

Restez ici, vous deux, voici les miennes ; jamais vous n’avez vu de meilleures boules qu’elles ; tenez et prenez et choisissez-en chacun une ; et maintenant, si vous perdez, ne me faites pas de reproche.

LE TROISIÈME SOLDAT parle :

Celle-ci je la prends quand elle ne vaudrait rien ; tirons pour savoir qui jouera le premier ; et maintenant dites en combien sera faite la partie je donne mon avis que ce soit en douze.

36 me rencou ep dale goût hac rnt so goersset C. 45 peb a re B. 47 a queres B. a pa golfen tout P. Dans P la partie est engagée et Tarilla a gagné le premier coup, quand Louis arrive. Cf. M, ci-dessous, appendice II.

LE PREMIER SOLDAT parle :

J’ai pris les dernières boules, et comme de juste et raisonnable je jouerai le premier ; à l’égard de la partie, comme vous l’avez dit, je serais content aussi qu’elle restât en douze. LOUIS entre et dit :

Bonjour, chevaliers, vous jouez terriblement ; je songeais que vous étiez à jouer du fleuret ; si vous étiez en train de commencer, comme vous n’êtes que j’aurais mis mon argent dans la partie. [trois, LE DEUXIÈME SOLDAT

Attendez ici, Monsieur, excusez un peu, et quand cette partie sera achevée, alors vous jouerez. Il fait rouler sa boule ; Louis la pousse d’un coup de pied. LE DEUXIÈME SOLDAT parle : ►

Monsieur, vous avez mal fait en jetant ma boule en bas ; vous avez perdu mon coup avec vos vaillantises. LOUIS

Je ne fais que plaisanter, qu’est-ce qui te prend ? tu peux prendre ta boule et jouer à nouveau. Il prend sa boule et joue de nouveau ; Louis donne à celle-ci un coup de pied. LE MÊME SOLDAT parle :

Ecoutez donc, monsieur, je vous trouve effronté ; si c’est pour chercher une affaire que vous êtes venu ici, si vous ne voulez pas cesser et venir à vous retirer, nous mettrons l’épée à la main tout à l’heure. Louis tire son épée. LOUIS parle :

Je renonce ferme à tout ce qui est au monde ! ce n’est pas à un poltron que vous vous êtes adressé ; 60 a pa vou achu ar B. 61 c’est-à-dire « en la faisant sortir du jeu ». 63 cf. Ernault, Revue celtique, t. XXI, p. 140-141 ; t. XXV, p. 63.

aussi, sans différer, s’il 5 a de l’acier sur votre face mettez l’épée à la main, car je suis en place. LE PREMIER SOLDAT

Messieurs, ce n’est pas par rigueur que je veux agir ; si vous vous êtes fâchés, vous pouvez vous accorder ; laissez tout cela tranquille, comme de vrais amis, et allons boire une bouteillée, messieurs, ensemble. LOUIS

Allons, sans compliment, il n’y a pas lieu à discours ; un de nous deux souffrira la mort ; allons, impertinent, tenez, un coup terrible. Celui-ci est mort ; allons, un autre à sa place 1 LE PREMIER SOLDAT

Je ne suis pas un poltron, ni n’aimerais l’être ; vous n’aurez pas meilleure fortune que n’a eue celui-ci ; quand je commencerai à suer, vous aurez chaud aussi ; coup pour coup, vie pour vie. LOUIS

Trop longue est ta langue, mais j’ai idée de la raccourcir ; tiens, impertinent, tu es content maintenant ? Or çà, j’en ai tondu deux, à vous, camarade 1 Le troisième s’en va en courant.

Et voilà le troisième qui joue des pieds. Autant valait pour vous, mon homme, être resté ici, car à la première rencontre, il faudra que vous en tâtiez. Scène ; tous sortent. LOUIS parle :

Or çà donc, cette fois-ci, Louis, c’est commencé, de faire connaissance parmi les soldats ; 84 85 89 91 92

pariel evit pariel B. Cf. Ernault, Glossaire*, p. 460. daoid B. chomet C P. sommet B. ez eo Louis commanset C. d’ober e connessans C.

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«

«

%

»•

« pour la première affaire ce m'a été favorable, sans que j'aie éprouvé pour tout cela mon moreeau dé bois; mais je crois parfaitement qu'avant la fin de la tournée, le premier combat que je ferai sera au bâton; je vais maintenant en ville pour me récréer, Pour que je voie quelle chance se présentera à moi.

UN SERGENT vient à saluer LOUIS :

Je vous salue, monsieur, avec joie et amitié: il y avait longtemps que je pensais à venir jusqu'à vous, pour vous prier de venir, si vous m'accordez, boire une bouteillée du vin nouveau.

LOUIS

Voyez le plaisant bougre que j'ai rencontré! quelle vocation avez-vous, dites-moi, quand je regarde ta face et tes moustaches, il me semble que tu es fils d'un monsieur.

LE SERGENT

Monsieur, sergent royal est ma condition,

dans la ville de Toulouse et partout dans le canton

et la juridiction, pour exécuter

aussi bien noblesse que bourgeois, quand il me sera commandé; et j'ai grand désir, parce que vous êtes redouté,

de me mettre au nombre dé vos amis;

venéz boire une bouteillée du vin nouveau;

j'ai l'intention de vous la donner par amitié.

LOUIS

Non, non, sûrement, mon ami, il n'est pas nécessaire

que nous buvions uné bouteillée pour être des gens chers; mais tout de même, puisque tu as idée de payer pour moi, -entrons, nous deux, dans l'hôtellerie.

117 teus alansion A. s

118 entréomp la amun en aseign an tri roue P, dsomp-ni arman ebers en tri roue Q.

LS b antreed. Curieux emploi du participe passé: Il est peu probable que ce soit une indication scénique à l'impéralil, CL sortisét 454 D, chomed 086 b, bed US b. ÜS.

Ils entrent ; LE SERGENT parle :

Salut à vous, hôtesse, avez-vous de bon vin ? car ne nous en tirez pas s’il n’est délicat, car ce jeune homme n’est pas accoutumé de boire bien souvent dans un cabaret. l’hôtesse

Eh oui, du très excellent, maître François, je le jure ; vous n’en trouverez pas de meilleur dans la ville de Toulouse ; montez par là en haut, et je vais vous servir, et un morceau, peut-être, vous aurez aussi à manger ? LOUIS

Oui, apportez-nous un morceau de côte grillé, car pour votre soupe je n’en demande pas ; allons donc, maître François, montez par là dans l’escalier ; vos moustaches sont aussi longues que mon doigt. MAÎTRE FRANÇOIS

Allons donc, monsieur, asseyez-vous, sans compliment ; l’hôtesse est arrivée avec ses regards brillants ; la plus belle femme qu’il y ait dans la ville de Toulouse, c’est cette hôtesse, quand il y en aurait dix mille. l’hôtesse

Voici, messieurs, une pinte de vin clairet et un morceau délicat d’agneau rôti ; je vous servirai sûrement, messieurs, comme vous méritez, et quand il vous manquera quelque chose, je vous prie de le [dire. L’hôtesse sort. 128 130 131 135 136 137 138

ne garan quet B. o moustago a ma A. ta ma otro aseed A. guin malequa B. hac eun tan rôti dilicad deus eun B. autre evel B. ma o pe B.



10

LOUIS parle :

A votre santé, maître François, buvons nos gouttes ; [bouche, vos moustaches sont frisées, elles vous sont allées dans la elles vous étoufferontsûrement si elles vous vont dans la gorge ; à votre santé, donc, François ; celui-ci va en sa route.

MAÎTRE FRANÇOIS

Merci à vous, monsieur, je vous souhaite santé ; je boirai aussi à vos bonnes grâces, donc, si vous permettez ; quelle bonne goutte de vin ! vous ne saurez trouver mieux dans Toulouse, ni nulle part dans le quartier.

LOUIS

Or çà donc, maître François, voulez-vous bien jouer un coup de carte triple pour nous récréer ? Car c’est l’habitude des sergents, quand ils sont à boire, de jouer aux cartes pour se divertir. MAÎTRE FRANÇOIS

Oui, c’est ma joie, monsieur, de jouer le lansquenet le brelan et la ferme ; je ne saurais être trompé ; or çà donc, hôtesse, apportez-nous des cartes, et enlevez la nappe ; alors nous jouerons. l’hôtesse

Voici des cartes flambant neuves, blanches et belles ; excusez, messieurs, que j’enlève la nappe. 150 eo hoari B. Cf. la partie des cartes dans le Mystère de saint Gwennolé, éd. Luzel, p. 184 et suiv. 151 hoari a las canab B. 152 hac ar feurin B. bean B. La ferme est un jeu de cartes connu dès le XVIIe siècle. Mon collègue et ami Feuillerat m’en signale une description dans La Maison des jeux académiques, Paris, 1668, p. 8081. Cf. le Dictionnaire des jeux de l’Encyclopédie méthodique, p. 89-91. Sur la vogue du brelan en Bretagne, au commencement du XIXe siècle, voir Perrin, Galerie bretonne, Paris, 1836, t. II, p. 16. 155 eur hartou neve flan B. aman cartou C. 156 ma savin B.

LOUIS

Vous avez raison, hôtesse, mettez le tapis ici mais vous ne trouverez pas étrange que j’aille vous épouser ; soyez tranquille, hôtesse, terriblement jolie je vous trouve aussi, et vous n’avez rien de volé, ici ?

l’hôtesse

Ce qui est ici, monsieur, n’est pas volé ; mais m’est donné à garder avec soin, mais non pas pour vous, car cela est promis en présence de gens dignes de créance et devant Dieu ; car si vous êtes sot, monsieur, je n’en suis pas cause car vous ne me ferez pas ce à quoi vous avez songé. LOUIS

Regarde la salope de mer, comme elle est fière ! [cul. Si tu veux, proie de la rage mue, tu bouteras ton nez dans mon L’HÔTESSE s’en va ; LOUIS continue :

Eh bien donc, maître François, donnez ici les cartes ; que nous coupions tous deux pour savoir qui fera la première tiens donc, maître François ; j’ai coupé un roi ; [main ; c’est à moi de faire la main, il n’y a pas à dire. Coupez maintenant, François, mêlez bien les cartes ; vous ne verrez pas bien à travers vos moustaches. FRANÇOIS

Ne craignez rien, je vois assez, vous le verrez sans délai ; je ne suis pas un âne au jeu de lansquenet ; mais vous êtes un farceur, je le vois maintenant, savoir comment sera le compte avant la fin de cette partie. 4

LOUIS

Et vous y irez, François, mon bel ami ?

167 sel deus ar gantoulien C. 168 On trouve la même expression dans une chanson vannetaise publiée par J. Loth, Revue celtique, t. VII, p. 193, str. 10. 169 deut C. 176 las quanab B.

FRANÇOIS

Oui, d’un demi-cent de livres tout à l’heure, à l’instant. LOUIS

Montre-jnoi ton jeu, le pique est à moi. LE SERGENT

J’ai cinq carreaux, mais je n’ai pas un pique. LOUIS

Or çà, j’ai perdu pour le premier coup ; ramassez l’argent, et faites la main maintenant, et donnez-moi de bonnes cartes pour m’encourager ; car puisque j’ai commencé, je ne garderai pas un denier. FRANÇOIS %

Cette fois-ci, monsieur, je crois que vous gagnerez. LOUIS

Allons, j’y vais, mettez un demi-cent,d’écus. Vingt-uh en trèfle, c’est assez misérable ; montrez vos cartes, qu’avez-vous aussi ? FRANÇOIS

Je vois trois de cœur et je n’ai pas de trèfle et sur ce que je vois, il est clair, monsieur, que je gagnerai. LOUIS

Un filou, François, je crois que vous n’êtes que cela, ou un fripon, je le crains, parmi les sorciers. FRANÇOIS

Il n’y a pas de tricherie, monsieur, vous voyez ; vous allez faire la main, donnez-moi le jeu que vous voudrez, 189 190 193 194

eur som dister B. disqueet B. discoezet C. ne noch B. fripon sel finese ar sergant B.

s’il est bon j’y irai ; s’il est mauvais j’y irai aussi ; et je ne crois pas que vous ayez raison de vous plaindre de cela. 0

LOUIS

Tenez, un beau tricon, vous gagnerez encore. FRANÇOIS

Peut-être, en cherchant à plaisanter, direz-vous la vérité. LOUIS

Vous y irez, allons, sans compliment. FRANÇOIS

Oui d’un demi-cent de livres, tout à l’heure à l’instant. LOUIS

Montre-moi ton jeu ; le carreau est à moi. FRANÇOIS

J’ai trois de dames, allons, les voilà ; regardez-les bien, il n’y a aucune tricherie. LOUIS

Par la tête dieu, j’ai encore perdu ! malédiction sur les sergents, on ne gagne pas avec eux ; or çà, donc, vieux coquin, je perds deux cents écus ; vous n’avez qu’à songer si vous êtes d’avis de m’en donner de bon gré la moitié, ou que je sois tout à fait perdu si je n’ai votre vie. LE SERGENT

Monsieur, par vrai jeu je les ai gagnés ; mais plutôt que vous vous fâchiez, je vous donnerai quatre écus. 206 Sur le juron palateteble et d’autres semblables, voir J. Dunn, La Vie de saint Patrice, acte 2, v. 619, et p. 220, n. 1. 207 mallos B. 209 a sou contant B. 211 Dans P, le sergent demande de la lumière, que l’hôtesse apporte aussitôt, et, lorsque la querelle s’engage, Louis éteint la lumière. 213 fachet B. a. 1396.

LOUIS

Quatre écus, faux-saunier, par la tête Dieu ! si c’est vous qui taillerez sur mon argent à moi, ce serait honnête à vous de gagner un cent d’écus quitte et net ; un maudit denier vous n’aurez pas, puisque vous m’avez fâché, rien qu’un million de coups de bâton ; je ne crois pas que désormais nous soyons camarades encore ; tenez, à travers votre tête, vieil entêté, vaurien, car vous n’êtes pas ici à culbuter des femmes. LE SERGENT

Force, force, force, je crie à la justice de ville ! LOUIS

Tenez, tenez, coquin, boutez votre nez dans mon cul ; pour attendre que la justice vienne vous assister, je vous aurai traîné autour de cette chambre ; tenez, vieil hypocrite, tenez, impertinent, mettez dans votre poche, tenez votre paiement. L’HÔTESSE monte en haut :

Entendez-vous, messieurs, il faut que je sois payée, c’est deux écus l’écot, comptez, si vous m’en croyez. LOUIS

Venez ici, mère des paillards, je vous donnerai paiement, tenez quelque monnaie comme je donne au sergent, tenez, tenez, souillon, grand’mère des miracles, et dites quand vos poches seront pleines. l’hôtesse

Elles sont assez pleines, il y a longtemps, fripon, larron, tu es un criminel, scélérat et voleur, [affronteur, 221 222 223 224 225 230 232 233

ne noch B. o frotan B. o secouitin C. Sur ce cri de force, cf. J. Dunn, p. 164, n. 4. boutet B. hasistans B. gamb voar ben neuse B. me a mo da treiniet C. aman a me rey B. deut aman, ma heuillet C. dalet dalet dalet calquen ar bursudou C. a vou leun codelou B.

force, force, je crie sur le meurtrier sans remède qui a bu dans ma maison et ne m’a pas payée. LOUIS s’en va. L’HÔTESSE

crie toujours :

Force, force, force, arrêtez le meurtrier vaurien qui a l’effronterie de bétonner des femmes 1

4

Scène ; paix maintenant ; le sergent entre par un côté ; le juge et le gouverneur par l’autre côté. LE SERGENT parle :

Messieurs de justice et vous, gouverneur, regardez comment on traite maintenant vos serviteurs ; me voici mis estropié pour jamais, par un malheureux homme dans la maison de l’hôtesse. LE GOUVERNEUR

Quel est cet homme qui a été assez insolent pour vous traiter en cette guise, dites-moi, sergent, et je promets hardiment, par mon autorité, [aujourd’hui. que je mettrai le grappin sur lui, avant qu’il soit nuit LE SERGENT

Monsieur le gouverneur, son nom est Louis Eunius, un affronteur, un voleur, et un homme dangereux ; nous étions allés boire chopine tantôt, et il me pria de jouer aux cartes, et avant la fin du jeu je lui avais gagné deux cents écus, en sorte qu’il m’a bétonné et m’a fait les rendre ; d’un bout de la chambre il me lançait à l’autre, je pensais que jamais je n’en reviendrais ; je suis arrangé, cette fois-ci, de façon à ne faire aucun travail ; je demande vengeance, monsieur, sur le traître ; l’hôtesse aussi est massacrée, par lui ; elle est toute souillée de sang, c’est une horreur de la voir. 247 248 250 252 256 258

me en laqou en houvoarnan B. otro e hano mad a so C. het evoamb B. gonezet e moa daou C. rin biquen a B. laquet on en eur stad na C. a sou ive B.

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LE JUGE parle :

Vous vous êtes trompé, maître François, cette fois-ci ; celui-ci est un gentilhomme du premier rang, et filleul du roi ; je trouve que vous avez eu tort ; faites attention, sergent, que vous n’ayez encore du bâton ; qu’avais-tu, pauvre malheureux, à venir t’associer à un homme comme celui-là ? réponds donc maintenant. LE SERGENT

Je ne songeais qu’à bien quand je le rencontrai pour la preet par civilité je le priai à boire [mière fois, un galopin ou deux du vin nouveau, non pas sans plus de sujet que par amitié. LE JUGE

Enfin, j’ordonne qu’il soit décrété et mis en prison, oui, si on le peut car celui-ci est un bon garçon qui se défendra ; quiconque l’approchera aura du bâton, mais, malgré tout cela, nous ferons notre devoir ; que le décret soit fait, monsieur le gouverneur ; vous ire& à l’hôpital tout de suite, maître François, et vous y resterez jusqu’à la fin du procès. Scène. LOUIS seul.

Or çà, j’ai commencé cette fois à jouer mon serpent ; j’ai proprement corroyé maître François le sergent, il n’est pas enchanté, ça chauffait pour le fripon ; ’ peut-être songera-t-il à me mettre en prison, parce qu’il est associé avec la justice de la ville ; je leur dirai hardiment de bouter leur nez dans mon cul, tout homme m’est égal, qu’il vienne d’où il voudra, mon bâton et mon épée seront mes lois ; je vais maintenant chez moi pour voir le tripot qu’il y a maintenant dans ma maison avec mes serviteurs. 271 272 273 278 279 280

prisan A. hennes so eur polr C. a neb B. comanset hon eta da C. Voir ci-dessous, v. 1401. ar mest B. hac ar B. quet ma sabet en nun dronbel B. tomed meus dar C.

LOUIS entre ; LE SERVITEUR lui dit :

Or çà, entendez, monsieur, moi, mon année est achevée et il n’est pas dans mon idée de venir à me gager ; aussi, vous n’avez qu’à songer à me payer de mon temps, pour que j’aille quelque part apprendre métier.

LOUIS

Que dis-tu, fripon, te payer de ton temps ! tout de suite avec mon bâton je t’apprendrai métier ; tenez, tenez, entêté, fils de vieille vaurienne, il n’ira pas un denier à votre trou de derrière ; sortez de ma maison, fripon, voleur, enchanteur, vous savez bellement parler pour un serviteur, tenez votre paiement, les voilà sur votre cou, le métier que vous apprendrez sera de monter à la potence. Le serviteur sort en pleurant. LOUIS parle :

Et vous, gouvernante, il faut vous en aller aussi, pour apprendre un métier, comme est allé l’autre. LA SERVANTE

Je suis savante assez, je suis bien instruite par vous, je suis aussi habile que ne le sera jamais fille ; vous m’avez appris à lire et à conduire la plume, et à regarder vers le haut, je n’ai pas besoin de plus. LOUIS

Paix, maintenant, taisez-vous tout à fait, ne dites mot de cela, obéissez-moi toujours, je vais faire une promenade ; je ne puis que m’ennuyer tant que je suis ici ; je vais faire un tour en ville pour me divertir. 299 301 302 306

disfet a vou nignat ous B. vo pignal C. ou en ping A. vel ma he et B. menach B. trese B. Mots à double sens ? Cette scène est beaucoup plus claire dans M, où Louis demande à ses serviteurs de ne pas l’abandonner et d’aller prendre des informations en ville, et où le sommelier •refuse de suivre Louis et lui demande ses gages. C’est alors que Louis, désespéré, se donne aux diables. 308 ho han via a fel B. 309 b Quarnagon est remplacé par Satan dans M P ; par Belzébuth dans Q. 11

LOUIS sort ; Monsieur QUARNAGON vient le trouver :

Ho ! Ho ! Louis, cette fois-ci, mon ami, il faut quitter Toulouse ou être prisonnier ; voici que le sergent que.tu as massacré travaille à te faire ramasser dans une maison de pierre pour dormir. LOUIS

Monsieur Garnagon, vous vous trompez, j’ai plus d’estime parmi les sergents, que vous n’en aurez jamais parmi vos consorts ; en ville et sur la campagne je suis honoré par eux. QUARNAGON fils aîné de MARIE ROBIN

Tu seras embêté, Louis, si tu te fies là-dessus, l’homme le plus puissant, quand ce serait Samson qu’il serait, ne pourrait résister à tous entièrement et tu es réputé partout comme un voleur. LOUIS

Comment, pour un voleur ? par la tête Dieu, taisez-vous net, ne parlez pas de cela ; oui, par animosité contre moi, parce que je suis un homme et parce que j’ai battu avec raison un sergent, [vaillant, oui et toujours, ils attraperont de ma part des coups toujours quand je les trouverai de côté ; je ne mérite aucun blâme pour donner une pile à des sergents ; au contraire, je devrais être récompensé. QUARNAGON

Tais-toi donc maintenant, Louis, pour que tu sois instruit : ta cousine germaine est là professe ; 326 o.ia — diganeme B. Marteze eo risquet da gaout c’hoas digane C. mes hoas e prometan o devo digane P. 327 bahada boupret po hevin B. Mar gallan ariout voar e hent a C. bahadou bepret P. 328 Dans M on lit : il y a un commun proverbe qui dit qu’on ne trouve jamais son profit b aller dans les cabarets boire et se battre avec des sergents. 329 me gleioay B. 330 selou breman B. ac’hanta, mar queres a vezi C. 331 quiniterves compas a sou B. Il manque ici un ou quelques vers : da gaout a relijiusdet en quichen Perpignant P.

celle-là t’aime parfaitement, et te donnera de l’argent, et alors tu pourras aller à la province où tu auras désir, ta cousine germaine est la mère Théodosia, la plus belle créature qu’il y a dans ce pays ; obéis-moi donc, Louis, et vas-y ton chemin, et je t’aiderai à enlever la religieuse. LOUIS

Ce serait un beau coup, mais il est terriblement malaisé que je vienne à bout d’enlever une religieuse. Il te faudrait la tenter par amourette et lui représenter les plaisirs du monde, et moi si je la trouve dans un coin de côté, je lui donnerai à goûter d’une liqueur nouvelle ; il ne faut pas que nous manquions, Carnagon, je te prie, hâte-toi donc, va faire un tour parmi les religieuses. CARNAGON

Parlez doucement, Louis, modérez votre furie, et allez-y à voix belle à mesure qu’elle pourra le supporter ; insistez sur l’amour et le contentement, et donnez-lui à entendre qu’elle est tout à fait charmante. Allons, pars, Louis, pour commencer un bout de ton chemin ; je serai en quelque coin aussi autour du couvent. Scène ; tous sortent. LOUIS seul.

Voici une belle hase qui est allé sa route ; je vais tendre mon piège si je puis l’attraper ; mon fusil est chargé et toujours en état, je suis sûre d’elle si elle paraît devant mes yeux ; je vais demander à parler à la mère Théodosia, pour lui donner le bonjour avec respect et avec joie, 347 a voais quic dre vallou B. Pour voais cf. 1700. Quee A. A vouez gai L. 347, 350, 351 manquent dans C. 351 manque dans B. 349 ehe eur feumelen charmand A B. 351 b Dans M P Q, suit une scène où Louis rosse trois sergents qui venaient pour l’arrêter. Cf. ci-après la scène des maltôtiers. 352 rouet B. 355 parti dirac B.

car j’ai des choses de conséquence en mon esprit, mais je ne le dirai à personne pour ne pas être dénoncé. LOUIS va au couvant ; LA RELIGIEUSE parie :

Deo gratias ! LOUIS

Bonjour, ma cousine, Dieu vous maintienne toujours pleine de piété et de dévotions ; si je ne vous fais pas perdre votre temps, j’ai affection à vous communiquer les secrets de mon cœur. THÉODOSIA

Il n’y a pas, mon cousin, d’empêchement au monde ; au contraire je désirerais toujours votre présence, depuis que nous étions petits, nous nous aimions parfaitement, et tant que je serai vivante ce sera continué. LOUIS «

Jamais je ne me lasserais dans ces saints lieux, s’il était permis de venir visiter ses gens et ses parents, mais les ursulines ne demandent jamais la conversation du monde ; cela me fait, ma cousine, avoir beaucoup de regret d’être privé chaque jour de vous voir. LA RELIGIEUSE

Il est vrai, mon cousin, que nous ne pouvons pas agir librement un sexe avec l’autre, car l’ordre commande. Allez donc, mon cousin, dans le jardin vous promener un peu, car j’ai encore à dire mes matines, et après, mon cousin, nous causerons de nouveau, car je vous aime en toute sincérité. 371 Vers la fin du XVIII® siècle il y avait en Basse-Bretagne des couvents d’Ursulines à Guingamp, Lannion, Tréguier. Etat général par fonds des archives départementales, ancien régime et révolution, col. 178. Cf. V. Onfroy-Kermcalquin, Etudes sur les villes de Bretagne, Guingamp, 1846, p. 451-453. 372 « conversion » est confondu avec « conversation ».

LOUIS

Bon ! Jusqu’à tout à l’heure, donc, nia chère cousine, je viendrai vous trouver de nouveau dans une heure. Louis sort ; la religieuse à genoux. CARNAGON entre et parle :

Ho ! ho ! jamais tu ne cesses de prier Dieu et la Vierge, tu es bien sans souci ; j’aimerais à savoir jamais comment tu fus tentée d’aller dans un couvent et d’être professe ; si tu t’étais mariée, tu aurais contentement chaque jour avec ton mari, s’il était un homme vaillant : et encore, si tu veux, tu auras commodité de quitter le couvent et ces prières, et d’aller avec ton cousin te divertir ; tu abrèges tes jours si tu restes en ce trou ; une femme si belle, la plus belle que vous trouverez ne donnera donc aucun plaisir pour les gens du monde ; il est ordonné à tous, dans la loi de Dieu, de venir à se faire du bien l’un à l’autre, et toi tu ne fais aucun bien à personne, aucun ; • tout ce que tu fais ici n’est qu’hypocrisie. Carnagon 6ort. LOUIS entre et parle :

Ah ! jamais il n’y a donc du tout fin à votre prière ? vous priez pour nous tous, il n’y en a plus besoin ; voici trois quarts d’heure et davantage que vous êtes ici ; laissez vos dévotions et causons de nouveau. LA RELIGIEUSE

Mes heures sont achevées depuis un quart d’heure et davantage, mais en pensant à votre entretien 389 392 3% 398

mes queres A. abregin a ry da A. elle an eil ober vad da egile A. b La scène entre Louis et Théodosia est beaucoup plus développée dans M. Louis fait valoir plusieurs arguments, entre autres que c’est la mode maintenant, même parmi les princes, d’aimer les personnes de leur parenté.

je suis restée à genoux comme si j’étais matée ; je suis charmée, mon cousin, de ce que vous êtes venu me voir. LOUIS

Or çà, ma cousine, je ne saurais nier davantage ; je suis charmé entièrement en voyant votre visage ; je trouve grand pitié que quelqu’une de votre beauté, soit dans un couvent privée d’un mari. LA RELIGIEUSE

Ha ! ha ! mon pauvre cousin, vous causez trop bien ; laissez votre libertinage et vos paroles amoureuses ; si vous aimiez un peu venir à vous discipliner, vous ne seriez pas si tenté que cela, je vous assure. LOUIS

Comment la discipline ? vous êtes assez cruelle pour mettre cette chose à toucher votre peau belle comme le cristal, douce comme l’ivoire, le ciel se plaindrait de cela lui-même ; puisqu’il vous a donné un corps si délicat et innocemment vous viendriez à le battre, c’est pourquoi vous n’avez qu’à songer si vous entendez être le sujet de ma mort, en venant me priver de votre beauté ; je l’avoue librement, je n’ai plus à vivre si vous êtes rebelle. LA RELIGIEUSE

Hélas, mon cher cousin, vous pérorez en vain, on ne peut pas sortir, après être professe. LOUIS

Comment vous voudriez servir d’Ankou pour qui vous aime parfaitement, et toujours vous aimera ; je suis nuit et jour occupé en mon esprit à venir à songer, ma cousine, à votre beauté. 427 L’Ankou est l’ouvrier de la mort. Cf. A. Le Braz, La légende de la mort chez les Bretons armoricains, 2° éd., t. I, p. 95-142. 429 rac me a zo noz de C. 430 hepquen en ho C.





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LA RELIGIEUSE

Je vous plais, je le vois maintenant ; et vous me plaisez aussi, je le dis hardiment ; mais je suis peinée horriblement et gênée en mon esprit, comment sortirais-je puisque c’est vrai que je suis professe ? LOUIS

Gela sera, et apportez avec vous le trésor, si vous pouvez, et nous ferons bonne chère aussi bien que des religieuses ; je préparerai des chevaux, un équipage tout prêt, et viendrai vous chercher, quand ce serait à minuit, et nous irons rester du côté des Pyrénées, et là il n’y a personne qui nous connaisse ; il ne vous manquera jamais mon honneur, mon respect, je vous reconnais comme ma vraie épouse. LA RELIGIEUSE

A deux heures après minuit, trouvez-vous à cette place, et faites bien attention de ne pas venir à manquer, et cherchez de bons chevaux, des sacs, des mannequins, car ils seront bien chargés et nous tous marcherons ; cherchez des muletiers qui ne soient pas du pays, car il ne faut pas que l’on nous reconnaisse ; je serrerai de l’or, de l’argent, la plus belle vaisselle, et d’ici qu’il ne soit jour, je serai loin de ce lieu. LOUIS

Allons, soyons Adèle en ceci, ma cousine, ne manquez pas et emportez avec vous le trésor, si vous pouvez ; je vais préparer et il est temps que j’aille ; soyons Adèles nous deux, car moi je ne manquerai pas. Scène ; ils sortent ; deux muletiers passent. 449 me digesou guenin A. 451 me sonj ma c’heniderv penos na vancfomp quet C. 454 b Dans M, le loueur de chevaux à qui Louis confie son projet, fait beaucoup de difficultés, mais finit par céder un de ses chevaux et s’en procure un autre dans le pays. C’est Luzel qui a proposé pour bululier la traduction « muletier ».

LOUIS va les trouver :

Salut à vous, mes deux hommes, de quel pays êtes-vous ? car si vous êtes sans charge, j’ai besoin de vous louer pour faire un lointain voyage, vous serez bien payés ; si vous avez quatre chevaux, ils seront tous chargés. LE PREMIER MULETIER

Oui, à votre service, monsieur, nous avons de bons chevaux ; nous sommes prêts à venir chercher, envoyer et quérir ; nous gagnons notre nourriture ainsi, par les pays, et irons avec vous où vous voudrez, monsieur. LOUIS

Aux environs de minuit, trouvez-vous ici, et je vous fournirai de quoi charger ; et faites manger vos chevaux avant de venir ici avec eux, car nous avons beaucoup de chemin à faire avant que soit arrivé [le jour. LE SECOND MULETIER

Dépêchez-vous, monsieur, arrivez quand vous voudrez ; avant qu’il ne soit minuit vous nous trouverez à cette place ; nous, le matin nous aimons mieux aller, que vers le milieu du jour, à cause de nos chevaux. LOUIS

Il suffît, mes bonnes gens, allez chacun à son affaire pour que nous soyons à temps pour commencer à faire route ; je vais chercher ma femme, que nous fassions les ballots, et à mesure que nous les ferons, je les rendrai à cette place. Scène ; tous sortent. Louis entre par un côté et Théodosia par un autre côté. LOUIS parle :

Eh bien, ma cousine, la nuit est avancée et j’ai préparé votre équipage tout prêt ; si vous avez fait des paquets, apportez-les ici ; car le moment est arrivé, il est temps que nous chargions. 476 Cf. 437.

THÉODOSIA

Voici un tas de paquets, emportez-les, quand vous voudrez, et emportez-les hardiment, ici on est toutes endormies ; et hâtez-vous de les emporter tous, et revenez de nouveau ; je n’ai qu’une peur, c’est que n’arrive le jour ; j’ai ramassé tout ce que j’ai trouvé, j’ai aussi empaqueté la vaisselle d’argent, plus de quatre mille écus en or et en argent ; [voudrez. maintenant nous pourrons aller à la province, où vous LOUIS fait un ballot pour le charger :

Je vais emporter celui-ci pour venir de nouveau, attrapez encore, si vous pouvez, ce sera même chose ; le plus, le mieux ne sera pas de trop, je suis sûr ; nous jouerons un coup jusqu’à ce que soit pleine la mesure 1 Louis porte son ballot pour revenir après. THÉODOSIA seule :

Or çà donc, pas moins, en voilà une affaire ! mon temps ne sera pas long car je suis une mauvaise femme, je serai criminelle et la honte de toutes les filles, je me rends une mauvaise femme par mon amourette. Mais puisque j’ai commencé à faire mon délogement, le plaisir sera partout, tant qu’il y aura de l’argent. LOUIS arrive et parle :

Ceci ira en un ballot ; et vous, venez par ici, c’est le moment pour nous de partir, car le jour avance ; venez promptement si vous pouvez, pour que nous partions, si nous étions attrapés ici, il y aurait manque dans notre compte. THÉODOSIA

Je suis aussitôt que vous, hâtez-vous comme vous voulez, quand je serai hors de la ville, jamais je ne serai attrapée, mais nous voici arrivés aux muletiers ; [suite hâtez-vous maintenant, les hommes, que nous partions tout de 492 feumelen fal A. na vo ket hir ma reuz L. 499 deut pronta ma c’helfet C. 500 e ve rnanc A. 12

LE PREMIER MULETIER parle :

Venez sur la charge, madame, nous allons partir, toutes les choses sont prêtes, sortons de ce lieu-ci voici deux heures sonnant, nous sommes tôt aujourd’hui, nous aurons fait beaucoup de route, je suis sûr, d’ici le jour. Scène : tous sortent. Ils ont fait deux tours sur le théâtre sans dire mot ; au troisième, LOUIS parlera : ✓

Or çà, muletiers, nous avons fait beaucoup de route, six ou sept vingt lieues depuis que nous sommes partis, de quel pays êtes-vous natifs, contez-moi votre affaire, le sommeil m’accable, je ne puis marcher plus longtemps, car marcher la nuit est terriblement fatigant ; contez quelque chose pour nous rendre joyeux. LE SECOND MULETIER

Nous sommes de l’Auvergne, monsieur, puisque vous ainsi par les pays pour gagner notre nourriture, [demandez, et quand nous avons gagné un certain nombre de deniers, nous retournons alors voir les gens de notre pays ; à la fin de ce voyage, nous retournerons sur nos pas, non pas par ces chemins, mais par la grande route de Paris. LOUIS

Oh ! gagnez-vous beaucoup quand vous êtes en condition, vos chevaux et vous sont toujours à aller et venir, combien vous revient-il aussi par jour ? Je suis votre débiteur de beaucoup maintenant, messieurs. LE PREMIER MULETIER

Six réaux pour chaque cheval, et six réaux pour moi, ce qui signifie, monsieur, dix-huit réaux chaque jour, et autant à mon camarade et à ses chevaux, ce qui fait trois écus chaque jour, qui nous sont dûs ;

519 522 528 529

réal est en Bretagne une monnaie fictive valant 0,25 centimes. L’écu valait trois livres. pa vou achif A. p’o achu’r veach man L. En petit trégorrois mone done. Ernault, Glossaire *, p. 192. dimb ni L. neur ober C.


Go O

cela fait quinze jours depuis que nous sommes en route, quarante-cinq écus, monsieur, est tout le compte ; et sur ce que vous dites, nous ne sommes pas au bout encore, nos chevaux sont éreintés, et nous sommes bien fatigués. LOUIS

Vous voulez me ruiner, sur ce que je vois, les hommes, quarante-cinq écus pour cela vous n’aurez pas ; je vous ai nourris, et c’est suffisant, n’allez pas vous figurer que vous ayez d’autre paiement. LE SECOND MULETIER

Je ne sais pas, monsieur, dans quelle condition, je viendrais à répondre à votre proposition, car de gré ou de force, il faudra que nous soyons payés ; il y a partout de la justice et bientôt on le verra. LOUIS

Je suis de la justice, impertinent, fripon, si je veux, je vous mettrai à pourrir dans une prison. LE PREMIER MULETIER

Eh bien donc, camarade, voici un polisson, qui compte nous mettre à pourrir dans la prison, vous vous trompez sûrement, Louis, sauf compliment, nous sommes sûrs de vous et de notre paiement. LOUIS

C’est vous qui vous trompez, deux fripons désordonnés ; voilà votre paiement : chacun un coup de pistolet. Les voilà morts tout à fait, les deux misérables voleurs, j’ai tiré juste entre leurs deux yeux, mais avancez toujours votre route, Théodosia, que je regarde si ces deux fripons ont de l’argent, oui, soixante écus sont sur un des fripons, et sur celui-là, il n’y a que quinze, 550 ho tennet C. 551 delc’hed da vond bepret c’hui, Theodesia C. 553 sou en grubuil eunan A.

je dirai, s’il est nécessaire, que des voleurs étrangers sont venus sur le grand chemin la nuit nous attaquer ; Tenez donc, ma femme, hâtez-vous vite, serrez ; leur argent est à nous, et aussi leurs chevaux. THÉODOSIA

O Dieu éternel, quel méchant homme vous êtes, Louis ! d’avoir tué deux hommes qui étaient à notre service, vous n’avez pas de conscience, malheureux, tout de même, comment paraître une fois devant Dieu ? Mon cœur tremble ; hélas, je crois maintenant que je mourrai honteusement de par la justice de ce pays ; si j’avais su que vous étiez un scélérat, je ne serais pas venue avec vous, pour être misérable. LOUIS

Que barbouilles-tu, mère de l’hypocrisie ? tu ne pouvais plus durer dans le couvent sans jouer, la manière des putains, c’est et voler et piller et encore tu as l’effronterie de venir me blâmer ? Si tu dis un mot de plus, religieuse putain et voleuse, ma botte ira sans souci à votre derrière ; regardez le beau chiffon que j’ai pour me commander, regardez la mère prieure, maîtresse sur les putains ! THÉODOSIA

Nous allons entrer en ville ; Louis, taisez-vous maintenant, et si j’ai trop dit, je demande excuse, les filles sont fragiles, vous le savez, aussi il faut s’excuser l’un l’autre, je vous aime en mon cœur, vous pouvez croire parfaitement ; c’est par respect pour vous ce que j’ai fait. LOUIS

Allons, c’est passé, qu’il n’en soit plus mot, vivons en union et avec fidélité, 568 570 571 577

hoary au sens grivois de ce mot. te zo meurbed hardi da zonet dam zamall C. II n’y a pas dans A de folio 11. ar merc’hed a zo bresq gouzout mad a red-se C.

1

venons à l’hôtellerie pour manger un morceau, et si nous nous plaisons, nous resterons si vous voulez ; et nous affermerons une chambre, en un côté quelconque en ville, et nous nous aimerons fidèlement le reste de notre temps. Descendez à bas, maintenant, Théodosia, et je vais entrer pour demander à loger. THÉODOSIA descend ; LOUIS entre dans rhôtellerie :

Salut à vous, mon hôte, et à votre compagnie, le logis pour cette nuit, si c’est votre bonté, pour moi et ma femme et quatre chevaux ; à boire, à manger, vous êtes sûr d’être payé. l’hôte

Avec beaucoup de joie, monsieur ; faites entrer votre épouse, et les garçons vont décharger vos chevaux, venez vous asseoir, madame, ici devant le feu, pour vous rafraîchir, et pour attendre votre souper ; et votre marchandise sera mise de côté, il ne lui arrivera aucune offense ni dégât. LOUIS entre :

Nos chevaux sont ramassés et tous nos effets, maintenant, quand le souper sera prêt, alors nous souperons ; or çà donc, mon hôte, j’ai encore à dire que si vous pouviez nous aider, nous vous serions obligés ; nous avons désir de rester un peu en cette ville [loger. si vous pouviez nous faire trouver une chambre suffisante pour l’hôte

Vous ne sauriez, monsieur, vous adresser mieuxque vous n’avez j’ai une belle chambre que vous aurez si vous voulez, [fait, et vous pourrez y fréquenter, sans passer par la maison ; voici l’escalier pour y entrer ; deux presses sont dedans, deux lits, un buffet, mettez-y des vêtements et servez-vous en ; [aussi, 607 darempredet e ve C. tu A. 608 chetu aman C. 609 presses « armoires ». ebars zo diou armell C.

de la vaisselle pour faire votre nourriture vous sera servie et tout ce que vous demanderez pour votre commodité, [aussi et si vous avez, monsieur, désir d’entendre le prix, on ne rabattra pas un denier de six écus par mois. LOUIS

Que ce soit à vous ou à un autre il nous faudra payer ; cette nuit, je suis content d’y venir loger, à cause de nos vêtements, de peur qu’ils ne soient mouillés, et quand nous serons dans notre chambre, ils seront dépaquetés. Voilà six écus pour le premier mois, et nous serons chez vous en attendant de nous installer. l’hôte

Venez avec moi, donc, monsieur, et votre épouse, et vous, et vous allez voir où je vais vous conduire. Ils vont à la chambre neuve. L’HÔTE

Eh bien donc, monsieur, voici la chambre ici, il n’y en a pas de plus belle dans cette ville. LOUIS

C’est tout à fait bien, hôte, je suis content, mon ami, en outre du paiement, nous avons obligation, nous avons assez de biens, Dieu merci, quand nous demeurerions ici le reste de notre vie ; mes chevaux encore, mon hôte, je vous recommande, la première foire qu’il y aura, que vous alliez les vendre, et vous les vendrez, comme s’ils étaient à vous-même ; je vous récompenserai, assurément, de votre peine. l’hôte

Allons donc, monsieur, il sera fait comme vous direz ; voici arrivé votre souper avec les domestiques, 620 a ganec’h e chomfomp da c’hortoz n’hem reizan C. 622 hac e velfet pelec’h ez han d’ho cundui C. a nin o seruigou vel mo pou bolante A. 625 Voir ci-dessus 123. 629, 631 manquent dans C.


Go O

mangez à votre plaisir, vous serez servis, et quand il vous plaira, vous irez coucher ; la dame est fatiguée, car son teint le fait voir ; hâtez-vous de manger votre souper et allez dans votre lit. THÉODOSIA

Oui-dà, mon cher homme, je me suis trouvée fatiguée, mon corps est tout moulu de voyager à cheval ; j’ai besoin, pour sûr, de prendre mon repos, car nous avons fait de la route et jour et nuit ; je vais manger, si je puis, le délai ne sera pas long, car j’ai assez hâte de m’allonger en mon lit. Scène ; tous sortent. Louis soupe et va se coucher ; le lendemain, après s’être levé, LOUIS dit à sa femme :

Or çà, pour cette fois, mon épouse Théodosia nous nous sommes trouvés bien, je me plais en ce pays ; maintenant, je vais me promener pour faire connaissance avec les grands bourgeois autant qu’avec la noblesse, [tiguée ; vous pouvez rester à la maison, jusqu’à ce que vous soyez défaet après vous viendrez avec moi vous promener quand vous [voudrez. THÉODOSIA

Oui-dà, cher Louis, vous dites bien ; pour les premiers jours, moi je ne sortirai pas, allez donc vous promener où il vous plaira, car je suis toujours fatiguée, je ne me trouve pas en bonne santé. LOUIS

Bon ! A bientôt donc, Théodosia, je vais faire un tour pour me divertir. LOUIS sort ; THÉODOSIA seule, qui parle :

Quand je me considère maintenant, abandonnée et privée à jamais du milieu de mes sœurs, je ne sais quelle sorte de posture tenir en ce pays ; il faudra que j’achète un vêtement de nourrice ; 660 Ce détail, singulier ici, se trouve plus naturellement dans M au moment où Théodosia s’échappe du couvent : « Je me suis aussi pourvue d’un costume de nourrice afin de n’être pas reconnue quand viendra le jour ».

oh ! quel malheur m’avait tenté de quitter le couvent pour plaire au monde, pour plaire à un homme méchant, s’il en est sur la terre, qui me jette dans le désespoir de mourir de chagrin ; je n’ose pas même regarder vers le ciel, ni prononcer le saint nom de Dieu ; mon crime est si grand que je suis toute confuse ; je serai pour jamais punie malheureusement, punie en ce monde, punie en l’autre monde, misérable que je suis, je suis une mauvaise femme. Marie, mère de notre Sauveur, serait-il possible, tout de même, que je ne trouve pas moyen de secourir mon âme ! Pour mon corps indigne, il ne me gêne pas, je suis contente de la peine et des souffrances, si c’était la miséricorde de notre Seigneur Dieu qui viendrait regarder avec pitié mon âme, mais, hélas, je ne sais pas si j’oserais jamais espérer quelque grâce, car je suis désordonnée ; mais-la Sainte Ecriture récrée mon esprit, ’qui nous fait défense de perdre patience. Saint Augustin, saint Paul et Marie-Madeleine, saint Guillaume, Marie l’Egyptienne, qui ont été pécheurs, et beaucoup d’autres, et nonobstant cela, après la pénitence sont pardonnés de Dieu ; et je souffrirai contente, quand je devrais être tuée par le misérable qui m’a dévoyée ; voilà dix-neuf ans sans délai que je suis avec lui, et il n’a fait depuis que rouler et boire, violer, et voler, et tuer misérablement ; et toujours, quand il arrive, il commence à me battre, ces jours, n’ayez peur, quand il se fatiguera de rouler, il retournera à la maison pour me maltraiter, mais je le mérite, Dieu soit loué ! je ne souffre pas assez pour ce que j’ai mérité ; .675 ar visiricord A. 677 allas ! ne ouzon quet ha me gredfe biquen C. 680 ousinb A. Sur pasianted, voir Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XI, p. 113. 682 Marie l’Egyptienne est très connue en Bretagne. Sant Guillerm ha re ail L. a. 1711.

ma lâcheté est honteuse et je suis une pourriture ; quitter mes sœurs, quitter ma religion, et venir avec un méchant homme me promener par le pays, chaque jour, dans le péché et les lubricités ! LOUIS arrive à la maison, ivre, et frappe un coup de bâton sur la porte :

Ho ! ho ! Théodosia, religieuse défroquée, combien de cornes m’avez vous faites depuis que je suis sorti ? voilà qu’il y a deux semaines que je ne suis venu vers vous, et le travail doit être fait par quelqu’un. THÉODOSIA

J’étais assez peinée de ce que vous n’arriviez pas, vous ne sauriez comprendre combien c’est une peine d’esprit d’être ici, nuit et jour, dans cette chambre, toute seule j’aimerais une fois être tirée de peine. LOUIS

Oh ! ce n’est pas cela qu’il faut dire, Théodosia, comment sera la vie ? nous n’avons plus rien ; dissipée et redissipée est la vaisselle d’argent, et tout ce que vous aviez volé autrefois au couvent, aussi vous n’avez qu’à songer si vous serez contente de jouer un coup avec tous ceux qui en auront désir ; oui, et il sera nécessaire d’être contente du vilain comme de celui qui est beau, s’il a de l’argent.

THÉODOSIA

Comment, âme méchante, vous seriez assez cruel pour mettre en cette guise votre cousine fidèle ; ce n’était pas ainsi que vous m’aviez promis, quand j’ai quitté le couvent à cause de votre beauté. LOUIS

Aussi bien je vous aimerai en faisant ainsi, et il est nécessaire de subvenir à la nécessité ; comment voudriez-vous que nous fassions pour vivre ? Nous n’avons aucun métier ni commerce en ce pays, 715 Dans M, pour décider sa cousine à se prostituer, Louis tire son épée et l’appuie contre la poitrine de Théodosia. 13

et il vous est nécessaire, cette fois, de songer à vous résoudre à aller parmi les gens et vous abandonner pour gagner quelque sou, et moi, de mon côté, j’irai sur les grands chemins pour que j’en gagne aussi. THÉODOSIA

Ah cruel inhumain, tigre que je caresse, cœur dénaturé, il te faut me tuer ; comment me résignerais-je à cette sorte de métier ? Hélas, pour cette fois, mon temps est achevé, allez vous coucher cette nuit, et demain matin, je vous donnerai de quoi boire de nouveau. LOUIS

Tant que vous me fournissez de quoi boire, je ne vous dirai rien, ma femme Théodosia, je vais venir dans mon lit, je suis consolé par vous, tant que vous aurez de l’argent, je ne vous manquerai jamais. Scène ; tous sortent. THÉODOSIA entre :

O Dieu éternel, serait-il possible, tout de même, qu’il me faille maintenant doubler ma méchanceté ; assez et trop, hélas, je vous ai offensé, détournez encore votre visage, mon Créateur béni, et ne permettez pas, mon vrai Dieu, que je sois perdue à jamais ; accordez encore une grâce à la plus grande pécheresse. Jésus crucifié, vous avez accordé le pardon à Marie-Madeleine, quand elle s’était abandonnée, à Marie l’Egyptienne et à beaucoup d’autres, à des filles, à des femmes qui se sont adonnées au mal ; inspirez-moi, mon Dieu, le chemin vers la pénitence, je souffrirai avec grande joie, sans jamais me plaindre ; Vierge, reine du Ciel, prosternez-vous à deux genoux devant votre fils Jésus, mon rédempteur divin.

741 745 747 750

vicaire pour se confesser ; celui-ci ne pouvant l’absoudre l’adresse à un missionnaire de passage dans la ville. Cf. Introduction. et 742 sont intervertis dans C. a. 682. a. 755. asanbles guenin A.

Obtenez-moi la grâce d’effacer mes péchés, et je ferai pénitence grande jusqu’à ma mort ; mon bon ange, mon conducteur, je vous avais délaissé, venez encore, au nom de Dieu, une fois me trouver ; inspirez-moi le chemin de la pénitence, je ne demande que peine, sans jamais me plaindre. Jésus, mon rédempteur, vous avez dit qu’il n’y avait pas au monde de péché impardonnable, avec la pénitence et la contrition, et vous demander pardon du fond du cœur. Hélas, je suis fragile, Dieu, vous avez vu combien promptement j’ai fui, après que j’étais tentée, et j’ai péché en votre présence, sans honte, ô mon Dieu ; tournez-vous encore, je vous prie, vers moi par charité. J’entends dire qu’il y a un jubilé à Sens, en Bourgogne, et tous ceux qui y vont auront tous pardon ; il y a dix lieues d’ici, mais quand ce serait quinze je pars tout de suite, il faut que j’y aille, et que je quitte le péché, avec le secours de mon Dieu, et que je tâche, si je puis, de sauver mon âme ; j’ai honte, quand je songe combien grande est mon offense, devant la reine du Ciel, et demander son assistance ! mais vous, vierge Marie, êtes toujours pitoyable ; protégez-moi, pour que je sois victorieuse ; je vais partir, adieu au monde mondain ; je ne chercherai de plus que le chemin de la pénitence ; je renoncé à Satan et à tous ses artifices, et je vais maintenant chercher Jésus-Christ, mon seigneur. Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan, vous vous peinerez en vain si vous songez à me faire retourner encore pour venir à pécher. ♦

Scène ; Théodosia sort. LOUIS

Ho ! ho ! où êtes-vous, entendez-vous, Théodosia, pour me donner le prix d’une bouteillée, j’ai soif maintenant ; 779 hac ar A. Ce vers et les trois vers suivants sèmblent interpolés ici d’après 1905, etc. 784 ro din C.

hâtez-vous, car si je suis trop longtemps ici à vous attendre ’ je vous frapperai sans délai mes pieds contre vos fesses. LE DIABLE

Tu auras maintenant de la peine à chercher Théodosia ; elle est allée au jubilé, pour se convertir ; ton coup est fait, Louis, il n’y a plus à dire ; te voilà fait veuf, pauvre misérable sot, en un moment, elle a renoncé pour de bon au plaisir du monde ; elle est allée au jubilé, et ne reviendra pas. LOUIS

Gomment, au jubilé ? que me dites-vous ? dans cette sorte d’endroit on ne demande pas de putains, mais il n’y a pas de mal, et quand ce serait vrai, je me divertirai selon ma volonté. LE DIABLE

Je ne te vois de ressource que dans les grands chemins, et tu n’auras aucun secours sinon de ton bâton, ton épée, Louis et tes pistolets ; voilà maintenant, pauvre misérable, ce que sera ton métier ; tu es un malheureux, je te dis la vérité, tu es capable de dépenser cinq cents écus en un jour ; et quand il y aurait dix diables à t’apporter de l’argent, tu les dépenserais à mesure qu’ils t’arriveraient. LOUIS

Tu es un insolent, et une bête désordonnée, * si j’écoutais mon humeur, je te briserais les os. LE DIABLE

Ton nez dans mon cul, tête de veau, fais comme tu voudras ; je te recevrai bien, quand tu arriveras chez moil LE DIABLE sort ; LOUIS, seul, dit :

Or cà, pour cette fois, je me vois réduit ; il me faut aller voler ou aller chercher ma nourriture, 790 moned A. e ber amzer C. 791 troet a deus he c’hein C. Ce passage est assez différent dans C. 806 me a meus eun tamm c’hoant da derri da estjuern C.

et c’est le moment pour moi de faire l’un des deux ; je n’ai pas un morceau de pain à me mettre.en la bouche ; je vais sur le grand chemin, sous prétexte de promenade : le premier qui passera perdra la vie. Par la jarni dieu, voici qu’arrive un cavalier ; tout à l’heure à l’instant, je lui ferai son affaire ; mais je ne m’arrêterai pas à causer avec lui ; d’un coup de pistolet, il faudra que je le tue. Un homme à cheval passe, LOUIS tire sur lui :

Holà, le voilà tombé ; maintenant je vais voir s’il y a quelque chose de bien sur lui ; ce n’était pas un mendiant, il a sur lui soixante écus ; c’est mieux que rien ; il est nécessaire que je l’enterre, pour qu’il n’y ait aucun esclandre, et j’aurai ses vêtements, car je gagnerai encore quand je les ferais bon marché. LOUIS le déshabille et l’enterre :

Or çà, je vais en ville pour me rafraîchir, le coup n’a pas été beau pour cette fois-ci, mais demain je pourrai aller aussitôt qu’il sera jour, peut-être ferai-je mieux que je n’ai fait aujourd’hui. Ici, il y a du cidre et de l’eau-de-vie, je crois, il m’est bien nécessaire d’entrer ; j’ai terriblement soif. Salut, brave femme, y a-t-il de bon cidre chez vous ? donnez-moi une chopine pour que j’y goûte. l’hôtesse

Vous ne saurez trouver mieux, mais en grâce, je vous prie, de causer doucement, car c’est en fraude que je vends, et les maltôtiers viennent en tournée chaque jour ; j’ai grand peur d’être dénoncée par quelqu’un. LOUIS

Soyez hardiment sans souci, hôtesse, quand je dis, car aujourd’hui, maltôtier n’entrera en cette maison, •

829 aman A. en ty man e zo C. 835 a dremen bemde A. 836 ven flated gand A. 837-838 sont intervertis dans C.

je voudrais dans mon cœur les voir entrer, et à cause de cela, je vais chanter une chanson. l’hôtesse

Ne faites pas cela, monsieur, au nom de Dieu, je vous prie, car vous auriez une fameuse perte, et moi je serais ruinée ; je suis une pauvre veuve ; mort est mon époux, il n’y a que trois jours qu’il est enterré, et en plus du danger, il serait inconvenant de vous laisser chanter ni cantique, ni chanson. LOUIS

Moi, il n’y a que deux jours depuis que je suis veuf, et il faut que je chante pour faire le deuil de mon épouse ; et puisque nous sommes veufs, jusqu’àce que ce soit fini, si vous je regarderai quelle est la mesure de vos cuisses. [voulez, l’hôtesse

Ne dites mot de cela, monsieur, je vous prie, j’ai assez de chagrin, hélas pour moi, de mon époux, et vous en avez aussi, si vous êtes homme de qualité ; la nature commande et afflige notre cœur. LOUIS

Je ne voudrais pas songer à avoir chagrin ni regret d’une vieille putain infâme qui m’a quitté ; assez de salopes viennent s’offrir à moi, et avec peu de chose je viens à les contenter. LOUIS chante :

Le lendemain d’une ribote L’on dit que j’abrège mes jours Moi je prétends que l’on radote Et je ris de ces sots discours Je ne chéris que ma bouteille J’ai commencé dès le berceau Je ne finirai qu’au tombeau Vive donc le jus de la treille. 853-854 sont intervertis dans C. 859-864 Le couplet est traduit en breton dans C. J’ai restitué le français d’après L.

DEUX MALTÔTIERS entrent ; LE PREMIER parle :

De par le roi ! LOUIS

Mais que signifie cela ? LE SECOND MALTÔTIER

Ty es pris en fraude, l’hôtesse et toi.

LOUIS

Eh bien, ce n’est rien, tout cela ne m’épouvante pas, buvez chacun une goutte, et soyons amis ; il ne faut pas qu’on.se fâche parce que je bois ; j’ai de l’argent, en poche, messieurs, pour payer. LE PREMIER MALTÔTIER

Vous trouverez assez à employer votre argent en vérité ; restez tranquille là, que soit fait procès-verbal, car je crois, moi, que c’est pour nous défier, que vous avez l’effronterie de venir ici chanter ! Car vous avez fait un coup qui vous coûtera, monsieur, beaucoup de pièces de deux écus, ou d’aller aux galères. LOUIS

Comment, aux galères ? fils aîné de Lucifer ! savoir si vous mettriez cette parole sur papier ! Allons, allons, hâtez-vous de faire vos procès, et je les contrôlerai bien vite à coups de bâton [vous ne sortiez vous faites depuis longtemps à votre guise, mais avant que et signiez votre procès, je vous dis que vous suerez. LE SECOND MALTÔTIER

Voici des épées, mon homme, à votre service ; modérez vos paroles, ou vous ôtes malavisé, car je vois clair que tu n’es qu’un fripon, si tu dis un mot de plus, ceci est dans ton cœur. •

«

comme me le suggère M. Ernault : och prest dont oar o quis. L’imprimé porte : c’hui ra pell zo guiz. On trouve dans le DicUonnaire français-breton de Troude : per s zo « il y a lieu ». 886 me biquo ho calon C.

LOUIS

Tu as assez dit, jean foutre sans pitié, je me fous de toi et de ton épée, tiens donc, impertinent, à travers ta face de singe ; [menacer, je suis sûr que tu ne viendras plus dans cette maison me LE PREMIER MALTÔTIER essaie de s’en aller ; LOUIS le prend au collet et le renverse :

Mon âme ! polisson, il faut vous retirer, je tremperai votre écuellée de la même soupe, ensemble vous étiez venus dans l’espoir de m’épouvanter, et ensemble vous allez en enfer loger. Tenez, âme damnée, tâtez le poids de mon bâton, et si vous ne le trouvez pas lourd, je l’alourdirai encore ; tenez, deux scélérats, voilà contrôlé votre procès-verbal à vous, comme il était dû. Et vous entendez, hôtesse, voilà les fils de Marie Robin, et nous devrons tout de suite les enterrer dans le jardin ; fermez vos portes, que personne ne sache, car pour ces deux-ci, ils sont déjà morts et froids ; je vais les déshabiller pour savoir si je trouverai, de quoi sur eux pour faire leurs obits. Voici dix louis d’or et trois pièces de vingt réaux ; voyons l’autre encore s’il en aurait autant. Regarde le diable infernal, il n’a que dix sols, je n’aurai pas le prix de ma peine avec ce maudit homme. Hé bien donc, la veuve, je crois que vous êtes endormie ; apportez avec vous une bêche pour qu’ils soient enterrés. ■

LA VEUVE

Je ne suis pas en état de bouger, tant je suis saisie ; je vois assez maintenant, hélas, que je serai pendue. LOUIS

Ne dites mot de ceci, et consolez-vous ; il n’y a pas de témoins, et personne ne l’a vu : 900 a vo red deomp dioustu C. 910 digesed guenach A. ma voint rac-dal plantet C. Sur treusplanted, voir Emault, Glossaire *, p. 717.

les gens sages de tout temps disent qu’il vaut mieux tuer maltôtier et archer, que battre ou blesser ; on ne fait pas d’enquête sur cette sorte de fripons ; c’est tant pis pour eux s’ils se sont mis dedans. LA VEUVE

Mais comment oserai-je rester ici seule ? je suis une misérable, je le vois maintenant. LOUIS

Vous ne serez pas seule, car je coucherai avec vous, et ferai mon possible pour vous plaire mieux, et la nuit est longue, et d’ici demain, qu’il fera jour, je vous promets, veuve, que vous aurez oublié ceci ; vous avez perdu votre homme, et moi j’âi perdu ma femme, voici qui tombe juste, que nous nous trouvions. LA VEUVE

Je suis une femme honnête, monsieur, je le promets, et il me faut toujours tenir ma promesse ; jusqu’à ceci, je vous assure, je n’ai connu d’homme que mon vrai époux, et je ne le ferai jamais. LOUIS

Ne dites mot de ceci, veuve, je vous dis, car de gré ou par rigueur, je coucherai avec vous ; déshabillez-vous quand vous voudrez, et allez en votre lit, quand j’aurai serré ces deux-là je viendrai aussi ; et encore je vous dis qu’il faut être joyeuse ou demain au matin je vous rendrai malheureuse, car je n’entends pas que vous fassiez des grimaces ni que vous soyez désolée quand nous serions à jouer. LA VEUVE

Eh bien donc alors, monsieur, faites comme vous voulez ; je vais aller au lit ; je me trouve mal à l’aise ; 931 :942 sont très dilférents dans C. 936 Sur la mutation de grey voir Vallée, La langue bretonne en 40 leçons, 2e éd., p. 142. 938 Cf. 568. 14


Go O

si je puis me comporter selon votre volonté, je ne mérite aucune peine, Dieu sait la vérité ! LOUIS

Oui et faites attention à ne pas venir, quand je serai sorti, fermer les portes, pour que je n’entre pas, oii je mettrai le feu aux quatre coins de votre maison, car puisque je suis résolu, il faudra que je joue. Louis sort : scène. «

[LOUIS]

Je vais faire un tour pour récréer mon esprit ; malheur à qui se frotte aux filles ; on dépense avec elles et elles savent toutes voler, je voudrais une fois qu’elles se cassent toutes le cou, et je suis un homme sans intérêt du tout, tout ce que j’ai doit être dépensé, comme il est venu, il s’en va, je n’ai rien de plus à dire ; j’ai un bon métier tant qu’on me le laissera ; cependant je vais encore en observation ; s’il a bonne façon je toucherai son cœur ; . puisque j’ai tourné mal et que je me suis déclaré, lors même que je serais honnête homme, pour fripon je suis Sur ma jarnidieu, je vois un homme, . [connu. et je crois, moi, que c’est un marchand de toile ; cette sorte de gens le plus souvent ont de l’argent sur eux, et si cela est, je promets que j’en serai maître, il est arrivé tout près, voyons ce qu’il dira : Eh bien donc, camarade, s’il y a du feu, nous fumerons ; je suis sûr du tabac, mais je n’ai pas une goutte de feu ; si vous m’en donniez un peu, je vous serais obligé.

LE MARCHAND

Je n’ai jamais fumé, monsieur, ni ne ferai jamais, car la fumée de tabac me fait grand mal à la tête ; jusqu’à la prochaine, monsieur et excusez, si je pouvais vous aider, soyez sûr que je l’aurais fait. 960 Sur le commerce de la toile en Bretagne au XVIIIe siècle, voir F. Bourdais. Annales de Bretagne, t. XXII, p. 264-270. Cf. aussi v. 1283. 967 me gred na rin biquenn C.

LOUIS

Tout de même vous le pourriez assez, si vous en aviez le désir, tenez, flairez mon bâton, le voici sur votre museau, [coquin, tenez, tenez, aussitôt, vieux marchand de toile, livrez-moi votre argent, ou je vous casserai la tête. 4

LE MARCHAND

Tenez, tenez, coquin et à travers votre crâne vous n’aurez pas bon marché, scélérat, de ma peau ; puisque vous avez frappé sur moi, damel je me défendrai, et puisque vous avez désir de vous battre, ici nous nous battrons. LOUIS

Que je sois aveugle et muet ! ici je vais avoir mes maîtres ( ?) il est temps pour moi de chercher mes chiens, ou j’aurai des tenez, un coup de pistolet entre vos deux yeux ; [coups de bâton, car j’ai pour mon lot trois ou quatre coups de bâton, mille z’yeuxl je suis infamé par cet affronteur ; je perds un tas de sang et je ne vois goutte, sur ma jarnidieu ! je vais être aveugle, ma tête est fracassée par le voleur déloyal, mais peu importe, maintenant je vais le fouiller, et s’il a de l’argent, il paiera l’écot ; par la tête dieu, une boursée d’argent blancl cela suffit, à ce que je vois, pour me guérir la tête ; il sera temps pour moi d’emporter les deux paquets de toile, et il ira dans l’étang, puisqu’il est auprès. Va dedans sur ta tête, fils de putain effrontée ! si tu es sûr de la mangeaille, à boire ne te manquera pas ; ce client-là m’a tout à fait réveillé, sans mon pistolet, j’étais tué par lui. Je vais maintenant à la maison pour me reposer, j’ai été cherché de près, horriblement mon nez saigne ; j’ai grandement manqué en ne tirant pas sur lui, en restant à discourir j’ai été bien attrapé, 989 Sur ce juron et d’autres semblables, voir Ernault, Mélanges //. d’Arboi* de Jubainville, p. 68. 990 da voailad A. 996 pe ne vid ma A.

mais, sur ce que je vois, à chaque âge on apprend de la sagesse ; il doit être éveillé celui qui va en route. Scène ; tous sortent. Les diables entrent et disent : LE VIEUX SATAN

Eh bien donc, bons garçons, qu’y a-t-il de neuf ? j’ai désir que vous me contiez maintenant vos affaires, pour que j’entende de vous si vous êtes vigilants. Gontez-moi, Astaroth, c’est vous qui êtes le gars à l’argent. ASTAROTH

J’ai eu grand plaisir, quoique je sois malheureux ; j’ai ri tout mon content avec Louis Eunius ; il tue tout de suite, pour avoir de l’argent, il nous a envoyé cinq ou six cents, sans compter ce qui arrivera, car il ne cesse, nuit et jour, de violer des filles et de forcer les femmes ; mais aujourd’hui il a failli être tué ; un marchand de toile l’a estropié ; il y a eu bataille entre eux et un tas de coups de bâton ; Louis était bourdé, si je n’avais été là ; il ne pouvait plus se défendre si je ne l’avais amené à songer que d’un coup de pistolet il pourrait le tuer, et Louis promptement, sans délai d’un moment, entre les deux yeux l’a tiré ; après l’avoir déshabillé il l’a jeté dans l’étang, après, il est allé chez lui pour compter son argent ; il a tué le sergent, tué deux muletiers, tué deux marchands, tué deux maltôtiers, enlevé sa cousine de son couvent, et volé tout avec eux jusqu’à la vaisselle d’argent,

noté, le nomme prince de la Paresse (Revue celtique, t. XX, p. 243). Sur son rôle auprès de Louis Eunius, cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 165-166. Sur les expressions contenant potr, voir Hingant, Eléments de la grammaire bretonne, p. 213.

1011 sos a de A. 1017 me digas zonj dean C. 1023 laz an ra daou serjant, ouspenn daou louajer C. 1024 daou baour quez marc’hadour C. 1025 enleued e A. he gueniterv a denn C.

et a tout dépensé en offensant Dieu, et en forçant la religieuse à devenir putain ensuite ; il a forcé la veuve et un nombre de filles ; il a empoisonné Thôte et rhôtesse ; et je suis à le suivre par les hôtelleries, et tant qu’il ira dehors, il y aura quelque bataille, et il ne perd jamais, parce qu’il est sans conscience ; il est le plus puissant qui soit maintenant en France voici mes cahiers, venez les ratifier ; j’ai fait mon devoir ; vous le voyez maintenant. LE VIEUX SATAN

Excellent Astaroth, je suis content de votre tour ; je rapporterai au maître toutes vos vaillantises ; soyez toujours fidèle, traître et envieux, et tenez-vous toujours près de Louis Eunius. Et vous, maintenant Belzébuth, qui êtes capitaine, vous êtes depuis longtemps aussi parmi les Français ; contez-moi votre affaire, ici, en langage bref ; il me faudra rendre compte à notre grand maître Lucifer. BELZÉBUTH

Vous raconter d’un mot bref ? quand je serais d’ici à huit jours à conter les affaires des Français depuis que je suis avec eux, ce ne serait pas suffisant, il n’y en aurait pas le tiers ; j’ai supprimé net, cette fois-ci, leur loi ; les prêtres sont devenus si intéressés, ils sont maintenant pires que ne le sont les Juifs ; une partie d’entre eux tient ménage, a bétail et chevaux ; une autre partie met de l’argent dans le commerce du blé, que l’on emporte de France aux pays étrangers ; et le commun ne peut plus s’aider, christ. Vie de saint Laurent, Vie de saint Divi. Dans la Vie de saint Gwenolé, Satan l’institue prince de l’Envie (Revue celtique, t. XX, p. 242). Dans la Vie de saint Patrice, p. 110, v. 168, c’est Lucifer qui est qualifié de capitaine. 10-44 Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 110, v. 168. 1040 Cette critique du clergé a été remplacée dans le texte imprimé (p. 50) par un éloge des prêtres ; tout le discours de Belzébuth est d’ailleurs différent de celui-ci dans C. Voir Appendice III.

f

les vivres s’en vont du royaume, pour leur nourriture, maintenant, ils n’ont que des patates ; en désespoir sont surtout les paysans, en cherchant à amasser de l’argent, ils n’osent pas manger ieur les patates maintenant sont leurs meilleurs mets, [nourriture ; pour garder leur argent pour faire des congéments, ils veulent se manger l’un l’autre, ’ ils ne connaissent plus la loi du vrai Dieu. Les prêtres en France se sont abandonnés ; sans honte, ils vont maintenant cageoler des filles, le peuple est faible et vient à les imiter, c’est une horreur de se rendre compte des Français mainde l’une à l’autre, sans faire fonction, [tenant : comme les lapins dans Roc’h ar hon ; il ne va fille se marier qui ne soit engrossée ; tant riches que pauvres, toutes sont éprouvées, les danses, je vois, sont maintenant défendues, depuis que sont arrivés les piètres parisiens ; mais cela ne m’afïlige point, je n’ai rien perdu ; maintenant, ils vont en cachette dans ce trou-là, dans ce trou-ci ; aux danses il y avait autrefois une assemblée pour faire connaissance l’un avec l’autre, et maintenant, ils doivent faire leur cour en cachette, et avant que soit finie la causette, il y aura jeu et bagage ( ?) bâtards, bâtards et encore bâtardes, parmi les jeunes gens et entre les gens mariés. Tout ce qu’il y a de mauvais vices inventés en enfer on les exerce en France, à chaque heure et à chaque moment ; l’usure, la gourmandise, et la vanité, et le commerce infâme de lubricité, l’affront, la ruse et tous sont intéressés ; il n’y a ni poids, ni mesure, ni conscience au monde. Les riches sont voleurs et affronteurs, ils ne cherchent que le moyen de gruger les pauvres ;

1078 Cf. v. 1176. Sur le sens de stran a bagag, voir Introduction, Vocabulaire. 1083 an vsulleres A. 1085 Sur le sens de fincse, voir J. Loth, Chreslomalhie bretonne, p. 480, col. 2.

le pauvre, quand il trouve le moyen saisit avec ses deux mains ; voici là deux chiens à ronger l’os. Les jeunes partout, gonflés de vanité, il y a lieu de rire pour qui les considérerait ; les hommes, la tête tondue, qui portent moustaches ; sous leurs deux aisselles sont leurs culottes, faites à petit pont ; avec beaucoup d’insolence, à la manière des tyrans, ils sont maintenant en France ; les filles, en percale, leur tête couverte de dentelle, une colinette frisée à trois rangs à leur éou, leur jupe au milieu du dos, sur quatre crochets, et nombre d’artifices pour décider les hommes ; je ne puis plus inventer aucun vêtement nouveau, qui soit plus méprisable devant le visage de Dieu, que celui qui est’régnant dans le royaume de France ; je l’ai inventé avec toute sorte d’impudence. Nombre de canailles j’ai enrichi ; et beaucoup de gentilshommes sont pauvres comme des rats ; dans le proverbe il est dit : le pauvre, quand il s’enrichit, se gonfle en vanité et devient diable ; dans les hôtelleries, on voit les buveurs blasphémer Dieu, crier à tue-tête ; la femme, les enfants, à la maison, jeûnent sans nourriture, et le mari dépense ce qui est gagné ; quand son corps sera chargé de cidre ou d’hydromel, comme en désespoir ; il retournera à la maison, et si on lui dit quelque chose contre son sentiment, on l’entendra renoncer même à son baptême ; en Basse-Bretagne maintenant, parmi les Bretons, parmi tous leurs contes, ils demandent d’être damnés et disent parfaitement en présence de Dieu : que soit damné leur corps et aussi leur âmel Maintenant donc, vieux Satan, qu’est arrivé l’hiver, j’ai désir que vous me laissiez attiser le feu, et avec ma grande chaudière je fondrai de l’argent, pour mettre dans la bouche du fils de putain paysan. 1110 o criai a boes pen L. 1115 neuze instantamant L. enes e A. 1117 en Bretaing breman A. Cf. le discours de Fragan dans la Vie de saint Gwènolè> publiée par H. de la Villemarqué, Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. XV, p. 195-205.


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BALBÉRITH, diable :

Et moi donc, vieux Satan,, je le dis hardiment ; je n’ai rien fait pour l’année présente ; j’ai été en Amérique où j’ai perdu mon temps, à travers les déserts, parmi les sauvages, et j’ai vu clairement qu’il ne m’était pas possible de leur donner science ou sujet de pécher ; car ce sont des sauvages, sans aucune religion, ils n’ont aucun intérêt en aucune façon, ni aucune ambition l’un envers l’autre ; ils n’offensent pas Dieu ni le louent non plus ; ils ne vendent ni n’achètent, il n’y a ni foire, ni marché, ni filou, ni voleur, ni garçon ingénieux, on n’a cheval d’Hamon, ni jalousie de sa femme, il n’y a aucune promesse, puisqu’ils ne se marient pas, il n’y a ni cidre, ni vin, café, ni eau-de-vie, on ne connaît pas l’or ni non plus l’argent, on ne fait ni billet double, ni aucune sorte de ferme verbale, il n’y a ni juge de paix, ni procureur fiscal, ni contribution, ni dîme, ni prémices, ni tour, ni citadelle, ni chapelle, ni église, ni prêtre, ni clerc, ni recors, ni sergent, ’ roi, ni reine, ni aucun gouvernement, prison, ni basse-fosse, corps de garde, ni bordel ; et on ne voit en aucun lieu ni servante, ni serviteur ; là l’un est aussi savant que l’autre, le père ne se soucie pas de ses enfants, tous connaissent leur mère, on ne connaît pas le père, le premier qui arrive, avec celui-là ce sera fait ; il n’y a point de préférence dans le plaisir de Gupidon ; chacun est libre, à sa discrétion ; avec celle-ci, avec celle-là, le vieux avec la jeune, et tout pour rien, il n’y a pas de paiement. Et personne ne songe aujourd’hui à ce que sera demain, à la nuit, quand ils arrivent, chacun fait son choix, 1136 Sur diliquad, voir Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 1227. M. Even donne à ce mot le sens de « déluré ». 1137 On dit d’un homme jaloux de sa femme qu’il a le cheval d’Hamon. Voir Sauvé, Dictons et proverbes de la Basse-Bretagne (Revue celtique, t. II, p. 238). 1153 neus qued a breferans A.

le lendemain matin, tous ceux qui sont capables s’en vont une partie au rivage, et une partie ira au bois ; ours, loups, cochons sauvages, singes, lions, renards, lièvres, cancrelas et beaucoup de lapins, saumons de la mer, berniques et chevrettes, et pour fruits ils ont groseilles et castilles. Et moi, quand j’ai songé que je n’étais pas nécessaire je suis parti de là pour l’île de Gythère ; là, ils sacrifient à Vénus et à Cupidon, et chacun vit au désir de son cœur, et tout leur contentement est le plaisir de Vénus ; ils ne désirent rien, sinon de vivre heureux. Vénus est leur dieu, c’est à elle qu’ils sacrifient ; et ils n’ont aucune croyance dont il leur soit nécessaire de au milieu du sacrifice, quandléfeuestallumé, [rendrecompte ; les jeunes gens s’élancent au cou des filles, et là, tout de suite, sans sortir de leur place, leur plus grande modestie est jeu et bagage ( ?) voilà leur loi qui est décrétée : que chacun jouisse de son désir ce jour-là ; ce pays est à nous tout entier, dès qu’ils sont nés ; au plaisir de Vénus ils sont tous dédiés, et moi, quand j’ai vu cela, que je n’avais rien à faire, je suis parti joyeux de l’île de Gythère, pour rendre compte devant vous, père Satan ; quand vous voudrez commander, je m’en irai de nouveau. En Espagne je désire aller en mission pour instruire le procès de l’inquisition ; le peuple est résolu à leur ôter leurs droits anciens, à cause de leurs femmes, car ce sera dommage pour nous, je vous dis, père Satan, si cela est supprimé parmi les prêtres d’Espagne. LE VIEUX SATAN

Gela suffît, bons garçons ; Lucifer sera content ; et moi je le suis aussi, quand je vous vois dans votre devoir ; de Berith sur l’Irlande et la Grande-Bretagne. Voir Appendice IV. 1191 Lucifer est le chef des diables dans Saint Patrice. On le trouve aussi dans Saint Gwenolé, Saint Divi. C’est l’empereur des diables dans le Grand Grimoire. 15

soyez exacts toujours, fiers et orgueilleux, par la lubricité rendez-les malheureux ; car c’est le péché qui déplaît à Dieu ; quand ils s’y adonnent, il les abandonne ; et alors vous avez prise, et tenez-les ferme, que je voie par bandes les gens venir en enfer, les gens avaricieux, tenez bien ceux-là, car celui-là est sûrement un ennemi de Dieu ; car celui-là ne veut de bien à personne, sur ce que je vois, car il n’aime pas Dieu, ni son prochain ; et sur la vanité, soyez toujours vigilant, car celui-là est un homme qui est suffisant ; celui-là ne connaît ni diable, ni Dieu, cette sorte est à nous, même quand ils sont encore en vie ; le vice d’impureté est pour nous le plus avantageux, parce que ils sont deux à le commettre, tous les autres péchés sont à chacun, celui-ci est à deux et souvent à trois, les deux qui le font, et celui qui est fait participent au même péché ; enfin soyez envieux, je le recommande, pour que nous ayons le grand lot le jour du Jugement dernier ; il y a encore certaines gens qui ne croient pas qu’il y a un Dieu ; tenez bien par dessus toute chose à cette sorte de clients-là ; nous savons qu’il y a un Dieu, pour notre malheur, hélas, et ils le sauront aussi à leur désavantage ; nous ne l’avions renié qu’une fois sans plus, et nous sommes malheureusement damnés à jamais ; et je ne désire pas ni n’espère que cette sorte puisse un jour être sauvée. Scène ; tous sortent. LOUIS EUNIÜS

A la fin, à la fin, je suis arrivé à être un fini gars ; je sens que je suis plus fort que n’est un cheval ; j’avais été meurtri durement, la semaine passée, savoir comment cela ira, dans le temps à venir ; maintenant je ne crains plus cette sorte de rencontres-là, avec un mot ou deux, je les ferai coucher ; 1228 me rai da dud gourve C.

il me faut être voleur ou mourir de misère, et aller chercher ma nourriture, cela sûrement n’est pas car je viens d’une grande famille, tout de même, [propre, je suis gentilhomme et filleul du roi ; par ma fragilité j’ai dissipé mon bien, à conduire des putains nuit et jour boire, et maintenant je le ferai encore, mais ce sera à leurs frais, et celle qui viendra à me refuser aura du bâton ; autrefois elles me volaient toutes quand j’étais devenu ivre, et je ferai la même chose, à mesure que je les rencontrerai ; tantôt j’irai au bordel, quand mon souper sera mangé, et je demanderai de l’argent, ou je mettrai le feu, pour brûler les putains, et leur appartement, si elles ne veulent pas me donner chacune un peu d’argent. Peu m’importe maintenant quelle sorte de crime faire ; je suis réputé, connu par tous, comme un voleur, et Dieu ne se soucie plus de moi, j’en suis sûr ; il faudra continuer jusqu’à ce que soit pleine la mesure. Je vais aller sur le grand chemin pour faire une promenade, savoir si c’est lièvre ou lapin qui sera attrapé aujourd’hui, j’ai goût et besoin, ma monnaie est achevée, je vais partir, il ne faut pas être poltron. Une femme bien mise passe ; LOUIS va la trouver ;

Salut à vous, marraine, au nom de Dieu, dites-moi si vous auriez ici deux écus de monnaie ; les pauvres, à mesure que je vais, viennent m’importuner, je n’ai pas sur moi deux liards en monnaie. LA FEMME

Oui-dà, sûrement, monsieur, pour vous obliger ; car j’ai avec moi beaucoup de monnaie maintenant, et quand il vous faudrait trouver la monnaie de dix écus, je vous la trouverai sur le champ, et je ne serai pas gênée, montrez-moi votre pièce, pour que je la voie, car, si elle n’est pas bonne, je ne ferai pas de monnaie. 1248 da houd pe A. 1252 monei deus a daou scoët C. 1259 discuezil din C.

LOUIS

Que je sois aveugle et muet, vous êtes bien défiante ; donnez ici votre argent, ou vous aurez sur le nez ; oui, mettez ici monnaie et aussi argent blanc, et faites promptement, ou je vous casserai la tête. LA FEMME

Comment, impertinent ? je n’aurais jamais cru que des gens de votre sorte soient maintenant des voleurs ; vous n’aurez pas mon argent, je vous le promets, ou l’un de nous perdra la vie. LOUIS la renverse et prend son argent :

A moi est ce qui est à vous, votre honneur, votre argent, et je ferai à ma guise, puisque vous êtes si suffisante ; allons, déballez votre étal ; ou je vais le faire, et nous ferons une danse, sans chanter, ni sonneur. LA FEMME tire son couteau :

Avant que s’en aille mon honneur, tu perdras la vie ; je planterai mon couteau, scélérat, dans ton âme. LOUIS tire son épée :

Que je sois misérable 1 salope, effrontée, avec le diable je crois que vous avez désir d’aller ; mon épée est un peu plus longue que votre couteau, tenez donc, infâme ; c’est là que vous devez mourir ; si vous aviez consenti et que vous fussiez plus traitable, vous n’auriez pas affaire, ma foi, à un ingrat ; mais elle est déjà morte et froide, sur ce que je vois, de l’autre côté de ce fossé, il me faut l’enterrer. Maintenant il la jette dans le champ ; un paysan vient par le chemin. LOUIS parle :

Arrêtez ici promptement, l’homme au pourpoint de toile, si tu avances d’un pas, je te casserai la tête ; 1283 ase prend A. chomm aze diustu C.

retourne sur tes pas, car tu ne passeras pas. Quoi, couleur de potence, vous avancez toujours ! Louis lui donne un coup de bâton par la tête. LE PAYSAN

Tu as manqué, mon ami, mais je te démanquerai, je sais manier un bois, tenez et vous en aurez encore, tenez, tenez, voleur ; vous avez tué cette femme-là, mais vous êtes sür le point d’être tué aussi. LOUIS renverse le paysan d’un coup de pistolet et dit :

Tu es assez bon, paysan, avec un morceau de bois, mais maintenant j’ai idée que tu te noieras dans ton sang. «

LE PAYSAN en mourant dit :

O malheur achevé, ô fortune détestable, je perds ma vie du fait d’un misérable, si ce n’étaient tes armes, homme méchant et maudit, tu ne m’aurais pas, je te dis, aussi vite tué. Achève, homme sans âme, achève ta cruauté ; tôt ou tard, tu seras puni. LOUIS

Trop de langue, fils de putain, vous voulez barbouiller ; tenez, un coup d’épée pour vous dépêcher ; ce n’est pas pour discourir que je suis venu jusqu’ici ; allez dans le champ sur la tête, il est temps que je parte. Je n’ai plus de chance ; j’ai toujours des coups de bâton, j’attraperai mon mal, voilà qui est sûr, il sera nécessaire de quitter le pays, car je suis bien connu, et tous sont effrayés de ma méchanceté. Vers l’Allemagne, il vaut mieux que j’aille ; là, au moins, je ne suis pas connu ; prendre un cheval de louage et aller nuit et jour, je ne serais pas découvert, ni vu par personne. Une jeune fille vient par le chemin. 1307 eo poend bras din C. 1310 vit na vin disculiet C.


Go O

LOUIS continue :

il est arrivé une jeune fille, qui est très belle, il faudra que je là salue le plus proprement qu’il se pourra. Dites-moi, jeune fille, oui, s’il vous plaît, combien y a-t-il d’ici à la ville, car je n’y ai jamais été. LA FILLE

Vous avez encore trois lieues, monsieur, d’ici à la ville de Vitré, en deux heures de marche, monsieur, vous les ferez, car vous marchez bien, et le chemin est uni, et d’ici deux heures, vous y serez sûrement arrivé. LOUIS

Or çà donc, jeune fille, arrêtez un peu, vous avez charmé mon cœur par votre patience, vos paroles gracieuses et votre air me plaisent, si vous aviez la bonté de venir me contenter, je suis content de vous payer de votre humilité, je suis un voyageur qui a nécessité. LA JEUNE FILLE

Vous vous trompez avec moi, car je suis mariée, et n’ai garde, monsieur, d’offenser mon époux, et ma religion me le défend, de déshonorer mon homme et d’offenser Dieu. LOUIS

Quand votre gars serait cornard, je le suis bien, moi aussi ; allons, sans compliment, venez ici de côté, car il faut que cela soit fait, contente ou non, cela ne durera pas longtemps, endurez qu’on vous aime. LA FILLE

Force, force, force à mon honneur ! serait-il possible tout de par une fâcheuse rencontre de perdre ma virginité ! [même, LOUIS

Oh moi, je vous enlèverai, criez comme vous voudrez, ici vous viendrez avec moi faire un tour dans la lande, 1322 ma pe A.

vous n’êtes pas grand chose entre mes mains à moi ; il vaut mieux pour vous être traitable, ou vous perdrez votre vie. Louis l’enlève dans la lande. Scène ; tous sortent. LE GÉNÉRAL DE FRANCE ET DEUX SERGENTS ; UN TAMBOUR

LE GÉNÉRAL parle :

Or çà, officiers, il vous faudra aller maintenant par le royaume, pour avertir tous ceux qui sont capables de porter les armes de venir avec diligence ; il est besoin de troupes ; je donnerai un demi-cent d’écus à ceux qui seront capables, qui viendront me trouver de bonne volonté, hommes forts et courageux, et capables de marcher, nous en avons besoin maintenant pour aller à barmée ; les Anglais sont descendus à Dunkerque en Flandre, avec soixante mille hommes, qui sont venus exprès, pour ravager le pays et nous supprimer net, et il est nécessaire de trouver des hommes pour se mettre en Ainsi donc, jeunes gens, vous tous qui entendez, [défense. aussi bien que les gens mariés qui ont désir d’aller, venez à l’hôtellerie, et je donnerai à dîner, et à chacun un demi-cent d’écus et aussitôt, départ ; les gens nouvellement mariés qui viendront à l’armée, leurs femmes, leurs enfants, seront pensionnés, et quand ils auront été trois ans, ils seront congédiés, car cette affaire-ci, sûrement, ne durera pas longtemps ; je vais venir dîner, après je partirai, venez donc, bons garçons, pour que je vous engage. LOUIS

Je vais avec vous tout de suite, général puissant ; je partirai aussitôt après le paiement, mais avant d’écrire rien, je dois être payé, un demi-cent d’écus tout de suite, comme vous l’avez dit. Sans-Souci, vont trouver le capitaine pour s’engager. Lorsque Louis arrive, il y a déjà cinquante mille hommes d’enrôlés. Voir aussi P Q. 1346 ar sort-ze zo ezom breman barz an arme C. 1354 hac ar somm zo laret quend evit partian C.

1364 anter cand scoed em dorn C.

LE GÉNÉRAL

Vous les aurez, mon ami ; tenez un demi-cent d’écus, et si vous êtes un homme vaillant comme vous dites, vous aurez de l’avancement, le délai ne sera pas long. Dites-moi votre nom, votre pays, et votre contrée, et je vais écrire votre engagement, et dites-moi aussi dans quel régiment vous avez désir d’aller, et je l’écrirai, et vous partirez alors demain matin.’ LOUIS

Ecrivez là que le sieur Lamontagne promet à lui seul de repousser l’armée, moyennant que vous donnerêz deux hommes pour aller avec moi pour pouvoir après vous donner témoignage ; donnez-moi un bon cheval et des armes comme il sera dû, c’est dans les hussards Ghamboran que je désire aller ; car je suis gentilhomme et homme de qualité, et marquez-moi lieutenant, avant que j’aille à l’armée ; je suis filleul du roi, entendez, général, je ferai ce que je dis, car je suis un gars à part. %

LE GÉNÉRAL

L’engagement est fait ; signez, monsieur Lamontagne, pour que vous partiez tout de suite à l’armée. LAMONTAGNE signe et ensuite dit :

Tenez, voilà mon signe, général ; mais il y a encore à dire que je songe à avoir de l’argent de route ; j’ai eu un demi-cent d’écus pour mon engagement, il m’en faut autant pour aller au régiment. LE GÉNÉRAL

Vous vous trompez, monsieur, sauf compliment, car je vous ai payé tout à l’heure à l’instant, 1377 1378 1381 1389

march mad A. var guein eur marc’h capapl armet vel m’ho dleet C. en ousarded A. ebars an housarded C. me sou filor A. a red, otro voair A.

un demi-cent d’écus sans doute, selon l’ordre du roi, et il n’est dû rien de plus, monsieur Lamontagne. LAMONTAGNE prend le général au collet :

Ecoutez, général, je ne suis pas un phraseur ; donnez-moi un demi-cent d’écus, ou je vais les prendre, et vous saurez bien vite que je ne suis pas un poltron, [cœur, s’il m’est nécessaire de me fâcher, vous aurez regret en votre LE GÉNÉRAL

Je vous ai donné, selon l’ordre du roi, et s’il me faut donner encore, ce sera de ma bourse que c’est, tenez un autre demi-cent, puisqu’il vous le faut, mais maintenant ce sera tout de suite que vous partirez. LAMONTAGNE «

Maintenant, j’irai joyeux jouer mon serpent, et je massacrerai tout pour avoir de l’argent ; je ferai mon mauvais garnement quand j’arriverai à l’armée, et ne respecterai homme, ni femme, ni enfant ; qui résistera, je mettrai le feu ; je hacherai en pièces le grand comme le petit ; je désirais, il y a longtemps, avoir permission de faire un massacre au désir de mon cœur. Après, je déclarerai guerre aux diables ; j’irai les défier même dans leurs enfers ; et quand j’aurai repoussé les Anglais de Flandre, je formerai, à mon compte,- rapidement une compagnie ; je briserai les portes sur les prisonniers, et je déchaînerai tous les galériens, les gars aux actes faux, les déplanteurs de croix, et les fripons qui ont fait du feu avec les saints et les autels, et je serai capitaine sur ces fripons, pour qu’il soit parlé de moi pendant l’éternité. N’importe quel bout de mon bâton je mettrai dans la fange, je suis fait larron, et voleur, et impertinent, 1416 gant ar zent coz C. 1419-1420 manquent dans C. 1420 inpertinand ; ce mot avait évidemment, pour l’auteur breton, un sens beaucoup plus fort qu’en français. Le Dictionnaire de Trévoux l’explique par « sot, ridicule ». 16


Go O

voilà maintenant quarante ans depuis que j’ai commencé à voler, à tuer, à violer les filles, et je n’aurai pas de fin tant que j’aurai pouvoir ; à mesure que je rencontrerai des gens je leur casserai le cou. Je vais partir pour aller en Flandre, pour que je sois incorporé dans une compagnie ; dans les hussards Chamboran, j’ai demandé à entrer ; j’aimerais à être maintenant parmi l’armée des Anglais. Adieu à vous, général, je vais m’en ciller, quand vous arriverez en Flandre, demandez de mes nouvelles. LE GÉNÉRAL

Jusqu’à la prochaine, monsieur Lamontagne ; j’irai bientôt aussi, je ne serai pas longtemps après vous. Scène ; tous sortent. Monsieur Lamontagne par un côté, le capitaine par un autre côté. LAMONTAGNE parle :

Salut à vous, capitaine, de la part du roi, de l’Allemagne je suis venu vers vous ; par ordre du général je suis venu vous trouver ; dans votre compagnie je demande à être reçu, je suis fait lieutenant sur mon engagement, car je suis, monsieur, de gens puissants, je suis gentilhomme noble et homme de qualité, et en plus de cela je suis encore filleul du roi ; voici mon engagement, capitaine, lisez-le, et comprenez bien ce qui y est écrit. LE CAPITAINE lit les papiers.

Je suis grandement charmé, sûrement, monsieur Lamontagne, vous promettez à vous seul de repousser l’armée, je serai content, monsieur, si vous faites ce que vous avez mais il y a terriblement danger ; vous vous exposez ; [promis ; %

Irlande. L’empereur sommé de faire sa soumission refuse ; à la seconde décharge des canons français, il a la cuisse emportée par un boulet. Son armée demande quartier ; Louis ne consent pas à les épargner et les extermine tous. Voir aussi P Q. 1430 e tesiran boud A. 1444 c’hui bromet oc’h unan rei an tec’h d’an arme C. mes prometed o heus A.

entrez donc, monsieur, vous rafraîchir, et ensuite, nous irons ensemble souper. LAMONTAGNE

Tout à l’heure, capitaine ; je me suis rafraîchi ; je vais faire un tour, avant qu’il soit nuit, pour les voir, afin que je comprenne mon affaire et que je songe bien par quel côté je commencerai l’attaque ; cette nuit ce sera fait, il n’y a pas d’appel, ils feront les poltrons, ou il leur faut mourir, maintenant, je vais retourner, quand j’aurai fait mon tour, et alors, capitaine, ensemble nous souperons. Lamontagne part ; le capitaine et deux sergents. LE CAPITAINE parle :

Voilà un homme, entendez, Messieurs, qui promet, lui seul, de repousser l’armée, moyennant qu’il ait deux hommes à aller avec lui, non pas pour combattre, mais pour ne pas le perdre de vue, pour porter témoignage et prouver la vérité, et ce sera vous deux qui irez avec monsieur Lamontagne ; vous ne risquez rien ; si vous voyez qu’il perd, retournez promptement et jouez des bottes. LE PREMIER SERGENT

Je suis étonné, capitaine, je ne puis croire cela, que ce soit un homme seul qui repousse l’armée ; quand ce serait tout ce qu’il y a de diables dans lés enfers, jamais il rie le ferait, je vous dis, monsieur. LE SECOND SERGENT

Un homme lâche, lui seul, met une armée en déroute, et un homme courageux fait tout gagner ; vous ne savez pas, monsieur, ce que sait cet homme ; nous sommes tous ignorants de sa capacité ; j’irai avec lui partout, sans aucune difficulté, j’ai entendu, il y a longtemps, parler de cet homme-là. 1463 1467 1468 1474

risqued netra A. Cf. La Vie de saint Patrice, p. 162, v. 779 ; et ci-dessous v. 1531. a boan a ratent-ze C. coms deus A.

LE CAPITAINE

Le voilà arrivé, quand nous étions à parler de lui ; vous arrivez bien, monsieur, car c’est le moment de souper. LAMONTAGNE descend et parle :

Allons donc souper, salut à vous, messieurs, j’ai été faire mon tour, en voyant l’armée, et maintenant, après souper, vous me donnerez deux hommes ; ils n’auront rien à faire que de ne pas me perdre de vue. LE CAPITAINE

Ces deux sergents-ci, monsieur, iront vous accompagner, et observeront la marche de notre ennemi, pour que nous sachions quelle position ou de quel côté camperont les Anglais. LAMONTAGNE

J’en camperai beaucoup, n’ayez doute, capitaine, la plus grande partie d’entre eux se brûleront la peau, je suis un instrument qui est sans conscience, comme il n’y en a pas beaucoup dans le royaume de France, je sais manœuvrer ; quand je me mettrai en train, je mettrai en pièces tout ce qui sera dans mon chemin, et vous, les deux sergents, je vous avertis aussi, quand je viendrai vers vous, criez : courage Lamontagnel pour que je vous reconnaisse, car moi, quand je suis fâché, je 9uis pire qu’un chien enragé ; je ne connais personne au [monde. LE PREMIER SERGENT

Nous irons à portée de vue, et vous suivrons toujours, et si vous venez à être fatigué, monsieur, venez nous trouver et nous vous secourrons, du mieux possible, . et avant que vous ne reveniez, nous ne quitterons pas. 1494 Le breton dit, par euphémisme, « un chien malade » cf. boed nr vud 168. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 221, note 5. 1495 nin ielo var hed guel C.

LAMONTAGNE »

Allons, puisque nous avons soupé, il est temps que nous je vais toujours devant, etvous, allez tout doucement, [partions ; j’ai hâte de voir à quelle fin aboutira le tour, la victoire sera sûrement, ou autrement la mort. Scène ; tous sortent. LE CAPITAINE seul.

J’ai crainte maintenant, quand je songe en mon esprit que je ne devrais pas tout de même avoir permis à trois hommes courageux d’aller s’exposer à être massacrés parmi leur ennemi ; cinquante mille hommes nous sommes ici dans l’armée, et encore nous n’osons pas aller les attaquer, et voilà un homme qui aurait le courage d’aller les attaquer, nous sommes donc des lâchesl Il expose sa vie pour le bien du pays, et s’il manque son coup, il perdra sa vie, mais c’est un homme qui ne fait cas de vivre ou mourir, de tels gens le plus souvent ont de la chance à la guerre ; je prie de cœur le Dieu des armées de venir l’assister dans ses entreprises, car voici une affaire de conséquence, pour que règne la paix, l’union, dans le royaume de France. LE PREMIER SERGENT entre :

Salut à vous, capitaine, réjouissez-vous ; les Anglais sont partis ; ceux qui sont restés, la plus grande partie d’entre eux est brûlée et tuée ; Lamontagne est maître de ses ennemis. Il a jeté le feu d’artifice dans les tentes ; ils ont été épouvantés, en voyant les flammes ; le feu en un instant de l’une allait à l’autre, et lui, tranchait tout, sans respect pour personne, ses coups de pistolet semblaient des coups de canon ; ils sont tous en déroute, ils sont à l’abandon. 1507 rail ez omp C. 1511 anfln hed e desposin e vue A. 1521 pa lac’het L. 1527.a seblante tenou A.

Lamontagne parmi eux comme un tonnerre, de tuer, trancher, jeter feu et flammes ; [en une bande). tout ce qu’il y a de diables, je crois, en enfer (quand ils seraient ne sont pas suffisants pour s’opposer à son passage ; mon cœur tremble, j’ai tout de même du plaisir ; j’ai peine à croire que c’est un mortel qu’il est. Ils ont pris la route d’Ypres et la route de Fumes, ils sont tous en déroute et tous seront tués ; mon camarade m’a fait m’en aller pour vous avertir et vous donner des nouvelles ; maintenant, je vais retourner, de peur qu’il ne se fâche, car celui-là est un homme, maintenant je le crois. LE CAPITAINE

Je vous suis grandement obligé de ce que vous m’avez averti ; grande était mon inquiétude, depuis que vous étiez parti, mais je crois que je les entends, ils arrivent tous deux. Nous étions à parler de vous, je vous salue, monsieur. LAMONTAGNE

J’ai fatigue et soif, mais pourtant je vous salue, et dépêchez-vous vite que j’aie du vin à boire, car depuis hier soir j’ai travaillé, et culbuté bon nombre de vos ennemis, j’avais, il y a longtemps, le désir d’avoir des gens à tuer, mais cette nuit j’en ai eu, je suis content celte fois. LE CAPITAINE

Tenez donc, monsieur, buvez ce que vous voudrez, vous êtes fatigué, je crois, mais le vin ne manquera pas, et vin, et eau-de-vie, et tout ce qui est dans ma maison, ne sont pas suffisants pour vous récompenser. LAMONTAGNE

Puisque j’ai biï maintenant, et apaisé ma soif, nous causerons l’un après l’autre, capitaine, si vous voulez. 1550 henoas meus gret ma goelc’h contand hon ar vech-man C. N’était cette variante on pourrait tenter d’expliquer envoais par anvoaisan 2913. 1553 quen neubeud guin ardant C. • ’ 1556 e cosefomb A.

J’ai conduit l’Anglais en Mésopotamie : que le diable le plaque ! pour que je ne le voie plus jamais, j’étais hors d’haleine, j’ai eu de la peine avec eux, mais le troisième lot a perdu la vie, et les autres lots ont été dispersés ; beaucoup se cassaient le cou dans leur désir de courir ; il leur était avis qu’étaient arrivées les armées de Lucifer et Satan et tous leurs diables ; quand ils ont vu le feu d’artifice rouler de tout côté, ils ont commencé à crier pire que des bêtes sauvages ; et moi comme un barbier, par le milieu des tentes, avec un rasoir de cinq pieds, je leur faisais la barbe ; le général Gobourg, j’ai aussi tué, et comme je revenais, je l’ai déshabillé, j’ai trouvé sur lui, en or et en argent, à peu près, je crois, quelque six ou sept cents ; et maintenant, quand il fera jour, monsieur, faites vos troupes aller par tout le combat, pour ramasser les armes ; et j’irai fouiller parmi les tués ; lê prix d’une barrique de vin j’ai idée de trouver. Voici vos deux sergents, entendez d’eux, monsieur, ce qu’ils ont vu, car ce sont mes témoins ; j’ai fait maintenant ce que j’avais promis au général de France, quand je m’étais engagé, je ne lui dois rien, pas plus qu’au roi ; j’ai fait mon devoir et eux qu’ils le fassent aussi.

LE CAPITAINE

Plus que votre devoir, monsieur Lamontagne, puisque c’est vous seul qui détruisez l’armée ; la chose que vous avez faite mérite récompense ; quand arriveront les nouvelles de par le roi de France, et elles arriveront d’ici peu de temps ; car avant qu’il soit nuit aujourd’hui, j’écrirai en votre faveur ; vous êtes lieutenant, monsieur, et vous me succéderez aussitôt que je mourrai, ou quand j’aurai ma retraite. Maintenant, vous vous reposerez dans votre prospérité ; vous ne ferez aucun service, sinon de votre propre volonté, 1573 de quabiten groed A. 1581 na dar roue yve A. 1582 hi die ober ive C.

au lieu qu’il vous plaira vous prendrez votre pension ; vivez désormais en paix et à votre discrétion ; allez vous reposer, monsieur, et changer d’habits ils ressemblent à ceux d’un boucher, ils dégoûtent de sang. LE SECOND SERGENT

Oui, il peut se reposer, je vous le promets, voilà trente ans que je suis au service du roi, et je n’avais jamais vu personne s’exercer comme faisait monsieur, parmi l’ennemi, abandon et cruauté ; je ne saurais expliquer, ni vous donner à entendre l’aspect de ce combat, le feu et la fumée, les coups de pistolet, et les gens qu’il hachait à coups de sabre, les Anglais criant : ô Luther et Calvin ! Parmi mon inquiétude, j’avais envie de rire, mais j’avais grande crainte que la victoire ne tournât à mettre monsieur à tomber à terre, mais, par la grâce de Dieu, cela n’est pas arrivé, par bonheur et chance, il a eu la victoire. Scène ; tous sortent. LAMONTAGNE seul.

Jean l’Anglais aura honte, quand il apprendra l’affaire, et quand il viendra à penser à la bataille de Lamontagne ; il perdra la tête ou désespérera net, quand il apprendra qu’un seul homme les a fait courir ; et pour moi, c’est un beau coup d’avoir attrapé de l’argent, sans cela, j’étais un fripon innocent, d’aller m’exposer pour de tels poltrons ; regarde la belle récompense qui m’est promise ! quand sera mort le vieux garnement, je serai fait capitaine, il mourra donc bientôt ou je lui casserai la tête ; celui-ci sera payé trois écus par jour, moi, je n’en aurai qu’un ! je ne permettrai pas cela ; j’abrégerai ses jours à ce vieux bordelier ; je l’enverrai à l’autre monde, prendre son repos ; il va aller souper à une maison de campagne, à un quart de lieue, je vais aller tantôt de nuit à sa rencontre ; 1623 Dans M P, la personne que Louis va attendre sur le rivage de la mer n’est pas désignée autrement. 1626 me ha en dro evit diarben anean C. da arribrouc anehan L. Cf. cidessous 1635.

et je le serrerai bien dans un endroit que personne ne saura ; d’ici huit jours, ici, je serai capitaine ; il faudrait que je sois pire poltron que ne fut Judas, pour laisser le vieux fripon boire du vin à ma place ; j’ai eu toute la peine et lui toute la récompense ; et encore entendre l’imbécile crier : Vive le roi de France 1 Ce n’est pas le roi de France, fils de putain vaurienne, qui a été cette nuit changer la place de l’armée. Je vais faire un tour à sa rencontre ; j’ai fait son procès, il ne manque que de le signer, pour tuer un vieux garnement, poussif, pourri, pulmonique, j’aurai aussitôt les trois écus de dessus sa chair. Lamontagne fait un tour et se pose à un endroit où passe le capitaine, mais pendant qu’il passe, un papier vient avec le vent dans le visage de Lamon tagne qui se met en colère et dit :

La foudre, le tonnerre et les éclairs dans l’air 1 quel mort-de-dieu m’aveugle avec un papier ? sorciers infernaux, quel est ce papier-ci ? tonnerre de bagasse ! je vais être aveuglé par lui ; c’est comme une lettre dépliée ; savoir ce qu’il signifie ; il monte, il descend, il saute avec moi, il est nécessaire que je l’attrape, que je voie ce que c’est ; tiens ! comme c’est peu de chose, il est attrapé tout de même ; c’est comme une lettre, il est nécessaire de le déplier, pour savoir s’il n’y a rien d’écrit dedans. Il déplie la lettre, en sorte qu’il y trouve le portrait d’un mort et écrit auprès : Je suis Louis Eunius, en sorte qu’il se trouve confus, qu’il voit près de lui une croix, une chandelle allumée de chaque côté d’elle et écrit sur le socle de la croix : ici a été assassiné un homme, priez Dieu pour le repos de son âme. Alors Louis, le sang saisi, se trouve mal en sorte qu’il s’appuie au fossé et il a peine à rester debout quand il voit son papier et la croix. LOUIS parle :

Grand Dieu immortel, qu’est-ce que tout cela ? c’en est fait de moi, donc, sur ce que je vois, deux tentatives infructueuses. Puis il rentre chez lui tout triste et tout pensif. Voir aussi P Q. 1640 Sur petore moul da g eue, voir Introduction, Vocabulaire. 1646 dister tra C. 1648 b aluin A. Le sens de confus est très fort en breton. Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 252. 17

c’est un avertissement, hélas ; il est nécessaire de mourir ! et hélas, malheureusement, mourir avec mon péché ; non pas avec le péché, mais nombre de crimes ; je fais horreur au monde, à la terre, aux cieux. LOUIS continue :

Jésus, mon rédempteur, serait-il possible, tout de même, que je sois un homme perdu pendant l’éternité ! à beaucoup de méchants vous avez pardonné, qui faisaient pénitence, avant qu’ils ne fussent morts. O Reine du ciel, Marie, mère pitoyable, regardez, s’il vous plaît, un homme si malheureux ; je suis le plus misérable qui soit jamais né, secourez-moi, Dame, ou je serai, hélas, perdu. O monsieur saint Michel, ô anges bénits ! depuis que je suis capable de pécher, je vous ai quittés, je n’ai jamais obéi à votre inspiration, et ce sera le sujet de ma perdition ; et inspirez-moi encore, de par Dieu, un moyen quelconque, sûr, de sauver mon âme ; mes crimes sont énormes et affreux à comprendre, mais je les effacerai tous par une vraie pénitence ; je châtierai mon corps avec toute sorte de cruauté, sans me plaindre de la peine à cause de mon péché, je confesserai mon crime sans honte à un confesseur ; si c’est de votre bonté, mon Dieu, de me secourir, accordez-moi la grâce, mon souverain seigneur, que je reste encore dans le monde pour faire pénitence, et ouvrez mon esprit et mon entendement, " car je ne chercherai plus que peine et tourment ; j’ai honte quand je songe à mes crimes si impies et que j’ai mis beaucoup de gens encore, Dieu, à vous offenser ; je demande pardon pour moi et pour eux, dans le chemin de la pénitence je vais maintenant mon Dieu. Scène ; ils sortent.

1662 1664 1665 1667 1674

man nem sicoured jtron alas me vou colled A. ma on quapab da beliin A. sented ous o A. laquet c’hoas em speret C. mar pe ar vadelez ma C’hrouer, d’am sicour C.

«

PROLOGUE DE LA SECONDE JOURNÉE Compagnie chrétienne, approchez-vous pour entendre et écoutez bien ce qui va être dit, car tous nous avons besoin d’instruction, si nous avons désir un jour d’obtenir pardon. Car tous nous sommes pécheurs, aussi bien qu’était celui-ci, et moi-même, hélas pour moi, je suis pire que lui ; je l’ai imité, hélas, dans son péché ; mais dans sa pénitence, hélas pour moi, je ne l’ai pas fait, nous avons eu un grand plaisir et tous nous avons ri, quand nous voyions Louis Eunius commettre le péché ; le péché nous plaît, parce que nous sommes pécheurs ; tâchons de l’imiter, maintenant, dans sa pénitence. Saint Augustin nous dit, et le Roi-prophète : voyez ma pénitence si vous voyez mon péché ; mais, hélas, malheureux, je ne suis pas comme cela, le péché des autres que je veux voir, hélas, cache les miens ; quand nous voyons punir quelque criminel, nous disons d’une seule voix : c’est bien fait ; [esprit, nous sommes prêts à le condamner, sans songer en notre que nous sommes aussi capables que lui de faire le même forfait ; nombre de nous disent que c’est rendre justice, que la mort est due pour punir le vice ; mais si nous étions tous dépêchés depuis que nous l’avons il y aurait moins de gens qu’il n’y en a dans le monde ; [mérité, comprenons, mes frères, que si nous avions vu pendre Louis Eunius, depuis qu’il l’a mérité, nous ne saurions l’appeler qu’un gibier de potence ; et le voici maintenant en exemple aux pécheurs ; maintenant, il sera une école pour l’un et pour l’autre, que l’on ne doit pas désespérer de la miséricorde de Dieu. Saint Guillaume, comte de Poitou, s’il avait été puni, dès qu’il fut criminel et qu’il eut mérité, «

1702 Sur torfed, voir E. Ernault, Annales de Bretagne, t. XIX, p. 558. 1705 mon eur A. 1711 Guillaume, comte de Poitou, est le héros d’un mystère breton. Voir A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 142-147. 317.

comme saint Augustin qui mena une vie pendant trente-cinq ans dans l’impureté, à la fin se repentit et fit pénitence, et il est l’avocat des pécheurs ; Théophile criminel aussi bien que Souache avait, sous son signe, renoncé à Dieu, s’était débaptisé, avait renoncé à Jésus, et par la pénitence les voilà heureux. Dieu est si charitable à l’endroit de ses enfants, qu’il s’afflige grandement quand il lui faut perdre une âme ; chaque jour et chaque heure il les appelle par son Esprit Saint, à s’humilier et à faire pénitence ; nous avons vu de quelle façon s’est servi Dieu pour toucher le cœur de Louis au milieu de sa méchanceté, lui qui était allé par envie pour tuer son capitaine, lequel était un homme honnête, catholique et chrétien. Dieu, qui voulut préserver cet homme, envoya un ange pour sauver sa vie ; tant que le capitaine passait, le bon ange aveuglait Louis avec un papier, et, la troisième fois, Louis, au désespoir, à la fin put attraper et saisir la lettre ; en sorte qu’il trouva le portrait d’un mort peint dans cette lettre et le nom de Louis Eunius écrit auprès. Alors Louis saisi, le cœur défaillant, en sorte qu’il aperçut une croix qui n’était pas loin de lui, et un flambeau allumé de chaque côté de la croix, et sur le socle, écrit en grandes lettres : — « ici, à cette place, il y a un homme assassiné, priez pour son âme afin qu’elle aille aux Joies » — Louis, à cet instant, dut s’appuyer et s’adossa à un fossé, il était près de défaillir ; il comprit bien que Dieu était arrivé, pour la dernière fois, le regarder avec pitié et il demanda pardon, et promit fidèlement. qu’il ferait pénitence, avec sa grâce, avant de mourir. %

1728 11 faut sans doute lire vechanste. 1739 Sur le sens de o vonnan, voir Introduction, Vocabulaire. 1746 On appelle « fossés » en Bretagne les talus élevés qui séparent les champs.

Le voilà dans sa chambre huit jours à ce que je vois, à demander à son Créateur de le laisser vivre, pour qu’il souffre pénitence et pour qu’il se châtie, avant de s’en aller du monde, par toute sorte de tourments ; il sortira en noir, en manière de pénitent, plein d’humilité, avec un cœur tremblant, pour aller à Rome simplement à pied, pour prier humblement le Saint Père le Pape ; mais il ne sera pas allé loin qu’arrivera le mauvais Esprit ; hélasl Louis, hélas ! il sera nécessaire d’être éprouvé ; Satan a été son conducteur jusqu’à présent, et ira le trouver quand il y songera le moins ; mais Louis a fait des actes de foi et de contrition, aussi un ferme propos en sa résolution, mais un ferme propos, avec toute fidélité, qu’il soutiendra partout au péril de sa vie. H aura la victoire sur le mauvais Esprit en sorte qu’il ira par son chemin sans être arrêté ; à une lieue et demie de Rome, dans la paroisse de Nodis, comme il passait à côté de l’église, là, on était au sermon, en sorte qu’il entra dans le porche et appuya son épaule contre la porte pour entendre, en sorte que le prêtre qui était en train de prêcher disait : « Je voudrais trouver le plus grand pécheur qu’il y a jamais eu car si je venais à bout de le rendre à Dieu, [dans le monde, ma récompense serait pendant l’éternité ». Quand le sermon fut achevé et les gens sortis, Louis entra et alla le trouver, en sorte qu’il lui répéta ce qu’il avait dit : [monde, — « C’est moi le plus grand pécheur qu’il y a jamais eu dans le si vous aviez la bonté de venir me confesser maintenant, je ne l’ai jamais fait depuis mes premières Pâques ». — « Faites devant l’autel, monsieur, en présence de Dieu, les actes de contrition et d’humilité, je dois sortir pendant un moment ou deux, et alors je vous entendrai en confession ». 1775 1777 1783 1785

den honuertisan A. voay achiv ar A. hed dirac A. moned A.

. Quand Louis se fut agenouillé en présence de son Créateur, Satan arriva de par Lucifer, qui était venu exprès pour l’enlever ; mais Jésus était présent et la Vierge Marie ; Louis Eunius suait, noyé dans ses larmes, cherchant à se défaire du mauvais Esprit, à la fin, avec le signe de la croix, il renvoya Satan, et le père confesseur vint alors aussitôt. Il confessa sans honte ses crimes en général, mais le père confesseur lui dit sur le champ qu’il n’avait pas le pouvoir de l’absoudre, et lui parla du Purgatoire de saint Patrice, en lui disant que cet endroit est dédié pour le plus grand pécheur qu’il y a jamais eu dans le monde, s’il avait le courage de passer les murs, en vingt-quatre heures il effacera ses péchés. Après avoir remercié son saint confesseur, Louis partit aussi joyeux qu’un ange pour trouver le Saint Père le Pape et le prier de donner la permission d’aller en Hibernie. Compagnie chrétienne, je ne dirai rien de plus maintenant ; j’ai peur tout de même que je ne vienne à vous fatiguer, car tout ce que je dis n’est qu’un abrégé ; mais vous verrez plus clairement avec la grâce de Dieu. Compagnie chrétienne, je vous prie, excusez-moi car je suis un homme simple, je n’ai pas étudié, ignorant et grossier, et sans civilité, incapable de parler sur les œuvres de Dieu ; car mon corps est simple, et mon esprit chétif, la science des gens habiles se trouve sur le papier, en sorte qu’ils m’ont député pour venir vous prier ; adieu, compagnie, jusqu’à après cela. Scène ; tous sortent. Louis Eunius entre, habillé en noir, un bâton à la main, propre et modeste comme un pèlerin, pour aller à Rome. 1812 et suiv., formules de modestie fréquentes dans les mystères. Cf. A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 408. Dunn, Le mystère de saint Patrice, p. 4, noies. 1818 doude A. VIE DE LOUIS EUNIUS.

269

«

LOUIS entre :

Au nom du vrai Dieu qui a créé le monde, dans le chemin de la pénitence je désire marcher ; le reste de ma vie ne sera que souffrance, avec le secours de mon Dieu, pour payer mon offense ; Jésus, mon rédempteur, pour moi vous êtes mort, vous avez répandu votre sang pour mon salut, et j’ai été assez indigne, par désobéissance, pour mépriser, Jésus, votre peine et votre souffrance ; accordez-moi la grâce, Jésus, mon souverain, que je sois victorieux de mes adversaires, qui viendront m’attaquer quand j’y songerai le moins ; entre vos bras sacrés, Jésus-Christ, je me mets ; je ne crains pas la peine, ni l’affliction ; aussi peu la chaleur que le froid ; un petit morceau de pain sec et une goutte d’eau pure seront désormais maintenant ma nourriture ; jamais goutte de vin, ni aucune sorte de liqueurs, viande, ragoût, ni poissons n’entreront dans ma bouche et dans toutes mes souffrances je ne demande aucun secours, sinon d’avoir la victoire à l’égard de mon adversaire, sinon de rester Adèle toujours à ma promesse ; que soit le nom de Jésus et de Marie dans mon âme, et par ces noms que je sois toujours préservé de la mort seulement jusqu’à ce que je me sois lavé, et rendu net et pur par la pénitence, et je le ferai par la grâce de Dieu, mon souverain, et après cette vie, si j’obtiens pardon, je verrai mon Créateur et Jésus sur leur trône 1 LE DIABLE arrive et parle :

Arrête, Louis. Où penses-tu aller ? tu as donc songé à te convertir ! c’est inutile à toi, tu te tromperas, depuis l’âge de quinze ans, tu t’étais donné à moi ; 1846 b Dans M, Louis est en proie à quatre diables : Lucifer, Belzébulh, Astaroth et Satan. 1849 dromptan A. 1850 « cinq ans » dit M.

c’est toi le plus mauvais homme, combien de gens as-tu tués, et combien de filles en ce monde as-tu violées, as-tu dérobé, volé ; les femmes tu les as déshonorées ; leurs maris, quand ils se fâchaient, tu les as aussi tués, tu es un innocent, Louis, je te l’avoue, et un impertinent, si tu songes à le gagner. LOUIS

Par ma fragilité je sais que j’ai été méchant, et je veux croire, selon mon sentiment, que Dieu prendra pitié et compassion, et que par sa miséricorde j’arriverais à trouver pardon. LE DIABLE

Crois parfaitement, Louis Eunius, que jamais il ne le ferait ; traître, meurtrier, ni voleur, jamais il ne secourrait ; ceux-là sont des vices qu’il ne pardonnera pas, dans la sainte Ecriture tu vois cela marqué. LOUIS

Dieu est pitoyable et bon, de sa nature, tendre, aimant à l’endroit de sa créature ; il aime à voir l’homme se convertir, le ciel mêmement vient à se réjouir. LE DIABLE

C’est inutile à toi, Louis, tu ne te convertiras pas ; Dieu mêmement ne veut pas te voir ; si grands sont les crimes que tu as faits en ce monde, qu’aussitôt s’ouvrira la terre pour t’engloutir. LOUIS

Jésus me préservera, qui a été crucifié, il a, par son sang sacré, lavé nos péchés, à ceux qui sont passés et à ceux qui arriveront, à condition de l’aimer parfaitement et de croire à ses paroles. 1870 ha Doue he unan zo scuiz ouz da velet C. 1873 Jésus crucifiet bepred dam divoallo ! C. 1875 les morts et ceux qui naîtront.

LE DIABLE

Il pardonnerait à certains péchés, non pas à toi, Louis, qui as tous les crimes, nous n’avions seulement qu’une fois désobéi, et, pour cela, à jamais nous sommes damnés. LOUIS

Votre désobéissance et votre rébellion, si vous aviez pu l’enlever de son trône, vous l’auriez fait captif, vous créés par lui ; vous allâtes l’attaquer au plus haut des cieux ; je suis un grand pécheur, mais jamais je n’ai songé à déclarer la guerre à mon Créateur béni ; toutes les autres méchancetés, par ma vivacité ; mais jamais je ne me suis élevé contre Dieu ; dans toutes mes méchancetés, tu ne m’as pas entendu ni demander sa malédiction, ni demander à être damné, ni le mépriser en aucune façon ; et si j’en ai eu la pensée, je demande pardon ; j’avoue que je suis pécheur et même criminel, mais je serai pardonné par Jésus mon sauveur, après une pénitence, selon que j’ai péché ; je renonce pour jamais à toi, Satan maudit ! SATAN

Tu m’insultes, mauvais homme ; comment, âme damnée tu as désir peut-être que nous te soyons soumis ? quel beau prédicateur est devenu le fripon ! le coquin coureur de filles, son cœur est touché, il est empoisonné, sans doute, accablé par le mal de Naples ; voilà la cause pour toi, de quitter le royaume ; oui, hypocrite infâme, je te briserai le cou ; et c’est ici, grand meurtrier, que tu achèveras ta route. SATAN prend au collet LOUIS qui parle :

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur je vous conjure de me quitter, officiers de Satan. 1893 avoein a ran A. 1902 did mechans da guitad ar A. 1903-1908 Formule d’exorcisme qui est reproduite plusieurs fois, hac A.

vous vous peinez en vain si vous songez à me faire retourner de nouveau au monde ou venir à pécher. Le diable sort en criant. Scène ; tous sortent. LOUIS en route :

Par votre grâce, mon Dieu, vous m’avez donné secours ; j’ai eu la victoire sur mon adversaire, si je n’avais été inspiré de faire le signe de la croix, je serais encore embarrassé par mon ennemi ; pour le premier combat j’ai gagné aujourd’hui ; et le dernier je l’aurai encore avec le secours de Dieu ; voici une belle paroisse, que je dois traverser, savoir si c’est que la messe est commencée ; la messe est terminée, et on en est au sermon ; il faut que je m’approche pour avoir l’instruction. Louis entre sous le porche ; un religieux fait un sermon. LE PRÉDICATEUR

Quia persecutus est inimicus animam meam humiliavit in terra [vitam meam] J’ai été persécuté par mes ennemis, et jusqu’à la terre je me suis humilié. Penitentiam agite Faites donc tous pénitence, tant que vous êtes en vie, faites donc tous pénitence, tant que vous êtes en bonne santé, car, après la mort, cela ne servira pas, car quoique nous soyons enfants d’Abraham, pourtant ne nous fions pas une miette, car Dieu peut susciter d’autres enfants à lui et de païens faire les gens les plus saints. Et videbit omnis caro salutare Dei Car tout ce qu’il y aura d’hommes, selon la prophétie, remarqueront certainement l’humeur du Sauveur du monde ; de deux façons cela peut être compris, comme est sans doute le jour du Jugement dernier là où tous devront apparaître. 1918 1919 1923 1928 1931

da gleued A. Matthieu, III, 2 ; IV, 17. piningen ne A. Luc, III, 6. Ou il y a ici une lacune, ou l’auteur s’embrouille.

penitentiam agile Faites donc tous pénitence, je vous prie, par charité, car nous sommes tous pécheurs, mes frères, vous le savez, et ces péchés doivent être effacés, car malheur à celui qui persévérera dans le mal, • le jour du Jugement dernier, ceux-là périront tous ; ainsi donc, mes frères, et mes sœurs chrétiennes, nous nous laissons mourir sans faire pénitence. Oui je vous dis, mes frères et mes sœurs, je voudrais rencontrer le plus .grand pécheur qu’il y a jamais eu je mettrais ma peine et mon attention [dans le monde, à lui expliquer la vraie religion ; et si j’avais le bonheur de le convertir à la foi, je serais heureux pendant l’éternité ; c’est le plus beau point de notre religion, de tirer une âme du chemin de la perdition, aussi, je vous dis aujourd’hui, mes frères chrétiens, d’enseigner le chemin de la pénitence, car Jésus-Christ dans son évangile a dit que si nous ne faisons pénitence nous serons tous perdus ; peinons donc ; chrétiens, l’un et l’autre, pour instruire l’ignorance à cause de Dieu. Semel mori, la mort approche de moi, veillons donc sur nous, sans être sans souci ; les gens vaniteux, superbes et inhumains mourront dans leur péché, sans faire pénitence ; le meurtrier, les empoisonneurs et les blasphémateurs tomberont en enfer, s’ils ne font pénitence ; l’ivrogne, le-libertin et les gens coléreux, si vous ne faites pénitence, vous serez malheureux. Où est l’homme qui ne connaît pas Dieu ? le misérable qui ne croit pas qu’il a une âme ? de tels gens croient quand ils quitteront le monde, qu’ils auront une mort comme celle des bêtes. Ah, malheureux, serait-il possible, tout de même, que tu ne te voies pas formé à l’image de Dieu, 1955 Epilre aux Hébreux, IX, 27. 1965 se gneus ar greden pa A. 1967 Sur la quantité de maleurvs, cf. Ernault, Dictionnaire étymologique du breton moyen, p. 331. 1US.

doué de connaissance, non pas comme une bête. Je crie à cette sorte de gens de faire pénitence ; voyez donc, mes frères chrétiens, et vous, mes soeurs, si c’est de la suite de Dieu ou de la suite du mauvais Esprit, car à l’un d’entre eux il faudra être sûrement, ou bien les prophètes mentent et toute l’Ecriture est fausse. Dans la sainte Bible je vois qu’il est marqué, de Nabuchodonosor, roi des Chaldéens, après un nombre de victoires gagnées à la guerre, avoir emmené en captivité les dix tribus d’Israël, et nombre de rois soumis à lui, en sorte qu’il vint avant la fin à se glorifier, et entendait comme quoi toutes ces victoires n’appartiendraient qu’à lui et non pas à Dieu ; au contraire il traita le peuple de Dieu avec tant de pouvoir et donna les vases sacrés à son fils Balthasar, pour qu’il les profanât à sa discrétion ; et lui, comme un dieu, assis sur son trône ne pouvait pas dormir avec tant de vanité, en sorte qu’il eut cependant une nuitée un songe, et après avoir consulté tous ses sujets, il n’y avait personne capable de l’interpréter comme il était On fut chercher Daniel, Israélite et prophète, [dû. qui lui expliqua comme c’était arrivé ; il lui demanda quand il arriva dans sa chambre : — « Gontez-moi donc votre songe, prince puissant ». Le roi, plein d’orgueil, enflé de vanité, dit au prophète : — « Voici mon songe. J’ai vu, la nuit, un arbre le plus beau comme il n’en a jamais paru dans ce pays, ses feuilles dorées, charmant dans ses branches, et tous les oiseaux de l’air venaient y faire leurs nids et les bêtes féroces même les plus cruelles venaient dessous pour se divertir ». Le prophète Daniel lui expliqua comment cet arbre était lui-même ; N*

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19.>3 res digand ar Roue A. 1995 a. 1108. 2000 er ha de A. 28i

VIE DE LOUIS EUNTUS.

les oiseaux qui venaient faire leurs nids dedans et les bêtes féroces qui venaient dessous, étaient le peuple fidèle et les étrangers qui vivaient à son ombre et sous sa loi ; « et Dieu vous compare à ce bel arbre que vous avez vu, florissant cette nuit, et aujourd’hui il est flétri ; Dieu se vengera de votre -vanité, bientôt vous vous verrez comme les bêtes sauvages ; ces vanités et toutes vos grandeurs seront cause pour vous, mon prince, que vous paîtrez dans les et d’ici à sept ans vous serez changé en bête, [bois ; puisque vous êtes si puissant opposez-vous-y si vous pouvez ». Le roi au contraire, au lieu de venir à se fâcher, dans sa confusion le récompensa ; fit placer sur lui un beau manteau d’écarlate, et un collier de perles au cou du prophète, et de le faire mettre à sa discrétion, le troisième de ses princes, et chef en Babylone ; et d’ici le lendemain, c’était accompli : Nabuchodonosor était changé en bête ; et, au même instant, il s’enfuit de là, et vécut sept années parmi les bêtes sauvages ; et à la fin des sept ans, quand il s’humilia, Dieu, qui est pitoyable, le reçut en sa grâce. Voilà donc, chrétiens, ce qui est arrivé ; dans la sainte Bible nous le trouvons marqué ; il est nécessaire de faire pénitence et de s’humilier pour aller au ciel après cette vie ; soyons donc humbles, charitables, l’un envers l’autre, et nous irons au ciel après la fin de notre vie ; c’est tout ce que je désire du fond de mon cœur, et je vous donne à vous tous ma bénédiction. Au nom du Père, du Fils et du saint Esprit que nous ayons la grâce de nous voir dans la gloire éternelle ! I

Scène ; tous sortent. Louis entre par un côté, le prédicateur par un autre côté.

2017 a lech A. 2033 eil en queuer A.

LOUIS lui dit :

Père humble et charitable envers le pécheur, ’se^courez-moi, je vous prie, car grande est ma misère ; c’est moi le pire pécheur qu’il y ait jamais eu dans le monde, d’un pire que moi on n’a jamais causé ; et vous avez dit dans votre sermon, que vous mettriez votre peine et votre attention, et que vous aimeriez à rencontrer le pire des pécheurs. Le voici, saint père, présent auprès de vous ; ma confiance est en vous, si vous avez la bonté et l’humilité de venir me confesser ; et vous aurez la grâce que vous avez désirée [monde, de confesser le plus méchant homme qu’il y a à présent dans le LE PRÉDICATEUR

Entrez dans l’église, et prosternez-vous, et d’ici un quart d’heure, je viendrai vous trouver ; et faites des actes de foi et de contrition et demandez pardon du fond de votre cœur ; examinez-vous bien, dans tous vos péchés, et vous me les déclarerez comme des litanies ; je vous écouterai bien de mon côté, et quand vous aurez tout conté, je conterai aussi. LE PRÉDICATEUR sort. LOUIS à genoux :

Grand Dieu d’Abraham, vous qui êtes le créateur du monde, voici un homme, s’il osait vous regarder, qui mourrait d’horreur et de chagrin de vous avoir offensé ; si j’avais une plume et un morceau de papier blanc, j’écrirais ma vie, car je serais plus sûr. LE DIABLE entre :

Tu n’as pas besoin, mon homme, de venir à écrire ta vie d’un bout à l’autre, car la voici : tu n’avais pas encore quinze ans que tu t’étais promis au diable Lucifer, ton corps et ton esprit, 2066 chedy A. 2067 Cf. 1850.

et tu veux quoi ? que tu sois pardonné, toi, un homme qui a fait un million de péchés ! LOUIS

De tout ce que j’ai fait, je demande pardon, et Dieu recevra une vraie contrition. LE DIABLE

Il pardonnerait des péchés véniels, non pas des sacrilèges, si noirs et si cruels, comme tu as fait avec toute méchanceté, quand tu es venu à enlever ta cousine germaine, LOUIS

Il a pardonné à David et à Marie Madeleine, et à monsieur saint Paul, qui avaient été pécheurs ; Souache et Théophile qui avaient fait un pacte- avec vous, autrefois, Esprits malheureux, et signé de leur sang, et nonobstant cela, ils sont tirés de vos griffes, et ils sont triomphants maintenant dans les Joies. LE DIABLE

S’il pardonna à David et à Marie Madeleine, c’est que durant leur vie ils firent pénitence ; et toi, âme damnée, tu veux en un jour payer toute l’offense que tu as faite à Dieu ! LOUIS

Je n’ai pas fait tous mes crimes en un jour, et j’en ai fait assez et malheureusement trop, et si Dieu m’accorde la grâce de vivre, je ferai pénitence comme il lui plaira ; sûrement grands sont les péchés que j’ai commis, plus grande est la grâce de Dieu, s’ils sont envisagés ; je demande pardon et je ferai pénitence, et à toi, par dessus toute chose, jamais je n’obéirai. fit un pacte avec Satan. Souache serait-il soit le nom de ce Juif, soit une corruption du mot /tri/ ? 2088 meus siuoais A. 4


Go O

SATAN

Comment, meurtrier infâme, tu ne m’obéiras pas ? ici, en ce moment-ci, je vais t’enlever, je vais t’empêcher de faire pénitence ; et par le cou tu viendras en enfer ; lève-toi vite, et viens avec moi, ou je t£ traînerai, il y a longtemps que l’on t’attend dans les enfers. LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan, vous vous peinez en vain si vous songez à me faire retourner de nouveau au monde et venir à pécher. SATAN sort ; LE CONFESSEUR entre :

Je suis arrivé, mon cher fils, pour vous confesser, et par la grâce de Dieu, je vous vois bien disposé ; les pierres tombales, ici, sont mouillées de vos larmes ; continuez toujours et vous aurez le pardon. LOUIS donne sa confession sur papier au CONFESSEUR :

Tenez ce papier-là, examinez-le bien ; et vous y verrez mes crimes détestables ; et si vous me trouvez digne d’être absous, je ferai la pénitence qui sera ordonnée ; peu importe que ce soit par le feu ou que ce soit par le sang, je souffrirai de bon cœur toutes les peines imaginables. LE CONFESSEUR, après avoir lu sa confession, dit :

Il n’est pas en mon pouvoir de vous donner l’absolution ; si vous voulez m’écouter, je vous donnerai un conseil ; il y a un purgatoire dans le pays d’Hibernie, qui a été révélé à monsieur saint Patrice ; et quiconque y passera vingt-quatre heures sera aussi net de péché que le jour de son baptême,

2114 2116 2118 2119 2120

boainou jmagined A. mes mur am seleouet C. releued A. Cf. 2414. nep a dremcnou enna C. oa A. Sur la caverne du Purgatoire, cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 236, v. 802-869 ; p. 238, v. 894-898 ; p. 240, v. 906-915.

s’il traverse les murs dans les ténèbres, et les autres souffrances de par les diables ; oui, je vous promets, quand vous en reviendrez, vous serez pur et beau devant le visage de Dieu, il y a beaucoup de peines à souffrir pour faire le voyage, mais rien n’est impossible si Dieu donne sa grâce. Il y a eu là des gens qui l’ont fait, Souache et Théophile que j’ai connus. Voyez leur relation, écrite par eux-mêmes et tous les tourments qu’ils ont souffert de par Satan ; car, mon cher enfant, votre péché est lourd, le Saint Père le Pape même ne vous absoudra pas. LOUIS

O mon père confesseur, c’est là que je désire aller, je traverserai les murs, quand je serais mille fois tué, et quand je serais dans un feu flambant pendant vingt-quatre jamais de douleur on ne m’entendra me plaindre ; [heures, donnez-moi la permission par écrit, si c’est en votre pouvoir ; j’aurai la victoire avec la grâce de Dieu. LE CONFESSEUR

Il sera nécessaire que vous alliez trouver le Saint Père, et il vous donnera par écrit ce que vous désirez, je ne puis, mon enfant, que prier Dieu, de vous accorder la grâce de sauver votre âine ; et c’est mon devoir et je le ferai, et si j’apprends que vous soyez passé et allé en Hibernie, je célébrerai chaque semaine la messe du Saint Esprit, pour que Dieu vous donne les grâces nécessaires, et soyez toujours fidèle au propos que vous avez fait ; Dieu vous aidera si vous vous aidez ; au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, vous chasserez loin de vous les ministres de Lucifer ; voilà, mon enfant, ce que j’ai à dire ; quand ce sera votre volonté, partez quand vous voudrez ; je prie le seigneur Dieu du fond de mon cœur de donner ensemble avec moi sa bénédiction.

2132 absolfe C. 2146 piigou gand Doue rein A.

Jésus vous conduise et sa mère la Vierge ! que la grâce soit à nous de nous voir dans les cieux ensemble ! LOUIS

Homme saint, charitable, plein d’humilité, songez à moi en présence de Dieu ; vous m’avez appris le chemin vers l’Hibernie ; avec la grâce de Dieu, je ferai le grand voyage de saint Patrice. Dieu vous conduise en ses grâces toujours ! je vous ferai savoir si je reviens dans le monde. Scène ; tous sortent. Le Saint Père le Pape entre par un côté et Louis par un autre côté. LOUIS, & genoux, qui parle :

O Vicaire général en ce monde, sous Jésus, c’est moi qui suis, hélas pour moi, le pire malheureux ; j’ai offensé le trône céleste, sans craindre ni redouter Dieu mon créateur ; le meurtre, l’assassinat, le viol et le feu ont été mon occupation depuis que je suis en ce monde, et sur les grands chemins, dérobant, violant ; je suis un grand pécheur, s’il en fût jamais. Grande est la miséricorde de Dieu en ce monde, puisqu’il n’a pas ouvert la terre pour m’engloutir, et je me suis résolu à aller en Hibernie, pour que j’aille dans le Purgatoire de monsieur saint Patrice ; si vous avez la bonté d’approuver mes vœux, je souffrirai tout tourment, et aussi la mort, en punition de mon crime et des offenses que j’ai faites contre Dieu qui m’a créé. LE SAINT PÈRE LE PAPE

Comment, mon cher enfant, avez-vous été exempté de la justice de ce monde, puisque vous n’êtes pas puni : le viol, et le feu, et ôter la vie doit souffrir la mort ; il y a une loi pour cela. 2172 Cf. 1872. 2181 II n’a pas été question d’incendies dans le Mystère, sauf dans les discours de Louis, v. 1240-1241-2167. Cf. 2181.

LOUIS EUNIUS %

Vénérable Saint Père, je serais puni, mais je suis sorti d’une famille illustre, de grands gentilshommes, de la première qualité, je suis filleul et même proche parent du roi ; de la ville de Toulouse, au royaume de France ; mon nom est Louis Eunius, fils du duc de Glarence ; et c’est pourquoi je ne suis pas puni, par respect pour ma famille pour qu’elle ne fût pas déshonorée. LE PAPE

Puisque vous êtes Louis Eunius, je connais un peu votre affaire ; j’ai entendu parler de vous, et de la conduite de votre vie. Levez-vous, monsieur, debout, pour que je vous entende, j’ai désir et besoin de vous instruire en cela. LOUIS se lève ; LE PAPE continue :

Or çà donc, Louis, vous êtes donc résolu à faire pénitence, avant de vous en aller de ce monde ; de quelque autre façon vous pouvez faire pénitence, et non pas aller corps et âme vous rendre en enfer ; et faites attention, monsieur Louis Eunius, car ce voyage est très dangereux, des gens y sont entrés qui ne sont pas revenus, hélas ! et à jamais ceux-là sont perdus. LOUIS

N’importe, Saint Père, pour rude que soit le voyage, j’ai bon courage et Dieu donnera sa grâce il est dit de tout temps par le seigneur Dieu : si vous vous aidez, je vous aiderai aussi ; j’étais corps et âme à offenser Dieu ; dans la pénitence, je dois l’être aussi ; peu importe combien obscure sera la traversée des murs. ni combien affreux seront les tourments, 2191 Pa ne c’houi eo Louis e c’houson ho toare C. 2201 na nint quet relornet C.

je suis fermement résolu et au risque de ma vie, à effacer mon péché par la grâce de Dieu. LE PAPE

Ecoutez encore, monsieur, je vous prie humblement, dans ce monde vous trouverez où effacer vos péchés, et faire pénitence, puisque vous avez été inspiré, en châtiant votre corps vous pouvez être sauvé ; et aller en cet endroit, une fois entré, si vous voulez sortir, assurément vous êtes perdu ; celui qui aurait la grâce de le faire avec fermeté sera net de péché lorsqu’il en reviendra. LOUIS

J’y irai, Saint Père, si Dieu le permet ; c’est là que je vois l’endroit où nettoyer mon âme ; accordez-moi donc, s’il vous plaît, ce qui est nécessaire, que j’aille avec diligence au pays d’Hibernie. LE PAPE

Je vous donnerai des lettres, et cela je ne vous refuserai pas. car je pécherais puisque vous avez été inspiré par le seigneur Dieu, puisqu’il lui a plu [de donner] la grâce à vous et à tous, de se convertir ; le ciel, mon pauvre enfant, vient à se réjouir, quand un grand pécheur vient à se convertir ; si vous avez le bonheur de faire ce voyage, vous donnerez joie dans le ciel aux saints et aux anges. Suppliez votre créateur Jésus et la Vierge, les saints, les saintes, d’être avocate ; Saint Michel, votre bon ange, de venir vous consoler ; et par dessus tous les autres, monsieur saint Patrice ; il est le fondateur de ce voyage-là ; priez-le de prier pour vous devant Dieu ; et ayez pour armes le signe de la croix, celle-là vous défendra, mon enfant, en tout endroit ; venez avec moi à mon bureau pour que je vous dépêche ; je vais vous donner des lettres pour aller en Hibernie, 2234 auocadet A. 2236 a dreist peb tra toud A.

que vous donnerez à l’évêque dès que vous arriverez, et il vous conduira à l’endroit qu’il sera dû ; dans le couvent de Saint Augustin est l’entrée, là vous serez instruit : ceux-là savent l’affaire. LOUIS

Quand vous voudrez, Saint Père, j’ai hâte d’y aller, avec la grâce de Dieu et de monsieur saint Patrice, et si j’ai le bonheur de revenir en vie, je vous le ferai savoir, avec la grâce de Dieu. Scène ; tous sortent ; ensuite, LOUIS, seul dans la route, et il dit :

Allons, mon vrai Dieu, soyez glorifié dans le ciel et sur la terre par tout ce que vous avez créé ; maintenant, je vois clairement qu’avec votre grâce, monj’irai en Hibernie, puisque j’ai mes papiers. [seigneur, SATAN arrive et parle :

Comment, Louis, je songeais que c’était pour badiner que tu avais entrepris de faire ce voyage ? je ne croirais jamais que tu quitterais le monde et renoncerais au vin et aussi aux filles ; toi surtout qui vivais à ta discrétion, et par ta pure sottise tu vas à l’abandon ? il ne te manquait rien et tu vas hors d’Europe, sur les contes de prêtres, du pape, et de l’évêque ; ceux-là sont des fins gars, Louis, ne le sais-tu pas ? ceux-là boiront le vin et caresseront les filles, et tu seras bafoué quand tu arriveras en Hibernie ; as-tu cru que tu seras saint pour avoir fait le voyage de saint plus de cinq cents espèces de sots ont prétendu [Patrice ? faire ce voyage et ont été trompés, qui sont venus en enfer, âme, corps et vie ; et toi, pauvre Louis, tu vas faire comme eux ; retourne, et crois-moi, et tu feras un beau coup, et mets tes papiers, Louis, pour te torcher le cul, 2263-2264 manquent dans C. Cf. le dicton : eva gwin, kanioli merc’hed, setu dever ar c’hloarek. Sauvé, Revue celtique, t. III, p. 196.

et envoie-les se faire foutre moines et prêtres, il est encore assez tôt pour toi de faire pénitence. LOUIS

O esprit malheureux, c’est toi qui es mon ennemi ; tu es cause des peines que je devrai souffrir ; tu m’as mis à offenser Dieu, et maintenant tu as désir de perdre entièrement mon âme ; j’ai renoncé à toi et je le fais à jamais ; tu es sur le point de me perdre par ton effronterie mais, cette fois-ci, avec la grâce de Dieu, je châtierai mon corps pour sa méchanceté. SATAN

Châtie donc ton corps, tant que tu voudras ; en enfer est ta place, et c’est là que tu arriveras, voilà que tu y vas de bonne volonté, et c’est là que tu resteras pendant l’éternité ; je suis sûr de toi, Louis, je ne le nie pas ; mais comme tu envoyais chaque jour des gens nous voir, nous avions grande joie de toi et nous étions vigilants à te conduire au plaisir, et à te donner de l’argent ; et si tu veux retourner à la ville de Toulouse, tu auras contentement, je te le promets ; et si tu as le malheur d’aller en Hibernie, et d’aller dans le Purgatoire de saint Patrice, tu abrèges tes jours pour être tourmenté ; le temps n’est pas arrivé pour loi de quitter le monde, comme nous sommes amis, Louis et que je t’aime, je me suis présenté pour t’avertir ; fais maintenant ce que tu voudras, je ne m’en soucie pas ; il est encore assez tôt pour toi de quitter le monde. LOUIS

Je quitte le monde, puisque je quitte le péché, Dieu, par sa miséricorde, m’a appelé, et je suis venu hors du chemin de la perdition, et maintenant je vais dans le chemin de bénédiction ;

2300 Cf. 2274.

2302 dre evisiricord A.

il n’y a rien d’impossible à la volonté de Dieu, et j’aurai la victoire sur ton iniquité ; tous tes artifices seront pour toi temps perdu ; j’ai renoncé à toi, Esprits maudits. SATAN

Dieu ne se soucie pas de toi, homme damné, . tu as commis des crimes, c’est une horreur à voir ; quand tu as enlevé ta cousine, la religieuse, de son couvent, tu as volé encore aussi la vaisselle d’argent, et tu as profané la vaisselle consacrée pour servir Dieu ; tu es un homme perdu. Balthasar, autrefois, roi de Babylone, prit les vaisseaux sacrés du temple de Salomon, et s’en servit dans un banquet, et, pour cela seulement, il avait été condamné ; et toi, grand scélérat, as fait pire que cela, et tu penses être quitte avec une pénitence d’un jour ! je mangerais, avant, la chair sur mes membres, si tu revenais, méchant homme, du voyage de saint Patrice ; là, ne crains rien, on s’occupera de toi, on te laissera entrer, mais non pas t’en aller. LOUIS

Tu menaces assez, savoir comment tournera l’affaire, mais je ne m’effraie pas de tes menaces ; il te faudrait, Satan, être sans égal ni pair. Est-ce toi qui a créé le ciel et la terre ? Celui-là est mon maître et aussi le tien ; je ne fais pas de cas de ta fâcherie ; c’est celui-là, esprit impur, que je prie et adore, et il donne la victoire à qui lui plaît, et par sa grâce divine il me préservera de toi tout à fait, et avant la fin de mon tour, mon pied ira sur ton cou ; je serai victorieux avec le secours de mon Dieu, tu n’auras aucun droit sur mon corps, ni mon âme. 2317 Daniel, V. 2333 am preseruou ousid A.

SATAN

Gomment, profanateur, tu veux m’insulter ? Je te briserai les os, et encore tu ne seras pas quitte, sais-tu, bordelier, qui a la main sur toi ? maintenant on va voir si ton pied ira sur mon cou. LOUIS saisit SATAN peu* le cou et le renverse à terre en disant :

Tu as manqué, tison d’enfer, ô Satan maudit ; là, sans mot dire, tu vas être égorgé ; voici mon pied sur ton cou, comme j’avais dit ; si tu n’étais immortel, je t’aurais mis en pièces ; tiens, Satan infernal, monstre à nature humaine, avec mes dents et mes ongles je te couperai la peau. LE VIEUX SATAN crie :

Astaroth, Belzébuth, Momon et Lucifer, accourez à mon secours, ou mon affaire est faite 1 Force, force, diables vils, où êtes-vous restés ? adieu ; pour cette fois je vais être écorché. •

!

Une bande de diables arrive et va sauter sur Louis. LOUIS fait le signe de la croix :

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur je vous conjure de me quitter, officiers de Satan, vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau au monde et venir à pécher. Les diables s’en vont en entraînant le vieux Satan avec eux ; il ne peut pas marcher ; Louis va son chemin en paix. LE VIEUX SATAN

O diables infâmes, où étiez-vous restés ? voici que mon corps est écorché, hélas et défoncé ; me voici sang et souillure, chargé de plaies, je suis si étreint que j’ai fait dans mes culottes. confusion avec le mot français momon, sorte de mascarade. C’est le démon de l’Avarice. On trouve Mammon dans le Jugement dernier, Momon dans la Vie de saint Jean-Baptiste, Mamonat dans la Vie de l’Antéchrist, Mamonna dans la Vie de saint Divi. Dans la Vie de saint Gwenolé, Satan le prépose à l’Avarice (Revue celtique, t. XX, p. 242). 2349 Sur maned, voir Ernault, Annales de Bretagne, t. XVI, p. 235-237. 2358 na meus A.

BELZEBUTH

Je crofë, vieux Satan, ce que vous avez dit, il y a une fichue odeur ici, allons-nous en, je n’y résisterais pas. ASTAROTH

Il est nécessaire, Belzébuth, que nous l’arrangions, il ne serait pas raisonnable à nous de le laisser ici, puisqu’il est estropié, nous devons le secourir, car le fripon de Louis n’est qu’un traître ; s’il avait été un homme sage, il respecterait son âge, et ne maltraiterait pas un pauvre vieux, qui n’est plus capable ; laissez-le donc, damel il va en Hibernie ; il a prétendu traverser le Purgatoire de saint Patrice, si nous l’attrapons là, n’ayez crainte, vieux Satan, nous l’exercerons sans guère de repos. Scène ; tous sortent. Louis arrive en Hibernie, en sorte qu’il va trouver l’évêque ; l’évêque entre par un côté et Louis par un autre côté. LOUIS parle :

Salut à vous, monseigneur, de par Dieu. Le Saint Père le Pape m’envoie vers vous, avec des lettres patentes signées de sa propre main, et il m’a ordonné de les porter à l’évêque. Et les voici, monseigneur, lisez-les ; alors, vous m’instruirez selon votre volonté. L’ÉVÊQUE lit la lettre et ensuite dit :

Cette lettre, monsieur, vient à m’étonner, en voyant que vous avez désir de faire le voyage de saint Patrice ; c’est un voyage qui est dangereux, et celui qui le manque est un malheureux, il se rend, corps et âme, dans les enfers ; comprenez, mon cher homme, écoutez mes paroles, je ne vous déconseille pas, je n’ai pas d’ordre pour cela, car si vous êtes inspiré par le seigneur Dieu, 2382 comprendre signifie, pour l’auteur breton, réfléchir. 2383 ne meus quet d’ober ze C. 2384 Cf. 2226. 20

c’est péché de résister à ses ordres ; pourtant, je vous avertis des dangers, car si vous entrez dedans et que regret vous vienne ensuite vous ne sortirez jamais de cet endroit-là ; beaucoup sont allés dedans qui n’en sont pas revenus, qui sont, hélas pour eux, à jamais damnés ; et ainsi, mon homme, il vaut mieux que vous restiez dans le ici vous ferez pénitence aussi comme vous voudrez. [monde, LOUIS

Mon prélat généreux, Dieu m’a inspiré ; et j’irai dedans, s’il m’est permis ; j’ai courage et désir, et avec le secours de Dieu, j’aurai la victoire quelque pénible qu’elle soit ; j’ai offensé Dieu d’une façon telle, que ce n’est que par des peines que j’obtiendrai pardon ; j’ai tué des gens, personne ne sait, sinon .Dieu, incendié, et violé et filles et femmes, volé dans les grands chemins, dévoyé une religieuse, et tout ce qui était en notre pouvoir, nous l’avions aussi volé ; le mauvais Esprit visiblement marchait à côté de moi, et me disait chaque jour ce que j’aurais à faire ; hélas, et malheureusement pour moi, je l’ai trop cru, au point que je me suis malheureusement quasi perdu ; voilà un abrégé de ma confession ; voyez maintenant, monsieur, si je mérite pardon. l’évêque

Lourd est votre péché, je ne saurais dire plus ; il n’est pas en mon pouvoir de vous donner l’absolution, votre péché mérite une pénitence grandement rude, ce n’est que par le vrai Dieu que vous pouvez être absous. Ce purgatoire, qui est ici, en Hibernie, a été révélé à monsieur saint Patrice, et, en vingt-quatre heures, celui qui est décidé à souffrir les tourments, est net de péché ; 2401 diroudel A. Cf. diroudet, que M. Ernault lit, au lieu de hiroudet, dans le Doctrinal, et qu’il traduit par « relégué, rejeté », Archiv {ür Celtische Lexikographie, t. I, p. 614.

2406 quen a hon C. 2414 Cf. 2118.

mais il ne faut pas s’épouvanter à voir des diables, feu, ni puits ni montagne, rivière, pont ni étangs ; ni venir à répondre rien du tout au mauvais Esprit, sinon le signe de la croix, il n’y a plus à dire. Dites-moi, mon enfant, quel est votre sentiment, et j’irai aussitôt vous mener au couvent. LOUIS

Venez donc, saint père, au nom du Créateur du mondé ; qui s’aidera sera par lui aidé ; et vous saint père, charitable et pitoyable, vous prierez pour moi notre rédempteur Jésus. l’évêque

Allons, au nom de Dieu, allons donc promptement en route ; tout à l’heure, nous sommes arrivés auprès du couvent. Ils vont au couvent ; l’évêque continue :

Nous voici arrivés où nous avons à aller ; je vois le prieur auprès du porche. Salut, monsieur le prieur, je suis venu vous trouver, pour vous amener un homme qui est décidé ; du royaume de France il est venu en Hibernie avec beaucoup d’intention, pour faire le voyage de saint examinez-le bien, monsieur, au nom de Dieu ; [Patrice ; il a désir et besoin de secourir son âme. LE PRIEUR

Entrez, monseigneur, et venez avec moi, vous deux ; asseyez-vous sur votre séant, alors nous causerons. Tous s’assoient ; le.- prieur continue :

Eh bien donc, monseigneur, qu’est-ce que cet homme ? l’évêque

Voici ses papiers, monsieur, lisez-les. LE PRIEUR lit la lettre et ensuite dit :

On me marque, mon enfant, que vous avez la volonté d’aller dans le purgatoire, si Dieu le permet ;

2432 eur penitand A. C. Cf. 2439. 2435 tap er fad A. han erfat C.

mais songez, mon cher enfant, ce voyage est pénible, et si vous le manquez, vous serez malheureux, et il vaudrait mieux pour vous rester dans le monde à faire pénique d’aller, corps et âme, vous rendre en enfer ; [tence, et pour cela, mon enfant, il est fait là neuf cellules, que vous devrez endurer, durant neuf jours ; et alors dans toutes vous devrez rester tout courbé, et attaché, aussi*songez-y, et vous devrez recevoir, avec toute humilité, plein de contrition, Jésus en votre âme ; et vous n’aurez à manger que du pain sans levain, sans un morceau de sel dedans, selon l’ordre de la loi, pour vous accoutumer aux peines que vous souffrirez ; pendant deux heures chaque jour, on vous confessera ; et les neuf jours finiront juste le dimanche au milieu du jour, pour entrer au purgatoire le lundi à dix heures du matin, pour que les gens soient avertis dans le prône de jeûner ces jours-là, avec vraie dévotion, et que soient avertis les couvents et tous les prêtres, pendant ces jours-là, de faire pénitence, pour qu’il plaise au ciel de donner courage et secours, à vous, pauvre pénitent, pour vaincre votre adversaire ; et vous, occupez-vous et la nuit et le jour, à prier Jésus-Christ de vous regarder avec pitié, . et si vous avez la grâce de revenir de là, vous serez net de péché pour aller devant Dieu. LOUIS ■

Je ferai, saints pères, par la grâce de Dieu, tout ce que vous commanderez, avec toute fidélité. Je me suis résolu à souffrir les tourments, haché et dépecé pour mes péchés ; quand j’étais à offenser mon créateur béni, j’étais corps et âme, nuit et jour, dans le péché ; je serai dans la pénitence avec plus de fermeté, je ne crains aucune peine pour plaire à Dieu ; 2456 e veet covesset C. 2457 naf deues just a reinquou finisan ar A. an nao deves a flnnissou d’ar zul d’a greis-de C.

je me confesserai chaque jour avec la contrition, et recevrai Jésus-Christ dans la communion, et si mon créateur me laisse vivre, je souffrirai les peines et les plus cruelles ; mon corps mérite une peine, des peines, et beaucoup en outre, c’est moi le plus misérable de tous les pécheurs ; j’ai péché, hélas, pour moi seul, fait pécher d’autres qui sont maintenant en peine ; massacré beaucoup de gens et tué dans leur péché ; et je dois payer tout cela puisque c’est moi qui en suis cause ; ce n’était pas assez pour moi d’offenser mon Dieu ; j’ai mis d’autres encore à l’offenser aussi, et je demande à Dieu pardon et miséricorde, et par les souffrances je ferai notre accord ; je prie Dieu, du fond de mon cœur, de donner à mes souffrances sa bénédiction ; et vous, saints pères, secourez-moi aussi par vos sacrifices, devant le vrai Dieu ; recommandez au peuple, comme vous avez promis, d’aider le pauvre pécheur à effacer son péché, et si j’ai le bonheur de plaire à Dieu, je prierai pour les gens du monde, pendant l’éternité. Disposez-moi maintenant, saints pères, que je commence le chemin de la pénitence. LE PRIEUR

Venez avec moi, mon enfant, à la chambre de pénitence, pour que vous entriez aussitôt dans la première cellule, et d’ici à neuf jours, vous souffriez avec affliction, pour éprouver, mon fils, votre résolution ; car quand vous serez dans le Purgatoire de saint Patrice, il ne faudra pas que vous songiez à retourner sur vos pas ; d’ici là vous le pourrez encore, si vous vous fatiguez dans les vous serez maître, après, de retourner en votre pays, [peines, Scène ; tous sortent L’évêque fait le prône le jour avant que Louis n’entre dans le Purgatoire de saint Patrice ; l’évêque parle, Louis à genoux au milieu de l’église, déchaussé, la tête nue et en corps de chemise. »

2505 veed antreed en A. 2508 retom do pro A.


Go O

l’évêque

Chrétiens, peuple de Dieu, vous vous assemblez ici, pour remercier Dieu du temps passé ; et pour le prier en grâce de nous accorder toujours ce qui est nécessaire dans le temps à venir ; mais, par dessus toute chose, je vous prie, la journée d’aujourde faire vos prières ensemble avec les miennes [d’hui, pour un pauvre pénitent qui s’est rendu ici, pour aller dans le purgatoire effacer ses péchés ; il est ici présent et vous supplie en grâce, de prier pour lui, tant qu’il sera en son voyage ; nous sommes tous intéressés, d’après la loi de Dieu, à prier de cœur l’un pour l’autre ; quel chagrin pour nous, mes frères, mes sœurs, si, après ce voyage il ne revenait pas ! quel contentement et grande charité ce serait pour nous tous de louer Dieu ! aussi donc, mes frères et mes sœurs, je vous prie humblement de jeûner et de prier pendant vingt-quatre heures, et prions le seigneur Dieu du fond de notre cœur pour qu’il lui plaise de donner sa bénédiction au pauvre pénitent qui a l’intention de réparer sa faute du fond de son cœur ; j’ordonne aux moines et aux religieuses, et à tous les prêtres, et aux capucins, qu’ils restent à jeûner pendant vingt-quatre heures, pour prier Dieu pour le pénitent de lui donner la grâce d’effacer son péché, et de le conserver après pour les Joies ; et prions, mes frères, monsieur saint Patrice, fondateur et patron de l’Hibernie, et monsieur saint Augustin, grand patron du couvent, d’être avocats pour le pénitent ; 2519 2522 2529 2533 2534 2535 2539

manque dans C. goudema vou ed er A. goude bean et er veaj ma relornfe quet C. L’auteur confond attention avec intention. Cf. 117. ma chomouind A. da bedin an autrou A. dacordin dean A. Voir Introduction. Cf. 2234.

crions à la Vierge sacrée de prier son fils Jésus de lui donner la grâce d’être victorieux, et si nous sommes participants au bonheur de cet homme, nous serons récompensés dans les cieux par Dieu. Ceci, mes frères chrétiens, est une affaire importante . notre pénitent, hélas, doit tout gagner ou tout perdre ; présentons-nous tous devant le vrai Dieu, pour prier humblement la grandeur de sa majesté, de regarder avec pitié et avec compassion vers le pauvre pèlerin, qui veut le pardon, content de souffrir la peine, et tous les tourments, et la mort même pour ses péchés ; demain, à neuf heures, sera la messe du saint Esprit ; il vous sera donné de le savoir par les voix des cloches, et, au coup de dix heures, le pénitent entrera dans le purgatoire, pour souffrir peine et tourment ; et quand le pauvre cher pénitent sera entré, il y aura un prêtre à l’autel, pendant vingt-quatre heures ; prosternons-nous à deux genoux avec vraie dévotion pour demander à Dieu sa bénédiction ; qu’il donne la grâce à cet homme de sauver son âme, et nous donne la grâce de le voir après cela. Scène ; tous sortent. L’évêque, le prieur et tous les gens de l’église entrent pour conduire Louis au purgatoire ; Louis arrivé à la porte tombe à genoux. «

LE PRIEUR parle :

Or çà, pauvre pénitent, voici l’entrée ; maintenant, nous vous laissons à la volonté de Dieu, nous prierons le seigneur Dieu avec vraie dévotion, de venir vous consoler dans votre affliction ; vous êtes averti des souffrances ; soyez toujours courageux dans vos peines, ne vous épouvantez pas, au nom de Dieu je vous prie, de voir les mauvais Esprits tout prêls à vous déchirer ; 2561 renin est une faute de copie ; cf. v. 2462. 2561-2562 manquent dans C et sont remplacés par les vers 2583-2584. 2561 b « le prieur et Louis se dirigent vers la caverne en chantant le Veni Creator » M. 2562 d’hen guelet L. Cf. 2628 ; dan A. 2567 ho hauertised on deus A. 2570 gueled an drouc speregou A. o voelet an drouc-sperejou C.

ne craignez pas le feu, l’eau, puits, ni rivières, montagne, étang, ni aucune roue, peigne, ni haches ; soyez fidèle, et souffrez un petit moment ou deux, et après la souffrance, le signe de croix les chassera ; ne leur causez pas, sinon aussi peu que vous pourrez ; par dessus toute chose, je vous prie, ne vous épouvantez pas ; soyez joyeux, mon enfant, quand vous vous verrez jeté dans les et souffrez patiemment, Dieu vous secourra ; [précipices, il sera présent partout où vous allez. et si vous êtes courageux vous serez secouru, et quand vous aurez renvoyé les mauvais Esprits, priez votre corps de souffrir, en allant par les chemins. Dites : corps malheureux, il ne te sert à rien de te plaindre, il est nécessaire d’être courageux et souffrir constamment aussi joyeusement que tu allais, quand tu avais la liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; ici c’est à toi maintenant de montrer ta cruauté que tu mettais autrefois à pécher, dans le monde, et, quand il vous arrivera de répondre aux raisons du mauvais causez hardiment et ferme, et n’ayez aucune peur, [Esprit, ne leur montrez pas que vous avez envie de faire le poltron ; songez que Dieu eât présent, et monsieur saint Patrice. Maintenant, quand vous entrerez, vous perdrez les clartés, vous irez doucement et toujours à tâtons, et la première attaque sera le tonnerre, qui renversera sur vous de tout côté les murs ; et quand vous songerez que vous allez mourir tout à fait, faites votre signe de croix et vous vous verrez libre ; et quand ils vous casseraient tout de suite les quatre membres, après votre signe de croix, vous vous verrez sain et sauf ; et la route se présentera droite devant vos yeux ; allez toujours par celle-là, car ce sera le bon chemin ; quand vous serez jeté dans le feu, dans l’eau le plus profond aussitôt le signe de la croix, vous serez jeté dehors, [possible, 9

2585 a pa poay liberté A. 2587 aman e eo dit disquet an oll vras grueldet C. aman vo discouet dit pegement L. 2591 na discoelet C. 2593 ar sclerijen C.

continuez toujours à aller, ne vous arrêtez jamais, le nom de Jésus à la bouche, et le nom de la Vierge, et songez souvent à monsieur saint Patrice, qui est toujours à portée de vue pour vous protéger. Allons, pauvre pénitent, allez au nom de Dieu, Dieu vous console dans vos nécessités ! Nous prierons beaucoup de cœur les trois personnes de la de vous donner la victoire sur vos ennemis. [Trinité, Allez avec ma bénédiction, et avec celle du seigneur Dieu ; .entrez, pauvre pénitent, car c’est le moment. LOUIS

Chrétiens charitables, priez le vrai Dieu de m’accorder la grâce de sauver mon âmel Entre les bras de Dieu qui a créé le monde je recommande mon corps et aussi mon esprit. Au nom du Père, du Fils et du saint Esprit ! Adieu, âmes justes, je vais à mon appel. LOUIS dans le purgatoire ; LE PRIEUR ouvre la porte en sorte qu’il se tourne vers les gens et dit :

Prions Dieu, mes frères, du fond de notre cœur, qu’il lui plaise de donner sa bénédiction au pauvre pénitent qui est allé dans le purgatoire ; ô Dieu éternel, donnez-lui la victoire ; prions, chrétiens, sans reposer un moment ; en tout ceci nous sommes tous intéressés ; crions vers le ciel et d’ici demain, à cette heure, demandons-lui la grâce de le voir encore ici. Scène. Tous les gens sortent tristement ; tous tristes pleurant, priant Dieu ; pendant le jour et le lendemain, les églises s’ouvrent ; chaque homme porte sa chandelle avec lui ; toutes les églises étaient aussi claires à minuit qu’au milieu du jour ; surtout l’église de Saint-Augustin et l’église de Saint-Patrice. Louis dans le purgatoire ; le tonnerre renverse les murs sur lui. 2616 2619 2620 2628

d’accordin ar c’hras da zavetad ma ine C. speret glan C. quen a vo ma zud quer, me ha da vont d’ar poan C. goulomb digand Doue A.

LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à pécher. Dieu tout puissant, soyez glorifié ! Voici la première attaque de par le mauvais Esprit, par les ténèbres qui sont grandement effrayantes je ne sais où je vais, car je ne vois goutte ; mais en allant à tâtons toujours j’avancerai ; je crois que je vois devant moi une goutte de lumière, une goutte de clarté semblable au point du jour, et bientôt, je crois, je verrai ce que c’est ; deux rochers en un monceau ; il n’y a qu’un petit trou, c’est ici que je serai écrasé puisqu’il faut que j’aille dessous ; allons, corps malheureux, c’est là que tu dois passer ; mon corps passera, puisqu’est passée ma tête ; voici un point lumineux, merci à Dieu ! je crois que c’est une chapelle qui se présente là à moi, il me faut entrer ; les portes sont ouvertes, voici un bel endroit et quels beaux travaux, des balustres faits en bronze, et comme la forme d’un autel ; il est nécessaire que je m’agenouille un petit moment de temps ; mais qu’entends-je ? ô Dieu mon créateur, monsieur saint Patrice et tous les apôtres ! Les douze apôtres et saint Patrice entrent. SAINT PATRICE parle à LOUIS :

Paix et bénédiction maintenant à jamais ! vous avez trouvé, Louis, le chemin de la pénitence ; et si vous persévérez toujours avec vraie fidélité vous aurez la grâce, mon fils, de sauver votre âme ; nous sommes yenuè tous ensemble pour vous avertir ; si vous avez regret, Louis, nous vous ferons sortir, mais si vous nous laissez partir et qu’il vous vienne regret vous resterez en enfer pendant l’éternité. [ensuite, 2652 b « Des moines viennent vers lui ». Le prieur prend la parole M. 2655 perseveret bepred ’n hent ar fidélité C. 2656 da souetad A.

LOUIS

Je n’ai aucune envie d’avoir du regret, merci à Dieu ! au contraire je désire beaucoup souffrir pour ma méchanceté ; que mon rédempteur Jésus me donne son secours, pour que j’aie la victoire sur mon adversaire ! SAINT PIERRE

J’avais renoncé à mon rédempteur Jésus, et par la pénitence me voilà heureux, et vous aussi, Louis, en souffrant patiemment, vous surmonterez votre peine et vous serez triomphant ; aidez-vous, Louis, et nous vous aiderons, et Dieu, par miséricorde, mon fils, vous absoudra. .

SAINT PAUL

. J’étais persécuteur de l’Eglise et des chrétiens ; me voici heureux, pour avoir fait pénitence, chargé de chaînes, d’une prison à l’autre, et ma tête tranchée à la fin de ma vie ; souffrez toujours, Louis, et soyez toujours courageux, et nous prierons pour vous que vous soyez victorieux. SAINT PATRICE

Au nom du vrai Dieu, Louis, soyez ferme et constant ; ne vous effrayez pas des menaces de Satan ; quand nous sortirons d’ici ils y arriveront, et, de gré et de force pensant à vous épouvanter, ils feront ici un bûcher de feu, vous y serez jeté, mais avec le signe sacré de la croix vous en sortirez sans mal, et partout ainsi ; mais ne vous lassez pas, Louis, et vous aurez le bonheur de retourner sur vos pas ; allons, pauvre pénitent, nous allons vous quitter, pour l’amour de Dieu, ne vous effrayez pas ! LOUIS

Par la grâce de Dieu, je n’ai aucun effroi. et quand je verrais planter trente lances dans mon cœur, 2672 o vean groet C. 2673 samed a chadenou A.

je suis fermement décidé, je ne puis que mourir ; votre bénédiction, je vous prie, saints pères, priez tous pour moi par votre humanité, recommandez mon corps et mon âme à Dieul Tous donnent leur bénédiction. SAINT PATRICE

Ma bénédiction, et celle de Dieu vous conduise, Louis ; jusqu’à après cela ! Tous sortent sauf Louis ; huit diables arrivent. BELZÉBUTH

Eh bien donc, Louis, ici tu es attrapé, tu n’iras plus à Toulouse cajoler les filles ; puisque tu es venu nous trouver de bonne volonté, nous t’avons préparé fricots et bonne1 chère ; allons, du feu tout de suite, que soit mise la brochel car Louis est un de nos chers amis. ASTAROTH

Voici un grand feu, mais ce n’est pas tout ça ; je n’ai pas désir qu’il perde la vie ; si tu veux encore, Louis, tu retourneras dans le monde, car tu es venu trop tôt, pauvre cher sot, nous trouver ; songe si tu vas retourner et je le conduirai ; si tu ne veux pas le faire, tu n’es qu’un tison de charbon ; réponds donc, Louis ; est-ce que tu es muet, cette fois-ci ? reviens-tu sur tes pas ? ou je vais te rôtir. LOUIS

Dieu me préserve, Esprits maudits ! je n’ai que trop, hélas pour moi, cru en toi,, mais pour cette fois-ci, avec la grâce de Dieu, tu perdras le pouvoir que tu as eu sur mon âme, mon corps est en ton pouvoir, pour un peu de temps, [sauveur, mais ce ne sera pas pour longtemps, par la grâce de Jésus, mon

2699 laquet C. 2707 petra mud A.

MOMON

Ecoute l’impertinent bordelier de Toulouse, celui-ci est effronté, c’est celui-ci qui cause ! tu es arrivé parmi nous, tu n’as pas besoin, meurtrier, assassin des gens, voleur sur le grand chemin ; comment, âme damnée, tu songes à obtenir pardon ! tu es devant Dieu comme une pourriture ; songe si tu retournes, ou si tu vas au milieu du feu, ou éteVnellement tu ne sortiras pas d’ici. BÉRITH

Retire-toi de là, Momon, tu as été trop complaisant ; qu’il aille au milieu du feu pour être brûlé ; va dedans, tison d’enfer, que tu grilles ton cœur ! et ensuite tu diras : je ne suis pas un poltron.

,

/

LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan, vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Les diables s’en vont en courant. LOUIS continue :

Allons, corps misérable, il ne sert à rien de te plaindre ; il est nécessaire d’être courageux et de souffrir tout content, aussi joyeux que tu allais, quand tu avais la liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; maintenant donc, c’est à toi de montrer ta cruauté que tu mettais autrefois à pécher dans le monde ; Jésus, mon rédempteur, Dame Vierge Marie, la grâce de souffrir toujours, 6 monsieur saint Patrice ! Huit diables viennent & Louis. LE VIEUX SATAN parle :

Ah ! assassin, voleur, tu es attrapé cette fois-ci ; je te torturerai, je m’en vante ; 2733 Cf. 2585. 2734 evit col va enée P.

songes-tu, tison d’enfer, que quand tu venais de Rome, tu m’as saccagé ; tu n’es qu’un fripon ; mais, pour cette fois, tu es, corps et âme, damné, car tout à l’heure à l’instant, fripon, tu seras pendu ; il y a longtemps que tu devais l’être, jean-foutre, libertin ; mais ta noblesse venait cacher ton crime ; allons^ les chaînes et la corde à son cou ; violeur de filles doit mourir sur la potence, et je me pendrai à ses pieds pour l’étirer ; allons donc, consorts, tout de suite pendez-le. ASTAROTH

Il aura encore quartier, vieux Satan, je te dis, s’il veut me promettre ferme qu’il s’en retournera, et qu’il ira encore dans le monde se divertir ; car il a encore de la vie d’ici à trente ans ; réponds donc, Louis, et explique ta raison ; je te protégerai toujours, car nous sommes deux amis. LE VIEUX SATAN

Celui-là ne dira mot, puisque ce n’est pas dans sa tête ; monte à la potence, Momon, et tiens le bout de la corde ; tire à toi vers en haut, et d’ici nous élèverons ; et saute sur ses épaules, car il sera sûrement pendu. MOMON

Il sera sûrement pendu, déjà il est engoué, regardez donc comme rapidement il s’est allongé, mais je pèse sur son cou, et vous, vous tirez de là, je crois, celte fois-ci, que c’est la fin de sa vie. LOUIS à la potence :

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Louis tombe à bas sain et sauf ; les diables s’en vont.

«

SATAN parle :

Mon âme est troublée, le voilà détaché, le voilà qui part, et il est fait sain et sauf en un moment, j’étais resté derrière, et vous vous couriez tous, Momon, je croyais, se serait cassé le cou. MüMON

J’étais sur ses deux épaules, et comme j’étais campé, mais par son signe de croix j’ai été culbuté ; mille malheurs à jamais ! je n’irai plus le pendre, je pensais que j’étais écrasé, je vous dis, en tombant. LOUIS

Allons, corps malheureux, il ne sert à rien de te plaindre ; il est nécessaire d’être courageux et de souffrir patiemment, aussi joyeux que tu allais, quand tu avais la liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; c’est ici qu’il te faut maintenant montrer ta cruauté que tu mettais autrefois à pécher dans le monde. Louis va toujours. Le diable BÉRITH parle :

Hâtons-nous d’aller après lui pour l’attraper ; peut-être qu’à la fin nous le mettrons à s’épouvanter ; tenons chaud, et hâtons-nous, il commence à se fatiguer ; arrêtez, grand voleur, à quoi songez-vous maintenant ? vous pensez être quitte parce que vous êtes dépendu, tout à l’heure, à l’instant, vous allez être brisé ; voilà le supplice qu’il y a pour la lubricité ; approchez, tison d’enfer, que vous ayez votre lot aussi ; tenez-le, Asmodée, voici le père des libertins, brisez-lui les membres, il y a longtemps qu’il l’a mérité. Le voilà sur le banc, et frappez avec votre hache ; celui-ci était autrefois nuit et jour au bordel. ASMODÉE

Je ne frapperai pas un coup, s’il veut m’obéir ; s’il veut retourner sur ses pas, j’irai le conduire ; 27% Le nom d’Asmodée se trouve pour la première fois dans Tobie, III, 8. Il apprend aux hommes à devenir invisibles et découvre les trésors. On le trouve dans la Création du Monde, la Vie de VAntéchrist. Dans la Vie de saint Gwenolé, il est nommé, par Satan, prince de la Luxure. ’S.

car il a fait pour nous, sur ce que j’ai entendu dire, et encore il fera s’il veut envoyer des gens nous voir. Retourne Louis et crois que j’ai grande joie à toi, car si tu t’entêtes, pauvre cher, tu ne seras pas quitte ; je suis forcé de te briser à coups de hache, jusqu’à ce que tu sois contraint par les douleurs de mourir ; tu n’as rien vu, Louis, de ce que tu verras ; des tourments grandement horribles, il te faudra souffrir ; et, si tu veux retourner, même quand tu arriverais après, tu ne souffriras aucun tourment, je te le promets. ASTAROTH

Que radotes-tu là ? tu m’étonnes ; hâte-toi de lui briser les os, pour que nous soyons quittes ; celui-là ne s’en ira pas d’ici avant qu’il n’ait souffert tout ; de dessus le pont de glace, là il se cassera le cou, dans le dernier supplice, là il restera ; son péché est si grand, Dieu le permettra ; Dieu a horreur de ses crimes mondains, en sorte qu’il l’a condamné à toutes les peines de l’enfer. Tiens et brise ses os, et ensuite le cartilage de sa face, et ensuite nous le traînerons faire un tour à la grande roue. ASMODÉE

Si tu es muet, tison d’enfer, maintenant tu cesseras de l’être ; il commence à se réveiller, son nez sue, au point que la moelle jaillit des os de ses cuisses. Vous n’êtes pas maintenant, indigne, à caresser les filles. LOUIS

Au nom du Père, du Fils et du saint Esprit, je te conjure de me quitter, ennemis mortels, tu te peines en vain si tu songes à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à te croire. Les mauvais Esprits s’en vont ; Louis sain et sauf part. 2822 dain A. 2822 Sur l’emploi de la 2® p. sg. lorsque l’on s’adresse à plusieurs personnes, voir Malgorn, Le breton d’Ouessant, Annales de Bretagne, . t. XXV, p. 220, 221.

Mon Dieu, mon créateur, donnez-moi la patience, force, courage, et pouvoir de dompter le mauvais Esprit. Reine du ciel, Jésus crucifié, quels horribles tourments sont pour le péchéI je vois ici aujourd’hui ce qui était dû, pour les grands péchés que j’avais commis ; allons, corps malheureux, montre ta cruauté, que tu mettais autrefois à pécher dans le monde ; tout ceci n’est que le commencement, et grâce à Dieu, je n’ai aucune inquiétude. Les diables accourent après. CARNAGON

Bonjour à toi, coureur de filles et voleur de religieuse, tu es venu ici chercher ta cousine germaine, qui a été avec toi dix-neuf ans, libertin, à faire le mal, et tu es venu ici pour nous faire des histoires, tu t’es trompé, indigne, car j’ai la main sur toi, et avant que je ne te lâche, j’aurai la fin de toi ; voici une roue sur laquelle tu seras attaché ; d’ici que tu aies fait deux tours, tu seras tout écartelé ; allons, amarre-le par les pieds, Bigoré ; fais tourner la roue, n’aie pas de pitié ! BIGORÉ

Laisse-le avec moi, ne crains rien, c’est ici qu’il sera cuisiné ( ?) il n’est pas en Allemagne à fourrager des filles ; quand ma roue se mettra à tourner, quand il tombera sur les il y restera la peau, la chair, et les boyaux ; [peignes, allons, ivrogne, ici tu sems dégrisé ; allons, la roue en mouvement, pour qu’il soit démembré ; eh bien donc, infernal, ici, on sait vous arranger ; dites donc, coquin, est-ce que vous avez désir de femme ? trouve Belfegor, prince de la Gourmandise, dans la Vie de saint Gwenolé (Revue celtique, t. XX, p. 242). Cf. Belfegou, dans Cognomerus et sainte Trèfine, v. 1320. 2845 a vo quignet C. Il est possible que quiniged soit pour quigined « cuisiné ». 2846 a. v. 1307. 2847 voair ar A. 22

LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Les diables s’en vont ; Louis va son chemin.

Allons, corps malheureux, il ne sert à rien de te plaindre ; il est nécessaire d’être courageux et de souffrir avec constance aussi joyeux que tu allais, quand tu avais ta liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; maintenant, c’est à toi ici de montrer ta cruauté que tu mettais autrefois à pécher dans le monde. O Dieu, mon créateur, je n’aurais jamais cru, les peines détestables qui sont dues au péché, si les gens du monde croyaient comment on punit, avant que de commettre le péché, il vaudrait mieux mourir ; mais, hélas, des gens sans foi comme moi, mon Dieu, ne croiraient pas sans voir, et moi je ne croyais pas non plus ; je demande pardon de mon incrédulité ; pour tous les gens du monde, je demande aussi. Dieu grand, immortel, je vous prie de cœur d’être attentif à ma désolation ; j’ai regret, mon Dieu, de vous avoir offensé ; je souffrirai pour votre gloire tout ce que vous désirerez. Les diables accourent en criant. BIGORÉ parle :

Arrêtez, vieux fripon, vous vous êtes trompé de route ; maintenant nous avons le pouvoir de vous briser le cou ; venez avec moi, meurtrier, sans délai vous éprouverez quelle corvée vous avez entreprise ; votre voyage est achevé, vous êtes condamné, homme inhumain, vous allez être jeté dans le grand puits de l’enfer, et là vous resterez pendant l’éternité, puisque vous êtes venu vous donner à nous, âme, corps et vie ; 2859 2860 2877 2878

a pa poay A. quend comelin A. hep dale e ouifet C. petore curunen C.

vous serez la pierre fondamentale dans le puits infernal, maintenant, on vous entendra de partout crier, voyez-vous les flammes de feu étouffer la fumée ? attrape-le, Astaroth, aide à le jeter 1 ASTAROTH

Je ne consentirai jamais à venir le supprimer, et s’il veut encore retourner, j’irai le conduire, et s’il reçoit une offense, en s’en allant de cet endroit, je demande à jamais les supplices les plus cruels. Réponds donc, Louis, et cause franchement car je te respecte, parce que tu as été un homme vaillant. MOMON

Je n’entends pas tout ce langage ; va dans le puits, homme damné, voilà ton héritage ; vois le beau bouffon, il ne dirait mot au monde ! avant qu’il s’en aille de là, il sera dompté. BÉRITH

Tu as été trop prompt, Momon, je te dis, si tu l’avais laissé, peut-être serait-il parti, car il est arrivé éreinté, c’est un fardeau pour lui de marcher, bientôt il retournera, car je connais cela. LOUIS se dresse au milieu des flammes et de la fumée : -

Au nom du Père, du Fils .et du Saint Esprit, je vous conjure de me quitter, serviteurs de Lucifer ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Tous s’en vont en courant. LOUIS

Jésus-Christ, mon rédempteur, serait-il possible tout de même, de souffrir tant de peines pendant l’éternité ? oui, corps malheureux, il ne sert à rien de te plaindre, il est nécessaire de prendre courage et de souffrir tout content ; quelle belle grâce c’est pour moi de souffrir tout en un jour, au prix d’être ici pendant l’éternité !

Allons, mon vrai Dieu, je vais à un autre supplice ; Satan aura beau me menacer ou me flatter, je ne me chagrine pas ; Dieu est avec moi, Jésus et la Vierge et monsieur saint Patrice ; toutes les âmes heureuses, au ciel et sur terre, * prient pour moi aujourd’hui et demandent la victoire ; et je l’aurai, je crois, par la miséricorde de Dieu. Il est temps d’être fier ; ils sont arrivés de nouveau.

/

Les diables viennent tous. LE VIEUX SATAN parle :

Le voleur s’en ira d’ici net de péché, honte et confusion sera à nous, camarades ; j’avais un grand désir de l’avoir à jamais, le fripon scélérat, plein d’effronterie ; celui-là est un fripon, je n’ai rien de plus à dire, peu s’en est fallu qu’il ne m’étranglât ! BIGORÉ

Mon âmel consorts, hâtez-vous, venez vous-en de là ; bientôt, le larron sera en pleine liberté ; attends, attends, Louis et patiente un peu, la religieuse est arrivée qui a besoin d’être frottée, la mère Théodosia, ta cousine germaine, qui a été ta femme pendant dix-neuf ans, mais tu as oublié cette sorte de commerce, et tu songes à être quitte avec une pénitence d’un jour ; voici, mon homme, la montagne Ménez Hellas ; avant que tu sois arrivé en bas, ta face sera déchirée ; et voici l’étang puant, tout prêt à te recevoir ; maintenant tu peux croire que c’est la fin de ton temps. CARNAGON

C’est bien le moment, Louis, de faire réflexion ; c’en est fait de toi, je te dis, mon ami ; 2928 bean froted A. Sur le sens de ce mot, cf. Ernault, Le Mystère de sainte Barbe, sfcr. 456, 486, 488. Cf. cd-dessus, v. 2264. 2930 eo bed A. cf. 687. 2933 souvenir classique. 2938 groet ec’h eo ac’hanout C.

il y a deux lieues à pic à descendre dans cette montagne, et tu iras rouler dans l’étang, où tu devras périr ; les peines que tu as eues ne sont pas à comparer à celle que tu auras, si tu ne m’obéis pas, c’est plein de ronces et d’épine qui te déchireront sûrement, et tu seras noyé en un instant dans une eau si sale, et tu ne sortiras jamais, cela, tu peux le croire, retourne encore dans le monde, Louis, et obéis-moi. LE VIEUX SATAN

Il est inutile à toi de causer à un larron effronté, celui-ci fait fl d’entendre votre prêche ; allons donc, enchanteur, allez faire pénitence ; cette fois-ci, j’ai idée que vous resterez en enfer. On jette Louis en bas de la montagne. BIGORÉ crie :

Haro, haro, haro, le patron des voleurs est venu en enfer pour faire pénitence. dans le fond de l’étang il sera canonisé, un saint grandement vertueux pour les religieuses, que je sois raccourci ! le voici arrêté, il n’est pas allé dans l’étang, il ne sera pas encore noyé, il ne peut plus se lever, il est crevé cette fois-ci ; hâtons-nous d’aller en bas pour le noyer ! LOUIS si épouvanté qu’il avait oublié le signe de croix :

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Les diables s’en vont en courant.

O mon vrai Dieu, j’étais si étourdi, que j’avais tout à fait oublié le signe de la croix, et à l’instant où j’ai appelé la Vierge Marie, à ce moment-là même, il m’est venu à l’idée ; 2955 pe da vin n’em dromplet C. 2961-2962 manquent dans C. 2963 etourdisset C. 2965 hac evel ma meus galvet ar C.

maintenant, je dois faire le tour pour aller de l’autre côté de et d’ici là, je crois, Satan sera arrivé. [l’étang, Dieu tout puissant, Jésus-Christ béni, Reine des cieux, je vous prie, secourez-moi, et monsieur saint Patrice, fondateur de ce voyage, priez pour moi, j’en ai besoin maintenant ; ô saints apôtres, vous m’aviez consolé ; priez Dieu pour moi, je suis terriblement affligé ; oui, corps malheureux, il ne sert à rien de te plaindre ; il est nécessaire d’être courageux et de souffrir avec constance, aussi joyeux que tu allais quand tu avais la liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; ici, c’est à toi de montrer maintenant ta cruauté que tu mettais autrefois à pécher dans le monde. Là-bas, je crois voir comme deux manières de maisons une pierre sur l’autre, sans boue ni argile ; depuis le commencement que fut créé le monde ces deux maisons-là doivent sans doute être élevées. Voici, mon vrai Dieu, mes ennemis arrivés je les entends crier comme des loups enragés ; mon Dieu, je demande par votre grâce le courage, assistez-moi, jusqu’à l’heure dernière. Les diables accourent. BELZÉBUTII parle :

Or çà donc, Louis, je dis que tu es sorcier ; tu ne mourras donc pas de peine ni de misère ? je pensais tantôt que tu étais déchiré et je te vois de nouveau remis en état ; quelle raison as-tu eue pour ne pas rouler dans l’étang ? maintenant, je crois, Louis que tu es un fainéant, tu sues terriblement, tu as chaud, sur ce que je vois. Mais ici il y a une maison pour te rafraîchir ; voilà un étang de forte glace et de frimas ; tu vas y être trempé tout à l’heure, indigne ; et d’ici que je ne sois fatigué ou que je te laisse partir, il y aura une charge de dents de janvier partout attachée à toi ; 2985 2986 2988 2998

allon A. Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 221, note 5. bete ar momed A. * e vi c’hoezet enni bremason, den indign C. 0

allons donc, putassier, glacez votre membre, une dent de janvier est attachée à tous ses poils ; il commence à danser, ses dents craquent ; vous n’êtes pas là au bordel à faire de mauvaises façons. B1GORÉ

Gonduis-le à l’autre maison, qu’il aille dans l’eau bouillante, pour accroître son châtiment, au voleur de religieuses ; viens à moi, et croche-le, maintenant qu’il est glacé, que je le plante dans l’eau bouillante. BELZÉBUTH

Tiens-le donc, Bigoré, et fais-en à ta guise, car je n’en veux plus, je suis fatigué de lui. BIGORÉ l’emmène dans la maison la plus proche :

Allons, garçon aux filles, là vous aurez chaud ; dites impertinent, est-ce que vous désirez une fille ? et n’est-ce pas pénitence qu’il vous faut faire ? Faites donc pénitence, scélérat et voleur, ça chauffe pour votre échine, cette fois-ci, Louis, mais puisque vous ne voulez pas retourner sur vos pas, vous devrez rester ici éternellement, pour vous accoutumer à la peine et au tourment. LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vou3 peinez en vain, si vous songez à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à vous croire. Les diables s’en vont..

O Dieu éternel, quels horribles tourments souffrent continuellement ici les âmes ; ô Jésus-Christ crucifié, et vous me l’auriez dit, je ne l’aurais pas cru ; 3006 evit cresqui poan da laer al leaneset C. 3009 a crog d’ez quis ennan C. 3011-3012 manquent dans C. Sur le sens de inpertinand, voir 1420.

hélas, pauvres pécheurs, nous sommes malheureux par cela ; un jour arrivera que vous le saurez aussi bien que moi ; oui, corps malheureux, tu n’as mot à dire, tu n’as pas souffert assez pour ce que tu as mérité, ici était ma place pendant l’éternité, et en vingt-quatre heures, ce sera la fin avec la grâce de Dieu. Les diables accourent tous. BELZÉBUTII

Haro, haro, vieux bordelier, où allez-vous par là ? [aussi, vous n’avez pas besoin de vous presser, nous irons avec vous vous ne vous êtes pas pressé depuis que vous êtes venu en enfer, vous n’avez pas encore sué, comme vous le ferez bientôt ; vous ne daignez dire mot à vos anciens amis ; mais, sans délai, je crois que vous saurez prêcher. Voici le pont de glace, tenez, levez la tête, trois quarts de lieue au moins sont nécessaires pour le traverser, il n’a que la place d’un pied de largeur, et vous vous casserez le cou, sans délai, de dessus ; et voici le grand étang de l’enfer en dessous ; regardez et comhélas, pour cette fois, Louis, vous êtes bouclé ; [prenez ; maintenant, quand vous voudriez retourner et revenir sur vos je ne vous laisserais pas aller, je vous dis, Louis ; [pas, voilà le pont, passez quand vous voudrez, et lui encore se plie comme un vieil arc, si vous vouliez, étourdi, vous avez été assez prié de quitter cet endroit et de retourner dans le monde ; [tant, dans le grand étang est votre place, oui, et tout à l’heure à l’inset ce sera vous-même qui vous casserez le cou dans l’étang. BÉRITH

S’il veut prêter serment, et jurer clairement qu’il mènera une vie comme il a fait ; je me ferai fort de l’envoyer encore d’ici, sans recevoir aucune offense de l’eau ni du feu.

3048 « semblable à une vieille voûte » M. 3053 Cf. Sainte Nonne 1628 ma car C. ja a toueed A. Sur serramant, cf. Ernault, Glossaire*, p. 591. 3054 e conduou eur A. 3055 en cassin C.

En quoi serions-nous mieux, s’il restait ici, alors qu’il peut vivre encore, toujours une trentaine d’années ; allons donc, Louis, réponds-moi promptement, ou tu resteras pour de bon, ou tu retourneras encore ; cause donc promptement, ou avance sur le pont ; regarde l’impertinent, il ne daignerait pas répondre 1 ASTAROTH

Allons, il est nécessaire d’en finir ; une partie en trépignant [derrière lui et une partie devant lui, pour que le pont se brise promptement sous lui ; il aura du travail alors à faire son signe de croix, une fois qu’il sera tombé sur la tête dans le grand étang. Allons, mouton du Pont vert, et lutin de Qyéribou, avance donc sur le pont, ou je vais te poignarder. LOUIS

Au nom du Père, du Fils et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; tu te peines en vain, si tu songes à me faire retourner de nouveau dans le monde et venir à te croire. Ils s’en vont en courant.

Au secours, Père éternel, regardez-moi avec pitié ; Jésus, mon rédempteur, secourez-moi aussi ; Reine du ciel, Vierge glorieuse Marie, Apôtres bénis, et monsieur saint Patrice, vous toutes, âmes heureuses, qui êtes mes protecteurs ; prosternez-vous à deux genoux, je vous prie, à ma requête, devant le Créateur du monde, pour le supplier, de me donner son assistance pour passer ce pont-ci. Je vais au nom du Père, du Fils, et du saint Esprit, de monsieur saint Michel et de mon ange gardien. Il va sur le pont. Louis, en traversant le pont de glace, sentait une main invisible contre son côté pour le soutenir, pendant qu’il passait ; les âmes damnées qui étaient dans l’étang crient toutes :

Casse-lui le cou au méchant ; celui-là a péché pire que nous toutes, et nous voilà damnées ; 3077 Ineou C. 3084 evidomp oll C. 23

casse-lui le cou, casse-lui le cou ; où êtes-vous allés, diables ? il traversera le pont et il s4en retournera. Les mauvais Esprits restent confus. LE VIEUX SATAN dit :

Le voilà sauvé, cette fois-ci, consorts, en dépit de notre malice, il a eu la victoire ; et ce n’est pas sans avoir peiné, l’un et l’autre, sans avoir employé toute notre malice à chercher à avoir son le voilà de l’autre côté, sà guerre est achevée ; [âme ; maintenant il sera pardonné par Dieu éternel ; nous pouvons dire qu’il n’y a jamais eu de pécheur qui porterait un cœur avec tant de courage ; je dis adieu à Louis pour la dernière fois, nous n’aurons plus aucun pouvoir sur lui. Les diables s’en vont désolés. LOUIS, de l’autre côté du pont, s’asseoit sur son séant pour se défatiguer et il parle :

Maintenant, Père éternel, avec une vraie dévotion, je rends mille grâces à votre bénédiction ; ô Dieu pitoyable, plein d’humilité, j’ai senti votre main sacrée soutenir mon côté ; c’est un miracle, qui est à comprendre ; il pliait sous moi comme une vieille planche ; il m’était impossible de le traverser, sans la main invisible qui m’a soutenu. Mais il est temps pour moi de me lever et de partir de nouveau et d’aller par la route que présente mon Dieu. L’agréable bruit qui vient là d’en haut, le beau ruisselet d’eauI je vais boire une goutte ; quelle admirable eau qui m’a rassasié et m’a défatigué ; Dieu, soyez loué ! mais le beau château que je remarque là ! la porte est un soleil, comme quand il paraît au milieu du jour ; en guise de fenêtres il y a des étoiles des plus brillantes ; et un parfum admirable à mesure que j’avance ;

3101 3104 3106 3113

de la Société de linguistique de Paris, t. XII, p. 432 ; Mélanges H. d’Arbois de Jubainville, p. 77. C’est-à-dire : qui donne à réfléchir. Cf. 2382. pa ne vid an A. bresand ar guir A. vit prenechou e neus steret ar brillantan C.

mais voici un beau jardin où je vois trois personnes, les saints prophètes Moïse, Enoch èt Hélie les trois agréables hommes ! ils sont arrivés vers moi ; je vais tomber à deux genoux pour les saluer. Il se met & genoux.

Salut, saints pères, vrais prophètes de Dieu ; prosterné à deux genoux en toute humilité, je vous demande, s’il vous plaît, votre protection, et par votre bonté, votre bénédiction, faites mes compliments, je vous prie, à Dieu ; priez-le de me regarder d’un œil de pitié. MOÏSE

Ma bénédiction, et celle de la Trinité aille avec vous, Louis, et soyez toujours fidèle. ENOCH

Pénitent courageux, persévérez toujours, soyez fidèle à Dieu, et ne l’offensez pas, puisque vous avez eu la grâce de nettoyer votre âme, vivez maintenant en paix, et en la crainte de Dieu. ELIE

Je prie le seigneur Dieu, par sa compassion, de donner, ensemble avec moi, sa bénédiction, de vous conserver sans péché le reste de votre vie, pour que nous ayons la grâce de nous voir dans le ciel. Ils passent ; Louis part du jardin ; une belle procession sort du château, où il voyait trois archevêques d’abord en tête, les douze apôtres ensuite et des millions de gens de tout sexe et condition, des croix, des drapeaux, des bannières, une musique et des voix admirables. Louis à deux genoux ; un des trois archevêques qui était saint Patrice vint parler à Louis. SAINT PATRICE

Rendez grâce à Dieu, votre créateur béni, vous êtes pardonné par lui, et fait net de péché ; 3124 gant eur lagat a drue, pedet an d’am sellet C. 3134 b « Une procession arrive en chantant le Veni Creator et lès Anges répondent en chœur... la procession s’arrête devant Louis et chacun le salue... Le glorieux saint Patrice qui vient le dernier dans la procession dit â Louis » M (Voir Introduction).

mais il est temps pour vous, Louis, retournez promptement car bientôt sera la fin des vingt-quatre heures ; et si vous n’étiez pas arrivé à la porte à l’heure et au moment, ils s’en iront tous de là et on ne vous chercherait plus ; retournez sur vos pas, vous n’aurez pas du tout d’offense ; le mauvais Esprit n’a plus de pouvoir sur vous ; quand ils vous verront passer, ils courront vite se cacher ; vous passerez par là, mais vous n’aurez aucun outrage ; et quand vous arriverez dans le monde, soyez toujours défiant. au nom de Dieu, je vous prie, ne venez plus à pécher. LOUIS

Saint père, je vous prie et j’aimerais à savoir en mon cœur s’il est, notre maître, dans la procession. SAINT PATRICE

Oui, il est visible pour nous, mais vous ne le verrez pas, avant d’être mort, et d’avoir quitté le monde ; et cessez de pécher, priez Dieu toujours, au bout d’un an et un jour, espérez le voir ; partez tout de suite, Louis, je vous supplie, ne séjournez nulle part, hâtez-vous de vous rendre, car le temps presse, et le moment approche. Dieu vous conduise ! je vais partir. LOUIS

Votre bénédiction, saint père, je demande, et au même instant je vais partir. SAINT PATRICE

Dieu vous bénisse, et moi je le fais aussi ; adieu donc, Louis, jusqu’à après cela ! Louis en route. Scène. LOUIS arrive au pont de glace et dit :

Dieu grand, immortel, me voilà rendu, en face du pont de glace ; votre secours, je vous prie ; «

3145 la dimp eo visibl C. 3152 C’est le délai ordinaire dans les légendes. A. Le Braz, La Légende de la mort chez les Bretons armoricains, t. I, p. 193. 3160 b a rar A.

voici le plus horrible endroit que j’aie à traverser, donnez, par votre bonté, votre main sacrée pour me soutenir 1 LOUIS traverse le pont et ensuite parle :

Grâces éternelles je vous rends, mon vrai Dieu, votre main sacrée bénie, appuyée à mon côté, m’a fait passer, sans branler d’aucun côté, et j’ai passé bravement avec la grâce de Dieu ; me voici arrivé aux deux maisons anciennes ; à l’endroit où j’avais beaucoup souffert de par mes adversaires ; il m’est nécessaire de jeter un regard avant de partir. Comment, mon père confesseur, vous êtes arrivé ici ? LE PÈRE CONFESSEUR

Oui, mon cher ami, il y a deux heures que je suis arrivé ici, et d’ici deux autres heures, j’espère sortir ; et grâce à Dieu, mon créateur béni, après ces quatre heures-ci, j’irai aux Joies. LOUIS

Le purgatoire, saint père, c’est cet endroit-ci ? car pour grands que soient votre peine et votre tourment, votre visage est plein de contentement ; au prix de ce que sont en enfer les âmes méchantes. LE CONFESSEUR /

Eh oui, mon cher enfant, c’est ici le purgatoire ; et pour grands que soient notre peine et notre chagrin nous espérons un jour être tous délivrés, et placés dans le ciel au milieu des Joies. LOUIS remarque une cousine

à lui :

Et vous, ma cousine, qu’est-ce qui est cause de ce que vous êtes arrêtée dans la prison de Dieu ? Vous aviez mené dans le monde là-bas votre vie, dans un couvent, à louer Dieu. 3173 la, diou heur zo aboue ma c’hon ari aman C. 3174 me esper C. 3177 ar plas man tad santel ehe ar purgoatoair A. 3178-3180 a. 3540-3542.

SA COUSINE

Il n’y a pas de cause, mon cousin, sinon la vanité qui m’a fait entrer dans la prison de Dieu ; et j’ai une année à souffrir les peines ; alors, je serai délivrée pour aller aux Joies. LOUIS

Dieu vous console, âmes prédestinées ! vous êtes sûres, par la grâce de Dieu, d’aller aux Joyeusetés ; je suis encore mortel, et je vais encore dans le monde, m’exposer de nouveau au vice et au péché ; je vais partir, Dieu vous pardonne, grâce soit à nous de nous Voir une journée dans les cieux ! Les diables cachent leur visage quand Ils voient Louis traverser et courent de tout côté.

Il est temps pour moi de me hâter, sur ce qui m’est dit par mon vrai protecteur, monsieur saint Patrice ; mais je vois que je suis bientôt arrivé à la salle, à l’endroit où j’avais vu pour la première fois les apôtres ; je vais entrer encore pour me reposer un peu, — car je suis venu vite, je n’ai pas tardé, — • et pour rendre grâces au sauveur mon Dieu des faveurs qu’il m’a faites aujourd’hui. Louis dans la salle, à deux genoux. Les apôtres entrent et SAINT PATRICE parle :

Allons, Louis, il est nécessaire de partir promptement ; il ne faut pas, mon enfant, vous attarder un moment de plus ; je vous avertis, quand vous arriverez dans le monde, faites attention, par dessus toute chose, à ne pas tomber dans le occupez-vous, nuit et jour, du seigneur Dieu ; [péché ; D’ici un an et un jour, sera la fin de votre vie ; vous avez vu, Louis, par quelle sorte de tourments on punit ici durement les péchés ; 3205 3207 3210 3212

gras dan otro Doue A. alon Louis partian promptamant zo ret C. dreist peb tra A. Cf. 3152.

quand vous arriverez maintenant au milieu des murailles, vous serez encore épouvanté par un coup de tonnerre, et les murs tomberont autour de vous ; mais, avec le signe de la croix, vous serez rendu sain et sauf ; et partez tout de suite, sans arrêt, mon ami, nous vous accompagnons de notre bénédiction. LOUIS

Je rends grâces à Dieu et à vous, saints pères, je vais partir, puisque vous me dites de le faire, et ne m’oubliez pas, âmes heureuses ; demandez toujours la grâce que je sois victorieux, car tant que je serai dans le monde, selon ce qu’il me semble, une guerre continuelle, hélas, sera la mienne. Les apôtres disparaissent. LOUIS

Au nom du Père, du Fils et du saint Esprit, avançons de nouveau par les ténèbres, et si les gens du monde savaient comment on punit dans les enfers les péchés mortels, il vaudrait mieux se jeter dans le feu ou l’eau bouillante, que d’avoir le malheur de commettre le péché ; je croirai maintenant parfaitement par la grâce du vrai Dieu, et encore je n’ai souffert qu’un abrégé. Louis continue :

Voici l’obscurité ; je suis arrivé au milieu des murs, je ne vois plus la terre ni aussi les cieux. Ici le tonnerre vient à renverser les murs sur Louis et le jette violemment à terre. Louis fait le signe de la croix :

Au nom du Père, du Fils, et de l’Esprit pur, je vous conjure de me quitter, officiers de Satan ; vous vous peinez en vain, si vous songez à me faire vous reconnaître jamais et venir à pécher. Oui, corps malheureux tu n’as pas à te plaindre, il est nécessaire d’être courageux et de souffrir tout content, 3237 mab hac ar A. 3241 ha... qued eon a damand A. 3242 bean A.

aussi joyeux que tu allais, quand tu avais la liberté, pécher, corps méchant, et perdre ton âme ; c’est ici qu’il te faut maintenant montrer la cruauté que tu mettais autrefois à pécher dans le monde. Mon Dieu, mon créateur, je ne sais où aller, ni ne sais si c’est du bon côté ou du mauvais côté que je suis puisque c’est par les murailles que j’ai été renversé ; [tourné, mon Dieu, mon créateur, je vous prie, conduisez-moi ! La procession, tous les prêtres, les moines et les capucins et un peuple infini viennent à la porte ; le prieur tourne la clef et ouvre la porte ; Louis se jette à genoux ; le prieur lève ses deux bras en l’air et se tourne vers les gens : Te Deum laudamus, Te Dominum confilemur, Te ætemum patrem omnis terra veneratur. Louis sort au milieu de la procession, les gens pleurent d’admiration, rendent grâce au Seigneur Dieu, en sorte qu’ils vont tous à l’église en chantant le Te Deum ; puis Louis continue :

Chrétiens, mes frères, et mes chères sœurs, je voudrais être entendu par le monde en entier, déclarer en quelle guise on fait dans les enfers, et en quelle guise on punit les péchés ; mais, hélas, pauvres pécheurs, vous ne le croirez pas ; mais je déclarerai tout, en présence de mon Dieu, et je signerais ici en votre présence, de mon sang, comme quoi tout ce que je dirai est vrai et véritable ; de mes propres yeux je les ai tous vus, et en mon corps indigne j’ai tout souffert ; croyez donc, pécheurs, mes frères, et faites attention ; celui qui ne croira pas aura regret dans son cœur, au moment, à l’instant où je suis entré, j’ai perdu entièrement toute la clarté du monde, en sorte que j’allais à tâtons de gauche et de droite, sauf que de chaque côté de moi, je sentais des murailles ; je regardais en bas, je regardais en haut, tout était même chose, car je ne voyais goutte, 3254 3255 3260 3264 3266

hac ar fesson e C. pes feson A. nemet pec’herien C. a neus bed A. antieremand A. mes a bep A.

en sorte que je marchai à peu près environ trois quarts d’heure, sans entendre bruit, ni pas, ni rien à me suivre ; quand il vint un éclair et un coup de tonnerre, qui renversa de tout côté les murailles sur moi, plus de vingt charges de pierre, sans dire un mot de mensonge, en sorte que sous elles mes membres étaient moulus et brisés ; et j’ai fait le signe de la croix, comme il m’avait été enseigné, et au même instant je me vis délivré, et en allant à tâtons de droite et de gauche, en sorte que je vis une clarté quasi comme le point du jour : au milieu de deux rochers je vois la clarté, et par cet endroit resserré il m’avait fallu passer. Quand je fus allé de l’autre côté, je voyais très clair, en sorte que j’aperçus une salle et moi d’y entrer, en sorte que je vis un autel, oui, il me semblait, et des balustres de bronze qui en faisaient le tour ; la salle était tapissée et ornée très bien, en sorte qu’il me vint à l’esprit que je devais m’agenouiller ; quand je fus tombé à deux genoux, ma prière commencée, voilà que j’entendis un bruit de pas et que je vis entrer les douze apôtres, monsieur saint Patrice, en sorte qu’ils vinrent près de moi, pour me consoler, et qu’ils me dirent tous qu’ils avaient été pécheurs, et qu’ils avaient trouvé grâce en faisant pénitence ; ils m’expliquèrent le nombre de tourments que je devrais souffrir dans les enfers, ils me dirent que si j’avais regret d’être entré, ils me feraient retourner, sans aucune offense au monde, et que si je les laissais partir et si j’avais regret ensuite, je resterais en enfer pendant l’éternité ; et je leur dis : « en grâce, saints pères, priez Jésus pour moi, et son père éternel, car je suis décidé à souffrir toutes les peines et tout ce qui est nécessaire pour aller aux cieux » ; et ils me dirent : « maintenant, quand nous serons hors d’ici, il arrivera ici huit des serviteurs de Satan, 3295 3297 3301 3302

lared a regond din A. ma clasqjent da C. da zoutr an oll C. ha quement a zo ret vit C.

qui formeront un feu pour que vous soyez brûlé, mais, nous vous prions, ne vous effrayez pas ». Et à l’instant que les apôtres bénis eurent fui, il arriva huit diables, et eux tous enragés, en sorte qu’ils m’insultèrent et me vilipendèrent, et firent un bûcher de feu pour me consumer, je fus dévêtu nu, mes pieds, mes mains enchaînées, et jeté au milieu du feu pour être brûlé ; quand j’eus été un peu à souffrir quelques grandes peines, il me vint à l’idée de faire le signe de la croix, en sorte que mes chaînes tombèrent et que je m’en vins du feu, sain et sauf comme auparavant, sans sentir aucune sorte de peine ; aussitôt, les mauvais Esprits s’en allèrent en courant, et je partis, mais ne me pressais pas ; je priais le seigneur Dieu du mieux que je pouvais, en sorte que je vis les diables venir en une bande ; ils commencèrent avec moi gifles, coups de pied, une partie se mouchait, crachait dans mes yeux ; alors je fus. traîné par eux à une lande, où je ne voyais que potences et un million de gens pendus ; je fus prié, de bon gré de m’en retourner de là, ou, si je ne voulais le faire, je serais pendu aussi ; je ne répondais mot, je les laissais dire et ils sautèrent sur moi en sorte que je fus alors pendu ; alors, l’un d’eux dansait sur mes deux épaules, et les autres, d’en bas, tiraient sur mes pieds ; quand je me vis au moment où j’allais perdre ma vie, je fis le signe de la croix, en sorte qu’ils s’enfuirent de nouveau, la corde cassa au même instant, en sorte que je partis aussitôt comme un homme vaillant ; je n’étais pas allé loin, que je les entendis crier : « Arrêtez, camarade, arrêtez le méchant homme ! » en sorte qu’ils m’envoyèrent à une bande de diables, qui avaient des haches avec eux comme des bouchers, qui hachaient, dépeçaient ceux qui avaient été colères, le péché de colère est traité malheureusement ; «

3323 3329 3330 3331 3340

est déplacé dans C. pa voain ous ar potans evnan A. Cf. 3399. er monied ma A. Cf. Cognomerus et sainte Tré[inet v. 1321. ÏUS.

je fus jeté sur le banc en sorte que je fus brisé par eux, jamais homme n’a souffert cette sorte de souffrance, alors je fis le signe de la croix pour les chasser, en sorte qu’ils coururent par une route et moi j’allai tout droit j’entendais crier bien loin de moi, [par une autre ; comme dans les forêts le hurlement des loups ; je restais bien bravement en priant Dieu, quand je les vis venir, et eux comme des bêtes sauvages, et des chaînes avec eux pour me garrotter, un demanda : « Louis, tu vas retourner, parle et réponds donc, oui, et promptement, ou tu vas dans le grand puits pour l éternité ». Je ne répondis rien ; alors je fus enchaîné, et entraîné par eux à l’endroit qu’ils avaient songé. Auprès du grand puits, là j’étais épouvanté, quand je vis les âmes s’élever parmi la flamme et la fumée, et après, elles tombaient dans les mêmes abîmes ; je n’aurais jamais songé à cette sorte de souffrances, on me demandait ou que je revinsse sur mes pas, ou que j’allasse dans le puits, au même supplice ; un diable vint, qu’ils nommaient Bigoré, et il sauta sur moi d’une façon impitoyable, et me précipita dans le puits, parmi la flamme ardente, et j’allai au fond jusqu’au fondement ; nous étions là un million de gens ensemble, et sans cesse nous nous élevions par l’ardeur des flammes ; là est puni le péché d’impureté, je méritais mon lot, mais je l’ai eu aussi ; j’avais oublié ferme de penser au signe de la croix, à mesure que je m’élevais en haut, hélas, je tombais encore, quelque neuf ou dix fois après m’être élevé, je tombais sur la tête au milieu des damnés ; à la fin, par la grâce de Dieu, parmi le feu, la fumée, je fis le signe de la croix, et je fus culbuté et jeté hors du puits, toujours à quelque deux cents pas, et je me levai debout et je partis encore ; 3300 pe c’hajen er puns bras en eur memeus suplis C. 3361 voa c’hanvet Bigore C. 3368 Cf. Cognomerus et sainte Tréfine, v. 1302.

je ne savais de quel côté c’était que j’avais à aller, quand j’arrivai à un endroit et j’étais effrayé en sorte que je vis Lucifer, comme un monstre, allongé et un nombre de diables allaient et venaient, et il était garni de feu et de flammes, en sorte que je vis un nombre de gens entrer dans sa bouche, et en même temps, il les vomissait, et les autres diables les faisaient entrer dans sa bouche de là, est punie l’usure et la vanité, [nouveau ; mais je n’avais pas mon lot dans ce péché-là ; et je passai bravement sans être attaqué ; Dieu fit justice puisque je ne l’avais pas mérité ; au bout d’un moment ou deux, j’entendis un grand bruit, ils venaient vers moi comme une bande de chiens, en sorte que l’un me dit : « Je croyais que tu étais retourné ; si tu avances plus loin, tu vas être perdu ; entends-moi, mon homme, et retourne sur tes pas, car si tu avances davantage, tu es un mal avisé ; nous allons te monter sur une montagne élevée, et en bas il y a un étang de quatre lieues de profondeur, oui, quatre lieues à rouler avant que tu arrives dans l’étang, maintenant, tu t’en iras sur tes pas, ou tu es un innocent ». En sorte que je jetai un regard au-dessous, que je fus épouvanté, que je me recommandai à mon Créateur béni ; ils sautèrent sur moi en sorte qu’ils me jetèrent sur le dos, et à coups de pieds je fus roulé loin d’eux, au milieu des ronces, des épines, je tombais sur toute sorte de mon corps était écartelé et mis en pièces, [souches, en sorte que j’arrivai en bas, mais j’allai sur la tête dans l’étang qui était plein de bêtes immondes, et dont l’eau était puante, mon corps était massacré, mon visage déchiré, et sorti de l’esprit de nouveau mon signe de croix, [Marie, en sorte que je criai à tue-tête : « Reine du ciel, secourez-moi, serait-il possible tout de même que ce soit là que je resteI.» Et au même instant il me vint à l’idée encore, par la grâce de la Vierge sacrée, de faire le signe de la croix, 3386 Cf. Cognomerus et sainte Tréfine, v. 1280, 1290. 3398 Sur le sens de jnosand, voir ci-dessus, v. 1616. 3401 voarnon ma voan toled em A. tolet em gourue C.

et aussitôt, par la grâce de Dieu, je fus rétabli, et je jetai un triste regard à l’endroit où j’avais à aller. Je voyais deux maisons qui étaient effrayantes à regarder, elles devaient être bâties depuis plus de six mille ans, sans argile ni boue, il n’y avait à faire ces deux maisons juste que des pierres posées l’une sur l’autre, et un vent froid de glace me coupait les membres, et une odeur puante venait des deux maisons, en sorte que j’allais assez doucement en disant mes prières, quand j’entendis de nouveau le bruit des mauvais Esprits, criant épouvantablement ; c’était effrayant de les entendre ; et quand ils arrivèrent, ils me dirent : [tourner dans le monde, « Maintenant, impertinent, nous ne vous prierons plus de recar nous sommes sûrs de vous, maintenant, vous allez périr ; vous suez, fripon, mais nous vous rafraîchirons ; dans l’eau glacée, maintenant, nous allons vous planter ». Je fus planté dedans, et enlevé en haut aussitôt, saisi et glacé au point que mes dents claquaient, les dents de janvier attachées à mes cheveux et à mon habit, en sorte que je songeais : ici sera la fin, jamais je ne puis je fus plongé par eux, tiré et rincé, [échapper ; plus de cinquante fois jusqu’à ce qu’ils fussent tous fatigués ; alors un d’eux dit : « Il est assez froid maintenant, allons avec lui à l’autre maison, il est grand temps de le et par mes cheveux alors j’étais traîné ; [chauffer » ; je ne pouvais pas rester debout, je ne pouvais pas marcher ; quand j’arrivai dans l’autre maison, l’eau était à bouillir, en sorte que je fus jeté dedans pour me dégeler ; en sorte qu’ils me faisaient même chose dans l’eau bouillante, qu’ils me faisaient dans l’eau froide ; je pensais être brûlé ; mais quand je fis le signe de la croix, je me retrouvai de nouet les mauvais Esprits me quittèrent alors ; [veau, en sorte que je commençai à marcher, mais j’étais si éreinté que je ne pouvais marcher qu’avec beaucoup de peine ; je n’étais pas allé loin que j’entendis encore le cri, et un hurlement de mon ennemi ; 3433 Sur ribouled, voir Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XI, p. 97. 3437 e voant traignet C. 3438 ne voain qued vid chom A.

j’étais arrivé près du pont quand je fus arrêté par eux, en sorte qu’ils prononcèrent ma sentence pour l’éternité ; on m’expliqua qu’il était impossible de passer, sans tomber dans l’étang, de dessus le pont de glace ; quand je regardai le pont, peu s’en fallut que je ne tombasse, il n’avait guère de large que la place d’un pied, et il y avait trois grands quarts de lieues pour le traverser, et il était placé au-dessus, au milieu du grand étang de l’enfer ; une sueur très froide me saisit alors, en songeant de quelle manière je traverserais ce pont-là, j’appelle, dans mon cœur, Dieu secrètement, de me donner assistance en un tel tourment, Jésus et la Vierge, monsieur saint Patrice, et tous les apôtres pour m’encourager ; car jusqu’à ce pont je n’avais pas eu peur, mais là je sentais que le cœur me manquait ; alors les diables, comme des loups monstrueux, me pressaient de retourner sur mes pas ou d„e passer le pont, et moi, de m’arme de foi et de confiance ; et je fis le signe de la croix avant d’avancer en sorte qu’ils s’éloignèrent de moi, en courant comme par un et j’allai sur le pont, sans craindre aucun danger ; [désespoir. dès que j’eus avancé d’un pas, par la puissance de Dieu, je sentis une main appuyée à mon côté, la main toute puissante qui m’aidait à passer, et me donnait le courage de faire ma pénitence ; alors les âmes qui étaient dans l’étang de l’enfer criaient aux diables à tue-tête : « Jette le méchant homme ici, il a péché plus que nous n’avons fait tous, et encore il sera sauvé ». J’avançai toujours, sans faire attention à eux, et je traversai bravement, avec la grâce de Dieu ; quand je fus allé de l’autre côté, je fus m’asseoir, en sorte que je sentais une douceur et mon esprit aisé ; le vent était doux, et le ciel était clair, et je rendis grâces à Dieu mon Créateur,

3466 dond voair ma gis A. 3472 e santis A. 3474 dachiuin ma A.

en sorte que j’entendis passer un bruit qui était charmant, un ruisseau d’eau claire qui était excellent ; que je bus une goutte, en sorte que je fus si soulagé, que je partis alors ; je ne me sentais pas marcher ; quand je m’enfuis de là, je vis un château, qui était très admirable, et large, et élevé, les fenêtres sur lui semblaient des étoiles, et les portes, la lune et le soleil béni : en sorte que je vis un beau jardin et que j’y entrai, que je vis trois hommes anciens qui venaient vers moi ; leurs cheveux étaient si blancs, ils étaient admirables à voir, chacun avait sur lui une tunique qui était colorée, et leur nom écrit en grandes lettres : Saint Jean l’Evangéliste, Moïse et Elie, et je tombai à deux genoux avec toute humilité, en sorte que je demandai leur bénédiction, au nom du vrai Dieu ; et alors ils me donnèrent leur bénédiction en me disant de tenir bon dans ma résolution, en m’avertissant, quand j’arriverais dans le monde, de prendre garde de ne m’adonner plus au vice et au péché ; et quand alors eurent disparu les saints pères, je partis aussi vers le château ; mais j’étais étonné d’admiration quand j’en vis venir une procession, une grande croix très belle, colorée en rouge, et trois archevêques aussi, qui marchaient de chaque côté, les saints apôtres, et une infinité de toute condition, prêtres, rois, et je tombai à deux genoux, le cœur saisi, rendant mille grâces à mon Créateur béni, en sorte qu’il vint un des archevêques me trouver d’un air gracieux, qui me dit : « retournez vite, Louis, car le temps est achevé, vous êtes pardonné maintenant par Dieu, votre Créateur, [monde, vous êtes fait net de péché, mais quand vous arriverez dans le faites attention, par dessus toute chose, à ne pas tomber dans le [péché ». 3500 3508 3515 3520

o benedicsion A. voelis o sortian eur A. eunan diues ar arhisquiby A. dreist peb tra A.

Mon saint protecteur, monsieur saint Patrice, était cet archevêque qui me causait, et je lui demandai : « saint père, humblement, est-ce que notre maître est dans la procession présentement ? et il me répondit qu’il était visible pour eux mais que je ne le verrais pas parce que j’étais en vie, en sorte qu’il me dit de nouveau : « Partez promptement, car bientôt ce sera la fin des vingt-quatre heures », et après que j’eus eu la bénédiction du saint père, je retournai aussitôt trouver mon pont de glace, quand j’arrivai auprès, j’avais grand effroi, en sorte que j’avançai dessus, après avoir fait le signe de la croix, et je le traversai bravement, par la grâce du vrai Dieu, avec la main invisible appuyée à mon côté. Quand j’arrivai aux deux maisons où j’avais souffert, j’avançai ma tête exprès pour regarder, et je vis le prêtre qui m’avait confessé, dans l’eau glacée jusqu’à l’estomac ; et je lui demandai humblement : « c’est ici le purgatoire ? « car pour grand que soit votre peine et votre tourment, votre visage est plein de contentement, au prix de ce que sont en enfer les âmes méchantes » ; et il me répondit : « je fus arrêté là pour quatre heures de temps, avant d’aller aux Joyeusetés » ; quand je regardai de l’autre côté, dans l’eau bouillante, je vis ma cousine germaine, et j’allai la trouver, en sorte que je lui demandai quelle était la cause pour qu’elle fût arrêtée dans la prison de Dieu, et elle me répondit que c’était la vanité, qui l’avait arrêtée dans la prison de Dieu. Dieu vous délivre, ô âmes fidèles, vous êtes sûres, sans délai, d’aller à la gloire éternelle ! En ce moment-là même il me vint à la pensée qu’il était temps de partir, en sorte que je le fis sans arrêter ; je traversai les endroits où j’avais souffert ; mais les diables s’enfuyaient, comme s’ils étaient fâchés, «

3535 ous an A. 3537 e haperseuis ar religius A. 3539 hac e houlis ontan heman e ra purgoatoair vmblamand A. 3540-3542 Cf. 3178-3180. 3556 mes an drouc speregou A.

en sorte que j’arrivai dans la salle où j’étais d’abord entré, que j’allai sur mes deux genoux, pour me défatiguer un moment, et je vis aussitôt venir vers moi les douze apôtres, monsieur saint Patrice, et il me dirent de partir promptement ; « il ne manque qu’une demi-heure aux vingt-quatre heures », et après que j’eus eu leur bénédiction, je partis aussitôt pour aller dans les ténèbres ; quand j’entrai dans le chemin étroit, je ne voyais goutte de jour, en sorte que j’allais à tâtons de droite et de gauche, que vint un éclair qui m’a aveuglé ; le tonnerre aussitôt a renversé les murs de chaque côté, et m’a aplati ; mais par un signe de croix j’ai été tiré de peine, mais je ne savais de quel côté j’avais à aller ; j’avais perdu le sens et parce que je ne voyais pas, en sorte que je venais à tâtons de gauche et de droite, quand j’ai entendu dans la porte le bruit des clés ; lorsque la porte a été ouverte, je suis tombé à genoux, et monsieur le prieur m’a reconnu ; voici, mes chers frères, dit un abrégé de ce que j’ai vu dans la prison de Dieu ; car je ne suis pas assez capable pour expliquer les peines que j’ai vues, en faisant ce voyage ; l’espace de vingt-quatre heures, je les ai vues, il me faudrait un mois, et encore je ne les expliquerais pas. Ecoutez tous ma voix, entendez, pécheurs, tant que vous êtes en vie, je vous prie, faites pénitence, croyez ce que je dis, mes frères et mes sœurs, vous m’êtes tous témoins que vous m’aviez vu hier, mais non pas dans la façon que vous me voyez aujourd’hui ; il y a un grand changement, vous le voyez tous ; il n’est venu avec moi qu’une peau mince sur quelques os, la chair est restée éparse par l’enfer ; faites attention donc, au nom de Dieu, je vous prie, de quitter le péché, et de vous humilier ; je prie le seigneur Dieu du fond de mon cœur, de nous donner à tous sa bénédiction, •

3572 ha ne C. 3587 ma voeled anon A. 3590 a sclabe en ivern C. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XXVII, p. 74. 25

et la grâce de nous voir dans le Paradis de Dieu, dans la compagnie heureuse des saints et des anges ! Scène ; tous sortent ; le prieur et Louis entrent d’un côté et le comte de Toulouse d’un autre côté. LE COMTE parle :

Bonjour, mon cousin, il me fait joie de vous voir ; quand j’ai appris la nouvelle que vous vous étiez embarqué, quand j’ai appris que vous aviez enlrepris de faire le voyage de je mesuis prestement dépêché de veniren Hibernie, [saint Patrice, des grâces immortelles je rends à Dieu, de vous avoir donné la grâce de sauver votre âme ; qu’il plaise à sa bonté vous conserver toujours, le reste de votre vie dans sa grâce, sans péché ! et je vous prie, mon cousin, avec toute fidélité, de venir avec moi en France, à la ville de Toulouse, vous aurez le choix de mes chambres, quand vous arriverez, et nous vous fournirons ce que vous désirerez. LOUIS

Je suis étonné de joie, mon cousin, en vous voyant, que vous soyez venu d’un lointain pays ici, pour me trouver ; je n’irai jamais en France, ni plus vers mon pays ; dans ce couvent je resterai le reste de mes jours ; pour un an et un jour que j’ai encore à vivre, je me suis résolu à rester en ce pays, si les pères permettent, je resterai avec eux, sous l’habit de frère, le reste de ma vie ; et je vous prie, mon cousin, avec affection, de payer pour moi une année de pension ; et distribuez mes biens, quand vous vous serez payé, parmi les pauvres les plus nécessiteux et faites mes compliments à la comtesse votre épouse, et à toute la famille aussi, car je renonce au monde. 3608 3603 3610 3615

da voud roed dach ar gras da souetad A. pliged gand e A. da voud deut A. e chomin gante A.

LE COMTE DE TOULOUSE

J’aurai grand chagrin, mon cousin, de vous quitter mais, puisque Dieu commande, je n’ai rien à dire ; je ne vous contrarierai pas, pour qu’il ne m’arrive pas de pécher ; je paierai pour vous tout ce que vous me direz ; et je distribuerai vos biens aux pauvres, puisque j’entends, mon cousin, que vous ne retournerez jamais. Dieu vous maintienne, et la Vierge Marie, les saints apôtres, monsieur saint Patrice ! Encore je demande une grâce, mon cousin, avant de vous quitter, que vous me donniez par écrit le voyage que vous avez fait, que nous ayons chacun une copie, l’un et l’autre, pour que nous rendions grâce pour vous à Dieu. LE PRIEUR du couvent :

Monsieur, ne vous gênez pas à l’égard de la pension, vous serez nourri ici à votre discrétion ; nous n’exigeons de vous ni or, ni argent ; nous nous contentons de votre corps pénitent ; entrons dans le couvent, il est temps pour nous de souper, et vous êtes fatigué ; vous avez besoin de vous reposer. Scène ; tous sortent.

quement-se vo.eun exempl en amzer da donct d’ar re a neum blij o vevoan er pec’hel. « Mon cher cousin cela sûrement je ne vous refuserai pas, au bout d’un peu de temps, je pense que vous le recevrez ; tout cela sera un exemple, dans le temps à venir, pour ceux qui se plaisent à vivre dans le péché ». 3640 c’heus eom da discouizan C.

APPENDICE II Commencement du mystère dans le manuscrit de Morlaix (Traduction de Luzel).

Louis Ennius avec son gentilhomme et son sommelier. LOUIS

Je vous le dis, gens de ma maison, grand est mon embarras au milieu de mon deuil : Toute ma famille, tous mes parents sont morts en me laissant des biens et des richesses en abondance : tout cela ne laisse pas que de m’embarrasser beaucoup, et je ne sais comment je dois passer le temps de ma jeunesse, car je suis jeune encore. Si je voulais les imiter, je vivrais sans pompe et sans éclat. Mais puisque je suis riche, je veux dire adieu à mon deuil et chasser la tristesse ; je veux jouir de ma fortune et m’élever au-dessus du commun pour vivre en la société des nobles et des plus riches. Quoique jeune, je suis homme de cœur et je ne crois pas qu’il existe de cavalier dans le pays qui ose m’affronter ou me désobliger. LE GENTILHOMME

Permettez-moi, mon maître, de vous faire connaître mon avis concernant ce que vous venez de dire. Il y a de mauvaises langues qui, si vous veniez à les mécontenter, se vengeraient bientôt en médisant partout de vous. LOUIS

Cela conviendrait à des coquins, à des morveux comme vous ; mais soyez tranquille, je saurai leur clore le bec. LE SOMMELIER

Mon maître et mon seigneur, permettez-moi de vous dire, aussi franchement, mon avis. Si vous veniez à maltraiter les gens et à les froisser par trop gravement, le peuple murmurerait et vous détesterait comme un méchant.

LOUIS

Je me moque bien des murmures et des cancans. Tout à l’heure même, et je veux que la tristesse s’envole d’ici, tout à l’heure même, je vais établir des musiciens devant ma maison, et s’il vient des jeunes filles je prétends les embrasser ; toutes celles qui seront jolies, filles, femmes, je serai pour elles impitoyable, il faut que je les possède. Tout ce qui procure du contentement et rend la vie agréable ici-bas, je veux le posséder à prix d’or. Ce ne sera plus aux sermons, à la messe, aux conférences et à vêpres qu’il faudra me chercher ; ceux qui auront affaire à moi me trouveront désormais dans les tavernes ou les mauvais lieux, ou bien encore jouant aux cartes avec mes amis pour me récréer de temps en temps l’esprit et leur gagner leur argent. Il faut que pendant que je suis jeune je jouisse de la vie ; je veux me faire craindre et me faire obéir du peuple. Et vous, gens de ma maison, soyez-moi dévoués et fidèles ; ne divulguez jamais ce que vous verrez ou entendrez chez moi, autrement je vous ferai danser une danse infernale. SCÈNE Le capitaine de Toulouse avec l’évêque. LE CAPITAINE à l’évêque :

Notre chef et notre prélat, je viens vous faire part d’une nouvelle qui vient de m’arriver. Monsieur le gouverneur m’a écrit qu’il viendra aujourd’hui même prendre possession de la ville de Toulouse. J’ai voulu savoir votre avis et aussi celui des habitants. Je crois qu’il conviendrait de se mettre sous les armes, et d’aller le recevoir aux portes de la ville. Moi-même j’irai à sa rencontre une lieue ou deux, car il est de notre devoir et de notre intérêt de lui faire une bonne réception. l’évêque

Monsieur le capitaine, mon avis est parfaitement conforme au vôtre : il est convenable de rendre à Monsieur le gouverneur tous les honneurs possibles, ainsi, commandez comme il vous semblera bon.

LE CAPITAINE

Et vous, habitants de Toulouse, êtes-vous disposés à vous armer de vos mousquets pour aller recevoir notre gouverneur, qui est un homme puissant et qui mérite d’être honoré ? LE PREMIER HABITANT

Monsieur le capitaine, il est de notre devoir de lui rendre aujourd’hui, à sa première entrée dans notre ville, tous les honneurs possibles. Pour moi je suis prêt à marcher à sa rencontre. LE SECOND HABITANT

Et moi aussi, Monsieur le capitaine, je vais bien vite chercher mon mousquet pour vous suivre. LE CAPITAINE

Tout ceci me plaît beaucoup, monseigneur l’Evêque : mais voyons maintenant : ou votre maison ou la mienne est la plus convenable pour le recevoir ; je crois que c’est la vôtre. L’tëVÊQUE

Monsieur le capitaine, il serait fort mal à son aise dans mon évêché, et je crois qu’il serait plus convenable de le recevoir chez vous. Mais il est temps de monter à cheval pour aller au devant de lui ; ainsi vous, habitants de la ville, faites diligence. Le capitaine monte à cheval et marche à la rencontre du gouverneur, qui arrive accompagné de deux princes et d’un empereur. LE CAPITAINE au gouverneur :

Je vous salue, Monsieur le gouverneur, et prie Dieu de vous conserver en paix et en bonne santé. Nous éprouvons tous une grande joie de vous posséder aujourd’hui dans notre ville. LE GOUVERNEUR

Je suis sensible, Monsieur le capitaine, aux sentiments que vous m’exprimez, et je vous prie de croire que tout l’honneur

est de mon côté, car je dois une si grande distinction plutôt à la bonté et à la faveur de mon roi, qu’à mon propre mérite. Ils avancent sur la scène et le peuple décharge ses mousquets en signe de joie. l’évêque

Monsieur le gouverneur, je suis votre très humble serviteur, et vous présente mes respects du fond de mon cœur. Je vous remets aussi, Monsieur le gouverneur, les clefs du château de notre ville. LE GOUVERNEUR mettant pied à terre :

Vénérable prélat, vos vertus, votre expérience et votre sagesse me conseillent de vous les laisser, elles ne sauraient être en meilleures mains. LE CAPITAINE

Non, Monsieur le gouverneur, nous ne le permettrons point, car votre rang vous fait un devoir de les accepter, et nous vous en supplions, de bon cœur. LE GOUVERNEUR

Habitants de Toulouse, vous me comblez d’honneurs dont je suis indigne ; mais je vous fais ici le serment de m’en souvenir toute ma vie et de ne rien négliger pour vous rendre contents de moi. LE CAPITAINE

Nous sommes loin, Monsieur le gouverneur, de mériter l’honneur que vous nous faites ; mais nous espérons que, grâce à votre sagesse et à votre bonté, vous voudrez bien excuser notre simplicité et notre ignorance. l’évêque

«

Venez voir notre temple, Monsieur le gouverneur, puisque vous avez bien voulu venir nous visiter dans notre ville ; nous vous accompagnerons tous, si cela vous est agréable.

LE GOUVERNEUR

C’est avec plaisir que je verrai votre Eglise, ô vertueux prélat, et je suis disposé à vous suivre partout où il vous plaira. SCÈNE .

LOUIS ENNIUS entre avec son gentilhomme et son sommelier

Maintenant je puis faire librement à ma guise, sans que personne vienne m’importuner ou me blâmer : mon père, ma mère, tous mes frères sont morts ; loué en soit Dieu ! et je bénis l’heure si impatiemment attendue, où j’ai pu enfin jouir de ma liberté ! Mon vieux père commençait à radoter, et si j’avais voulu écouter tous ses discours et ses sermons, je serais devenu un véritable saint. Mais tels n’étaient pas mes goûts. Ce qu’il me faut à moi, c’est la bouteille, le bruit des verres, les danses et les jolies filles : les armes aussi font mes délices. Ainsi, mon gentilhomme, je vous prie d’être diligent à seconder et à prévenir mes désirs. LE GENTILHOMME

Pour moi, mon maître, je vous suis tout dévoué et prêt à me conformer en tout à vos moindres désirs. LE SOMMELIER

Et moi aussi, mon maître, je suis tout disposé à obéir à tous vos ordres. LOUIS

Celui qui m’enseignera les moyens de me procurer de l’or je le récompenserai généreusement, car pour mener joyeuse vie et ne me rien refuser sur cette terre,ma fortune est insuffisante. (Lacune, ici il manque une feuille au manuscrit.) Ils joueront aux boules. — LE PREMIER parle :

Pardieu, je gagne le premier coup ; ainsi camarades, si vous voulez gagner, il faudra me chasser celte boule. LOUIS

APPENDICE III Discours de Belzébuth C (p. 50-53 de l’imprimé), cf. ci-dessus v. 1045.

Il ne me serait pas possible, même en l’espace de huit jours, de vous conter tout du long, comme il faut, les affaires, depuis que je suis avec eux, des Français : je dirais à peine le tiers W. Pourtant il ne manque pas d’enseignement de la part des pasteurs, en ville et à la campagne ; ceux-ci, d’autre part, montrent tout bon exemple à ce peuple, pour pouvoir venir à le sauver ; ils connaissent le prix de l’âme, aussi ils ont désir de la conduire au ciel ; mais, malgré leurs belles paroles et leurs exemples, ils ne peuvent venir à bout d’enlever les vices dont est chargé le cœur des chrétiens, qui ne veulent plus garder la vraie loi ; ils font la sourde oreille comme les Hébreux qui méprisaient autrefois les paroles des prophètes, pour n’écouter que leur inclination et courir par le chemin de la damnation. L’homme, sur la terre, ne cherche que le plaisir de son corps et son esprit, car il est faible outre mesure ; nous ne lui donnons aucun moment de repos, pour qu’il ne puisse jamais gagner le Paradis, que nous avons perdu par un péché sans plus <2), nous qui avons été des anges purs, pleins de clarté ; pour moi je serai fidèle à lui faire la guerre pour l’empêcher d’entrer dans la gloire éternelle ; s’il m’est obéissant, il ne sert à rien, le sang qui est répandu sur la croix pour le racheter. Je colorerai des mensonges pour le tromper, comme il fut fait autrefois à la première femme, (1) Cf. v. 1045-1047. (2) Cf. v. 1879.

et tirerai profit de sa simplicité, pour qu’il soit désordonné pendant toute sa vie ; le plus que je pourrai, il viendra à descendre par mes artifices au milieu du puits de l’enfer ; arrivé dans ce lieu-là il sera trop tard pour avoir regret et pouvoir se donner aux bonnes œuvres. Avec joie, je vois en France l’imprudence de tous ou de la plus grande partie à vivre à leur guise ; peu de gens suivent leur charge et leur devoir ; au contraire, ils font régner force crimes et mauvais exemples ; il y a désobéissance au lieu d’obéissance ; [campagne ? combien de maîtres peuvent commander en ville et à la fils, fille, serviteur, servante, il leur faut commander ; c’est la cause pour le ménage de marcher mal dans la maison ; la haine règne à la place de l’affection ; on voit l’un tromper l’autre : pauvre, riche, grand, vieux, jeune ; la fille vole la mère, le fils vole son père ; à la foire et au marché, tout plein de bestiaux défectueux ; on paie très cher après qu’il est juré sur l’âme, hier, qu’ils n’ont aucun défaut ; avec tout ce qu’on vend c’est le même compte ; il est difficile de trouver une bonne chose, le poids et la Mais les gens de métier sont-ils plus sages ? [mesure. Qui a affaire avec les artisans a coutume le plus souvent d’être trompé W) ; à jouer à la taverne et aux mauvaises veillées on se retire, au lieu d’aller aux offices ; et dans les coins obscurs on se laisse aller au mal <2>; rare est qui se tire de là sans dommage ; le jurement de Dieu, les œuvres honteuses salissent ainsi des familles honorables, lesquelles avec peine alors osent lever la tête ; après la première faute, on en commet un tas des plus horribles, venir à les déclarer est assez pour faire rougir les honnêtes gens ; nous les connaissons toutes et venons à les semer dans les cœurs des plus saints, (1) Proverbe encore usité dans le pays de Tréguier sous la forme : An hini a c’hoari gand artisanet c zo zur da vean stranet (M. Even). (2) Cf. v. 1109, 1077.

sans venir à cesser, avant que soit la fin du monde, pour augmenter le nombre des gens damnés. On se refroidit encore pour les sacrements ; on voit chaque jour tout plein de sacrilèges ; en beaucoup de façons on nuit au voisin, et quelquefois môme on le tue ; parler de l’envie et de l’avarice et des autres crimes qui sont si épais dans le monde, je ne trouve pas, mon maître, que ce m’est nécessaire ; c’est assez pour moi de dire comment on les commet, et je fais mon possible pour les mettre à régner ; on aura beau prêcher à toutes les créatures. Une partie des Bretons est si obstinée qu’ils demandent à chaque mot que soit damnée leur âme (1>. Dans leur pays, on trouve des ribambelles de pauvres ; ce n’est pas sans raison, car tout plein de fermiers la moitié du temps perdent des terres ; ainsi ils se damnent et ruinent le pays, faute de venir à rendre le bien pour le mal ; il* faudra faire pour eux bientôt un autre pater. En Tréguier, on voit respect et affection, sauf que c’est bien pour un pauvre de trahir l’autre ; en Cornouaille, ils sont fidèles, car là ils trompent peu de gens de leur pays et ils trouvent meilleur compte ; mais ils ont beau prier dur dans l’église, si vous faites marché avec eux, il vous en cuira. [défatiguer ; Je marche depuis longtemps ; il est temps pour moi de me si vous voulez me laisser maintenant, pour le souper, mon maître, faire du feu ici dans la grande chaudière W, il me sera plus aisé après d’aller en tournée encore. (1) Cf. v. 1120.

APPENDICE IV Discours de Bérith

C (p.

55-58 de

l’imprimé).

L’Angleterre et l’Irlande, pour donner à entendre, étaient nommées autrefois les Iles des Saints ; beaucoup d’hommes vertueux elles ont fourni : saint Brandan, saint Maudez, saint Cadoc, saint Brieuc, saint Samson, saint Tuai, saint EfHam, saint Gildas O), et tout plein d’autres saints qui en sont venus encore, qui, par leurs paroles et par leurs œuvres ont planté la foi dans plus d’un pays. Si ces grands apôtres ont travaillé avec tant de soin pour semer le règne de Dieu là où on voit aujourd’hui caché tout plein de crimes, croyez qu’ont peiné vos serviteurs à leur tour ; peu marchent là maintenant par le chemin du ciel ; ils ont abandonné, il y a longtemps, la vraie foi <2>; leurs apôtres nouveaux sont Calvin et Luther ; leur loi est semblable à celle de Lucifer, parce qu’elle laisse à l’homme la liberté de pouvoir se conduire selon sa volonté, en venant à mépriser les avis de l’Eglise, mère des Catholiques, parce qu’ils les trouvent trop stricts ; ils ont tourné le dos à notre saint Père le Pape, et de ses ordres ils continuent à faire moquerie ; ils le regardent comme un hérétique, parce qu’ils ne veulent pas venir à lui obéir ; il n’est pas, disent-ils, envoyé par Dieu pour tenir sa place : ô le grand aveuglement ! par l’orgueil comme nous, ils sont nos enfants, et cela leur fait de la peine d’entendre la vérité, s’humilier par la confession ; ils préféreraient plutôt venir à se détruire (1) La plupart de ces saints ne se trouvent pas dans la Buez ar Zaent moderne. (2) Cf. un fragment de la Vie de saint Guénolé, E. Ernault, Revue celtique, t. XX, p. 221.

et tomber de désespoir dans les bras de Satan, que de recevoir le pardon que propose le Créateur ; des Français ils ont tous les vices mais il leur manque beaucoup de leurs vertus ; si je venais tout du long ici à les déclarer, vous verriez d’épouvante l’enfer trembler. En Angleterre, il y a peu de catholiques ; par les autres sectes nous savons comment ils sont traités, et aussi bien le pauvre peuple de nie d’Irlande est loin de trouver léger leur gouvernement ; je les mettrai, si je puis, toujours à murmurer, à attendre saint Patrice venir les consoler ; les Anglais, sans sujet, pour les pourchasser ont la cruauté de brûler leurs maisons, parce qu’ils sont restés dans la vraie croyance, et qu’ils ne veulent pas devenir de mauvais chrétiens. Les Anglais, pourtant, sont tout miel en leur langage, mais le poison est trouvé au fond de la tasse ; ils ont beau parler sans cesse de liberté, ils sont les pharisiens de la loi nouvelle, au point que sera beau ce qui est étranger ; adieu, affection, quand se lèvera la misère ; leurs prochains sont pour eux autant d’outils qu’ils mettent à contribution, selon ce qu’ils valent ; s’ils ne peuvent pas tirer profit d’un homme, ils préfèrent vite une chose ou une bête à un homme car leur religion est matérielle, et ne fait cas au monde des choses éternelles. Je vous ai conseillé, mon maître, de persévérer ; vous voyez donc que je suis toujours fidèle ; dans le monde je ne parle jamais de sacrifice, mais je conseille aux gens de se livrer au vice ; puisqu’ils sont assez sots pour le croire, il sera trop tard pour après la mort cruelle, de chercher à faire le bien ; [eux, s’ils se donnent au mal comme enfants de Satan ils auront à jamais avec nous leur lot dans le feu.

CORRECTIONS ET ADDITIONS

P. 32, 1. 6. En 1525 d’après J. Plattard, Revue des études rabelaisiennes, t. VIII, p. 203.

P. 33, 1. 2. A la suite des Sermones discipuli de tempore, de Hérolt (premier tiers du XVI* siècle) il y a un prompluarium exemplorum où l’on raconte qu’un jeune moine, entré au Purgatoire de saint Patrice, assista aux supplices de ceux qui avaient pris part aux caroles. Pourtant, à cette époque, on ne croyait plus à la légende et le jacobin Guillaume Pépin, dans ses Sermones quadragesimales dît tenir d’Irlandais dignes de foi que toutes ces visions du Purgatoire de saint Patrice ne sont que des rêveries ou imaginations. J. Plattard, Revue des études rabelaisieûnes, t. VIII (1910), p. 203.

P. 49, 1. 8, ajouter en note à Conomurus : Ce nom est emprunté au Mystère breton de Cognomerus. Sur la Chanson du Cocu, voir H. Estienne, Apologie pour Hérodote, VII, éd. Ristelhuber, t. I, p. 111.

P. 56, avant-dernière ligne, en note : dans les Chansons bretonnes on voit souvent les pécheurs aller demander l’absolution au Pape ; par exemple, Gwerziou Dreiz Izel, t. I, p. 84. P. 66, note 3, ajouter : et dans le cahier d’Erbray, t. II, p. 353. P. 69, note 4. M. P. Le Roux me le signale entre les villages de Loguivy en Ploubazlanec et de Kermouster en Lézardrieux. P. 71,1. 22, ajouter en note : les comparaisons dialectales contenues dans les notes sont très incomplètes et les faits qui y sont relevés s’étendent bien au delà des points de repère que les seuls documents dont j’ai eu connaissance m’ont permis d’indiquer.

P. 80, 1. 24, ajouter : vourhigen 648. P. 81, 1. 20, ajouter après quaed : (gaffet D 44). v final tombe dans ari 475, ary 1563 (arif 478, 2694 b). P. 82, 1. 5, ajouter : les mutations après l’article sont en général régulières ; quelques particularités peuvent tenir au changement de genre en breton des mots d’origine française : ar gouand 2422, ar beemand 1362, eur vantel 2019, ar gras 2561 (ar hras 2628), eur hos planquen 3102, a[r]gomun 1054, er monlaing 2939, ar veag 2125, er prison 544, er vordel 3004, ar gry 3447, eur pintad 135, ar pes 161, ar gontantamand 348, er plas 443, ar bris 613, eur

vicher 954, ar bib 1975, er bligadur 2290 ; remarquer ar gras 2250, etc., à côté de ar liras 2467 ; ar gonifled 1068, cf. 1162 ; eun drous 3107 ; neb voien 672 ; eur banach 145 ; ar gousqued 512 ; ar vrasan peheres 742, er gis 245. P. 89, L 7, ajouter : ahanomb on daou B 78. P. 92, note 6, ajouter : cf. Ernault, Revue celtique, t. XXXI, p. 234, note 5, et ci-dessous v. 1336.

P. 95, 1. 2, après ping ajouter : n. cf. pinal. P. 96, 1. 16, ajouter hourven 644 ; — 1. 18, ajouter après rulal : (cf. ruil 2940, 3397).

P. 98, 1. 17, ajouter : cf. 2472. On trouve même de nombreuses phrases sans aucune forme verbale : 516, 1091, 1887, 2982. P. 98, 1. 28, ajouter : 1” p. pl. omb ; 3e p. pl. end ; inl B 7. P. 104, 1. 17, ajouter : peuar a gesec 591, peder le{ a mil 3397, cf. 2940 ; a beder lef donder 3396 ; — 1. 25, ajouter : te vanc dit ma lasan 728, les da veuan 2479, e vou red de rentin cond 1172, groed de redec 1614, me a rey de goume 1228 ; — 1. 32, ajouter : songed alies en autro sant Patry 2607, songal ebars en no quened 430. P. 105, 1. 24, ajouter en note : cf. oz crech, Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 321.

P. 106, 1. 27, ajouter : ermes deus. P. 107,1. 31, ajouter : ous trou 3399, os croech 227 b, ous croech 3107. P. 110, 1. 2, ajouter : o pe quen peamand 536. P. 116, 1. 18, ajouter : Dans les parlers du Bas-Maine, on dit, dans le môme sens, amuser.

P. 116, après 1. 18, ajouter : aillen 1559 « haleine » ? P. 124, 1. 20, ajouter en note : On peut supposer que le rimeur songeait à la prononciation vannetaise biscoah. P. 125, 1. 14, ajouter : enion 1832 pour rimer avec afecsion. P. 131, I. 2, en note : M. Maurice Duhamel me fait remarquer à ce sujet que le vers de 13 pieds est très fréquemment employé dans la poésie chantée ou psalmodiée des Bretons, et que la mesure à 7 temps s’adapte parfaitement à ce vers. P. 142, v. 97, ajouter en note : divertisan B. P. 184, v. 608 : j’ai traduit d’après C ; le texte de A semble signifier « à la chaux est l’escalier ».

P. 224, v. 1162 : canquala est évidemment un mot corrompu. P. 244, v. 1473, ajouter en note : difulquete par métathèse pour

difuquelte.

TABLE


INTRODUCTION

I. — 
La légende du Purgatoire de Saint Patrice. 
 7

Jocelin, Giraud de Cambrie, p. 7. — H. de Saltrey, p. 9. — Récits de pèlerins, imitations, p. 16. — Perez de Montalvan, p. 19. — Traducteurs de Montalvan, p. 28. — Froissart, le moine d’Eymsteede, Erasme, Rabelais et les conteurs du XVIe siècle, Fortunatus, Feijoo y Monténégro, p. 30. — Conclusion, p. 35.

II. — 
Les Mystères bretons de Louis Eunius. 
 36

Les manuscrits de la première rédaction, p. 37. — Les manuscrits de la seconde rédaction, p. 44. — Comparaison des deux rédactions, p. 50. — Etude de la première rédaction, la source, les personnages, l’action, p. 55. — La représentation, p. 60. — La date, le lieu, l’auteur, p. 66. — La langue : orthographe, p. 71 ; phonétique, p. 75 ; mutations initiales des consonnes, p. 81 ; les noms, l’article, les adjectifs, les pronoms, p. 83 ; les particules verbales, les verbes réguliers, p. 91 ; bean, p. 98 ; ameus, p. 100 ; ober, p. 101 ; mont, p. 102 ; dont, p. 103 ; gousout, p. 103 ; les mots invariables : prépositions, p. 104 ; adverbes, p. 107 ; conjonctions, p. 112 ; le vocabulaire, p. 115. — La Versification : les assonances, p. 121 ; le nombre des syllabes, p. 125 ; le groupement des vers, p. 128. — L’édition, p. 130. — La traduction, p. 132.

LOUIS EUNIUS OU LE PURGATOIRE DE SAINT PATRICE

PAGES

Première journée. 
 134
Prologue de la deuxième journée. 
 260
Deuxième journée. 
 268
APPENDICE


I. — 
Prologue du premier acte dans D, texte et traduction. 
 390
II. — 
Commencement de M, traduction de Luzel. 
 396
III. — 
Discours de Belzébuth dans C, traduction 
 401
IV. — 
Discours de Bérith dans C, traduction 
 404
Corrections et additions 
 406
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Annales de Bretagne (Les), publiées par la Faculté des lettres de Rennes avec la collaboration de MM. les Archivistes des cinq départements de Bretagne (Histoire, histoire littéraire, folk-lore, etc.). Prix d’abonnement : France, 10 fr. Etranger. 12 fr. 50 A chaque fMOÛmle de» Annale» sont jointe» de» feuille» de* volumes en oours de la Bibliothèque bretonne armoricaine. Ont déjà paru ain«i et ae rendent à part :

— Fascicule I. — Dictionnaire breton-français du dialecte de Vannes, de Pierre de Chalons, réédité et augmenté par J. Loth, in-8 de 115 p. 5 fr. — Fascicule II. — La très ancienne coutume • de Bretagne, avec les assises, constitutions de parlement et ordonnances ducales, suivie d’un recueil de textes divers antérieurs à 1491. Edition critique, accompagnée de notices historiques et bibliographiques, par Marcel Planiol, in-8 de 556 p. 10 fr. — Fascicule III. — Lexique étymologique des termes les plus usités du breton moderne, par V. Henry, in-8 de xxix et 350 p. Epuisé. Net. 10 fr. — Fascicule IV. — Cartulaire de l’abbave de Sainte-Croix de Quimperlé, par Léon Maître et Paul de Berthou, 2® édition, revue, corrigée et augmentée, in-8 de xi-408 p..., 12 fr. — Table analytique des t. i-xi® (188o-1898), gr. in-8 de 54 p. 2 fr. 50 Arbois de Jubainville (H. d’). Membre de l’Institut. Etudes grammaticales sur les langues celtiques. Première partie : Introduction, phonétique et dérivation bretonnes, 1881, gr. in-8. 0 fr. — Deuxième partie, en collaboration avec M. E. Ernault : Glossaire moyen breton, 2® édition, corrigée et augmentée avec une préface et les index du tome i, 1695-1896, 1 tome en 2 vol. gr. in-8. 30 fr. — La famille celtique. Etude de droit comparé. 1905, in-8 carré. 4 fr. Comment était oompoaé la famiU», responsabilité pour crime», législation de» suocesaion*. — Le mariage, lee épouse» légitime*, le» concubine», le» prostituée ». — Les Celte» ét&ient-il* pédéraste» ?

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7 fr. 50 Le Braz ( Anatole ). Tryphina Keranglaz. Poème. 1892, in-12. 3 fr. Oea poèmes charmante furent le début de M. Le Br&a dans les lettrea. — La Légende de la mort chez les- Bretons armoricains. Nouvelle édition avec des notes sur les croyances analogues chez les autres celtiques, par Georges Dottin, proadjoint à l’Université de Rennes. 1899, 2 forts vol. in-12. 10 fr. — Textes bretons inédits pour servir à l’histoire du théâtre celtique. 1904, in-8. 1 fr. — Cognomerus et sainte Tréfine. Mystère breton en deux journées. Texte et traduction. 1904, in-8 .. 4 fr. — Vieilles histoires du pays breton. 1905, in-18. 3 fr. 50 I. Vieillit histoires bretonnes. Le Charleaenn. — Le Bâtard du roi. — Histoire Paeoale.. — La légende de Margeot. II. Aux Veültes de Noël. Nédeleok. — Noël de Chouan*. — La Noël de Jean Romengol. — A bord de la Jeanne-Augustine. — La ohouette. — Le puits de Saint-Kadd. — Le Forgeron de Plousélambre. — En « Alger d’Afrique ■. III. Récits de passants. Les deux amis. — La haohe. — Le péché d’Ervoanio Prigent. — Humble amour. 3* édition de ce recueil de oontes bretons de l’éorivain bien oonnu. — Au Pays d’exil de Chateaubriand, 1909, in-12, 2« édition. 3 fr. 50 Lecomte (Ch.). Le Parler Dolois. Etude et glossaire des patois composés de l’arrondissement de Saint-Malo, suivi d’un relevé des locutions et dictons populaires. 1910, in-8, 242 p. 5 fr. Le Gallen (Léandre). Belle-Ile. Histoire politique, religieuse et rrlilitaire, mœurs, usages, marine, pêche, agriculture, biographies belliloises. 1907, :n-8. 7 fr. 50 Lemoine (Jean), archiviste-paléographe. La révolte dite du papier-timbré ou des Bonnets Rouges en Bretagne, en 1675. Etude et documents. 1898, in-8. Epuisé. 40 fr. Le Moy (A.). Le parlement de Bretagne et le ouvoir royal au XVIIIe siècle. 1909, in-8, )5 p. 10 fr. Prix Thérouanne à l’Académie française. — Les Remontrances du parlement de Bretagne au XVm* siècle. Textes inédits précédés d’une introduction. 1909, in-8, 260 p. 5 fr. Loth (J.), professeur au Collège de France. Vocabulaire vieux-breton avec commentaire, contenant toutes les gloses en vieux breton gallois, comique, armoricain connues. Précédé d’une introduction sur la phonétique du vieux-breton et sur l’âge et la provenance des gloses. 1884, gr. in-8. 10 fr. — Remarques et corrections au lexicum comubritannicum de Williams. 1902, in-8... 2 fr. — L’année celtique d’après les textes irlandais, gallois, bretons et le calendrier de Coligny. 1904, in-8. 3 fr. —- Contribution à la lexicographie et l’étymologie celtique. 1906, in-8. 2 fr. — Les noms des saints bretons. 1910, in-8. 3 fr. — La langue romane et bretonne en Armo. rique. 1908, in-8, 30 p. 2 fr. Lot (Ferdinand). Mélanges d’histoire bretonne (vi*-xie s.). 1907, in-8. 15 fr. Recueil de mémoires très Importants par le savant professeur Lot, sur l’hagiographie bretonne et repro*

S duiaant des textes édités arec toute la rigueur scientifique : La plus anoienne vie de saint M&lo, la Vit» Maohuti* par Bili et la vie de saint Gildas. Maury (Alfred), de l’Institut. Croyances et lé¬

gendes du Moyen-Age. 1896, in-8 (portrait). 12 fr. Mollat (Abbé G.). Etudes et documents sur l’histoire de Bretagne (xm®-xvi« siècles). 1907, in-8 . 6 fr. lui portant recueil de pièoee du XIV* siècle, concernant le pays breton, les abbayes bretonnes, les diocèses, les évêques et la oour des duos de Bretagne. Couronné par l’Institut.

Mystère de saint Crespin et saint Crespinien, publié pour la première fois par L. Dessalles et P. Chabaille. Gr. in-8, pap. vélin, fac-sim. 10 fr. Mystère breton de saint Crespin et saint Crépinien, publié avec une introduction et des notes par Victor Tourneur. 1907, in-8. 5 fr. Orain (Adolphe). Contes du pays Gallo : i. Cycle mythologique. — n. Cycle chrétien. — . ni. Contes facétieux. — iv. Contes de voleurs. — v. Le monde fantastique. 1904, in-12. 3 fr. 50 Revue Celtique, fondée par H. Gaidoz et H. d’Arbois de Jubainville et publiée avec le concours des principaux savants des Iles Britanniques et du Continent, par J. Loth, G. Dottin, E. Ernault et J. Vendryes. Prix d’abonnement : Paris, 20 fr. — Départements et Union postale, 22 fr. Prix du numéro.*... 6 fr. 50 A commencé à paraître en 1870. La collection forme 31 volumes et coûte. 585 fr. Revue de Bretagne (La), exclusivement bretonne, historique et littéraire. Mensuelle. Un an : France, 12 fr. Etranger, 15 fr. Est née de la fusion de la Revue de Bretagne et de Vendée et de la Revue de l’Ouest, dirigée par le marquis de l’Estourbeillon et M. R. de Lai gue. Rebillon

(A.). La vente des biens nationaux dans l’ancienne commune de Fougerai. 1909, in-8. 38 p... 1 fr. Soniou Breiz-Izel. Chansons populaires de la Basse-Bretagne recueillies et traduites par F.-M. Luzel avec la collaboration de M. A. Le Braz. Soniou (Poésies lyriques). 1890, 2 vol. in-8 . 10 fr. Tome I. Chansons enfantines ; sentimentales. — — Tome II. Mariage ; chansons humoristiques et satyriques ; métier» ; chansons de soldats et ohansons de bord ; Noël et chansons religieuses. • La traduction française est en regard du texte breton. Importante introduction d’Anatole Le Bras. Stockes (W.). Togail Bruidne Da Derga, the

destruction of Da Derga’s hostel. 1902, in-8. 8 fr. — Colloqui of twho Sage. 1905, ln-8. 3 fr. — The birth and life of S1 Moling. 1906, in-8. 2 fr. 50 Texte du plus haut intérêt, très utile pour l’explication en commun dane les éoolea supérieures et dan* les universités.

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du roman gallois de Peredur. îr.ifilO, in-8, br. 3 fr. 50 Dahlgren (E.-W.). Les relations commerciales et maritimes entre la France et les côtes de l’Océan Pacifique (commencement du xvm* siècle). Tome 1er : Le commerce de la mer du Sud jusqu’à la paix d’Utrecht. Gr. in-8, xvi-740 p. 20 fr. Vallée (F.). La langue bretonne en 40 leçons, seconde édition, in-8, 196 p. Net. 3 fr. 25

  1. Thomas Wright, St Patrick’s Purgatory, an essay on the legends of Purgatory, Hell and Paradise current during the middle âges, London, 1844. S. Eckleben, Die aelteste Schilderung vom Fegefeuer des heil. Patricius, Halle, 1885 ; G. Ph. Krapp, The legend of Saint Patriclc’s Purgatory : ils later litcrary history (dissertation), Baltimore, 1000 ; Ph. de Félice, L’autre monde, mythes et légendes. Le Purgatoire de saint Patrice, Paris, 1906. M. de Félice se propose de publier une seconde partie où il étudierait l’influence de la légende du Purgatoire de saint Patrice sur les littératures anglaise, française, espagnole et italienne.
  2. J. B. Bury, The life of saint Patrick and Ms place in history, London, 1905, p. 279.
  3. On trouve pour la première fois cet épisode de la Vie de saint Patrice chez Tirechan (VII« siècle), 1. I, ch. 38. Analecta Bollandiana, t. II, p. 58.
  4. Colgan, Trias thaumalurga, Louvain, 1647, p. 103, col. 1. Le plus souvent ce sont des cavernes qui servent de lieu de retraites à des saints : Dom Gougaud me signale S. Ninian’s cave à Glasserton, S. Fergus’ cave, S. Fillan’s cave. Cf. la caverne où descend S. Brendan pour faire pénitence (Stokes, Lives of saints from the Book of Lismore, p. 250.
  5. Cf. Procope, De la guerre des Goths, IV, 20, 42-47. Au lac Derg est aussi attaché un épisode de la légende de Finn mac Cumaill. Cf. Wright, St. Patrick’s Purgatory, p. 1-4.
  6. Topographia Hibernica, II, 5. Rolls édition, p. 82-83. Cf. Camden, Britannia sive (lorentissimorum regnorum Angliae, Scotiae, Hiberniae et insularum adjacentium ex intima antïquitate chorographica descriptio, Londini, 1607, p. 516.
  7. L’tle s’appelle aujourd’hui Station Ireland ; le lac est situé dans la paroisse de Templecame, baronnie de Tyrhugh, comté de Donegal, diocèse
  8. Ph. de Félice, L’autre monde, p. 125. Sur les gouffres qui, d’après la tradition populaire, conduisent à l’enfer, cf. P. Sébillot, Le folklore de France, t. II, p. 420-421.
  9. Dialogus beati Gregorii papae eusque diaconi Pétri in quatuor libros divisus : de vita et miraculis patrum italicorum et de eternitate animarum, IV, 36-38. Migne, Patrologia latina, t. LXXVII, col. 381-389.
  10. Ecclesiaslicae historiae gentis Anglorum libri quinquc,, 12-14. Migne, Patrologia latina, t. XCV, col. 247-255.
  11. Pausanias, IX, 39, 4-14.
  12. Odyssée, XI. Aristophane, Grenouilles, 143, 273, 278, 289, 311, 454. Virgile, Enéide, VI, 236-263.
  13. Platon, République, p. 614 c et suiv. Plutarque, De la vengeance tardive de la divinité, 22.
  14. Il se désigne seulement par son initiale : Fr. H... — Matthieu Paris lit : Henricus, et Th. Tanner : Hugo.
  15. Quisquis veraciter penitens, vera flde armatus, fossam eandem ingressus, unius diei ac noclis moram in ea faceret, ab omnibus purgaretur totius vitae suae peccatis, sed et per illam transiens, non solum visurus esset tormenta malorum, verumetiam, si in flde constanter egisset, gaudia beatorum.
  16. Ceux-ci furent chargés du monastère et du pèlerinage jusqu’en 1(532, date de leur expulsion. Les Franciscains les remplacèrent jusqu’à la fin du XVIII* siècle, où l’évêque de Clogher nomma prieur un des prêtres séculiers de son diocèse.
  17. En irlandais recles « grande église. »
  18. Roi d’Angleterre en 1153, d’après Matthieu Paris. Colgan remarque avec raison qu’il doit s’agir d’un roi d’Irlande, aucun roi d’Angleterre avant Henri II n’ayant pénétré en Irlande (Trias thaumaturga, p. 281, note 9). On conserve au lac Derg la tradition d’après laquelle Tieman O’Rourke, prince de Breffny, serait allé en 1152 en pèlerinage au Purgatoire, pour y trouver le calme de la conscience. O’Connor, St. Patrick’s Purgatory, p. 93.
  19. O’Connor, St. Patrick’s Purgatory. p. 91, pense que c’est tout simplement le pont de planches entre Saints’ Island et la terre ferme qui a donné l’idée de cet épisode. Mais le pont des âmes est connu dans les traditions des Perses (le pont Cinvat), des Musulmans (ai sirât), des Irlandais païens, dans le Tochmarc Emere (El. Hull, The Cuchullin Saga in Irish literature, London, 1899, p. 56), Immram Mail Duin, 17 (Revue celtique, t. IX, p. 488). On le trouve fréquemment dans la littérature chrétienne des visions : Fis Adamnain, § 22 (Windisch, Irische Texte, t. I, p. 184), saint Grégoire, Dialogues, IV, 36 (Migne, t. LXXVII, p. 383), Visio-n de Tundale, 4 (éd. Friedel et Kuno Meyer, Paris, 1907, p. 16, 98), Vision de Paul (Anecdota oxoniensia, mediaeval and modem sériés, t. VI, Oxford, 1894, p. 235C. S. Boswell, An Irish Precursor o{ Dante, London, 1908, p. 38-39, 71, 111, 131, 132, 139, 216, 231.
  20. Gervais de Parco mourut entre 1160 et 1170. Vischius, Bibliotheca scriptorum sacri ordinis Cisterciensis, Cologne, 1656, p. 124.
  21. Gilbert de Louth devint abbé de Basingwerk, en Flintshire, et mourut vers 1153. Le ms. du Vatican Barberini 270 a pour titre : Purgatorium Sancti Patricii curante Gilberto monacho Ludensi, post abbate de Basingwerek in Anglia. Lee, National Biography, t. XXI, p. 314.
  22. Sans doute Florence O’Cherballan, intronisé à Derry en 1185, et mort en 1230. Annals o( the Four Masters, anno 1203. Voir toutefois Colgan, Trias thaumaturga, p. 281, note 13.
  23. Moel Patricii ou Patricianus qui mourut en 1137. Acta Sanctorum, 27 mars.
  24. Archevêque d’Armagh en 1134, mort en 1148.
  25. Cf. Ph. de Félice, Le purgatoire de saint Patrice, p. 30-31.
  26. Ed. Mail, Romanische Forschungen, t. VI, p. 139-197, a publié le texte d’un manuscrit de Bamberg. Cf. le texte donné par Colgan, Trias thauvnaturga, p. 273-280.
  27. Kœlbing, Englische Sludien, t. I, p. 57-121. Horstmann, Alt-Englischc Legenden, Paderborn, 1875, p. 149-211. Cf. Ward, Catalogue o[ Romances, London, 1893, t. II, p. 435-492, 748.
  28. Th. Atkinson Jenkins, L’Espurgaloire saint Patriz o{ Marie de France, Philadelphia, 1894. Cf. Romania, t. XXXIII, p. 141.
  29. P. Meyer, Notice sur le ms. S07 [anc. 851) de la bibliothèque d’Arras, Romania, t. XVII, p. 382. IA Purgatoire di Saint Patrice, légende du XIIIe siècle, publiée d’après un manuscrit de la bibliothèque de Reims (Société des Bibliophiles de Reims, 1842). Voir aussi Romania, t. XXXIV, p. 371.
  30. P. Meyer, Notices sur quelques manuscrits français de la bibliothèque Philipps à Cheltenham, Notices et extraits des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, t. XXXIV, lre partie, p. 238-246.
  31. Il en existe au moins deux éditions sans lieu ni date, l’une in-4o, de 14 feuillets, l’autre in-8o, de 16 feuillets. Cf. Krapp, lhe legend o/ Saint Patrick’s Purgatory, p. 27-28.
  32. Le Voyage du puys Sainct Patrix auquel lieu on voit les peines de purgatoire et aussi les ioyes de Paradis, Lyon, Claude Nourry, 1506. Il y en eut plusieurs éditions à Paris. L’édition de Claude Nourry a été réimprimée à Paris par V[einant] et Gfiraud], 20 décembre 1839 ; à Genève par Philomneste Junior (G. Brunet), en 1867, in-16, 64 p. On trouve dans ce dernier livre une bibliographie des légendes sur saint Patrice. Cf. Gaidoz, Revue critique, 1869, p. 255.
  33. Viaggio del pozzo di S. Palrizio nel quel luogo si vede le pene del Purgatorio ed altresi le gioie del Paradiso, Milano ; édité aussi à Naples et ailleurs d’après Haym, Bibliografia italiana, t. II.
  34. On trouvera la liste des pèlerins historiquement connus chez H. Delehaye, Analecta BoUandiana, t. XXVII (1908), p. 36-40.
  35. Sur la date, M. H. Delehaye remarque qu’il y a contradiction entre l’indication « en l’an de notre Senhor 1248 » et la suite « qi era lo segond an de papa Eugens quart », Eugènè IV ayant été pape de 1431 ù 1447. Le manuscrit est signalé chez Champollion-Figeac, Documents historiques inédits, Paris, 1847, t. III, p. 325.
  36. F. Toldy, dans la revue hongroise Szâzadok, t. V (1871), p. 229-247. Cf. Revue celtique, t. II, p. 482-484 ; t. IV, p. 105-106.
  37. L. Frati, Tradizioni sloriche del Purgatorio di San Palrizio, Giornale storico délia letteratura italiana, t. XVII d-891), p. 76-7J.
  38. Ibid., p. 76-79.
  39. Voyage au purgatoire de S. Patrice, publié par Jeanroy et Vignaux, Toulouse, 1903 (Bibliothèque méridionale, t. VIII).
  40. Ph. O’Sullevan, llistoriae catholicae Iberniae compendium, Ulyssipone, 1621, t. I, livre h, ch. 1-3.
  41. Publiée chez Krapp, p. 54-77 : analysée p. 35-40.
  42. Le texte de ce manuscrit a été publié par M. H. Delehaye, Analecta Bollandiana, t. XXVII (1908), p. 43-60.
  43. Ce texte a été publié par Frati, Giornale storico délia letteratura ilaliana, t. VIII, p. 154-162.
  44. In questo libro vulgarmente setrala alchuna ystoria breue del re Karlo Imperatore. Poi del nascimento e opéré di quelo magnifico caualier nominato Guerino e prenominalo Meschino, in Venexia, 1477, lib. VI, cap. cr.xu La première édition (1473) est mentionnée chez Haym, Bibliotheca Italiana, 1808, t. III, p. 36.
  45. Cy commance l’hystoire des faits geste triomphes et prouesses du très preux et vaillant cheuatier Guérin Mesquin [ils de Millon de Bourgongne. Voir une analyse chez Krapp, The legend o( Saint Patrick’s Purgatory, p. 33-35, et chez J. C. Dunlop, Ilistory o[ prose fiction, a new édition, London, 1888, t. II, p. 270-279. Un traité du Purgatoire de saint Patrice se trouve à la fin des Vite di SS. PcCdri, Ferrariae, 1474. L’histoire d’Owen n’était donc pas, à cette époque, en Italie, traitée uniquement comme une légende romanesque.
  46. Ad illustrera Ebcrhardum ducem in Wirlenberg et decke Comitem Montispelegardi Carmen de purgatorio divi Patricii. Memmingen. Cf. Krapp, The legend of Saint Palrick’s Purgatory, p. 48, note. Peu après l’invention de l’imprimerie parurent (vers 1475) deux feuillets in-folio avec une figure sur bois et intitulés De Purgatorio Sancli Patricii in Ybernia. Cf. Le voyage du puys sainct Patrix, réimpression par Philomneste Junior, p. 44.
  47. De Gallorum imperio et philosophia libri septem, Parisiis, 1581), p. 1007. Cf. Claudien, Contre Buffin, I, 123-128.
  48. Encore a la fin du XVIIe siècle, la légende de saint Patrice se développe, comme le prouve la publication à Londres, en 1085, du livre intitulé : The delightful hislory of the life and dcalh of that renowned and famous St. Patrick, champion of Ireland, containing his heroick actions and valorous alchievements in Europe, Asia and Affrick, with other remarkable passages (rom his craddle to his grave. Sur divers manuscrits latins contenant des traités du Purgatoire de S4 Patrice, voir O’Connor, St. Patrick’s Purgatory, p. 99.
  49. Né à Madrid en 1602, mort en 1638. Le titre de l’édition que j’ai eue entre les mains et qui appartient à ia Bibliothèque Mazarine, n° 31917, est : Vida, y purgatorio de S. Patricio por el doctor Juan Perez de Montalvan, natural de Madrid, en esta septima impression enmendado y an dido por el mismo autor. Madrid, 1635, in-16, 14 p., non numérotées, et 118 folios. Le livre est dédié à la Serenissima Infanta Soror Margarita de la Cruz. Les approbations sont datées de 1627. C’est M. Omont, membre de l’Institut, qui m’a obligeamment signalé cette édition.
  50. Florilegium insulae sanctorum, seu vita et acta sanctorum Hiberniae, Parisiis, 1624, p. 86-109. Réimprimé chez Migne, Patrologia latina, t. CLXXX, col. 975-1004. Le Purdan Padric, publié et traduit par R. Williams et G. H. Jones (Sélections from the Hengwrt mss., London, 1892, t. II, p. 189211 ; 566-581), n’est qu’une traduction de Messingham.
  51. Voir Sidney Lee, Dictionary of national biography, London, 1897, vol. XLIX, p. 293-295.
  52. Chronica majora, Rolls édition, 1874, t. II, p. 192-203. Matthieu Paris ne fait que reproduire la version de Roger de Wendover, English Historical Society, London, 1841, t. II, p. 256. La première mention imprimée du chevalier Owen se trouve chez R. Higden, Polychronicon, 1482.
  53. Rolls édition, London, 1865, t. 1, p. 370.
  54. Opus aureum et legende insignes sanctorum sanctarumque, Lugduni. Constantin Fradin, 1519, fol. xxxvii r°. Cf. Petrus de Natalibus, Catalogus sanctorum et geslorum eorum, Venise, 1493, lib. III, cap. 204.
  55. Jacobi de Vitriaco libri duo quorum prior Orientalis, aller occidentale Historiae nomine inscribilur, Duaci, 1597, Orientalis, c. 92, p. 216-217. Cf. Vincent de Beauvais, Bibliotheca mundi, tomus quarlus qui spéculum historiale inscribitur, Duaci, 1624, lib. XX, cap. 23, 24.
  56. Le nom du héros de la légende a subi de nombreuses transformations : en latin, on trouve Owcnus, Oenus, Oengus ; en français, Oben, Oicns, Oieus, Egnus ; en anglais, Owen, Owein, Owayne, Sir Ilowyne, Owain miles. Jacques de Voragine l’appelle Nicolas. Krapp, The legend of St. Patrick’s Purgatory, p. 12. Eunius est le nom d’un évêque de Vannes au VI® siècle. Cf. La Borderie, Histoire de Bretagne, t. I, p. 289, 445.
  57. « Te remito el Purgalorio de San Patricio : en que a mi ver hallaràs vna deuota suspension, que te diuierta y atemorice ; vna nouela a lo diuino, que te prouoque, y escarmiente ; y vna historia prodigiosa, que junstamente castigue, y lisongee. » Dans l’approbation du docteur Martin de Iauregui et dans la licence de l’ordinaire, docteur Juan de Mendieta, l’ouvrage de Montalvan est appelé La admirable Vida y prodigioso Purgatorio de San Patricio.
  58. L’analyse que nous donnons a été faite sur le texte espagnol, mais en utilisant, toutes les fois qu’il n’y avait aucun inconvénient à le faire, les termes mêmes de la traduction française du P. Boüillon.
  59. Sa bourse, son argent ou son manteau (P. Bouillon).
  60. Un sergent (Boüillon).
  61. Le gouverneur de la ville (Boüillon).
  62. Environ deux lieues (Boüillon).
  63. Il trouva qu’on faisoit un grand appareil de guerre et qu’on levoit des soldats pour mettre une armée en campagne (Boüillon).
  64. Pour son âme (Boüillon).
  65. Que ce ne soit un présage assuré de ma mort prochaine (Boüillon).
  66. Qu’à peine les larmes qui ruisseloient sur son visage lui donnoient la liberté de la langue pour parler et déclarer toutes ses fautes (Boüillon).
  67. Pauvre et misérable pécheur (Boüillon).
  68. Avec des crochets de fer leur déchiroient la chair en lambeaux et leur arrachoient les veines et les artères du corps (Boüillon).
  69. Des grilles de fer brûlantes équipées de pointes de fer (Boüillon).
  70. Une maison qui étoit, à mon avis, déserte d’habitants et sembloit si vieille et caduque qu’elle fondoit de toutes parts et s’accabloit sous les ruines (Boüillon).
  71. Hommes, femmes, enfants, mariés, non mariés, dames, demoiselles, religieux, religieuses (Boüillon).
  72. Revue critique d’histoire et de littérature, 1869, I, p. 255. Voir aussi U. d’Arbois de Jubainville, Revue celtique, t. XXV, p. 358, note.
  73. L. Rouanet, Drames religieux de Calderon, Paris, 1898, p. 286-289. A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 346-348.
  74. L. Rouanet, Drames religieux de Calderon, p. 297-376. A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 343-345.
  75. La Vie admirable du grand saint Patrice, avec l’histoire véritable de son fameux et tant renommé purgatoire, mise en espagnol par le docteur Jehan Perez de Montaluan, natif de Madrid, et traduite en françois sur la sixiesme édition par F. A. S. Chartreux, à Bruxelles, 1637 ; réimprimé en 1638, 1640, 1659. L’édition de 1659 contient une gravure représentant JésusChrist debout à côté de S* Patrice qui tient son bâton pastoral ; derrière lui apparaît un trou béant où les âmes sont représentées immergées dans un étang de feu liquide.
  76. Waddingus, Scriptores ordinis Minorum quibus accessit syllabus illorum qui ex eodem ordine pro fide Christi (ortiter occubuerunt, Romae, 1650, p. 114. C’était en 1632 que les Franciscains avaient été chargés du monastère de Station ïsland.
  77. Cf. Pellechet, Notes sur des imprimeurs du Comtat Venaissin, 1887, p. 73.
  78. Cette édition m’a été gracieusement communiquée par M. Ph. de Félice. Pour les autres éditions, voir Potthast, Bibliotheca historica medii aevi, Berlin, 1896, p. 1511 ; U. Chevalier, Répertoire des sources historiques du moyen âge, bio-bibliographie, t. I, col. 1726. M. Morel-Payen, conservateur de la bibliothèque de Troyes, M. Loriquet, directeur des biblio-
  79. In nomine Jesu Christi opusculum de Purgatorio Sancti Patricii llyberniae patroni scriptum per fratrem Dominicum Brullaughan, Lovanii.
  80. Caesarii Heisterbacensis monachi ordinis Cistereiensis Dialogus Miraculorum, accurate recognovit Josephus Strange. Coloniae, Bonnae et Bruxellis, 1851, distinctio 12, cap. 38, p. 347. Cf. P. Le Brun, Histoire critique des pratiques superstitieuses, t. IV, p. 44-40.
  81. Chroniques, éd. Kervyn de Lettenhove, Bruxelles, 1871, t. XV, p. 145146.
  82. Une autre édition parut à Troyes, chez la veuve Jacques Oudot, en 1705. Sur la bibliographie de Fortunatus, voir P. O. lîückstrôm, Svenska lolkbôcker, sagor, legender och üfventyr, sednare bandet, Stockholm, p. 1-5. Ce livre et le texte m’ont été indiqués et communiqués par M. E. Philipot. Krapp, p. 45, cite une traduction anglaise de 1676, par Thomas Churchyard.
  83. Chefs-d’œuvre des conteurs français contemporains de La Fontaine, XVII* siècle, avec une introduction, des notes historiques et littéraires, et un index par Charles Louandre, p. 54-58.
  84. Adam Loflus, vicomte d’Ely, lord chancelier, et Richard, comte de Cork. Cf. H. Jones, bishop of Clogher, Saint Patrtck’s Purgatory, containing the Description, Originall, Progresse and démolition of that superstitions place. London, 1647. O’Connor, Si. Patrick’s Purgatory, p. 132-140.
  85. Ph. de Félice, L’autre monde, mythes et légendes ; le Purgatoire de saint Patrice, p. 9-15. M. A. Le Braz, qui Ta visite en avril 1905, quelques semaines après M. de Félice, a bien voulu me communiquer ses notes de voyage.
  86. Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 271-333.
  87. N’est-ce pas lui, d’ailleurs, que désigne l’auteur de la Vie de St Patrice dans ce vers ambigu : Asistet gant eun tad deus a urz sant Frances (Prologue, 13).
  88. Saint Patrice ne semble pas avoir été très connu en Bretagne. M. R. de Laigue m’a aimablement signalé les quelques sanctuaires qui lui sont dédiés : une chapelle à Vezin (manoir du Groselier), à Rennes (manoir du Breil), à Lannion. Il y a en Indre-et-Loire une commune de Saint-Patrice. On y remarque une épine miraculeuse que le saint, dit la légende, fit lleurir en plein hier et qui maintenant fleurit encore à contre-saison (communication de M. H. Teulié, bibliothécaire de l’Université de Rennes). On trouve en outre Saint-Patrice-de-Claids dans la Manche, et Saint-Patrice-du-Désert dans l’Orne. A Mégrit, Côtes-du-Nord, la Pierre de saint Palrice est percée dans toute sa longueur d’un trou où le saint se cacha pendant longtemps. Ernoul de la Chenelière, Mégalithes des Côtes-du-Mord. P. Sébillot, Le folklore de France, Paris, 1904, t. I, p. 321. Dans la forêt de Longboël, à La Neuville (Seine-Inférieure), il y avait un trou de saint Patrice qui donnait entrée dans l’enfer. F. Baudry, Mélusine, t. I, col. 13.
  89. Voir acte III, vers 1124, 1175-1176, p. 256, 262 de l’édition de J. J. Dunn. Cette édition est en cours de publication dans les Annales de Bretagne, t. XXIV et suiv., et a été publiée à part en 1909.
  90. Sur Jean Conan, voir A. Le Braz, Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 441-448. Voici son acte de décès qu’a bien voulu me communiquer M. le Secrétaire de mairie de Trédrez : « Extrait du registre des actes de décès de la commune de Trédrez pour l’année mil huit cent trente quatre ; du dix neufième jour du mois de décembre mil huit cent trente quatre à midi, acte de décès de Jean Conan, né à S1® Croix, département des Côtes du Nord, Agé de soixante-dix-neuf ans, profession de tisserand, domicilié de Trédrez, décédé le dix huit décembre à sept heures du matin, fils de Guillaume Conan et de Marie Le Moal, tous deux décédés, époux de Marie Jeanne Thomas, filandière, démeurant A Trédrez. La déclarai ion du décès sus-mentionné a été faite par François Conan, demeurant à Trédrez, âgé de vingt-neuf ans, profession de tisserand, qui a dit être fils du défunt et par Pierre Ollivier, demeurant A Trédrez, âgé de soixante trois ans, profession de laboureur, qui a dit être voisin du défunt. Lecture donnée de ce que dessus, les comparantc et témoins ont déclaré ne savoir signer de ce interpellés. Constaté suivant la loi par moi, Yves Hullot, maire et officier de l’Etat civil soussignant. » Si l’on regarde comme exacte l’indication de l’âge de Jean Conan A la date de sa mort, on en conclut qu’il naquit en 1755. C’est la date portée sur une copie de sa traduction du Bouquet sacré du P. Boucher, copie due A Nicolas Le Braz. Il y est dit que la traduction fut achevée er bla mil eis cant trègonl, an uguent a vis hèré « en l’an mil huit cent trente, le vingt
  91. Voir ci-dessus, deuxième rédaction P.
  92. Luzel, Notes manuscrites inédites sur le théâtre breton. La version de Le Pezron était assez différente de la nôtre. La scène où Louis Eunius rencontre son confesseur et sa cousine ôtait, comme chez le P. Boüillon, placée avant l’arrivée au Paradis, et il y a de nombreuses variantes de détail ù en juger par la traduction que donne Luzel. C’est, à quelques expressions près, le texte de M.
  93. Voir ci-après, Vocabulaire.
  94. Vla à Kérity, en Goello, Parabole de l’Enfant prodigue, 29, transcription de M. l’abbé Le Bezvoët. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 635-636. Cf. chas = choas, chant = choant, Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 552, 693.
  95. C’est le traitement ordinaire de a dans une bonne partie du Trégor et de la Cornouaille, ainsi qu’en vannetais. J. Loth, Chrestomathie bretonne, , p. 438, col. ï.
  96. La forme par h est particulièrement usitée en Goello. Hingant, Eléments de la grammaire bretonne, p. 200, note.
  97. J. Loth, Revue celtique, t. IX, p. 537-538.
  98. Le Fèvre, Grammaire celto-bretonne, écrit toujours æ, e (prononcé e muet français) pour o ; J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 504, signale e en haut-cornouaillais et vannetais.
  99. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 504. Vallée, Le breton en 40 leçons, 2« éd., p. 85, note.
  100. Ernault, Revue celtique, t. V, p. 488 ; t. XI, p. 183-184 ; t. XXVI, p. 207, note 6. La confusion entre en em et en eur est faite en sens contraire chez Tourneur, Le Mystère de saint Crépin et saint Crépinien, 1114 : en eur gontet « vous vous croyez. » Sur en eur, voir Ernault, Zeitschrift fur Celtische Philologie, t. I, p. 39-40.
  101. Forme fréquente en trégorrois.
  102. On trouvera la plupart des formes propres h notre texte chez Le Fèvre (de Plougrescant), Grammaire celto-bretonne, p. 35-45.
  103. Cf. E. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 94-108. Læ formes en -ou se rencontrent chez Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine : lesou, v. 9, retornou, v. 23, etc.
  104. Sur -f- dans les terminaisons verbales, voir E. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 479-487.
  105. Le t de petomb est dû à l’influence de l’ancien h. On trouve ces formes en -omp dans la Vie de saint Patrice, par ex. p. 116, v. 238 : etoit ma hellomp. Elles sont usitées actuellement à Pludual, Yvias, Kerfot, Lanloup, Plouézec.
  106. Cf. leret, Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 26, v. 318, 328 ; velet. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 927. Dans certains cas, il se peut qu’on ait affaire èt des présents employés au sens du futur.
  107. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 465 ; t. XIX, p. 184, n. 3.
  108. J. Loth, Revue celtique, t. VU, p. 233-237. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XIX, p. 180-186. La distinction du potentiel et de l’irréel (Cf. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 61, note) est très sensible dans notre texte pour les propositions conditionnelles ; mais il semble bien que dans les propositions complétives les diverses formes de conditionnel s’emploient indifféremment en fonction de subjonctif. Dans les propositions subordonnées autres que les complétives, on emploie le futur-subjonctif.
  109. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 118.
  110. Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 325 ; Annales de Bretagne, t. XVII, p. 59 ; J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 132, v. 451 ; p. 140, v. 524.
  111. Voir E. Ernault, Les (ormes de Vin(initi( breton, Zeitschrift /ür Celtische Philologie, t. II, p. 382-402, 494-522.
  112. Ces formes en -an sont caractéristiques du trégorrois.
  113. Forme caractéristique du trégorrois et du vannetais ; ailleurs rei.
  114. En moyen-breton toeaff, touet, toet, Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 392, en breton moderne toui, touein.
  115. Sur ces infinitifs, particulièrement répandus en comouaillais, voir Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 470.
  116. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 97-100 ; t. XIII, p. 352.
  117. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 48, v. 575 : da rein.
  118. Cf. Ernault, Revue celtique, t. IX, p. 247-248.
  119. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XXII, p. 376.
  120. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 126, v. 350.
  121. Zo dans le sens de eus est trégorrois. Vallée, Leçons élémentaires de grammaire bretonne, p. 156 ; a zou comme a vou est du dialecte du Goello. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 60,. note 4 ; 65, note 1.
  122. Forme du Goello. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 60, note 4. On la trouve à Saint-Gilles-Plîgeaux. Elle est relevée dans la Grammaire celtobretonne de Le Fèvre, p. 36, 37.
  123. On trouve cette forme à Penvénan ; béhomp chez Le Fèvre, p. 36.
  124. On trouve aussi cette forme dans la Vie de saint Patrice, par ex. p. 190, v. 300 ; dans Cognomerus et sainte Tréfine, par ex. v. 840, 841 ; bèhet chez Le Fèvre, p. 36.
  125. Voint, Tourneur, Saint Crépin et saint Crépinien, v. 189 ; voind, Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 1127 ; von à Pleubian ; boind, bouind chez Le Fèvre, p. 36.
  126. Les formes en oe sont inusitées à Carnoët, Plougonven, Penvénan, Saint-Gilles-Pligeaux.
  127. Sur les formes par b initial, voir Vallée, Leçons élémentaires, p. 146.
  128. Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 162.
  129. Forme employée à Penvénan, Pleumeur-Gautier.
  130. Graphie du moyen-breton. Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 286.
  131. Cf. Ernault, La conjugaison personnelle et le verbe avoir, Revue celtique, t. IX, p. 261. Cf. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 71.
  132. Cette forme est propre au goello. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 68, note 3.
  133. La forme par p initial est usitée à Plougonven, Penvénan, Glomel, Plouézoc’h.
  134. Ces formes en / se trouvent dans la Grammaire celto-bretonne de Le Fèvre, p. 40.
  135. Cf. Ernault, Revue celtique, t. IX, p. 262. On dit actuellement momp à Pleumeur-Gautier, Carnoët, Penvénan, Plougonven, Glomel, Plouézoc’h.
  136. Cf. E. Ernault, Revue celtique, t. IX, p. 262. Ces formes contractées sont usitées surtout en Goello.
  137. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 38, v. 467 ; p. 144, v. 590.
  138. On trouve aussi cette forme dans La Vie de saint Patrice, par ex. p. 68, v. 814 ; p. 190, v. 299. Elle est, m’écrit M. l’abbé Le Clerc, usitée en Goello et Haute-Cornouailles.
  139. En trégorrois graiont, Hingant, Eléments, p. 68, note 3.
  140. Sur cette confusion, fréquente en vannetais, complète h l’ile de Groix. voir Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 115, 117, 119 ; J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 485.
  141. Cette forme et les formes analogues sans u sont caractéristiques du Goello. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 91.
  142. Forme analogique d’après la conjugaison régulière, au lieu de gouzout. Elle n’est plus usitée maintenant ; M. F. Even l’a entendu employer par de vieilles gens du Goello. M. Vallée me signale en Basse-Cornouaille gouezez. M. Ernault m’indique n’ ouzez-te dans le Barzaz Breiz, 6® éd., p. 4, col. 2.
  143. Sur -feed, -feomp, très usité en petit trégorrois, voir Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 482, 485.
  144. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 478 ; gwien est trégorrois. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 92-93.
  145. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 4G3, 479.
  146. J’ai relevé un grand nombre d’exemples de ces mots sur le plan suivi par L. Le Clerc ; c’est une des parties les plus originales et les plus intéressantes de la grammaire bretonne, surtout du point de vue sémantique.
  147. Cf. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 477. Ernault, Glossaire•, p. 210.
  148. Ernault, Glossaire*, p. 214.
  149. Ernault, Glossaire*, p. 454.
  150. Cf. Le Braz, Cognomervs et sainte Trêfine, v. 15.
  151. Pet. trég. dus. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 363 ; Glossaire *, p. 174.
  152. Trég. dimeus, demeus. Ernault, Glossaire *, p. 225 ; dimes, Le Rroz, Cognomerus et sainte Trèfine, v. 128.
  153. Cette forme par n au lieu de z est usitée surtout en bas-goello. E. Ernault, Revue celtique, t. V, p. 124 ; Glossaire *, p. 217 ; cf. trene au Faouët, chez J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 370, 12 ; Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 198, v. 407.
  154. Pour da gaed. Emault, Revue celtique, t. XI, p. 189 ; Glossaire*, p. 737 : ves. Zeitschrift für Celtische Philologie, t. II, p. 504. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 90, v. 1048 ; p. 112, v. 188.
  155. Pet. trég. heri, heli, hei ; Ernault, Glossaire*, p. 220.
  156. Le Pelletier, Dict., col. 600. J. Loth, Chrestomathie, p. 284, 285, 2% E. Emault, Glossaire *, p. 410 ; Revue celtique, t. XVI, p. 189, note.
  157. Ernault, Glossaire », p. 214.
  158. Ernault, Glossaire », p. 473 : penn ; war ben, Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 80, v. 932.
  159. Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 173, note 6. Ernault, Glossaire *, p. 502. Hingant, Eléments, p. 199.
  160. Ernault, Glossaire », p. 126, 715.
  161. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 397.
  162. Cf. Ernault, Glossaire*, p. 731.
  163. Cf. J. Loth, Revue celtique, t. XV, p. 96.
  164. Henwas, chez Diinn, La Vie de saint Patrice, p. 80, v. 932.
  165. Ernault, Glossaire *, p. 721-722.
  166. Cf. dustu, Ernault, Glossaire*, p. 46, usité en petit-trégorrois.
  167. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 227.
  168. Tourneur, Saint Crépin et saint Crépinien, 1085, La Vie de saint Patrice, p. 122, v. 306. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 225.
  169. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 199 ; Glossaire *, p. 204 ; J. Loth, Revue celtique, t. X, p. 482.
  170. Cf. E. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. X, p. 330.
  171. Ernault, Glossaire*, p. 210. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 96, v. 1123.
  172. Cf. E. Ernault, Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 255262. Sur le sens précis de ce mot en trégorrois, voir Hingant, Eléments de la grammaire bretonne, p. 206, n° 190.
  173. Cl. Ernault, Glossaire *, p. 395.
  174. Ernault, Revue celtique, t. XIII, p. 349.
  175. Ernault, Revue celtique, t. XIII, p. 352-353.
  176. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 142, v. 552. Sur na = ha en vannetais, voir Guillevic et Le Goff, Grammaire bretonne du dialecte de Vannes, p. 101.
  177. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 142, v. 554.
  178. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 42, v. 494 ; p. 140, v. 524. Ernault, Glossaire *, p. 32.
  179. Cette conjonction est surtout usitée en Goello.
  180. Cf. J. Loth, Chrestomathie, p. 507.
  181. Hingant, Eléments de la grammaire bretonne, p. 122. Le Clerc, Grammaire bretonne, p. 108, 191.
  182. Ernault, Glossaire *, p. 18.
  183. Ernault, Glossaire*, p. 711, tre.
  184. Ernault, Revue celtique, t. XIII, p. 358-359.
  185. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 54, v. 633 ; Hingant, Grammaire, p. 200-201.
  186. Sur pa et pan, voir E. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 364 ; Mémoires de la Société de linguistique de Paris, t. X, p. 339.
  187. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XI, p. 476 ; Mémoires de la Société de linguistique, t. XII, p. 433 ; Glossaire», p. 458 : pan.
  188. Essai sur l’histoire du théâtre celtique, p. 421422.
  189. Les mots d’origine française sont en italiques.
  190. 167, 223, 232, 294, 700, 807, 850, 887, 1271, 1329, 2358. Les quelques jurons français que l’on trouve dans le texte : paletete die 214, 322 ; pale charny die 815 ; mil sieue 983, sont là évidemment pour donner quelque distinction au personnage qui les emploie. Sur ces jurons, voir E. Ernault, Mélanges II. d’Arbois de Jubainville, p. 68-69. Quant au juron provençal trône da bagase, il est venu sans doute par les matelots levantins.
  191. Cf. dans M : un vieux chien n’aime pas à jouer avec des chaînes. — Il y a un commun proverbe qui dit qu’on ne trouve jamais son profit à aller dans les cabarets boire et se battre avec des sergents.
  192. On trouvera la plupart des mots employés dans Louis Eunius soit dans le Dictionnaire étymologique du breton moyen, soit dans le Glossaire moyen-breton de E. Ernault, soit dans le Dictionnaire de Troude. Je n’ai renvoyé à ces ouvrages que pour des questions de détail ou lorsque le mot en question n’était pas en vedette.
  193. Je dois la localisation de ces particularités à M. Even, de Tréguier, originaire du Goello. Le Goello avait pour capitale Chatelaudren. 11 était borné à l’ouest par le Trieu, à l’est par la baie de Saint-Brieuc : il s’étendait au sud jusqu’à Quintin et comprenait 42 paroisses. J. Geslin de Bourgogne et A. de Barthélemy, Anciens Evêchés de Bretagne, t. I, p. lxxvi : A. de La Borderie, Histoire de Bretagne, t. III, p. 86. Il s’étendait sur les cantons actuels de Paimpol, Plouha, Etables, Plouagat, Châtelaudren, Pontrieux, Ianvollon, Plœuc, Uzel, Quintin.
  194. Voir E. Ernault, Revue celtique, t. XIII, p. 241. On trouvera la bibliographie du sujet chez J. Loth, La métrique galloise, t. II, p. 177 ; cf. Revue celtique, t. XXI, p. 404.
  195. Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. xxx-xxxi, Tourneur, Le Mystère de saint Crépin et de saint Crépinien, Introduction, 5.
  196. Voir ci-dessus, phonétique.
  197. Cf. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. xxix-xxx. Tourneur, Le Mystère de saint Crépin et de saint Crépinien, Introduction, 5.
  198. Cf. Tourneur, Saint Crépin et saint Crépinien, 604 : michour = micher.
  199. La difficulté vient aussi de l’état précaire du texte. Je considère ici comme définitives les corrections conformes au texte de C et comme non avenues celles qui ne se trouvent pas dans C. La division actuelle des syllabes en Goello m’a été indiquée par M. Even. Elle est notée pour les mots difficiles chez Troude, Nouveau Dictionnaire pratique breton-français du dialecte de Léon, p. 679-790.
  200. En Goello comme en Vannes : la-qued.
  201. Ernault, Glossaire *, p. 21, 710.
  202. Cf. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 466 note.
  203. Cf. Ernault, Revue morbihannaise, t. II, p. 239.
  204. Cf. Ernault, Glossaire *, p ? 303.
  205. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 3 du premier Prologue.
  206. Ecrit hiia chez Quiquer de Roscoff, Dictionnaire et colloques françoisbreton, Morlaix, 1690, p. 120 ; hiya, p. 84 ; hiia, p. 110 ; hia de deux syllabes chez Le Pelletier, Dictionnaire de la langue bretonne, 1752, col. 432. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XIII, p. 356. Le Braz, Cognomerus et sainte Trèfine, v. 269, note ; Dunn, La Vie de saint Patrice, p. xxxvm.
  207. On dit maintenant fi-ans.
  208. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 290. C’est la prononciation actuelle, de même que fi-es, pri-ed ; mais on dit qui-riec.
  209. Yenien 3 syll. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 315.
  210. Cf. diou-tan, J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 104, v. 103. C’est la prononciation actuelle.
  211. Cf. Ernault, Revue celtique, t. XVI, p. 193. Le Braz, Cognomerus et sainte Tréfine, v. 766. Troude compte diaoul pour deux syllabes.
  212. On dit maintenant gou-liou comme eu-riou, etc.
  213. Cf. Tourneur, Saint Crépin et saint Crèpinien, v. 404.
  214. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 51, note 2.
  215. Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 372.
  216. Ce mot a d’ordinaire une syllabe en Goello.
  217. Cf. Ernault, Dictionnaire étymologique, p. 275.
  218. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 256, v. 1118 ; p. 262, v. 1176.
  219. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 106, v. 134 ; p. 220, v. 671.
  220. Cf. Tourneur, Saint Crépin et saint Crèpinien, 189.
  221. Cf. H. de la Villemarqué, Le grand Mystère de Jésus, p. 98, col. 1,1.14.
  222. Cf. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 126, v. 354 ; p. 156, v. 697, etc. On dit actuellement puissant.
  223. Cf. Tourneur, Saint Crépin et saint Crépinien, 267. En Goello marv.
  224. Cf. Emault, Dictionnaire étymologique, p. 308. En Goello han’.
  225. Cf. seit, en petit-trégorrois sêt. Emault, Glossaire moyen-breton*, p. 622. Tourneur, Saint Crépin et saint Crépinien, v. 400, 412 ; Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 100, v. 33 ; p. 188, v. 259.
  226. Voir, par exemple, v. 605, 1531, 1763, 1942, 1990, 2525, 3324, 3425, 3562, 3589.
  227. La traduction française d’un manuscrit perdu de Louis Eunius avec prologues et un épilogue fort curieux que Luzel avait en 1881-1883 et que A. Le Braz a trouvée dans ses papiers (Cf. Revue celtique, t. V, p. 323) est analysée ci-dessus.
  228. Pour l’interprétation des passages obscurs j’ai constamment eu recours à la science et à l’amitié de A. Le Braz. M. Even a bien voulu aussi me faire profiter de la connaissance intime qu’il a du breton trégorrois. M. Emile Ernault et M. Vallée m’ont donné avec unç grande obligeance leur avis sur les mots ou les phrases difficiles à expliquer. M. Pierre Le Roux, chargé du cours de celtique à. l’Université de Rennes, a relu les épreuves de mon livre et m’a signalé plus d’une erreur.