Mémoires de la ville de Dourdan/Le trafic

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Le trafic.

Le principal trafic qui ſe face à Dourdan eſt de bas d’eſtame & de ſoye, qui y a eſté introduit nouuellement enuiron l’an mil cinq cens ſoixante, qu’vn officier de l’Eſcurie que Monſieur de Guyſe Seigneur vſufruictier y auoit eſtably, voyant vn jeune garçon trauailler habilement à faire des bonnets de laine, & jugeant ſon eſprit aſſez eſueillé pour comprendre choſe nouuelle, il luy fit naiſtre l’enuie de faire vn bas, (duquel les points n’eſtoient autres que ceux du bonnet :) & pour luy ouurir le chemin, luy en donna vn vieil de ſoye ſur lequel il pourroit ſ’instruire & prendre patron : Ceſte entrepriſe reüſſit ſi heureuſement, que ce nouuel apprenty rendit vn bas d’eſtame fait en perfection, & fut capable d’en enſeigner la methode à ſes compagnons bonnetiers, (deſquels y auoit grand nombre en ceſte ville, pource que lors on n’vſoit point encores de chapeaux, ains ſeulement de bonnets :) A leur exemple tous ceux de la ville ſ’y appliquerent, & en fin furent imitez par les villages circonuoiſins, voire par tous ceux de la Beaulce, juſques à huict ou neuf lieuës loing. Quelques années apres les ouuriers de la ville plus ſubtils que les autres ſ’adonnerent aux bas de ſoye (en la façon deſquels ils ne cedent en rien à Milan) & laiſſerent la laine aux Beaulcerons, les ouurages deſquels toutesfois les marchands de Dourdan vont achepter ſur les lieux, pour (après les auoir appreſtez) les vendre à ceux de Paris.