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Mémoires extraits des recueils de l’Académie des sciences de Paris et de l’Institut de France/Recherches sur la libration de la Lune

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RECHERCHES

SUR

LA LIBRATION DE LA LUNE,

DANS LESQUELLES ON TÂCHE DE RÉSOUDRE

LA QUESTION PROPOSÉE PAR L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
POUR LE PRIX DE L’ANNÉE 1764[1].


(Prix de l’Académie Royale des Sciences de Paris, tome IX, 1764.)


Séparateur


I.

Cet écrit a pour objet d’examiner les différents mouvements, apparents ou réels, que la Lune peut avoir autour de son centre. Je suppose d’abord que cette Planète a une figure quelconque ; et je cherche le mouvement qu’elle doit recevoir de l’action de la Terre et du Soleil. Quoiqu’un très-grand Géomètre ait déjà donné des méthodes et des formules générales, qui peuvent aisément s’appliquer à la recherche dont il s’agit ici, néanmoins il m’a paru plus commode de reprendre la question en entier, et de la résoudre par une méthode que je crois nouvelle à plusieurs égards et qui est d’un usage simple et général pour tous les Problèmes de Dynamique. Cette méthode me conduit naturellement à trois équations générales, qui reviennent au même, pour le fond, que celles qu’on trouve dans les Mémoires de l’Académie de 1754, pages 424 et 425 et, pour en faciliter la comparaison à ceux-qui voudront prendre la peine de la faire, j’expose en peu de mots les principales différences qu’il y a entre elles par rapport à la diversité des dénominations. D’après ces équations, j’examine quels changements l’action de la Terre et du Soleil doit produire dans la rotation de la Lune et dans la position de son axe. Après avoir prouvé que l’action du Soleil est presque insensible par rapport à celle de la Terre, je trouve qu’en supposant, avec M. Newton, que la Lune est un sphéroïde allongé vers la Terre, cette Planète doit faire autour de son axe une espèce de balancement ou de libration, par lequel sa vitesse de rotation est tantôt accélérée, tantôt retardée ; et j’explique alors avec facilité pourquoi la Lune doit nous montrer toujours à peu près la même face, quoiqu’elle n’ait point reçu d’abord, comme il est très-naturel de l’imaginer, une rotation exactement égale a son mouvement moyen autour de la Terre. Je fais voir ensuite que l’axe de cette Planète doit être sujet à un mouvement semblable à celui de la Terre, comme M. d’Alembert l’a déjà démontré dans la supposition que la Lune soit un sphéroïde homogène et elliptique dans tous les sens ; mais je diffère essentiellement de lui sur la quantité de la précession-et de la nutation qui doit avoir lieu dans cette hypothèse ; je donne la raison de la différence qui se trouve entre nos résultats, en faisant voir que les formules qui sont vraies pour la Terre ne s’appliquent pas indistinctement à la Lune, comme le suppose cet Auteur. Je fais voir de plus que la figure de la Lune pourrait aussi être telle que la précession de ses points équinoxiaux fût exactement, ou à très-peu près, égale au mouvement des nœuds de la Lune, comme l’a trouvé M. Cassini ; et dans ce cas je démontre qu’il ne doit plus y avoir de nutation sensible dans l’axe de cette Planète. Au reste, c’est aux Astronomes seuls à nous instruire pleinement là-dessus ; mais ; pour les mettre plus à portée de connaître ces différents mouvements, je propose des méthodes que je crois assez simples pour déterminer, par le moyen des observations des taches de la Lune, la position de son axe de rotation et la quantité de sa libration tant apparence que réelle.

Tels sont, en abrégé, les points principaux de la Dissertation suivante. L’Académie Royale des Sciences ayant proposé pour le sujet du Prix de l’année prochaine « Si l’on peut expliquer par quelque raison physique pourquoi la Lune nous présente toujours à peu près la même face ; et comment on peut déterminer par les observations et par la » théorie si l’axe de cette Planète est sujet à quelque mouvement propre, semblable à celui qu’on connaît dans l’axe de la Terre, et qui produit la précession des équinoxes et la nutation » ; j’ose lui présenter le fruit de mon travail sur cette importante matière. S’il ne répond pas entièrement aux vues de cette savante Compagnie, au moins servira-t-il à jeter de nouvelles lumières sur un des principaux phénomènes célestes.

II.

Comme il n’est question ici que du mouvement que la Lune doit avoir autour de son centre de gravité, en vertu de l’action du Soleil et de la Terre, il est évident qu’on peut regarder le centré de la Lune comme immobile par rapport à la Terre et au Soleil ; en transportant à ces deux Planètes en sens contraire le mouvement que la Lune a réellement autour d’elles, c’est-à-dire en imaginant que la Terre et le Soleil se meuvent autour du centre de la Lune, supposé fixe, comme les verrait un observateur placé dans ce centre.

Cela posé, j’imagine par le centre de la Lune un plan parallèle à l’écliptique, auquel je rapporte la position des centres de la Terre et du Soleil, comme aussi celle de tous les points de la masse de la Lune. Pour cella, ayant mené du centre de cette Planète dans le plan dont je parle une ligne fixe et dirigée vers le premier point d’Aries, laquelle sert d’axe commun à toutes les abscisses soient l’abscisse et l’ordonnée rectangle qui répondent à la projection du centre de la Terre sur ce plan, et soit l’autre coordonnée rectangle qui exprime la distance du centre de la Terre au point qui en est la projection ; soient aussi les coordonnées semblables pour la position du centre du Soleil ; enfin soient l’abscisse, et les deux ordonnées correspondantes à un point quelconque de la masse de la Lune.

Il est visible :

1o Que la distance de ce point au centre de la Terre sera exprimée par

quantité que j’appelle pour abréger ;

2o Que la distance du même point au centre du Soleil sera exprimée de même par la quantité

que j’appelle

Donc, si l’on nomme la masse de la Terre et celle du Soleil, chaque point de la Lune sera tiré par deux forces, l’une dans la direction de la ligne égale à l’autre suivant la ligne égale à

De plus, si l’on prend l’élément du temps pour constant, on aura pour les forces accélératrices dont le point est sollicité suivant la direction des espaces qu’il parcourt dans l’instant et il faudra, par le principe général de la Dynamique, que ces forces prises en sens contraire et combinées avec les forces tiennent le système de tous les points c’est-à-dire la masse entière de la Lune, en équilibre autour de son centre de gravité supposé fixe.

III.

C’est un principe généralement vrai en Statique que, si un système quelconque de tant de corps ou de points que l’on veut, tirés chacun par des puissances quelconques, est en équilibre, et qu’on donne à ce système un petit mouvement quelconque, en vertu duquel chaque point parcoure un espace infiniment petit, la somme des puissances, multipliées chacune-par l’espace que le point où elle est appliquée parcourt suivant la direction de cette même puissance, sera toujours égale à zéro.

Dans la question présente, si l’on imagine que les lignes deviennent, en variant infiniment peu la position de la Lune autour de son centre,

il est facile de voir que les différences

exprimeront les espaces parcourus en même temps par le point dans des directions opposées à celles des puissances

qui sont censées agir sur ce point ; on aura donc, pour les conditions de l’équilibre, l’équation générale

savoir, en changeant les signes,

(A)

Les quantités ne sont autre chose que les différentielles des lignes prises à l’ordinaire et affectées de la caractéristique au lieu de la commune pour les distinguer des autres différentielles des mêmes lignes qui ont rapport au mouvement réel du corps.

Quant au signe d’intégration il est mis pour marquer la somme de toutes les formules semblables qui répondent à tous les éléments de la masse de la Lune.

IV.

Scolie. — Le principe de Statique que je viens d’exposer n’est, dans le fond, qu’une généralisation de celui qu’on nomme communément le principe des vitesses virtuelles, et qui est reconnu depuis longtemps par les Géomètres pour le principe fondamental de l’équilibre. M. Jean Bernoulli est le premier, que je sache, qui ait envisagé ce principe sous un point de vue général et applicable à toutes les questions de Statique, comme on le peut voir dans la Section IX de la nouvelle Mécanique de M. Varignon, où cet habile Géomètre, après avoir rapporté d’après M. Bernoulli le principe dont il s’agit, fait voir, par différentes applications, qu’il conduit aux mêmes conclusions que celui de la composition des forces.

C’est aussi ce même principe qui sert de base à celui que M. de Maupertuis a donné dans les Mémoires de l’Académie de 1740, sous le nom de loi du repos, et que M. Euler a développé ensuite et rendu très-général dans les Mémoires de l’Académie de Berlin pour l’année 1751.

Enfin c’est de ce principe que dépend celui de la conservation des forces vives, comme M. d’Alembert l’a remarqué le premier à la fin de sa Dynamique ; ce qui peut d’ailleurs se démontrer généralement ainsi.

Soit un système quelconque de tant de corps qu’on voudra qui pèsent, ou qui soient attirés vers des centres par des forces quelconques ; soient les forces qui agissent sur le corps et les distances respectives de ce corps aux centres de ces forces ; soient aussi les forces des corps et leurs distances aux centres des forces ; si l’on imagine que tous ces corps se meuvent, durant un instant quelconque par les espaces avec les vitesses il faudra, par le principe général de la Dynamique, que le système des Corps animés chacun des forces

dans la direction même dea espaces soit en équilibre avec les forces

Or, si l’on considère le système pendant que les corps changent infiniment peu de position en parcourant les espaces il est clair que

exprimeront les espaces parcourus par chacun des corps, dans des directions contraires à celles des forces on aura donc, par le principe de l’équilibre dont nous parlons,

Mettant, au lieu de ses valeurs et intégrant, on aura

étant les valeurs primitives de et cette équation renferme, comme on le voit, la conservation des forces vives prise dans toute son étendue.

Au reste le principe de Statique que je viens d’exposer, étant combiné avec le principe de Dynamique donné par M. d’Alembert, constitue une espèce de formule générale qui renferme la solution de tous les Problèmes qui regardent le mouvement des corps. Car on aura toujours une équation semblable à l’équation (A) (Article précédent), et toute la difficulté ne consistera plus qu’à trouver l’expression analytique des forces qu’on suppose agir sur les corps et des lignes suivant lesquelles ces forces agissent, en n’employant dans ces expressions que le plus petit nombre possible de variables indéterminées, de manière que leurs différentielles désignées par le soient entièrement indépendantes les unes des autres ; après quoi, faisant séparément égaux à zéro les termes qui se trouveront multipliés par chacune des différentielles dont je parle, on aura tout d’un coup autant d’équations particulières qu’il en faudra pour la solution du Problème, comme on le verra dans les Articles qui suivent.

V.

Soient présentement :

l’inclinaison du plan de l’équateur lunaire par rapport à celui de l’écliptique ;
la longitude du nœud descendant de l’équateur lunaire, c’est-à-dire l’angle que l’intersection de cet équateur avec l’écliptique, ou avec le plan parallèle à l’écliptique et passant par le centre de la Lune, fait avec l’axe des abscisses (Article II) ;
la distance d’un méridien lunaire pris à volonté sur la surface de la Lune, et qu’on appellera dorénavant le premier méridien, au nœud descendant de l’équateur, cette distance étant comptée à l’ordinaire sur l’équateur et selon la suite des signes.

Il est aisé de voir que ces trois variables suffiront pour déterminer, à chaque instant, la situation de la Lune par rapport à son centre, qui est censé immobile ; aussi ce seront les seules qu’il faudra faire varier dans les différentielles des lignes Soient de plus

le rayon ou la distance d’un point quelconque a au centre de gravité de la Lune ;
l’angle que ce rayon fait avec le plan de l’équateur, ou la distance du point a à l’équateur comptée sur le méridien qui passe par ce point ;
l’angle que le méridien passant par le point fait avec le premier méridien, c’est-à-dire la distance entre ces deux méridiens comptée sur l’équateur en allant d’occident en orient.

Il est visible que ces trois nouvelles indéterminées ne dépendent nullement de la position de la Lune sur son centre, mais seulement de la situation particulière de chacun de ces points par rapport à tous les autres. Ainsi ces quantités ne seront variables dans nos formules que relativement aux intégrations indiquées par le signe dans l’équation (A).

Au reste il est bon de remarquer d’avance que, comme on suppose que le centre de rotation de la Lune soit dans son centre même de gravité, on aura, par la propriété connue de ce centre, les trois conditions suivantes

(B)
VI.

Maintenant, pour avoir les valeurs des coordonnées exprimées en je considère que l’angle peut être regardé comme exprimant la déclinaison du point vu du centre de la Lune, et rapporté à l’équateur lunaire ; et que, dans cette supposition, l’angle que je nommerai pour abréger, sera l’ascension droite du même point comptée à l’ordinaire depuis le nœud descendant de l’équateur. Donc, en rapportant le point au plan de l’écliptique lunaire (j’appelle ainsi le plan que nous avons imaginé parallèle à l’écliptique et passant par le centre de la Lune), lequel est incliné à l’équateur de l’angle on trouvera facilement, par les formules de la Trigonométrie, sa latitude que j’appellerai et sa longitude que je nommerai car on aura, comme il est aisé de le démontrer,

(C)

Mais il est clair d’autre part que l’angle n’est autre chose que l’angle fait par le rayon avec le plan des et et que que je nomme est l’angle que la projection de sur ce plan fait avec l’axe des on aura donc, comme il est facile de le concevoir même sans figure,

(D)

et, substituant pour pour et leur valeurs ci-devant,

(E)

où l’on se resouviendra que

VII.

On différentiera d’abord ces valeurs de en faisant varier seulement (Article V), et en mettant la caractéristique au lieu de la pour avoir celles de on différentiera ensuite les mêmes valeurs deux fois à l’ordinaire, pour avoir les différentio-différentielles après quoi on fera les produits

et, après avoir effacé ce qui se détruit, et mis pour

leurs valeurs

on aura

On multipliera cette quantité par et l’on en prendra l’intégrale en faisant varier seulement (Article v) ; on aura ainsi la valeur de

qu’il faudra substituer dans l’équation (A), Article III.

VIII.

Remarque. Il y a plusieurs moyens d’abréger le calcul de la valeur de

en voici un qui quoique indirect est néanmoins préférable par sa simplicité et sa généralité. On commencera par chercher la valeur de

et pour ce j’observerai, dans la supposition présente, que la valeur de devient celle de en mettant simplement à la place de et à la place de c’est-à-dire en augmentant l’angle de degrés ; ce qui aura par conséquent lieu aussi dans les valeurs de et de d’où il s’ensuit que, dès que l’on aura la valeur de on en pourra tirer tout de suite celle de en négligeant simplement dans le carré de tous les termes qui renfermeraient et effaçant dans les autres les carrés et après cela il n’y aura plus qu’à faire le carré de et l’on aura, après quelques réductions,

Je différentie à présent cette équation par c’est-à-dire en affectant les différentielles de au lieu de j’aurai, après avoir divisé par

Je ne mets pas cette différentielle en entier parce que je ne veux que

donner une idée de la méthode que je propose. Maintenant je considère que est la même chose que comme il est aisé de s’en convaincre en considérant la nature du Calcul différentiel ; il en est de même des autres différences affectées des on peut donc mettre partout au lieu de et l’on aura

On prendra l’intégrale de cette équation, et, regardant les différences affectées de comme de simples variables, on fera disparaître leurs différentielles par l’opération assez connue des intégrations par partie ; ce qui donnera

Or il est aisé de comprendre que cette équation doit être identique et que par conséquent il faut que la partie algébrique du premier membre soit égale à la partie algébrique du second, et la partie intégrale à la partie intégrale ; donc, n’ayant égard qu’à la partie intégrale de l’un et de l’autre membre, et ôtant le signe on aura sur-le-champ

On peut remarquer encore que cette valeur ne différe de celle de

qu’en ce que la lettre qui était après la dans les différentielles aflectées de se trouve maintenant devant les quantités mêmes qui multiplient ces différentielles, et que les autres termes, qui ne renferment

point de semblables différentielles, ont des signes contraires. Ainsi, ayant la valeur de

on aura facilement celle de

dont on a besoin dans la solution de tous les Problèmes de Dynamique qu’on voudra traiter suivant notre méthode.

IX.

Jusqu’ici la position de l’axe de rotation, autour duquel nous supposons que la Lune tourne en décrivant d’occident en orient l’angle est ahsolument arbitraire, et nous pourrons prendre telle ligne qu’il nous plaira pourvu qu’elle passe par le centre de gravité ; mais le calcul sera beaucoup simplifié si l’on suppose qu’abstraction faite des forces étrangères, la rotation de la Lune doive être uniforme, et son axe une ligne fixe et invariable. Voyons donc les conditions qui résultent de ces suppositions pour cela il n’y a qu’à faire

dans l’équation (A), ce qui la réduit à

et il faudra que cette équation sui vraie en faisant

or, dans ce cas, on aura (Article VII)

donc l’équation à vérifier sera

laquelle donne séparément les deux suivantes (Article IV à la fin)

(F)

Telles sont les conditions nécessaires pour que la Lune puisse d’elle-même tourner uniformément autour d’un axe fixe ; par conséquent si l’on suppose, comme les observations de la libration paraissent le démontrer, que ces conditions aient lieu dans la rotation de la Lune, il faudra négliger, dans la valeur (Article VII) de

tous les termes où se trouvent et et pour avoir l’intégrale

il n’y aura plus qu’à mettre au lieu de sa valeur ce qui donne

En supposant, pour abréger,

(G)

on trouvera pour la valeur de

une expression de cette forme

dans laquelle

X.

Scolie I. — On aurait tort de croire que les conditions

rendissent notre solution moins générale ; car je vais démontrer que, dans quelque corps que ce soit, on peut toujours trouver trois axes qui passent par le centre de gravité, par rapport à chacun desquels ces deux équations aient lieu en même temps.

Pour cela, imaginons pour un moment que la position de la Lune, que je considérerai ici comme un corps quelconque, soit fixe par rapport au plan de son écliptique ; et cherchons la position du plan de l’équateur de manière que l’on ait

on aura d’abord, en combinant les formules (C) de l’Article VI

donc

et, en mettant pour sa valeur afin que l’angle ait une origine fixe,

Donc si l’on fait, pour abréger,

on aura

deux équations d’où l’on tirera les valeurs de et

La première nous donne

et la seconde nous donne aussi

donc, chassant et faisant on aura, après les réductions, une équation de cette forme

dans laquelle

étant et Cette équation étant dégagée des signes radicaux, devient celle-ci

laquelle, ayant son dernier terme négatif, et ne renfermant aucune puissance impaire de aura nécessairement, comme on sait, au moins deux

racines réelles et égales, l’une positive et l’autre négative ; donc, puisque

on aura au moins une valeur de et par conséquent de l’angle et cette valeur étant substituée dans l’expression de \operatorname{tang}\pi ci-dessus, on aura l’angle \pi correspondant. Ayant les angles \varepsilon et on aura, comme on le voit, la position du plan cherché de l’équateur par rapport au plan donné de l’écliptique. Si et alors \operatorname{tang}\pi=0, et le plan cherché tomberait dans le plan donné, ce qui est évident, parce que les deux équations

sont analogues aux équations de condition

mais, en reprenant les équations qui résultent immédiatement de ces deux dernières équations et y mettant et on trouve

équations qui, outre la racine donnent encore

savoir, en faisant

dont les deux racines sont nécessairement réelles, à cause du dernier terme négatif ; de là il s’ensuit que si, après avoir trouvé par les équations ci-dessus la position du plan cherché, on regarde maintenant ce

plan comme donné, on trouvera encore deux autres plans qui auront la même propriété, et dont la position par rapport à celui-là sera déterminée par les équations

Donc : 1o ces deux derniers plans couperont le premier à angles droits ; 2o ils se couperont l’un l’autre avec un angle égal à la différence des angles qui ont pour tangentes les deux racines de l’équation en c’est-à-dire qu’en nommant et ces racines, la tangente de l’angle en question sera, à cause de

XI.

Scolie II. — À l’égard des quantités de l’Article IX [équations (G)], il est clair que leur valeur dépend entièrement de la figure et de la constitution intérieure de la Lune ; car, soit la densité d’une particule quelconque on trouvera aisément

et l’on aura

et, pour avoir la valeur complète de ces intégrales, il faudra, après avoir substitué pour sa valeur en et intégrer : 1o en faisant varier et en mettant, après l’intégration, sa valeur en et en qui dépend de la figure de la Lune ; 2o en faisant varier et en mettant, après l’intégration étant la circonférence d’un cercle dont le rayon 3o en faisant varier et en mettant, après l’intégration, et dou-

blant les termes. Comme la figure de la Lune est sensiblement sphérique, on ne s’éloignera pas de la vérité en la regardant comme formée de différentes couches à peu près sphériques et dont chacune soit partout de la même densité ; soit donc le rayon variable d’une couche quelconque de densité uniforme, étant le rayon de cette couche, qui est perpendiculaire au plan de l’équateur, une quantité constante très-petite, et une fonction quelconque de et qui soit nulle, lorsque On remarquera : 1o que la quantité sera une fonction de seulement ; 2o que, si l’on néglige les carrés et les puissances plus hautes de on aura, en faisant, pour abréger,

d’où il suit qu’on aura

(H)

Soit

on aura


on trouvera de la même manière

on aura donc
(I)

D’où l’on voit : 1o que les quantités et sont des quantités finies ; 2o que les quantités et sont des quantités très-petites par rapport à et étant de l’ordre de 3o que la quantité est aussi une quantité très-petite du même ordre, étant égale à

Quant à la masse de la Lune, on la trouve en intégrant l’expression de savoir, dans la supposition présente,

et son intégrale sera

en prenant ici pour la valeur de

Donc, nommant cette masse on aura, aux quantités de l’ordre de près,

Or, quoique sans connaître la valeur de on. ne puisse déterminer le rapport de ou de à on peut néanmoins trouver

des limites entre lesquelles ce rapport doit nécessairement demeurer. Il est clair : 1o que, si exprime la valeur de à la surface,

parce que est toujours de plus on a

ce qui donne

égale à une quantité positive si est négatif, et à une quantité négative si est positif, parce que donc, 2o si la densité diminue du centre à la circonférence,

mais si elle augmente,

ainsi, dans ce dernier cas, la valeur de sera contenue entre les limites

Si la densité était partout la même, on aurait alors

XII.

Scolie III. — On peut au reste déterminer la figure de la Lune par la Théorie, en supposant qu’elle ait été originairement fluide, et qu’elle ait conservé, en se durcissant, la forme qu’elle aurait dû prendre, en vertu de la gravitation mutuelle de ses parties, combinée avec la force centrifuge et avec l’attraction de la Terre. Pour cela, nous supposerons que le premier méridien de la Lune, d’où l’on commence à compter les angles soit celui qui passe par la Terre, lorsque le lieu moyen de cette Planète est égal à son lieu vrai, et nous regarderons l’attraction de la Terre comme agissant dans le sens du diamètre de l’équateur qui se trouve dans le premier méridien ; ce qui est vrai à très-peu près, à cause que la Lune nous présente toujours sensiblement la même face. Or soient le rapport de la force centrifuge à la pesanteur sous l’équateur de la Lune et la distance moyenne du centre de la Lune à la Terre ; on trouvera généralement pour la figure de chaque couche

et les deux quantités et seront déterminées par les deux équations suivantes

(K)

et étant égales à ce que deviennent et lorsque la démonstration de ces formules est facile à trouver par les principes établis par MM. Clairaut et d’Alembert ; je ne la donne point ici, pour ne pas écarter trop de mon objet principal. On aura donc dans cette hypothèse

et par conséquent on trouvera

et

Par là on aura

(L)

Si l’on suppose on aura alors

en prenant et pour les valeurs de et lorsque Mais, si l’on veut avoir égard aux conditions de l’équilibre, on aura, par les équations quelle que soit d’ailleurs la densité

en mettant Si l’on supposait de plus la densité constante et égale à on aurait, à cause de dans cette hypothèse,

Du reste on remarquera que sera dans ce cas l’ellipticité du premier méridien, et celle du méridien qui est à degrés de là ; d’où il suit que les deux demi-axes de l’équateur seront et et que son ellipticité sera, à très-peu près,

XIII.

Il reste encore a trouver la valeur des deux termes et de l’équation (A). Pour cela, soient

le rayon de l’orbite de la Terre autour de la Lune, projeté sur le plan


de l’écliptique lunaire ; ou, ce qui revient au même, le rayon de l’orbite de la Lune autour de la Terre, réduit a l’écliptique ;
la longitude de la Terre, vue du centre de la Lune, ce qui est la même chose que la longitude de la Lune vue du centre de la Terre et augmentée de degrés ;
la tangente de la latitude de la Terre, vue de la Lune, et supposée au-dessus de l’écliptique lunaire, laquelle est égale, mais de signe contraire à celle de la Lune vue de la Terre.

On aura, comme il est très-facile de le concevoir,

et, si exprime la longitude du nœud ascendant de la Lune et la tangente de l’inclinaison de l’orbite, la valeur de era, suivant les dénominations qu’on vient de poser,

Soient aussi

le rayon de l’orbite apparente du Soleil autour de la Terre,

sa longitude.

Il est visible qu’on aura

savoir

On fera donc toutes ces substitutions dans l’expression de et de (Article II), et l’on aura, après quelques réductions fort simples, en substituant pour leurs valeurs [Article VI, équations (E)], et réduisant,

On aura de même

Substituant au lieu de sa valeur et faisant, pour abréger, après avoir développé les sinus et les cosinus de

(M)

on aura

XIV.

Je différentie maintenant la valeur de qu’on vient de trouver, en faisant varier seulement et en écrivant au lieu de j’aurai, en retenant les lettres et divisant par

On a de plus, en négligeant les carrés et les autres puissances de vis-à-vis de

On multipliera donc ensemble ces valeurs de et de en ayant attention de rejeter tous les termes qui renfermeraient

par la raison que l’intégrale de ces termes, après avoir été multipliés par est égale à [Article V, (B) ; Article IX (F)] ; on multipliera ensuite chaque terme du produit par et l’on en prendra l’intégrale, en se souvenant que l’on a [Article IX (G)]

ce qui donne

Par ce moyen, on aura

Or on trouve, par la différentiation de (Article précédent),

savoir, comme il est facile de le voir, par la seule inspection des formules (M), Article précédent,

On a de même

donc

Donc, si l’on fait, pour abréger,

on aura

On remarquera que dans ces formules j’ai mis pour sa valeur et pour mais j’ai conservé dans les autres termes les lettres tant pour rendre les expressions moins composées que pour les raisons qu’on verra plus bas.

XV.

On cherchera d’une manière semblable la valeur de et pour cela il suffira de remarquer : 1o que, dans l’expression de (Article XIII), on peut négliger les termes vis-à-vis de parce que le rayon de l’orbite du Soleil est incomparablement plus grand que le rayon de l’orbite de la Lune ; 2o que la valeur de ne différera, après cela, de celle de qu’en ce qu’il y aura, au lieu de

quantité qu’on peut réduire par la même raison à et au lieu des d’où il s’ensuit que, si l’on fait pareillement

on trouvera aussi

XVI.

Remarque. — La valeur de de l’Article XIII nous fournit un moyen commode et simple de trouver lâ position du centre apparent de la Lune par rapport à son équateur et à son premier méridien. Car, comme la quantité exprime la distance de chaque point \alpha de la Lune au centre de la Terre, il est évident qu’elle sera la plus petites, lorsque le rayon sera dans la ligne qui joint les centres de la Lune et de la Terre, c’està-dire qui passe par le centre apparent de la Lune ; donc si l’on fait la distance du centre apparent de la Lune au plan de l’équateur lunaire la distance du méridien qui passe par le centre apparent au premier méridien il n’y aura qu’à mettre, dans l’expression de au lieu de et au lieu de et faire ensuite sa différentielle égale à zéro, en regardant et comme variables ; ce qui donnera

d’où l’on tire séparément les deux équations

la dernière donne d’abord

d’où

ensuite la première nous donnera

et, en substituant pour et les valeurs qu’on vient de trouver,

d’où l’on tire

mais on a par les valeurs de [Article XII, (M)],

donc, substituant cette valeur, on aura