THÉORIE
DES VARIATIONS PÉRIODIQUES
DES MOUVEMENTS DES PLANÈTES.
SECONDE PARTIE
CONTENANT LE CALCUL DES VARIATIONS INDÉPENDANTES DES EXCENTRICITÉS ET DES INCLINAISONS POUR CHACUNE DES SIX PLANÈTES PRINCIPALES.
(Nouveaux Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres
de Berlin, année 1784.)
Les variations périodiques des Planètes ont déjà été calculées par plusieurs Géomètres ; mais leurs calculs, épars dans différents Ouvrages, et fondés sur des formules et des données différentes, ne sauraient former un corps. D’ailleurs leurs méthodes mêmes n’ont peut-être pas toute la précision nécessaire pour ne laisser aucun doute sur les résultats ; car un défaut commun à toutes ces méthodes est de donner, dès la seconde approximation, une expression inexacte du rayon vecteur, en y introduisant des termes proportionnels au temps, qui ne doivent point s’y trouver sous cette forme ; et parmi les différents moyens qu’on a employés pour se débarrasser de ces sortes de termes et les faire servir à la détermination des variations séculaires, les uns sont ou trop compliqués ou trop indirects, et les autres ne sont pas assez rigoureux.
On peut donc encore désirer un Ouvrage où cette partie importante de l’Astronomie physique soit traitée avec autant de généralité que d’exactitude, et qui réunisse à une analyse directe et uniforme l’application numérique des formules algébriques à toutes les Planètes principales. C’est le motif qui m’a déterminé à entreprendre ce nouveau travail, comme une suite de celui que j’ai donné sur les Variations séculaires. En les réunissant on aura une analyse complète des perturbations des Planètes principales, causées par leur attraction mutuelle ; et les Astronomes y trouveront tous les secours que la Théorie peut fournir pour la perfection des Tables.
Comme nous avons déjà donné dans la première Partie de la Théorie des variations périodiques les formules générales de ces variations, il ne s’agit plus dans cette seconde Partie que de traduire les mêmes formules en nombres pour chacune des Planètes principales. Or, parmi les différentes espèces de variations périodiques que l’action mutuelle des Planètes peut produire dans leurs mouvements, celles qui se présentent les premières sont les variations qui dépendent uniquement de la distance ou commutation des Planètes entre elles, et qui auraient lieu également si les orbites des Planètes étaient sans excentricité et sans inclinaison. Nous commencerons donc par calculer celles-ci, pour lesquelles nous avons trouvé des formules très-simples, qui représentent directement les corrections de la longitude et du rayon vecteur ; et nous pourrons même négliger entièrement les corrections du rayon vecteur, comme inutiles pour les applications astronomiques, tant à cause de leur petitesse, que parce que les observations immédiates des longitudes sont les seules dont on fasse usage et sur lesquelles on puisse compter. Nous passerons ensuite à la détermination des autres variations qui dépendent tout à la fois des distances des Planètes et de leurs excentricités et inclinaisons.
section première.
où l’on donne les variations périodiques du mouvement de saturne dépendantes de sa distance héliocentrique à jupiter.
Quoique l’attraction soit mutuelle entre toutes les Planètes, on peut néanmoins, dans le calcul du mouvement de Saturne, n’avoir égard qu’à l’action de Jupiter, les autres Planètes étant et trop petites et trop éloignées pour pouvoir produire dans Saturne des dérangements sensibles ; et si cette action se trouve insuffisante pour expliquer tous ceux que les Astronomes y ont observés, il faudra avoir recours à d’autres causes pour en rendre raison. Mais, comme les preuves que l’on a déjà de la gravitation universelle ne permettent pas de douter de l’action réciproque de Jupiter et de Saturne, il est important de déterminer à priori les irrégularités dues à cette action, pour pouvoir en dépouiller les résultats des observations, et séparer d’abord les effets de cette cause générale et constante de ceux des autres causes particulières et accidentelles. Je vais donner dans cette Section les inégalités de la longitude de Saturne, dépendantes uniquement de sa distance ou commutation avec Jupiter.
1. Soit l’angle du mouvement moyen de Saturne, et sa distance moyenne au Soleil due au mouvement moyen dans une orbite invariable soit de même l’angle du mouvement moyen de Jupiter décrit en même temps que l’angle du mouvement de Saturne, et la distance moyenne de Jupiter au Soleil due à ce mouvement moyen ; enfin soit la masse de Jupiter en parties de celle du Soleil.
En appliquant à ces Planètes les résultats donnés dans la première Partie de la Théorie des variations périodiques (21), on aura pour les inégalités de la longitude de Saturne produites par l’action de Jupiter et indépendantes des excentricités et des inclinaisons, la formule suivante
dans laquelle
et où sont les coefficients de dans la série résultante du développement de la fonction irrationnelle
Cette formule exprime la correction à faire à la longitude de Saturne calculée dans son orbite elliptique. Il y en a une pareille pour la correction du rayon vecteur, mais que nous omettons comme inutile pour les usages astronomiques, ainsi que nous l’avons remarqué plus haut.
2. Pour pouvoir évaluer la formule précédente, il faudra donc commencer par déterminer les valeurs des fonctions et de leurs différences premières relativement à c’est à quoi on peut employer les formules données dans le no 45 de la première Partie de la Théorie des variations séculaires.
En faisant dans ces formules il est visible que les coefficients deviennent de sorte qu’on aura d’abord
et l’on trouvera de même
d’où, en faisant varier on tirera les valeurs des différences de par conséquent il suffira de connaître les valeurs des deux premières fonctions et celles de leurs différences, pour avoir les valeurs de toutes les autres à l’infini.
3. Dans le même endroit, nous avons fait dépendre ces valeurs de celles des fonctions et résultantes du développement de la quantité
fonctions qui sont plus faciles à calculer, et pour lesquelles nous avons donné dans le no 48 du même Ouvrage des séries très-convergentes ; nous en userons de même ici, d’autant plus que nous avons aussi déjà donné dans la seconde Partie de la même Théorie les valeurs numériques de ces séries pour toutes les Planètes principales ; et même, au lieu de faire dépendre les fonctions et leurs différences les unes des autres, il sera plus simple de les faire dépendre simplement et immédiatement des fonctions correspondantes
Pour cela on trouvera d’abord, en faisant dans les formules citées et changeant en
On trouvera ensuite
Enfin on aura par les mêmes formules
4. Or, en faisant et prenant pour et les expressions en du no 3 de la seconde Partie de la Théorie citée, on a
Si donc on suppose
et ensuite
on aura
Par ces substitutions la formule générale du no 1 ne contiendra que les quantités connues et cette formule pourra servir pour une Planète quelconque, en tant qu’elle sera dérangée par une Planète inférieure en prenant pour la distance moyenne de la Planète troublée et pour celle de la Planète perturbatrice.
5. En employant les données du no 4 de la seconde Partie de la Théorie citée, on aura d’abord
et de là on trouvera
ensuite
enfin
6. Maintenant, puisque
on aura
Par le moyen de cette valeur et des précédentes on trouvera celles des coefficients de dans la formule du no 1, et elle deviendra
7. Il ne reste donc plus qu’à substituer la valeur de , masse de Jupiter exprimée en parties de celle du Soleil, et de réduire les coefficients en arc, en les multipliant par l’arc égal au rayon.
Nous prendrons pour la valeur que nousavons employée dans la seconde Partie de la Théorie des variations séculaires et qui est (8). Multipliant cette fraction par nombre des secondes contenues dans l’arc égal au rayon, on a le nombre pour la valeur de en secondes qu’il faudra substituer dans la formule précédente.
Si donc, pour plus de simplicité, on désigne pour le lieu moyen de Saturne et par celui de Jupiter, on aura
Correction de la longitude de Saturne due à l’action de Jupiter et dépendante de la distance, de Saturne à Jupiter
8. Cette formule, quoique composée de plusieurs termes, ne constitue cependant qu’une seule équation dépendante de la distance, ou angle au Soleil, entre Saturne et Jupiter, et peut par conséquent être renfermée dans une Table unique, qui aura cette distance pour argument.
On voit que cette équation sera nulle dans les conjonctions et les oppositions de Jupiter et Saturne, que dans les quadratures de ces Planètes elle sera et que dans les octants elle montera à ou et sera à peu près à son maximum. D’où il s’ensuit que cette équation sera toujours beaucoup au-dessous des erreurs auxquelles les meilleures Tables connues de Saturne sont encore sujettes, et qui montent à près de minutes ; elle ne pourra par conséquent contribuer que très-peu à la perfection de ces Tables.
Il était cependant important de voir ce que la Théorie peut donner à cet égard, et quoique la même équation ait déjà été calculée dans les deux Pièces sur les inégalités de Saturne et Jupiter qui ont remporté le Prix de l’Académie des Sciences de Paris en 1748 et 1752 ; cependant, comme les résultats sont fort différents relativement au premier terme, qui dans la Pièce de 1748 a pour coefficient et dans celle de 1752 a j’ai cru qu’il était nécessaire de revenir sur ces calculs pour dissiper les doutes que cette différence pourrait faire naître sur leur exactitude, et fixer ce point de la Théorie de Saturne d’une manière incontestable.
Par cette raison j’ai aussi calculé deux fois plus de termes que M. Euler n’avait fait, afin qu’on puisse être d’autant mieux assuré de la convergence de la série et du degré de précision sur lequel on pourra compter.
section deuxième
où l’on donne les variations périodiques du mouvement de jupiter, dépendantes de sa distance héliocentrique à saturne, avec les inégalités qui en résultent dans les éclipses de ses satellites.
Comme dans le calcul des variations de Saturne nous n’avons eu égard qu’à l’effet de l’attraction de Jupiter, nous pouvons ainsi et par la même raison ne tenir compte que de l’action de Saturne dans la détermination des variations de Jupiter ; car ces deux Planètes forment par la grandeur de leurs masses, et par leur éloignement du Soleil, comme un système à part et indépendant des autres Planètes.
Les inégalités du mouvement de Jupiter sont d’autant plus importantes à connaître qu’elles influent sur le temps des éclipses de ses satellites, et par conséquent sur la détermination des longitudes, un des principaux objets de l’Astronomie et un des avantages les plus sensibles qui résultent de cette science. Par cette raison il est nécessaire de calculer ces inégalités avec une précision et une étendue qui ne laissent rien à désirer je vais remplir une partie de cet objet dans la Section présente, qui est uniquement destinée à la recherche des inégalités dépendantes de la distance ou commutation entre Jupiter et Saturne.
1. Soient, comme dans la Section précédente, l’angle du mouvement moyen de Saturne, sa distance moyenne, l’angle contemporain du mouvement moyen de Jupiter, sa distance moyenne, et soit de plus la masse de Saturne exprimée en parties de celle du Soleil ; on aura pour les inégalités de la longitude de Jupiter dues à l’action de Saturne, et indépendantes des excentricités et des inclinaisons, une formule semblable à celle du no 1 de la même Section, en changeant seulement dans celle-ci les lettres en et vice versâ ; ce qui est évident, puisque dans le cas présent ce sont les lettres affectées d’un trait qui appartiennent à la Planète troublée, tandis que celles sans trait se rapportent à la Planète perturbatrice.
Or on sait que les fonctions demeurent les mêmes en y changeant en et en puisque le radical d’où elles dérivent, ne subit aucune altération par ce changement ; ainsi la formule des inégalités dont il s’agit sera de cette forme
étant
Quant aux inégalités du rayon vecteur, on peut les négliger, comme on l’a fait pour Saturne et par les mêmes raisons.
2. Les valeurs des fonctions sont les mêmes ici que dans la Section précédente.
À l’égard des différences il n’y aura qu’à changer dans les formules du no 3 de la même Section en et en en observant que les fonctions demeurent aussi les mêmes dans ces changements. De sorte qu’on aura
Ainsi, en faisant, comme dans le no 4 de la Section citée, et conservant les mêmes valeurs des quantités on aura dans le cas présent
Mais, comme on a déjà calculé dans la Section précédente les valeurs des quantités
ainsi que celles de
on pourra déduire immédiatement de ces valeurs celles des quantités ci-dessus, en faisant
Telles sont les valeurs qu’il faudra substituer dans la formule générale du numéro précédent ; et cette formule servira, en général, pour une Planète quelconque, en tant qu’elle sera dérangée par une Planète supérieure en prenant pour la distance moyenne de la Planète troublée et pour celle de la Planète perturbatrice.
3. De cette manière on trouvera
ensuite
4. Or, étant ici égal à
on trouve
et la formule du no 1 deviendra par ces substitutions
5. Dans la première Section de la seconde Partie de la Théorie des variations séculaires, je suis entré dans une discussion assez étendue sur les valeurs des masses des Planètes, et j’ai trouvé pour la masse de Saturne une valeur moindre que celle qu’on avait adoptée jusqu’ici d’après Newton. Cette valeur est de de sorte qu’en l’employant ici pour après l’avoir multipliée par nombre de secondes de l’arc égal au rayon, on aura pour la valeur de en secondes, qu’il faudra substituer dans la formule précédente.
On aura ainsi, en dénotant toujours par Ϧ le lieu moyen de Saturne et par celui de Jupiter,
Correction de la longitude de Jupiter due à l’action de Saturne et dépendante de la distance de Jupiter à Saturne
6. Cette formule est, comme on voit, analogue à celle que nous avons trouvée pour Saturne, et peut de même être représentée par une seule Table, dont l’argument sera la distance ou angle au Soleil entre ces deux Planètes.
Elle est pareillement nulle dans leurs conjonctions et oppositions ; dans les quadratures elle sera de et dans les octants elle montera à ou et cette dernière valeur sera très-près du maximum. D’où l’on voit que l’équation de Jupiter est presque huit fois plus grande que celle de Saturne, quoique la masse de Saturne qui la produit ne soit qu’environ le tiers de celle de Jupiter qui produit l’équation de Saturne ; ce qui vient de ce que l’action d’une Planète perturbatrice est encore plus augmentée par la lenteur de son mouvement que par la grandeur de sa masse.
Dans la seconde Pièce déjà citée, sur les irrégularités de Jupiter et de Saturne, l’équation dont il s’agit n’est calculée que jusqu’au quatrième terme, et les coefficients s’accordent à très-peu près avec ceux de la formule précédente, en ayant égard à la différence de la masse de Saturne, qui y est supposée, d’après Newton, de de sorte qu’ils s’y trouvent augmentés tous dans la raison de à ou de à Cet accord peut servir de confirmation à la bonté de nos calculs, et augmenter encore la confiance qu’on y doit avoir. Au reste notre formule, contenant deux fois plus de termes, est aussi à cet égard plus exacte et montre en même temps combien la série est convergente.
7. Les inégalités, qui altèrent le mouvement de Jupiter autour du Soleil, doivent affecter aussi les retours des satellites de cette Planète à leurs conjonctions et les intervalles des éclipses ; et il n’est pas difficile de voir que chaque équation du mouvement de Jupiter produira une équation semblable pour le temps des éclipses de chacun de ses satellites, et dont la quantité en temps sera à la quantité de l’équation de. Jupiter en arc comme le temps de la révolution synodique du satellite sera à l’arc de degrés.
Or, pour le premier satellite, la durée de la révolution synodique, ou de ses retours aux conjonctions avec Jupiter, est de ou Divisant ce nombre par nombre de secondes du cercle entier, on aura le nombre par lequel il faudra multiplier les équations de Jupiter en secondes de degrés, pour avoir les équations correspondantes du premier satellite en secondes de temps. Appliquant donc cette réduction à la correction de la longitude de Jupiter donnée ci-dessus (5), on aura
Correction du temps des éclipses du premier satellite de Jupiter, dépendante de la distance de cette Planète à Saturne
Pour le second satellite, la durée de la révolution synodique est de ou de et ce nombre divisé par donne le nombre par lequel il faudra multiplier les coefficients de la correction de Jupiter pour avoir celle du second satellite en temps. Donc
Correction du temps des éclipses du second satellite, dépendante de la distance de Jupiter à Saturne
Pour le troisième satellite, la durée de la révolution synodique est de ou de et ce nombre divisé par donne le nombre par lequel il faudra multiplier la correction, de Jupiter pour avoir celle du troisième satellite. Ainsi l’on aura
Correction du temps des éclipses du troisième satellite, dépendante de la distance de Jupiter à Saturne
Enfin, pour le quatrième satellite, la durée de la révolution synodique étant de ou de on aura, en divisant ce nombre par le nombre par lequel la correction de Jupiter devra être multipliée pour obtenir celle des éclipses du quatrième satellite. Donc
Correction du temps des éclipses du quatrième satellite, dépendantes de la distance de Jupiter à Saturne
Au reste ces différentes corrections étant simplement proportionnelles à celle de la longitude de Jupiter, lorsqu’on aura réduit celle-ci en Table, on n’aura plus qu’à multiplier tous les nombres de la Table par les multiplicateurs donnés pour construire les Tables des corrections des éclipses.
8. Parmi les Tables des satellites de Jupiter dressées par feu M. Wargentin, on en trouve pour chaque satellite une qui a pour titre Somme des équations dépendantes de l’action de Saturne sur Jupiter, et qui est proprement composée de différentes Tables, fondées sur diverses équations de Jupiter produites par Saturne. M. de Lalande a donné dans la Connaissance des mouvements célestes pour 1763 les Tables de ces équations pour Jupiter, et je me suis assuré que celles des satellites en dépendent uniquement. M. de Lalande dit qu’elles sont de feu M. Mayer, qui les avait déduites de la Théorie ; mais il ne donne point les formules d’où elles résultent, et je ne sache pas que le travail de Mayer sur cette matière ait jamais été publié.
Cependant, comme il n’est pas difficile de retrouver ces formules d’après les Tables mêmes, les voici
Équations de Mayer pour la correction de la longitude de Jupiter due à l’action de Saturne
9. Il est visible que les trois premières équations dépendantes simplement de la distance de Jupiter à Saturne répondent à celles que nous venons de calculer dans cette Section, et en particulier aux trois premiers termes de la formule trouvée dans le no 5. Aussi le coefficient de est, aux dixièmes de seconde près, le même dans cette formule et dans la précédente ; mais le coefficient du est dans notre formule moindre d’un dixième que dans celle de Mayer, et le coefficient du est au contraire plus grand dans celle-là que dans celle-ci d’environ un cinquième. Or, comme le rapport des coefficients est indépendant de la masse de Saturne et n’est donné que par les rapports des distances et des temps périodiques de Saturne et de Jupiter, ainsi qu’on le voit par la formule générale du no 1, il s’ensuit que les équations de Mayer ne sont pas exactement conformes à la Théorie de la gravitation ; puisque d’un côté les distances et les temps périodiques des Planètes ne sont susceptibles d’aucune correction qui puisse avoir un effet sensible sur les coefficients dont il s’agit, et que de l’autre on peut compter entièrement sur l’exactitude de nos calculs, laquelle se trouve d’ailleurs confirmée par l’accord de nos résultats avec ceux de la Pièce citée de 1752.
Cependant le grand mérite de l’Auteur et la précision singulière qui distingue tous ses Ouvrages ne permettent pas de douter de la justesse de ses calculs sur les inégalités de Jupiter ; on peut donc présumer qu’il en aura usé à l’égard de ces inégalités comme il l’a fait pour les inégalités de la Lune, et qu’après avoir déterminé les coefficients par la Théorie, il aura cherché à les corriger d’après les observations ; mais les équations trouvées de la sorte ne peuvent être regardées que comme des équations empiriques, du moins en tant qu’elles s’écartent de celles qui résultent de la Théorie, et si ces équations peuvent rapprocher les Tables des observations pendant un certain espace de temps, on doit toujours craindre qu’elles ne les en éloignent dans la suite de plus en plus, comme il arrive déjà aux équations empiriques que feu M. Lambert avait données pour détruire les erreurs des Tables de Halley, dans les oppositions de Saturne et de Jupiter.
Nous croyons donc qu’il est beaucoup plus sûr de s’en tenir uniquement à la Théorie, du moins pour les équations que celle-ci peut fournir, et qu’il conviendrait par conséquent d’employer dans les Tables des satellites les corrections que nous venons de donner, à la place de celles qui résultent de la Table de Mayer pour les inégalités de Jupiter dépendantes de sa distance à Saturne.
Quant aux autres Tables de Mayer qui dépendent à la fois de la distance de Jupiter à Saturne et des anomalies de ces deux Planètes, nousnous réservons de les apprécier lorsque nous aurons calculé la partie des inégalités de Jupiter qui dépend des excentricités.
section troisième
où l’on donne les variations périodiques du mouvement de mars, dépendantes de ses distances héliocentriques aux autres planètes.
Après avoir déterminé les variations de Jupiter et de Saturne, nous allons entreprendre le calcul de celles des autres Planètes. Ce calcul ne sera pas plus difficile, mais beaucoup plus long ; car il faudra y avoir égard pour-chaque Planète à l’action de toutes les autres. En effet les orbites de Mars, de la Terre, de Vénus et de Mercure sont assez proches les unes des autres pour qu’elles puissent être sensiblement dérangées par l’attraction mutuelle de ces Planètes ; et en même temps elles doivent l’être aussi par l’action de Jupiter et de Saturne, dont l’éloignement se trouve compensé par la grandeur des masses. Cette Section contiendra les variations périodiques de Mars dues aux actions de Saturne, Jupiter, la Terre, Vénus et Mercure, et dépendantes simplement de sa distance héliocentrique à chacune de ces Planètes.
§ I. — Calcul des variations de Mars dues à l’action de Saturne.
1. La formule générale des inégalités de la longitude de Mars, provenantes de l’action de Saturne, sera la même que celle que nous avons donnée dans le no 1 de la Section précédente pour les inégalités de Jupiter dues à la même action, en y changeant simplement les quantités relatives à Jupiter en quantités analogues pour Mars.
Ayant désigné jusqu’ici par la masse, la distance moyenne et l’angle du mouvement moyen de Saturne, et par les mêmes quantités pour Jupiter, nous désignerons pareillement par la masse de Mars, par sa distance moyenne et par l’angle de son mouvement moyen dû à cette distance supposée constante.
Et, en général, les mêmes lettres marquées de trois, de quatre, de cinq traits se rapporteront successivement à la Terre, à Vénus, à Mercure, ainsi que nous en avons usé dans la seconde Partie de la Théorie des variations séculaires.
Il n’y aura donc qu’à changer dans la formule citée et en et et l’on aura, pour les inégalités de la longitude de Mars dépendantes de sa distance à Saturne, la formule suivante
dans laquelle
2. On fera maintenant et, prenant pour et les valeurs correspondantes données dans le no 4 de la seconde Partie de la Théorie des variations séculaires, on aura comme dans le no 4 de la première Section
et ensuite
et de là, par les formules du
no 2 de la Section précédente,
Ainsi il n’y aura qu’à calculer ces différentes valeurs et les substituer ensuite dans la formule du numéro précedent.
3. On a d’abord, par l’endroit cité de la Théorie des variations séculaires,
et ces valeurs donnent
ensuite
enfin
4. Maintenant, puisque
on trouvera
et la formule du no 1 deviendra par ces substitutions
dans laquelle il ne s’agira plus que de substituer pour sa valeur en secondes comme dans le no 7 de la première Section.
5. Désignant donc les lieux moyens de Saturne et de Mars par les caractères de ces Planètes, ainsi que nous en userons toujours dans la suite par rapport aux autres Planètes, on aura
Correction de la longitude de Mars due à l’action de Saturne et dépendante uniquement de la distance de Mars à Saturne.
On voit que cette correction, lorsqu’elle est la plus grande, ce qui n’arrive que près des quadratures, ne va qu’un peu au delà d’une seconde ce qui étant fort au-dessous de l’incertitude qui peut rester dans les lieux de Mars déduits des observations, il s’ensuit qu’elle peut être absolument négligée ; mais il était nécessaire de la calculer pour pouvoir s’assurer de sa quantité, et, comme personne n’avait jusqu’ici rempli cet objet, j’ai cru devoir, pour ne rien laisser à désirer dans la Théorie de l’attraction des Planètes, donner aussi la formule numérique de la correction dont il s’agit.
§ II. — Calcul des variations de Mars dues à l’action de Jupiter.
6. Pour appliquer à l’action de Jupiter les formules données dans les deux premiers numéros pour l’action de Saturne, il n’y aura qu’à changer dans ces formules les quantités en puisque ces deux Planètes sont l’une et l’autre supérieures par rapport à Mars.
Faisant donc et prenant pour et les valeurs correspondantes du no4 de la seconde Partie de la Théorie des variations séculaires, on aura ici
et de là, par les formules du no 2 ci-dessus, on trouvera
ensuite
enfin
7. Or, étant comme dans le no 4 égal à
on aura
et, faisant ces substitutions dans la formule du no 1 après y avoir changé en il viendra
où il ne faudra plus que substituer la valeur de
en secondes
comme nous l’avons vu dans le
no 5 de la seconde Section.
8. De sorte qu’on aura
Correction de la longitude de Mars due à l’action de Jupiter et dépendante uniquement de la distance de Mars à Jupiter.
Cette correction, quoique beaucoup plus sensible que celle qui vient de l’action de Saturne, est encore assez petite, puisque dans les quadratures où elle est à peu près à son maximum elle ne monte qu’à cependant, comme les Tables de Halley dans les oppositions de Mars au Soleil s’écartent rarement des observations au delà d’une demi-minute, on pourrait peut-être par le moyen de la correction précédente diminuer encore l’erreur de ces Tables et ajouter à l’exactitude des éléments sur lesquels elles sont fondées. Mais cet objet demande qu’on ait égard aussi aux corrections qui dépendent en même temps de la commutation des deux Planètes et de leurs anomalies, et dont nous donnerons le calcul dans la suite.
9. M. de Lalande avait déjà calculé les inégalités du mouvement de Mars dues à Jupiter, dans le volume de l’Académie de Paris pour 1761 ; mais je n’ai pas cru que son travail dût me dispenser de les déterminer de nouveau par mes formules, soit parce que celles-ci sont différentes de celles qu’il a employées d’après la méthode de Clairaut, soit parce que je ne pouvais pas répondre de ses calculs comme je crois pouvoir le faire des miens. D’ailleurs il n’a calculé que les deux premiers termes proportionnels au sinus de la distance simple et double de Mars à Saturne ; et l’on pouvait désirer de voir ce que donneraient les autres termes de la série, ne fût-ce que pour s’assurer qu’on n’a aucune erreur sensible à craindre de leur omission.
Les termes que M. de Lalande a trouvés sont
dont les coefficients diffèrent de ceux de notre formule d’environ une seconde en plus ou en moins. Cette différence est très-petite en elle-même ; cependant, comme nos calculs sont fondés sur les mêmes éléments, elle aurait dû être sinon tout à fait nulle, du moins beaucoup moindre ; mais je n’ai pas cru qu’il valût la peine d’en chercher la raison dans les procédés du calcul de M. de Lalande.
§ III. — Calcul dcs variations de Mars dues à l’action de la Terre.
10. Comme l’orbite de Mars est au-dessus de celle de la Terre, il faudra employer dans ce calcul des formules analogues à celles que nous avons données dâns la première Section pour les inégalités de Saturne dues à Jupiter, et que nous avons vu être générales pour toute Planète troublée par une Planète inférieure par rapport à elle.
Changeant donc dans ces formules les lettres qui se rapportent à Saturne en pour Mars, et les lettres qui répondent à Jupiter en pour la Terre, on aura pour les inégalités de la longitude de Mars dépendantes de sa distance à la Terre
étant égal à
11. Soit maintenant et qu’on prenne pour et les valeurs correspondantes parmi celles du no 4 de la seconde Partie de la Théorie citée, on déterminera d’abord les valeurs des quantités par les mêmes formules que ci-dessus mais ensuite il faudra faire, comme dans le no 4 de la Section première,
12. On aura donc de cette manière
et de là
ensuite
enfin
13. Or, étant égal à (10 et 11), on aura
et la formule du no 10 deviendra par ces substitutions
où il faudra encore substituer la valeur de masse de la Terre, et réduire les coefficients en secondes.
14. Nous ferons, comme dans la Théorie des variations séculaires (deuxième Partie, no 14),
ce nombre, multiplié par celui des secondes de l’arc égal au rayon, donne
pour la valeur de
en secondes qu’il faudra substituer dans la formule précédente. Ainsi l’on aura
Correction de la longitude de Mars due à l’action de la Terre et dépendante uniquement de la distance de Mars à la Terre
où l’on se souviendra que le lieu moyen ♁ de la Terre est à degrés de celui du Soleil.
Cette correction ne monte, comme on voit, qu’à environ dans les quadratures de Mars et de la Terre, où elle est à très-peu près la plus grande ; elle est donc peu importante dans l’état actuel de l’Astronomie, mais elle peut le devenir davantage lorsque la précision des observations, qui paraît augmenter de jour en jour, mettra en état de tenir compte des secondes dans les lieux des Planètes.
15. M. de Lalande ayant aussi calculé l’effet de l’attraction de la Terre sur Mars dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, année 1761, a trouvé pour la partie dépendante de la distance ou commutation de Mars à la Terre les termes
dont les coefficients sont plus que doubles de ceux que nous venons de trouver pour les termes semblables.
Cette différence vient uniquement de ce que M. de Lalande a employé pour le rapport de la masse de la Terre à la masse du Soleil celui que Newton avait donné d’après la parallaxe du Soleil supposée de mais cette parallaxe ayant été rabaissée à par les observations des derniers passages de Vénus, le rapport dont il s’agit a dû être diminué dans la raison des cubes des parallaxes ; ce rapport étant suivant Newton de à et suivant nos déterminations de à il s’ensuit que les coefficients de la formule de M. de Lalande doivent être diminués dans le rapport de à ou de à ce qui les réduira à et lesquels s’accordent à très-peu près avec ceux de notre formule.
M. de Lalande rapporte dans le même endroit (page 288) une formule que feu M. Mayer lui avait communiquée pour le même objet, et dans laquelle les termes dépendants de la distance de Mars à la Terre sont
Les lieux de Mars et de la Terre sont, suivant les suppositions de Mayer, des lieux vrais ; mais, en exprimant ces lieux par les lieux moyens, il ne peut résulter aucune différence dans les termes indépendants des excentricités.
En comparant cette formule avec la nôtre, on trouve que pour que les premiers termes deviennent les mêmes, il faut diminuer celui de la formule de Mayer dans la raison de à diminuant ensuite dans la même proportion les coefficient des deux autres termes de celle-ci, ils deviennent , lesquels s’accordent à peu près avec ceux des termes correspondants de notre formule ; d’où l’on peut conclure que Mayer avait employé pour la masse de la Terre une valeur plus grande que celle que nous avons adoptée dans la même raison de à et par conséquent une parallaxe du Soleil plus grande que dans la raison de à ce qui donne environ J’ai cru ce détail nécessaire, moins pour la justification de mes calculs, que pour la satisfaction des Astronomes qui voudront faire usage de la correction dont il s’agit dans la Théorie de Mars.
§ IV. — Calcul des variations de Mars dues à l’action de Vénus.
16. Ce calcul dépend des mêmes formulés que celui que nous venons de donner pour l’action de la Terre, puisque Vénus est aussi inférieure à Mars. Seulement il faudra changer dans ces formules (nos 10 et 11) les lettres qui se rapportent à la Terre, en pour Vénus (1).
Faisant donc et prenant pour et les valeurs correspondantes dans la Table du no 4 (deuxième Partie de la Théorie des variations séculaires), on aura d’abord
et de là par les formules du no 2 ci-dessus
ensuite par les formules du no 11
enfin
17. L’expression de étant comme dans le paragraphe précédent
on aura ici
et, ces substitutions faites dans la formule du no 10 appliquée au cas présent, on aura celle-ci
Prenons pour masse de Vénus, la valeur adoptée dans la Théorie des variations séculaires ; ce nombre, multiplié par celui des secondes de l’arc égal au rayon, donnera en secondes
Ainsi en substituant cette valeur, et dénotant toujours les lieux moyens de Mars et de Vénus par les caractères de ces Planètes, on aura
Correction de la longitude de Mars due à l’action de Vénus, et dépendante uniquement de la distance de Mars à Vénus
On voit que cette correction est insensible, et que, pour qu’elle pût monter à une seconde, il faudrait que la masse de Vénus fût plus que triple de celle que nous avons adoptée, ce qui ne se peut ; ainsi l’on pourra toujours négliger cette correction en toute sûreté.
§ V. — Calcul des variations de Mars dues à l’action de Mercure.
18. Nous pourrions à la rigueur nous dispenser de calculer ces variations car Mercure étant plus éloigné de Mars que Vénus, et ayant en même temps une masse moindre que cette Planète, on en peut d’abord conclure que l’effet de son action sur Mars sera nécessairement encore moindre que celui de l’action de Vénus, que nous avons vu être insensible. Nous donnerons cependant encore ce calcul, ne fût-ce que pour ne laisser aucun vide dans la Théorie des perturbations des Planètes principales.
On y suivra le même procédé que dans le calcul précédent, mais en prenant, à la place des quantités relatives à Vénus, les quantités qui répondent à Mercure.
Ainsi l’on fera et l’on aura
d’où l’on tirera
ensuite