SUR LES VARIATIONS SÉCULAIRES DES MOUVEMENTS MOYENS DES PLANÈTES.
(Nouveaux Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Berlin, année 1783.)
Les observations ont fait apercevoir des variations dans les révolutions de Jupiter et de Saturne, mais on n’a pu encore les expliquer par la Théorie de la gravitation. M. de Laplace, ayant calculé en détail les termes proportionnels au carré du temps que les forces perturbatrices d’une Planète peuvent introduire dans l’expression de sa longitude, trouva que ces termes se détruisaient mutuellement, du moins dans la première approximation. Ce résultat m’a donné occasion de chercher rigoureusement, et par une méthode directe, la loi des variations du grand axe de l’orbite d’une Planète troublée par l’action de plusieurs autres ; et j’ai démontré que ces variations ne pouvaient être que périodiques, et relatives aux configurations des Planètes entre elles ; d’où il s’ensuit que le mouvement moyen d’une Planète ne peut être sujet à aucune variation séculaire, en tant que cette variation dépendrait du grand axe de son orbite mais comme les autres éléments, l’excentricité, l’inclinaison, les lieux de l’aphélie et du nœud sont au contraire sujets à des variations séculaires, celles-ci ne pourraient-elles pas influer dans le mouvement moyen et y produire aussi des variations du même genre ?
Dans la Théorie que je viens de donner sur les variations périodiques, j’ai fait voir que l’effet des variations des éléments de l’orbite sur le mouvement moyen n’est que périodique tant qu’on n’a égard qu’aux premières dimensions des excentricités et des inclinaisons ; et j’ai avancé en même temps, qu’en portant la précision jusqu’aux secondes dimensions de ces quantités, on trouverait des termes qui donneraient des équations séculaires dans le mouvement moyen. Il ne s’agit donc, pour décider la question des variations séculaires des mouvements moyens des Planètes, que d’exécuter l’analyse que nous avons indiquée et d’en appliquer ensuite les résultats à chaque Planète ; c’est l’objet du présent Mémoire, qui doit être regardé comme un supplément à la Théorie générale des variations séculaires.
section première.
formules générales pour la variation séculaire du mouvement moyen.
1. L’analyse donnée dans la première Partie de la Théorie des variations séculaires fait voir :
1o Que l’expression du rayon vecteur, par la longitude vraie ou angle décrit par ce rayon sur un plan fixe, est la même, soit que les éléments de l’orbite soient constants ou variables ; et qu’il en est de même pour l’expression différentielle de ce rayon ;
2o Que la même chose a lieu pour l’expression de la latitude par la longitude, ainsi que pour la différentielle de cette expression ;
3o Qu’à l’égard de l’expression de la longitude moyenne par la longitude vraie, il n’y a que sa différentielle qui soit la même pour les éléments constants ou variables ; l’expression finie doit être différente à raison de la variabilité des éléments (29 et suivants).
2. L’équation différentielle entre la longitude moyenne et la longitude vraie est de la forme
étant une fonction algébrique de sinus et cosinus de dans laquelle les éléments de l’orbite entrent comme coefficients. Soit l’intégrale de en regardant ces éléments comme constants ; on aura alors
d’où l’on tire
c’est l’expression de la longitude vraie par la moyenne dans les orbites invariables.
Lorsque l’orbite est variable, ne sera plus l’intégrale exacte de car la différentielle de contient, outre la partie due à la variabilité de encore celle qui vient de la variabilité des éléments de sorte qu’en dénotant celle-ci par la caractéristique et la ditférentielle totale par la caractéristique ordinaire on aura
donc
ou
et, intégrant,
équation d’où l’on tirera ensuite
On voit par là que la variabilité des éléments de l’orbite ne fait qu’ajouter à la longitude moyenne la quantité c’est celle que nous avons dénotée par dans le Mémoire précédent ; en sorte que l’on aura, en général,
3. Donc la détermination du lieu d’une Planète dans une orbite variable et troublée par l’action des autres Planètes dépendra des mêmes formules que si les éléments de l’orbite étaient constants, pourvu qu’on y prenne pour la longitude moyenne.
Or l’angle dépend du temps et du demi-grand axe de l’ellipse de la même manière que si cet axe était constant, puisqu’on a, en nommant le demi-grand axe,
et nous avons vu que la valeur de ne saurait jamais contenir des inégalités séculaires, de sorte que la valeur de l’angle n’en saurait contenir non plus ; donc, si l’angle qui doit faire la fonction de longitude moyenne, peut contenir des variations séculaires, elles ne peuvent venir que de la quantité ainsi tout se réduit à examiner si cette quantité peut contenir de pareilles inégalités.
On suivra pour cela une méthode semblable à celle par laquelle nous avons recherché les inégalités séculaires des éléments de l’orbite ; on développera la valeur de la différentielle en séries de sinus et cosinus d’angles multiples des longitudes moyennes, et l’on ne retiendra, après toutes les substitutions et réductions, que les termes qui se trouveront débarrassés de tout sinus et cosinus de ces angles.
4. On commencera donc par chercher la valeur de la fonction ensuite on la différentiera, en y faisant varier seulement les quantités dépendantes des éléments de l’orbite, et l’on y substituera, à la place des différentielles de ces quantités, leurs valeurs données dans la première Partie de la Théorie des variations séculaires ; on aura ainsi l’expression générale de et comme nous avons vu dans le Mémoire précédent que les termes qui peuvent donner des variations séculaires dépendent des secondes dimensions des excentricités et des inclinaisons, il faudra, dans le développement de la fonction pousser la précision jusqu’aux troisièmes dimensions de ces quantités inclusivement ; c’est ce qui rend le calcul long et épineux, par l’attention qu’il faut y avoir pour n’omettre aucun des termes qui peuvent donner des équations séculaires. Pour le simplifier autant qu’il est possible, nous ferons d’abord abstraction de l’inclinaison de l’orbite ; nous verrons ensuite comment les formules trouvées pour ce cas s’appliquent, en général, aux orbites dont la position est variable ; et nous donnerons même à cette occasion une nouvelle analyse pour la détermination des variations séculaires des éléments de l’orbite.
5. Ayant déjà donné dans le Mémoire précédent (1) l’expression générale de exacte jusqu’au degré de précision qui est nécessaire dans la recherche présente, nous nous contenterons de l’emprunter, en y effaçant seulement les termes affectés des quantités et lesquelles, deviennent nulles dans l’hypothèse de l’orbite non inclinée.
On aura donc
et la différentielle prise en faisant varier et et regardant comme constante sera la valeur de .
De sorte qu’on aura
Les valeurs de et ont été données dans le no 41 de la Théorie des variations séculaires[1]. Dans le cas présent, les termes qui contiennent doivent disparaître, puisque est l’ordonnée perpendiculaire au plan de projection ; les valeurs dont il s’agit se réduisent alors à la forme de celles du no 42 de la même Théorie ; de sorte qu’en prenant pour dénoter le rayon vecteur à la place de la lettre que nous conserverons pour exprimer le demi-grand axe, on aura
donc, faisant ces substitutions et réduisant, on aura
expression qu’on peut mettre sous cette forme
en faisant
6. Il faut maintenant substituer dans cette formule les valeurs de et exprimées par la distance moyenne et par le mouvement moyen et comme nous tenons compte des secondes dimensions de et il faudra aussi y avoir égard dans les valeurs dont il s’agit. Or nous pouvons emprunter pour cet objet les expressions données dans le no 20 du Mémoire précédent, en y changeant et en et et y faisant nuls, puisque nous regardons l’inclinaison comme nulle.
Ainsi à la place de il faudra substituer
et à la place de
À la vérité il faudrait, d’après ce que nous avons dit au commencement de ce Mémoire, mettre dans ces expressions à la place de mais : 1o on peut retenir pour plus de simplicité la seule lettre en se souvenant qu’à la rigueur elle doit être augmentée de 2o comme nous ne cherchons pas la valeur entière de mais seulement les termes de cette valeur qui doivent être indépendants de tout sinus et cosinus de il est indifférent pour le résultat du calcul de mettre à la place de ou non.
Pour avoir les valeurs de et on différentiera les expressions précédentes, en n’y faisant varier que puisque nous avons vu que les différentielles sont les mêmes que si les éléments étaient constants.
De sorte qu’on aura pour
et pour
Faisant donc ces substitutions dans les valeurs de et du numéro précédent, elles deviendront, aux troisièmes dimensions près de et
Ensuite on-aura pour l’expression
et pour celle-ci
De sorte que la quantité deviendra, en négligeant toujours les troisièmes dimensions de et
la quantité deviendra
et la quantité deviendra
Donc enfin, faisant ces substitutions dans l’expression de du numéro précédent, on aura
7. Il ne reste plus qu’à faire les mêmes substitutions dans la fonction qui par le no 5 est (42, Théorie citée)
étant les masses des Planètes perturbatrices exprimées en parties de celle du Soleil, désignant des quantités analogues à pour les Planètes
Comme cette fonction n’entre dans l’expression de que sous la forme linéaire, et qu’elle est composée d’autant de formules semblables qu’il y a de Planètes perturbatrices, il est clair que la valeur totale de pour plusieurs Planètes perturbatrices sera toujours la somme des valeurs particulières et semblables, dues à chacune de ces Planètes ; de sorte qu’il suffira de n’avoir égard d’abord qu’à l’action d’une seule Planète.
De plus, si l’on représente par et les valeurs de et de données dans le numéro précédent, les quantités et seront de l’ordre de et et comme dans les substitutions dont il s’agit nous n’avons besoin que d’avoir égard aux secondes dimensions de il est clair que ces substitutions se réduiront à changer d’abord dans en en et à y faire croître ensuite de de en poussant la série jusqu’aux secondes dimensions de
8. On fera donc simplement
les quantités étant les demi-axes ou les distances moyennes, et les angles du mouvement moyen ; et l’on aura, pour la fonction dont il s’agit, cette transformée
Pour avoir les transformées de et il n’y aura qu’à changer, dans la précédente, la quantité en
Substituant ces valeurs dans la formule du numéro précédent, et négligeant les dimensions de au-dessus du second degré, on aura
Or on a par le no 6
et, marquant toutes les lettres d’un trait, on aura la valeur de
De plus, si l’on développe la fraction irrationnelle
en une série de cosinus de multiples de et qu’on représente cette
série comme dans le Mémoire précédent par
la fonction deviendra
Ainsi il faudra encore faire ces substitutions dans la valeur précédente de mais comme nous ne cherchons que les termes exempts de sinus et cosinus, nous observerons que les différences de , qui se trouvent dans la valeur dont il s’agit, ne peuvent donner de ces sortes de termes qu’autant que leurs multiplicateurs contiendront des termes de la forme de ceux qui entrent dans les expressions de ces différences.
Par cette considération on pourra donc, en substituant les valeurs de réduire d’abord la valeur de à celle-ci
Donc enfin, substituant la valeur ci-dessus de développant les pro
Cette équation donnera la variation séculaire du mouvement moyen d’une Planète troublée par l’action d’une autre Planète quelconque la masse du Soleil étant prise pour l’unité des masses des Planètes.
S’il y avait une seconde Planète perturbatrice il n’y aurait qu’à ajouter à la valeur de une autre partie composée des mêmes termes que ceux qui répondent à la Planète mais dans lesquels les lettres affectées d’un accent le seraient de deux, et ainsi de suite (7).
10. Pour faire usage de l’équation précédente, il n’y aura qu’à substituer pour les valeurs déterminées dans la Théorie des variations séculaires, et comme (3), on aura, en multipliant par une équation intégrable, puisque les distances moyennes sont des quantités constantes.
Or nous avons vu dans la Théorie citée que les expressions de sont, en général, de la forme
le nombre des termes étant toujours égal à celui des Planètes qui agissent les unes sur les autres.
Donc, faisant ces substitutions dans la valeur de il en résultera :
1o des termes sans sinus ni cosinus ; 2o des termes proportionnels aux cosinus des angles
et qui étant multipliés par seront tous intégrables.
Il s’ensuit de là que la valeur de se trouvera composée de deux sortes de termes, les uns rigoureusement proportionnels à et qui se confondront par conséquent avec le mouvement moyen et uniforme de la Planète ; les autres proportionnels aux sinus des angles et dont les coefficients seront beaucoup plus grands que ceux des cosinus correspondants dans l’équation différentielle, puisque l’intégration les aura augmentés dans la raison de à Ces termes donneront donc de véritables équations séculaires dans le mouvement moyen de la Planète ; et il ne s’agira que de voir si elles sont assez sensibles pour être aperçues par les observations.
11. Nous avons fait abstraction jusqu’ici de l’inclinaison des orbites, de sorte que la formule trouvée n’a lieu que pour le cas où la Planète troublée et les Planètes perturbatrices seraient mues dans un même plan fixe. Il faut donc, pour ne rien laisser à désirer, voir encore ce qui peut résulter de l’inclinaison mutuelle des orbites, et surtout de la variation de cette inclinaison. On pourrait pour cela employer la valeur complète de donnée dans le Mémoire précédent, et avoir égard dans le calcul aux quantités et à leurs variations déterminées dans la Théorie des variations séculaires ; mais il sera beaucoup plus simple de considérer immédiatement l’orbite réelle de la Planète, et de chercher la variation du mouvement moyen d’après celles des éléments de cette orbite. Pour cela il faut commencer par déterminer ces variations ; c’est à quoi on peut parvenir directement et facilement par les principes donnés à la fin de la première Section de la Théorie citée.
12. Soit le rayon vecteur de l’orbite réelle de la Planète, la longitude vraie dans cette orbite, la longitude de l’aphélie prise aussi sur l’orbite, l’excentricité et le demi-paramètre ; on aura, comme on sait, pour l’équation de l’orbite elliptique
laquelle, en faisant
devient
De plus, cette orbite étant décrite par une force centrale comme le sont celles des Planètes en prenant la somme des masses du Soleil et de la Planète pour l’unité, on aura, par la propriété connue des aires,
La valeur de doit être la même, soit que l’orbite varie ou non ; ainsi, en différentiant l’équation (a), on aura d’un côté
et de l’autre
En substituant dans l’équation (c) la valeur de tirée de l’équation (b), elle devient
13. Pour que cette équation appartienne à l’orbite troublée, en y regardant les éléments comme variables, il faudra que sa différentielle satisfasse aux équations différentio-différentielles de cette orbite, l’orbite, l’excentricité et le demi-paramètre ; on aura, comme on sait, pour l’équation de l’orbite elliptique
laquelle, en faisant
devient
De plus, cette orbite étant décrite par une force centrale comme le sont celles des Planètes en prenant la somme des masses du Soleil et de la Planète pour l’unité, on aura, par la propriété connue des aires,
La valeur de doit être la même, soit que l’orbite varie ou non ; ainsi, en différentiant l’équation on aura d’un côté
et de l’autre
En substituant dans l’équation la valeur de tirée de l’équation elle devient
13. Pour que cette équation appartienne à l’orbite troublée, en y regardant les éléments comme variables, il faudra que sa différentielle satisfasse aux équations différentio-différentielles de cette orbite, lesquelles sont, par rapport aux coordonnées rectangles
étant les forces perturbatrices.
Ainsi, comme
et par conséquent
il n’y aura qu’à substituer dans la différentielle de l’équation pour
les valeurs
Mais, puisque la variabilité des éléments ne vient que des forces perturbatrices, il s’ensuit que les termes affectés de et de doivent former une équation à part, celle composée des autres termes devant subsister d’elle-même, parce que l’équation dont il s’agit satisfait par l’hypothèse aux équations de l’orbite invariable.
Il n’y aura donc qu’à faire varier dans l’équation les éléments et les différences et substituer simplement à la place de ce qui donnera sur-le-champ celle-ci
ou bien, en faisant, pour abréger,
et substituant pour sa valeur de l’équation ,
Et cette équation combinée avec l’équation donnera les valeurs de et ; on aura ainsi
14. Il ne reste plus qu’à trouver la valeur de on la tirera de l’équation , en y appliquant le même raisonnement que nous venons de faire sur l’équation . Ainsi, comme
et que
puisque ces deux quantités expriment également le carré de l’élément de l’espace parcouru, que par conséquent
il s’ensuit qu’on aura la valeur de en faisant varier dans
les différences seulement et substituant ensuite pour
Donc, faisant, pour abréger,
on aura sur-le-champ
valeur qu’il faudra substituer dans les deux équations ci-dessus.
Cherchons maintenant les valeurs de et de En ne supposant qu’une seule Planète perturbatrice on a
exprimant la distance rectiligne d’une Planète à l’autre, et étant pour la Planète ce que sont pour la Planète troublée S’il y avait plusieurs Planètes perturbatrices chacune donnerait des formules semblables dans les valeurs de
On aura donc, en substituant ces valeurs,
15. Maintenant, puisque est la distance rectiligne entre la Planète et la Planète on aura, par les coordonnées rectangles,
D’un autre côté, si l’on nomme l’angle intercepté entre les deux rayons et en considérant le triangle rectiligne dont sont les trois côtés et où est l’angle opposé au côté on aura aussi
de sorte qu’en comparant cette expression de à la précédente, on aura
et comme cette équation est indépendante d’aucune relation entre la position des deux Planètes, elle aura lieu aussi en supposant que la Planète avance infiniment peu dans son orbite, auquel cas deviennent
et deviendra
ainsi l’on aura par là
mais il faut encore déterminer la valeur de et de
Pour cela, si l’on imagine que du centre des rayons vecteurs on mène au point d’intersection des deux orbites un troisième rayon, et qu’ensuite sur la surface d’une sphère décrite du même centre on trace trois arcs de grand cercle qui joignent les trois rayons dont il s’agit, il est visible que l’un de ces arcs sera que les deux autres seront les distances des deux Planètes au nœud commun de leurs orbites, et dans le triangle sphériqùe formé par ces trois arcs, l’angle opposé au côté sera l’inclinaison mutuelle des orbites.
Par conséquent, si l’on nomme cette inclinaison et la longitude du nœud commun, en sorte que et soient les distances des Planètes à ce nœud, on aura, par la propriété connue des triangles sphériques,
or, tandis que la Planète se meut infiniment peu dans son orbite, il n’y a que l’angle qui varie, les autres quantités demeurant constantes ; d’où il suit que la variation de que nous avons désignée ci-dessus par devra être exprimée par
16. Substituons les valeurs qu’on vient de trouver dans les valeurs de et de du no 14 ; on aura, en retenant le pour plus de simplicité,
Si donc on fait
on aura, à cause de
et de fonction de sans
Donc l’équation du no 14 donnera par ces substitutions
et enfin, substituant cette valeur de ainsi que celle de dans les équations du même numéro, on aura
expressions qu’on voit être de la même forme que celles de et du no 5.
Et à l’égard de la fonction on voit qu’elle est aussi de la même forme que celle du no 7, si ce n’est qu’à la place de l’angle il y a l’angle mais ces deux angles sont d’ailleurs analogues entre eux, puisqu’ils expriment également dans les deux hypothèses la distance d’une Planète à l’autre.
17. Prenant pour représenter le demi-grand axe, comme dans les calculs ci-dessus, on a, par les propriétés de l’ellipse, le demi-paramètre
Ainsi l’équation du no 12 donnera
et, cette valeur substituée dans l’équation du même numéro, on aura
ce sont les formules connues entre le rayon vecteur la longitude vraie dans l’orbite et la longitude moyenne .
La dernière équation étant intégrée en regardant et comme constantes donnera la valeur de la fonction (2), et cette valeur exprimée en série sera de la même forme que celle du no 5, et étant ici à la place de et de là l’expression de ou de sera encore de la même forme que dans ce numéro, et cela aura lieu aussi après la substitution des valeurs de et que nous avons vu être semblables à celles de et
De plus les valeurs de et en tirées des équations précédentes, seront aussi de la même forme que celles qu’on a employées dans le no 6, ce qui est d’ailleurs évident par la comparaison de ces équations et de celles d’où ces valeurs ont été déduites. Donc la valeur de sera encore de la même forme que celle qui se trouve à la fin du même numéro, et étant toujours à la place de et mais la substitution de la valeur de y produira une différence, à cause que l’angle tient la place de et c’est uniquement de là que peut venir la différence des résultats dans les deux cas.
18. Pour déterminer cette différence, nous remarquerons d’abord qu’en mettant, dans l’expression de du no 15, au lieu de elle devient
de sorte que tout se réduit à augmenter, dans l’expression de du no 7, de la quantité
Or, comme représente l’inclinaison réciproque des orbites que nous supposons du même ordre que l’excentricité et par conséquent que les quantités et il est clair que la quantité dont il s’agit est déjà très-petite du seoond ordre, et qu’ainsi l’accroissement de sera au quatrième ordre près
en faisant
Donc, puisque dans l’expression de nous avons négligé les troisièmes dimensions de et il s’ensuit qu’en négligeant pareillement les troisièmes dimensions de , il n’y aura que le premier terme de cette expression dans lequel on doive avoir égard à l’accroissement de et qu’ainsi la valeur de se trouvera par là simplement augmentée de la quantité
Par la même raison, puisque cette quantité est du second ordre, on pourra d’abord y substituer à la place de ce qui la réduira à
étant
Développons en série le radical irrationnel
et supposons, comme dans la Théorie des variations séculaires, cette série représentée par
on aura pour la valeur de
Substituant cette valeur dans la quantité dont il s’agit, développant les produits des sinus et cosinus, et ne retenant que les termes sans sinus ni cosinus, on aura enfin
pour la quantité à ajouter à la valeur de
Ainsi il n’y aura qu’à ajouter ce nouveau terme au second membre de la dernière équation du no 8, en y changeant en même temps les quantités et en et
19. Nous remarquerons maintenant que les quantités n sont au troisième ordre près égales à car ces quantités, étant exprimées par où est la longitude de l’aphélie dans l’orbite (12), ont par conséquent la même valeur que les quantités du no 18 du Mémoire précédent ; et il est aisé de voir que celles-ci se réduisent à en négligeant les quantités du troisième ordre, puisque
Ainsi, comme dans la Théorie des variations séculaires nous avons nommé les quantités on pourra également, dans l’équation précédente, changer en
De plus, on a aussi au troisième ordre près
mais nous avons démontré, dans le no 18 de la seconde Partie de la Théo-
rie citée, que, pour des orbites peu inclinées, on a au troisième ordre près
étant la même chose que Donc à la place de on pourra substituer la quantité
D’où l’on doit conclure que la considération de l’inclinaison des orbites ne fera qu’augmenter l’expression de du no 9 du terme
en supposant
Et s’il y a plusieurs Planètes perturbatrices, chacune d’elles fournira un pareil terme dans la valeur de
Les valeurs des quantités ont aussi été données dans la Théorie des variations séculaires pour toutes les Planètes, et comme elles sont d’une forme semblable à celle de il en résultera des termes analogues dans l’expression de la variation séculaire du mouvement moyen.
20. Pour appliquer aux Planètes les formules que nous venons de trouver, il faudra commencer par déterminer les valeurs des coefficients et l’on peut employer pour cela les méthodes et les données de la Théorie citée ; mais, comme ces coefficients contiennent les différences des fonctions relativement aux deux quantités il sera à propos de réduire d’abord toutes les différences à la seule quantité comme nous en avons usé dans la même Théorie.
Or, par la propriété des fonctions homogènes, telles que sont nécessairement les quantités on a
donc
et, différentiant successivement par
ou bien, en substituant dans cette dernière formule les valeurs données par les deux précédentes,
On aura de pareilles expressions pour les différences de et, faisant ces substitutions dans les valeurs des coefficients (2) et (3) données dans le no 9, on aura
21. Les quantités sont évidemment les mêmes que nous avions d’abord désignées par dans le no 43 de la première Partie de la Théorie des variations séculaires, et dont nous avons ensuite, dans le no 45, donné les valeurs exprimées par les quantités ainsi que celles de leurs différences premières et secondes. On aura donc par les formules de ce dernier numéro
les quantités étant les mêmes que nous avons déjà employées ci-dessus.
Différentiant les deux dernières équations par on aura
Or, si dans les formules générales du même numéro cité on fait les quantités deviennent ainsi l’on aura par ces formules
de sorte que par ces substitutions les formules précédentes deviendront
22. On pourra donc exprimer tous les coefficients par les seules quantités et l’on aura ainsi
Nous avons déjà donné, dans la Théorie des variations séculaires (no 48, première Partie), la manière de calculer les valeurs des quantités et nous y avons trouvé des expressions de cette forme
dans lesquelles étant supposée la plus petite des deux quantités et représentent les séries
comme dans le no 3 de la seconde Partie de la même Théorie.
Nous avons de plus donné dans le même endroit les valeurs numériques de pour toutes les distances moyennes des Planètes principales combinées deux à deux ; ainsi l’on pourra partir immédiatement de ces valeurs dans le calcul des coefficients de la formule trouvée pour l’altération du mouvement moyen des Planètes ; nous allons maintenant appliquer cette formule à Saturne et à Jupiter, et voir les conséquences qui en résultent relativement à leurs mouvements moyens.
section seconde.
variation séculaire du mouvement moyen de saturne produite par l’action de jupiter.
23. Nous supposerons ici, comme nous l’avons fait dans la Théorie générale des variations séculaires, que les lettres sans trait se rapportent à Saturne, qu’avec un trait elles se rapportent à Jupiter, et ainsi de suite ; de cette manière sera la masse de Saturne, celle de Jupiter, ces masses étant exprimées en parties de celle du Soleil ; il en sera de même des distances moyennes et des mouvements moyens
Ainsi l’altération du mouvement moyen de Saturne due à l’action de Jupiter sera déterminée par l’équation différentielle
dont les coefficients seront exprimés par les quantités de la manière suivante
Ces formules, en y changeant les traits des lettres serviront aussi pour toute autre Planète en tant qu’elle sera troublée par une Planète inférieure, la quantité devant toujours être une fraction moindre que l’unité pour l’exactitude des expressions de et
24. L’action de Jupiter sur Saturne étant, à raison des masses et des distances, infiniment plus considérable que celle des autres Planètes, il suffira de tenir compte de cette action, comme nous l’avons fait dans la Théorie des variations séculaires ; ainsi la formule précédente donnera l’altération totale du mouvement moyen de Saturne, en y substituant pour les valeurs dues à la même action et qui ont été calculées dans les nos 50 et 53 de la deuxième Partie de cette Théorie.
Par ces substitutions on aura donc en premier lieu
En second lieu on aura
en désignant par les coefficients des expressions de pour les distinguer de ceux de que nous avons représentés par les mêmes lettres.
Donc enfin, substituant ces valeurs et faisant, pour abréger,
on aura
Or représente l’angle du mouvement moyen de Saturne, et nous avons exprimé le temps en années Juliennes ; si donc on nomme le nombre d’années Juliennes de la révolution de Saturne, on aura par conséquent la formule précédente étant multipliée par et intégrée donnera
c’est l’expression de l’altération du mouvement moyen et qui doit être ajoutée à ce mouvement.
25. Le terme ne fait qu’augmenter le mouvement moyen primitif dans la raison de à de sorte que le mouvement moyen, tel que les observations doivent le donner, sera et répondra par conséquent à une distance moyenne égale à ainsi, par cette distance qui est celle qui résulte de la comparaison des temps périodiques, on pourra déterminer la distance primitive qui entre comme élément dans le calcul des perturbations ; mais la quantité étant une fraction infiniment petite, puisqu’elle est de l’ordre des masses des Planètes rapportées à celle du Soleil, il ne résultera de là qu’une correction insensible, et de nulle considération dans les distances moyennes. On peut donc n’avoir aucun égard à l’effet du terme dont il s’agit.
26. Il n’en est pas de même de l’autre terme qui contient le sinus de l’angle ce terme donnera une véritable équation séculaire périodique, dont la période sera extrêmement longue. En effet, en substituant pour les valeurs données dans le no 50 de la deuxième Partie de la Théorie des variations séculaires, on trouve pour l’angle dont il s’agit
de sorte que la période de l’équation séculaire sera déterminée par l’équation
laquelle donne
pour le nombre d’années de cette période. Mais il faut voir si la valeur de cette équation est assez forte pour pouvoir être aperçue par les observations.
Pour cela il faut commencer par calculer les valeurs des coefficients or, par le no 4 de la deuxième Partie de la Théorie des variations séculaires, on a
et, substituant ces valeurs dans les formules du no 23, il vient
De plus on a par le no 50 du même Ouvrage
Toutes ces valeurs étant substituées dans l’expression de on aura