Mémoires posthumes de Braz Cubas/Chapitre 128

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Traduction par Adrien Delpech.
Garnier Frères (p. 415-416).


CXXVIII

À la Chambre


Notez bien que cette gravure turque, je ne la vis que deux ans plus tard à la Chambre des députés, au milieu d’un grand chuchotement de voix, tandis qu’un orateur discutait les conclusions de la commission du budget. J’étais alors moi-même député. Pour ceux qui ont lu ce livre, il est inutile de dire ma satisfaction, et il serait également oiseux de le dire pour les autres. J’étais député, et je vis la gravure turque, tandis qu’appuyé sur le dossier de mon fauteuil j’écoutais un voisin qui contait une histoire, en en regardant un autre qui faisait sur le revers d’une carte de visite le portrait de l’orateur. Cet orateur n’était autre que Lobo Neves. L’onde de la vie nous avait jetés sur le même rivage, lui contenant son ressentiment, et moi avec l’obligation de dissimuler mes remords. Et j’emploie la forme suspensive, dubitative ou conditionnelle parce qu’en réalité je ne dissimulais rien du tout, si ce n’est mon ambition d’être ministre.