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Mémoires secrets d’un tailleur pour dames/08

La bibliothèque libre.
(Auteur présumé)
Gay et Doucé (p. 77-79).
Comment on paie sa note

Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, médaillon de début de chapitre
Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, médaillon de début de chapitre


COMMENT ON PAIE
SA NOTE

Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, séparateur de texte
Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, séparateur de texte



C ette anecdote était écrite de la main de Burth lui-même.

« Depuis longtemps déjà une idée me fermentait dans ce qu’on est convenu d’appeler le cerveau.

» Être, pour un moment, le sigisbé d’une de mes belles petites.

» Leur faire une déclaration, — elles auraient ri… ou se seraient fâchées.

» Il fallait préparer mon coup de longue main, c’est ce que je fis, avec une patience digne de Méphisto.

» J’avais jeté mon dévolu sur la préférée de mes clientes : — La belle marquise Cochonnette.

» Une marquise !… Je m’en pourléchais les babines !…

» Mais voudrait-elle !…

» Bah ! la coquetterie, l’amour de la toilette, sont de puissants auxiliaires.

» Je laissai monter… mais monter la note de la jolie femme.

» Lorsque nous fûmes arrivés au chiffre de soixante mille francs… une bagatelle, — je présentai la facture.

» Impossible de me solder.

» Ni le père, ni le mari, ne voudraient entendre parler de cette somme exorbitante.

» Comment la payer ?

» Je hasardai ma proposition :

» Le madère aidant, — j’avais pris soin de faire apporter dans le petit salon un de ces flacons qui contiennent le soleil des tropiques dans leurs flancs.

» La marquise qui avait commencé par accueillir ma proposition avec un ricanement décourageant finit par grignoter plus méditativement les gâteaux qu’elle humectait du vin de couleur topaze brûlée.

» Elle en arriva à se tourner gracieusement vers moi :

— Vrai, Burth, vous me donneriez quittance ?

— Vrai, parole de gentilhomme, dis-je, en dérobant un baiser.

— Hum, dans ce cas-là… peut-être… pour une fois.

. . . . . . . . . . . . . .

« Nous nous tînmes religieusement parole tous deux.

» Cependant, je ne pus m’empêcher de m’écrier :

— Décidément, marquise, je crois que nous avons fait, l’un et l’autre, un marché de dupes !…

« Cependant, elle me fait toujours faire ses robes ».


Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, vignette de fin de chapitre
Mémoires secrets d’un tailleur pour dames, vignette de fin de chapitre