Marie-Anna la Canadienne/28

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Maison d’édition non mentionnée (p. 306-307).

ÉPILOGUE




Le jour où le docteur Henri Chesnaye épousait Marie-Anna Carlier, un navire parti d’Halifax s’en allait sur l’Atlantique vers les côtes de France.

Appuyé aux bastingages, à l’arrière, Jacques de Villodin regardait s’effacer peu-à-peu les côtes canadiennes dans les brumes de l’horizon.

Il souriait, de ce sourire figé et triste qui s’empare des lèvres et ne les quitte plus quand l’âme humaine vient d’être ravagée par une grande passion.

La nuit tombait sur la mer. Deux jeunes matelots qui n’avaient pas aperçu le voyageur passèrent près de lui en parlant. Le plus jeune, un moussaillon de Bretagne s’épanchait en confidences dans l’oreille de l’autre :

— Si tu la connaissais, Kersac, ma douce Anne-Marie !… C’est la plus jolie demoiselle de Paimpol ! Et puis, c’est la première fois que nous aimons…

Le confident hocha la tête et du même ton qu’il eût dit : « J’ai passé par là… » il répondit :

— Les premières amours ne durent jamais !…

Le matelot et le mousse s’éloignèrent. Jacques, un instant distrait se replongea dans la contemplation de l’océan. La lueur verte du dernier phare de la côte canadienne ne fut plus qu’un point lumineux sur l’horizon noir.

On n’entendait que le clapotis cristallin des vagues qui léchaient doucement les flancs du navire.


FIN