Modernités/Corps de ballet/Hérodias

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E. Giraud et Cie, éditeurs (p. 62).


HÉRODIAS


Portant dans ses bras nus, comme un sanglant trophée,
Une tête de femme aux yeux blancs et collés,
Flambe et luit au milieu des gommeux assemblés
Le duc Hérodias, atroce coryphée.

Sous de faux cheveux roux, de rubis constellés,
Il danse en tutu rose un pas troublant de fée,
Applaudi de la tourbe heureuse et bien coiffée
Des banquiers délicats et des ducs épinglés.

Or, tandis qu’il triomphe au bruit rageur du sistre
Dans Paris qui s’amuse une ville sinistre
Transparaît lentement sous les lustres en feux,

Jérusalem infâme aux monuments boueux,
Cité de pharisiens, changés en fils de cuistre,
Où le Temple est à vendre aux vices qui sont dieux.