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Modernités/Le Crépuscule des Dieux/Frère et Sœur

La bibliothèque libre.
E. Giraud et Cie, éditeurs (p. 115).


LE CRÉPUSCULE DES DIEUX


FRÈRE ET SŒUR


À Élémir Bourges.


Il s’appelle Hans Ulric, elle a nom Christiane.
Beethoven est leur dieu, Shakspeare est leur amour,
Leur chambre somptueuse, où flotte un demi-jour
De songe et des odeurs d’encens, à tout profane
Est fermée.
Est fermée.Un mystère étrange et noir y plane

Du plafond à caissons aux orfroids morts et lourds,
Où de grands archiluths et des théorbes sourds
Luisent, pendus aux murs, auprès d’un vieil Albane.

Des chandeliers de fer et des saintes d’émail
Y rougeoient dans la braise ardente d’un vitrail,
Où des iris de pourpre enflamment un ciel jaune,

Et ce sont là les fiers et mystiques plaisirs
De ces enfants de rois, mourant au pied du trône,
L’un pour l’autre obsédés de monstrueux désirs.