Monsieur Vénus/13

La bibliothèque libre.
Brossier (p. 207-225).

CHAPITRE XIII


Vers minuit, les invités aux noces de Jacques Silvert s’aperçurent d’un fait bien étrange : la jeune mariée était encore parmi eux, mais le jeune marié avait disparu. Indisposition subite, vexation d’amoureux, incident grave, toutes les conjectures possibles furent faites dans le clan des familiers que cette union préoccupait déjà au dernier point. Le marquis de Sauvarès prétendit que le cartel d’un rival éconduit avait été trouvé par Jacques, sous sa serviette, au début du merveilleux repas qui leur avait été servi. René affirmait que tante Élisabeth devait quitter le monde ce soir même et qu’elle remettait ses pouvoirs à l’époux. Martin Durand, témoin du marié, bougonnait sans se cacher, parce que les artistes ont toujours le droit de faire leur tête quand on a besoin d’eux. Il ne pouvait plus sentir ce Jacques, maintenant. Au coin de la cheminée monumentale du salon où s’écroulait en braises rouges le nouveau foyer conjugal, la duchesse d’Armonville, pensive, son binocle entre ses doigts fins, suivait les mouvements de Raoule, placée en face d’elle. Raoule déchiquetait machinalement son bouquet d’oranger. De Raittolbe assurait tout bas à la duchesse que l’amour est la seule puissance vraiment capable d’aplanir les difficultés politiques sous le gouvernement du jour.

— Mais enfin, murmurait la duchesse, sans prendre garde aux étourderies du baron, me direz-vous pourquoi cette chère mariée s’est aujourd’hui fait coiffer de façon si… originale ? Cela me rend perplexe, depuis la cérémonie religieuse.

— L’hymen est, sans doute, pour Mme Silvert une prise de voile comme une autre, répondait de Raittolbe, dissimulant un sourire sardonique.

Mme Silvert portait une longue robe de damas blanc argenté et une sorte de pourpoint de cygne. Son voile avait été enlevé au moment du bal et l’on voyait la coiffure de fleurs d’oranger naturelles reposer en diadème sur des boucles pressées comme dans la chevelure d’un garçon ; sa physionomie hardie s’harmonisait admirablement avec ces boucles courtes, mais ne rappelait en rien la pudique épousée, prête à baisser les yeux sous ses tresses parfumées qu’allaient bientôt défaire les vives impatiences de l’époux.

— Je vous assure, réitérait la duchesse, que Raoule a fait couper ses cheveux.

— Une mode récente que j’adopte définitivement, chère duchesse, répondit Raoule, qui venait d’entendre et sortait de sa rêverie.

De Raittolbe eut un applaudissement muet. Il frappa la paume de sa main du bout de ses ongles. Mme d’Armonville se mordit la lèvre pour ne pas rire. Cette pauvre Raoule, à force de se masculiniser, finirait par compromettre son mari !

Les demoiselles d’honneur vinrent en tumulte offrir le gâteau, suivant la nouvelle coutume importée de Russie et qui faisait fureur, cette année-là, dans la haute société. L’époux ne se montrait toujours pas. Raoule dut garder sa part entière. Minuit sonna ; alors, la jeune femme traversa le vaste salon de son pas altier ; arrivée à l’arc de triomphe dressé avec toutes les plantes de la serre, elle se retourna et eut pour l’assemblée un salut de reine qui congédie ses sujets. D’une phrase gracieuse mais brève, elle remercia ses compagnes, puis elle sortit à reculons, les saluant encore d’un geste élégant et rapide, comme le salut de l’épée. Les portes se refermèrent.

À l’aile gauche, tout à l’extrémité de l’hôtel, était la chambre nuptiale. Le pavillon dans lequel elle se trouvait formait retour sur le reste du bâtiment. La plus profonde obscurité, le plus discret silence régnaient dans cette partie de la maison.

Les corridors étaient éclairés de lanternes de bohème bleu dont le gaz avait été baissé, et dans la bibliothèque attenante à la chambre à coucher une seule torchère, tenue par un grand esclave en bronze, servait de fanal. Au moment où Raoule entra dans le cercle de lumière projeté au centre de la pièce, une femme habillée simplement comme une domestique se détacha de la tenture sombre.

— Que me voulez-vous ? murmura la mariée redressant sa taille souple et laissant à ses pieds se dérouler l’immense traîne de sa robe d’argent.

— Vous dire adieu, ma nièce, répliqua Mme Élisabeth, dont le visage pâle, tout à coup éclairé, semblait surgir comme une évocation spectrale.

— Vous ! ma tante, vous partez ?

Émue, Raoule lui tendit les bras.

— N’embrasserez-vous pas une dernière fois votre neveu ? fit-elle d’un son de voix plus respectueux et plus doux.

— Non ! dit la chanoinesse secouant le front. Quand je serai là-haut ! peut-être ! mais ici je ne puis me résigner à couvrir de mon pardon les souillures de la fille perdue. Adieu, mademoiselle de Vénérande. Mais avant mon départ, sachez-le : si sainte que Dieu veuille que je sois, il m’a permis d’apprendre vos horribles débordements. Je sais tout : Raoule de Vénérande, je vous maudis.

La chanoinesse parlait très bras et cependant Raoule crut entendre retentir les éclats de cette malédiction jusque dans la tranquillité de la chambre nuptiale.

Elle eut un tressaillement superstitieux.

— Vous savez tout ? expliquez vos paroles, ma tante ! Le chagrin de me voir porter un nom roturier vous trouble-t-il la raison ?

Vous êtes la belle-sœur d’une prostituée. Elle était ici tout à l’heure, cette fille, oubliée dans vos invitations ; elle m’a forcée à me pencher sur le gouffre. Vous n’étiez pas la maîtresse de Jacques Silvert, Raoule de Vénérande, et je le regrette à présent de toute mon âme ! Mais souvenez-vous bien, fille de Satan ! que les désirs contre nature ne sont jamais assouvis. Vous rencontrerez la désespérance au moment où vous croirez au bonheur ! Dieu vous précipitera dans le doute au moment où vous toucherez à la sécurité. Adieu… je vais prier sous un autre toit.

Raoule, immobilisée dans l’impuissance de sa rage, la laissa se retirer sans proférer un mot.

Lorsque Mme Élisabeth eut disparu, la mariée appela ses femmes qui l’attendaient pour l’aider à sa toilette de nuit.

— Il est venu quelqu’un ici voir ma tante ? interrogea-t-elle d’un ton sourd.

— Oui, madame, répondit Jeanne, l’une de ses caméristes, une personne très voilée qui lui a parlé longtemps.

— Et cette personne ?

— S’est retirée emportant un petit coffret. Je pense que Mme la chanoinesse a fait une dernière aumône avant de partir pour son couvent.

— Ah ! très bien, une dernière aumône.

À ce moment le bruit d’une voiture fit trembler légèrement les vitres de la bibliothèque.

— Votre tante a commandé le coupé, dit Jeanne en baissant la tête pour ne pas laisser voir son émotion.

Raoule passa dans le cabinet de toilette, et, la repoussant :

— Je ne veux personne, allez-vous-en et faites dire au marquis de Sauvarès, mon parrain, que désormais il reste seul pour faire les honneurs du salon.

— Oui, madame.

Jeanne sortit à l’instant, complètement ahurie. L’air semblait devenu irrespirable dans l’hôtel de Vénérande.

Un à un, les invités défilèrent devant le marquis, plus étonné qu’eux du mandat qu’il venait de recevoir ; puis, quand il n’y eut plus que de Raittolbe, M. de Sauvarès lui prit le bras.

— Allons-nous-en, mon cher, dit-il avec un éclat de rire moqueur ; cette maison est décidément transformée en tombeau.

Le chasseur préposé à la garde du vestibule éteignit les lustres, et, bientôt, dans les salons déserts, par tout l’hôtel, avec le silence, régna l’obscurité profonde.

Après avoir fait glisser le verrou du cabinet de toilette, Raoule s’était dépouillée de ses vêtements avec une orgueilleuse colère.

— Enfin ! avait-elle dit, quand la robe de damas aux chastes reflets était tombée à ses pieds impatients.

Elle prit une petite clef de cuivre, ouvrit un placard dissimulé dans la tenture et en tira un habit noir, le costume complet, depuis la botte vernie jusqu’au plastron brodé. Devant la glace, qui lui renvoyait l’image d’un homme beau comme tous les héros de roman que rêvent les jeunes filles, elle passa sa main, où brillait l’alliance, dans ses courts cheveux bouclés. Un rictus amer plissa ses lèvres estompées d’un imperceptible duvet brun.

— Le bonheur, ma tante, fit-elle froidement, est d’autant plus vrai qu’il est plus fou ; si Jacques ne se réveille pas du sommeil sensuel que j’ai glissé dans ses membres dociles, je serai heureuse malgré votre malédiction.

Elle s’approcha d’une portière de velours, la souleva d’un geste fébrile, et, la poitrine palpitante, s’arrêta.

Du seuil, le décor était féerique. De ce sanctuaire païen érigé au sein des splendeurs modernes, émanait un vertige subtil, incompréhensible, qui eût galvanisé n’importe quelle nature humaine. Raoule avait raison… l’amour peut naître dans tous les berceaux qu’on lui prépare.

L’ancienne chambre à coucher de Mlle de Vénérande, arrondie aux angles, avec un plafond en forme de coupole, était tendue de velours bleu, lambrissée de satin blanc rehaussé d’or et de cannelures en marbre.

Un tapis, dessiné d’après les indications de Raoule, recouvrait le parquet de toutes les beautés de la flore orientale. Ce tapis, fait de laine épaisse, avait des couleurs tellement vives et des reliefs si accusés, qu’on aurait pu croire marcher dans quelque parterre enchanté.

Au centre, sous la veilleuse retenue par quatre chaînes d’argent, la couche nuptiale avait les contours du vaisseau primitif qui portait Vénus à Cythère. Une profusion d’amours nus accroupis au chevet soulevaient de toute la force de leurs poings la conque capitonnée de satin bleu. Sur une colonne en marbre de Carrare, la statue d’Éros, debout, l’arc au dos, soutenait de ses bras arrondis d’amples rideaux de brocart d’Orient, retombant en plis voluptueux tout autour de la conque, et, du côté du chevet, un trépied en bronze portait un brûle-parfums étoilé de pierres précieuses où se mourait une flamme rose dégageant une vague odeur d’encens. Le buste de l’Antinoüs aux prunelles d’émail faisait face au trépied. Les fenêtres avaient été reconstruites en ogive et grillées comme les fenêtres de harems, derrière des vitraux de nuances adoucies.

L’unique ameublement de la chambre était le lit. Le portrait de Raoule, signé Bonnat, s’accrochait aux tentures, tout entouré de draperies blasonnées. Sur cette toile, elle portait un costume de chasse du temps de Louis XV et un lévrier roux léchait le manche du fouet que tenait sa main magnifiquement reproduite.

Jacques était étendu sur le lit ; par une coquetterie de courtisane qui attend l’amant d’une minute à l’autre, il avait repoussé les couvertures ouatées et le moelleux édredon. Au reste, une vivifiante chaleur régnait dans la chambre bien close.

Raoule, les pupilles dilatées, la bouche ardente, s’approcha de l’autel de son dieu, et dans son extase ;

— Beauté, soupira-t-elle, toi seule existes ; je ne crois plus qu’en toi. Jacques ne dormait pas : il se souleva doucement sans quitter sa pose indolente ; sur le fond d’azur des courtines, son buste souple et merveilleux de forme se détachait rose comme la flamme du brûle-parfums.

— Alors, pourquoi voulais-tu jadis la détruire, cette beauté que tu aimes ? répondit-il dans un souffle amoureux.

Raoule vint s’asseoir sur le bord de la couche et prit à pleines mains la chair de ce buste cambré.

— Je punissais une trahison involontaire cette nuit-là ; songe à ce que je ferais si jamais tu me trahissais réellement.

— Écoute, cher maître de mon corps, je te défends de rappeler le soupçon entre nos deux passions, il me fait trop peur….. Pas pour moi ! ajouta-t-il, riant de son adorable rire d’enfant, mais pour toi.

Il posa sa tête soumise sur les genoux de Raoule.

— C’est bien beau, ici, murmura-t-il, avec un regard reconnaissant. Nous allons y être très heureux.

Raoule, du bout de son index, caressait ses traits réguliers et suivait l’arc harmonieux de ses sourcils.

— Oui, nous y serons heureux et il ne faut pas quitter ce temple de longtemps, pour que notre amour pénètre chaque objet, chaque étoffe, chaque ornement de caresses folles, comme cet encens pénètre de son parfum toutes les tentures qui nous enveloppent. Nous avions décidé un voyage, nous n’en ferons pas ; je ne veux pas fuir l’impitoyable société dont je sens grandir la haine pour nous. Il faut lui montrer que nous sommes les plus forts, puisque nous nous aimons…

Elle pensait à sa tante… Jacques pensait à sa sœur.

— Eh bien, dit-il résolument, nous resterons. D’ailleurs, j’achèverai mon éducation de mari sérieux ; dès que je saurai me battre, j’essaierai de tuer le plus méchant de tes ennemis.

Voyez-vous cela, madame de Vénérande, tuer quelqu’un !

Il se renversa d’un mouvement gracieux jusqu’à son oreiller :

— Il faut bien qu’elle demande à tuer quelqu’un, puisque le moyen de mettre quelqu’un au monde lui est absolument refusé.

Ils ne purent s’empêcher de rire aux éclats ; et, dans cette gaieté à la fois cynique et philosophe, ils oublièrent la société impitoyable qui avait prétendu, en quittant l’hôtel de Vénérande, qu’elle quittait un tombeau.

Peu à peu, la gaieté insolente se calma. Son rictus ne déforma plus leurs deux bouches qui s’unissaient. Raoule attira le rideau jusqu’à elle, plongeant le lit dans une demi-obscurité délicieuse, au sein de laquelle le corps de Jacques avait des reflets d’astre.

— J’ai un caprice, dit-il, ne parlant plus qu’à voix basse.

— C’est le moment des caprices, répondit Raoule, mettant un genou sur le tapis.

— Je veux que tu me fasses une vraie cour, comme, à pareille heure, peut en faire un époux quand c’est un homme de ton rang.

Et il se tordait, câlin, dans les bras de Raoule, rejoints sous sa taille nue.

— Oh ! oh ! fit-elle, retenant ses bras, alors je dois être très convenable ?

— Oui… tiens, je me cache, je suis vierge…

Et, avec une vivacité de pensionnaire qui vient de lancer une malice, Jacques s’enveloppa de ses draps ; un flot de dentelles retomba sur son front et ne laissa plus entrevoir que la rondeur de son épaule, qui semblait être, ainsi voilée, l’épaule large d’une femme du peuple, admise par hasard dans le lit d’un riche viveur.

— Vous êtes bien cruelle, fit Raoule, écartant le rideau.

— Mais non, dit Jacques, ne pensant pas qu’elle commençait déjà le jeu. Non, non, je ne suis pas cruel, je te dis que je veux m’amuser, là… J’ai de la gaieté plein le cœur, je me sens tout ivre, tout aimant, tout plein de désirs fous. Je veux user de ma royauté, je veux te faire crier de rage et remordre mes plaies comme lorsque tu me déchirais par jalousie. Je veux être féroce à ma manière, moi aussi.

— N’y a-t-il pas assez de nuits que j’attends et demande aux songes les voluptés que tu me refuses ? continua Raoule debout et le couvant de ce regard sombre, dont la puissance avait doté l’humanité d’un monstre de plus.

— Tant pis, riposta Jacques, mettant sur sa lèvre pourpre le bout de sa langue humide, je me moque un peu de tes songes, la réalité sera meilleure après, je te supplie de commencer tout de suite, ou je me fâche.

— Mais c’est le martyre le plus atroce que tu puisses m’imposer, reprit la voix frémissante de Raoule, qui avait l’intonation grave du mâle : attendre quand j’ai la félicité suprême à ma portée ; attendre quand tu ne sais pas encore combien je suis fier de te tenir en mon pouvoir ; attendre quand j’ai tout sacrifié pour avoir le droit de te garder à mes côtés, jour et nuit ; attendre quand le bonheur inouï serait de t’écouter seulement me dire : « Je suis bien le front sur ton sein, je veux dormir là. » Non, non, tu n’auras pas ce courage !

— Je l’aurai, déclara Jacques, sincèrement dépité de voir qu’elle ne se prêtait pas à la comédie sans en avoir le bénéfice voluptueux. Je te répète que c’est un caprice.

Raoule tomba sur les genoux, les mains jointes, ravie de le voir dupe lui-même, et par habitude, de la supercherie qu’il implorait, sans se douter qu’elle l’employait dans son langage passionné depuis vingt minutes.

— Oh ! tu es d’une méchanceté ? je te trouve tout à fait détestable, fit Jacques énervé.

Raoule s’était reculée, la tête rejetée en arrière.

— Parce que je ne puis te voir sans devenir fou, dit-elle, se trompant à son tour ; parce que ta divine beauté me fait oublier qui je suis et me donne des transports d’amant ; parce que je perds la raison devant tes nudités idéales… Et, qu’importe à notre passion délirante le sexe de ses caresses ? Qu’importent les preuves d’attachement que peuvent échanger nos corps ? Qu’importe le souvenir d’amour de tous les siècles et la réprobation de tous les mortels ?… Tu es belle… Je suis homme, je t’adore et tu m’aimes !

Jacques avait compris enfin qu’elle lui obéissait. Il se leva sur un coude, les yeux pleins d’une joie mystérieuse.

— Viens !… dit-il dans un frisson terrible, mais n’ôte pas cet habit, puisque tes belles mains suffisent à enchaîner ton esclave… Viens.

Raoule se rua sur le lit de satin, découvrant de nouveau les membres blancs et souples de ce Protée amoureux qui, à présent, n’avait plus rien conservé de sa pudeur de vierge.

Durant une heure, ce temple du paganisme moderne ne retentit que de longs soupirs entrecoupés et du bruit rythmé des baisers ; puis, tout à coup, un cri déchirant retentit, pareil au hurlement d’un démon qui vient d’être vaincu.

— Raoule, s’écria Jacques, la face convulsée, les dents crispées sur la lèvre, les bras étendus comme s’il venait d’être crucifié dans un spasme de plaisir, Raoule, tu n’es donc pas un homme ? tu ne peux donc pas être un homme ?

Et le sanglot des illusions détruites, pour toujours mortes, monta de ses flancs à sa gorge.

Car Raoule avait défait son gilet de soie blanche, et, pour mieux sentir les battements du cœur de Jacques, elle avait appuyé l’un de ses seins nus sur sa peau ; un sein rond, taillé en coupe avec son bouton de fleur fermé qui ne devait jamais s’épanouir dans la jouissance sublime de l’allaitement. Jacques avait été réveillé par une révolte brutale de toute sa passion. Il repoussa Raoule, le poing crispé :

— Non ! non ! n’ôte pas cet habit, hurla-t-il, au paroxysme de la folie.

Une seule fois ils avaient joué sincèrement la comédie tous les deux, ils avaient péché contre leur amour, qui, pour vivre, avait besoin de regarder la vérité en face, tout en la combattant par sa propre force.