Monsieur le Marquis de Pontanges/Ch. 30

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Monsieur le Marquis de Pontanges
Œuvres complètes de Delphine de GirardinHenri PlonTome 2 (p. 356-357).


XXX.

VENGEANCE.


Le lendemain, tout le monde était réuni à table pour déjeuner ; on n’attendait plus que Lionel.

— Voyez si M. de Marny est chez lui, dit madame Ermangard ; peut-être n’a-t-il pas entendu sonner la cloche du déjeuner.

Un domestique revint en disant que M. de Marny était parti à cinq heures.

— Voici une lettre qu’il a laissée pour madame la marquise.

— Sans doute il vous explique ce brusque départ, dit madame Ermangard.

Madame de Pontanges ouvrit la lettre d’une main tremblante ; elle contenait ces mots :

« Vous ne m’aimez pas… Adieu ! »

Laurence resta longtemps immobile, les yeux fixés sur cette ligne.

— Quelle longue lettre ! dit tout bas le sous-préfet.

Enfin, revenante elle, madame de Pontanges plia le billet et le passa dans sa ceinture.

— Ma nièce, quelle raison donne-t-il ? demanda madame Ermangard.

— Une lettre de son père qui l’oblige d’être à Paris ce matin. M. de Marny me charge de vous exprimer tous ses regrets, monsieur le sous-préfet ; il ne peut se consoler de manquer la partie de chasse de demain.

Elle inventa ce mensonge avec une présence d’esprit merveilleuse ; elle parlait vite, mais avec beaucoup d’assurance : elle était si indignée !… « Je ne l’aime pas ! dit-il ; eh bien, qu’il le croie ; ce sera ma vengeance ! »