Nouvelles poésies (Van Hasselt)/Foi

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Nouvelles PoésiesBruylant et Cie (p. 81-82).


Foi.



Quoniam novit Dominus viam.
Ps. I, v. 6.


 
Laissons, ô mes amis, laissons courir le temps.
Le rossignol n’a pas toujours son tiède ombrage,
Souvent avril jaloux obscurcit d’un orage
L’aube vermeille du printemps.

Qu’y faire ? C’est la loi, c’est la loi de ce monde.
Quel œil humain pourrait sonder ce grand secret ?

Au fond de toute joie on trouve le regret,
Dans tout lac bleu quelque hydre immonde.

Laissons courir le temps ; et ne nous plaignons pas
Si l’horizon toujours de plus d’ombre se voile,
Si l’aquilon plus fort déchire notre voile
Qui flotte en lambeaux à nos mâts.

Dieu seul a le secret, Dieu seul, de toute chose.
Il sait d’où vient la nue en voyage dans l’air,
Et le but où descend la flèche de l’éclair,
Et tout effet, de toute cause.

Il sait où va la source à travers les vallons,
Et la feuille des bois qu’à sa branche, en automne,
Arrache la tempête aride et monotone ;
Et nous, il sait où nous allons.

Il sait où nous allons. Suivons donc notre voie,
Sans refaire nos jours de relais en relais ;
Et, sombres ou dorés, mes amis, prenons-les
Ainsi que Dieu nous les envoie.


Octobre 1852.