Octobre en fleur/2/045

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Maison d’éditions et d’impressions Anct AD. Hoste, S. A. (p. 98).

XLV.

DANS L’ÉTROIT JARDIN CLOS.


Je rêve au jours lointains où, dans le bleu du soir,
J’écoutais le glouglou de l’eau dans l’arrosoir.
Dans l’étroit jardin clos plein de mélancolie,
J’arrosais les rosiers, le phlox et l’ancolie,
Le gazon verdoyant sous l’ondée et le buis.
Et les odeurs des fleurs montaient dans l’air des nuits
Vers moi qui leur versais la fraîcheur délectable.
Et j’écoutais le bêlement, dans quelque étable,
D’une chèvre dolente et, presque sous mes pas,
Le doux froufrou des cigales qu’on ne voit pas.
Et je savourais l’heure ainsi que la promesse
D’un bonheur ineffable. Et la tiède caresse
Du vent qui soulevait mes blonds cheveux bouclés
Et l’étoile entre les nuages pommelés,
L’amer parfum des buis, l'ardent parfum des roses,
L’ombre voluptueuse et la bonté des choses
Et le mystère de la femme éclose en moi
Me faisaient trésaillir d’espérance et d’émoi.