Odes (Horace, Leconte de Lisle)/I/7

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1er siècle av. J.-C.
Traduction Leconte de Lisle, 1873
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Ode VII. — À MUNATIUS PLANCUS.


D’autres loueront l’illustre Rhodos, ou Mityléné, ou Éphésos, ou les murailles de Corinthus aux deux mers, ou Thébæ célèbre par Bacchus, ou Delphi célèbre par Apollo, ou la Thessalienne Tempé. L’unique souci des uns est de chanter d’un vers éternel la ville de la vierge Pallas, et de cueillir de tous côtés l’olivier pour le poser sur leur front. Un grand nombre, en l’honneur de Juno, dit Argos où abondent les chevaux et la riche Mycéna ; mais la patiente Lacédæmon et la campagne de la grasse Larissa ne me touchent point autant que la demeure de la résonnante Albunéa, la chute de l’Anio, le bois sacré de Tiburnus et les vergers baignés d’eaux courantes. Souvent le Notus chasse les nuages du ciel obscur, et il n’engendre pas des pluies éternelles. Ainsi, dans ta sagesse, souviens-toi de mettre fin à la tristesse de la vie et à ses peines, Plancus, à l’aide d’une légère ivresse, soit que les camps où brillent les enseignes te retiennent, ou les ombres épaisses de ton Tibur. Lorsque Teucer fuyait Salamis et son père, on dit que, ceignant d’une couronne de peuplier ses tempes humides de Lyœus, il parla ainsi à ses amis attristés : — « Partout où nous portera une fortune meilleure que mon pcre, nous irons, ô compagnons, ô amis ! Il ne faut point désespérer sous le commandement et sous les auspices de Teucer. En effet, l’infaillible Apollo m’a promis, sur une terre inconnue, une nouvelle Salamis future. Ô braves, hommes qui avez déjà tant souffert avec moi, maintenant chassez vos soucis à l’aide du vin ; demain nous repasserons la grande mer. »