Odes (Horace, Mondot)/6

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Traduction par Jacques Mondot.
Poncelet (p. 17).
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À VIPSANE AGRIPE.


Qu’il ne peut s’amuſer à chanter
ſes faits héroïques, & qu’il eſt
ſeulement propre à chanter les
Cantiques, & la force d’Amour.


ODE VI.



D’un vers heroé, l’eſcrivain
Varius, fera dans l’erain
Ta force viure, & tes batailles :
Ceſt oyſellet, ſur ſon rameau,
Ton nom rauira du Tombeau,
Et du plus noir de ſes entrailles.

D’un fredon il deſgoiſera
Ta vaillance, lors qu’il fera
Par tout retentir tes Gens d’armes
De mille accords doux & parfaits :
Il chantera leurs braues faits
Finis au branſler de tes armes.

Puis, qu’Agripe, arreſté ie ſuis
Dans le rets d’Amour, ie ne puis
Éterniſer (veincu) ta gloire,
De Pelidee, ce n’eſt à nous
Ourdir le feu ny ſon courroux,
Ceſt ouvrage eſt au grec Homere.

Mon vers n’eſt encore ſi fol
Que de cuider dire le vol
D’Vliſſe, ſur les fieres ondes,
Ny de Pelope la maiſon
Enyuree de trahiſon,

Ces choses me sont trop profondes.

Ces entreprises ne me font
Que de honte couurir le front,
Et mon ame paslir de crainte,
La Muse defend à mes vœux
Que d’vn suget si glorieux
Par moy la grandeur ne soit peinte.

Car qui pourroit vn grand Dieu Mars.
Chargé d’vn harnois, aux hazards,
De la guerre éprouué, descrire ?
Qui diroit le noir Merion
Perdu dans le camp d’Ilion
De Tydide, l’audace, ou l’ire

Ie tonne les riches banquets
Du vin, ie dis les beaux souhaits
Dont rougit l’argentine coupe,
Ie chante le feu, le brandon,
Et laflesche de Cupidon
Le Dieu de l’amoureuse Troupe.