Ornithologie du Canada, 1ère partie/L’Oiseau Rouge

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Atelier typographique de J. T. Brousseau (p. 277-278).

L’OISEAU ROUGE.[1]
(Purple Finch.)


À l’approche du printemps,[2] il est peu d’oiseaux dont le retour en Canada est salué avec plus de joie que l’agréable chantre, connu du vulgaire sous le nom d’Oiseau Rouge. Nous lui laisserons ce nom. Au mâle seul, est échue en partage une belle livrée pourpre ou presque écarlate. La femelle est d’un gris foncé par tout le corps. Le mâle ne reçoit ses couleurs vives qu’à la troisième année ; ces mêmes couleurs, il les perd complètement après trois ou quatre mois de captivité dans la demeure de l’homme, quelquefois pour toujours. L’Oiseau Rouge est répandu dans toute la partie nord du continent jusqu’au cercle arctique. Une autre bien belle variété ne se rencontre que dans le sud de l’Amérique et ne dépasse jamais les limites du Nouveau-Mexique. L’Oiseau Rouge se perchera sur un arbre, sur le versant d’une colline ou sur le bord d’un ravin au pied duquel coule un ruisseau et érigeant les plumes sur le sommet de sa tête, il gazouillera à demi-voix et sans interruption pour une heure entière, une douce psalmodie sans autre objet apparent que celui de se charmer lui-même. À l’état de domesticité, ses talents pour l’harmonie le font apprécier de tous. Sa voix n’est pas éclatante comme celle du merle, mais la continuité, la douceur de son chant lui assurent une place distinguée parmi les visiteurs ailés dont s’honore le Canada. Il est granivore, sans dédaigner pourtant le pain et le lait qu’on lui donne. Lorsque sa cage est exposée dans un appartement bien éclairé, il commencera à chanter en janvier et ne cessera qu’à la fin d’août.

D’un caractère sociable, il est bien adapté pour la volière et son goût pour l’harmonie encourage les autres oiseaux à chanter. Les variations dans son plumage ont causé de singulières méprises aux anciens naturalistes. Pennant, Latham, Bartram, Pallas et autres en avaient fait quatre espèces.

Le bec de l’Oiseau Rouge est si trapu, si robuste qu’on serait presque tenté de croire qu’il appartient à la famille des Gros becs des pins ; l’oiseau est fort méchant au commencement de sa captivité : il mord à enlever la chair ; il est tapageur et harcèle les serins et autres habitants des volières ; mais peu à peu, il s’apprivoise, fait preuve même d’une grande mansuétude. Il faut se garder de lui faire faire trop bonne chère, car il devient si replet qu’il succombe fort souvent à des attaques d’apoplexie foudroyante.

Dimensions du mâle, 6 × 9.


  1. No. 305. — Carpodacus purpureus. — Baird.
    Erythrospiza purpurea.Audubon.
  2. Nous l’avons vu cette année le 12 avril.