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Page:Émile Faguet - L'Art de lire.djvu/104

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les personnes ; c’est un homme du meilleur caractère.

Concluons que dans sa malveillance à l’égard des livres il a sa soupape. Il est possible que la lecture des mauvais livres soit une catharsis d’une très précieuse utilité morale.

Ensuite la lecture des mauvais livres forme le goût, à la condition qu’on en ait lu de bons, d’une façon qu’il ne faut pas mépriser, ni peut-être négliger. Au sortir des études scolaires, les jeunes gens se partagent à peu près en trois classes : ceux qui liront instinctivement de bons livres ; ceux qui en liront de mauvais, ou vulgaires, ou très médiocres ; ceux qui ne liront rien du tout. Les études scolaires donnent le goût du beau, ou l’horreur du beau, ou l’indifférence à l’égard de la littérature.

Elles donnent le goût du beau à ceux qu’elles ont intéressés, et ils ne songent plus qu’à retrouver des sensations d’art analogues à celles qu’ils ont éprouvées en lisant Horace, Virgile, Corneille et Racine, et c’est pour cela, disons-le en passant, qu’il faut toujours, au lycée, amener l’élève jusqu’aux auteurs presque contemporains, pour que, entre les grands classiques et les bons auteurs de leur siècle, il n’y ait pas une grande lacune qui les ferait désorientés en face des bons auteurs de leur siècle et qui les empêcherait de les goûter, par où ils seraient de ces humanistes qui ne peuvent entendre que les auteurs très éloignés de nous, gens respectables et