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Quatorzieme

eut-il appris les mépris de Céleſte pour ſon neveu, le beau Phénix, qu’il ſe mit à parler, ce qui ne lui était pas arrivé depuis dix-huit mois. Mais toutes les fois qu’il ſe mettait à parler, il en réſultait des choses mémorables, dont on ſe ſerait très-ſouvent bien paſſé. Il y avait à ſa cour un vieux corſaire retiré, qui s’y était fait dévot, pour faire ce qu’on appelle une fin, après avoir écumé les mers pendant trente ou quarante ans, & pillé amis & ennemis indiſtinctement. Songecreux ſe faiſait conter par lui ſes aventures, pour ſe déſennuyer, tandis qu’il ſongeait à autre choſe. Ce pirate lui perſuada qu’il fallait venger l’afront qu’on venait de faire à ſon neveu, & réaliſa ainſi des deſſeins creux & vindicatifs, qui ſans lui n’auraient peut-être jamais eu d’exécution. Lorſqu’on y penſa le moins, l’île heureuſe fut envahie, conquiſe, ſubjuguée ; le corſaire s’aſſu-