Voilà l’animal que les stoïciens regardent comme le sage absolu.
Je vous le demande, si on allait aux voix, quelle république voudrait un tel magistrat, quelle armée un tel général ? Un pareil être pourra-t-il jamais trouver un hôte, une femme, un serviteur ? Ne lui préférera-t-on pas mille fois n’importe quel fou qui sache ou commander ou obéir aux fous, un de ces aimables cerveaux brûlés, indulgents pour leurs semblables, complaisants pour leurs femmes, agréables à leurs amis, charmants en société ? un de ces individus enfin qui se vantent de prendre intérêt à tout ce qui se passe sur la terre ? Mais j’ai regret de gaspiller ainsi vos instants autour de ce prétendu sage ; je continue l’exposition des avantages que je procure aux hommes.
J’imagine que quelqu’un soit transporté sur l’observatoire élevé où les poëtes placent Jupiter ; que verrait-il ? Une foule de maux assaillir de toutes parts la vie des misérables mortels ; naissance immonde, éducation pénible, enfance à la merci de tout ce qui l’environne, jeunesse accablée d’études et de travaux, vieillesse exposée aux infirmités de toutes sortes, et pour fin à tant de misères, la mort. Ajoutez à cela les maladies et les accidents qui traversent le cours de cette pauvre existence et tous ces ennuis qui répandent leur fiel sur les plus doux moments. Sans parler des tourments que l’homme inflige à l’homme, comme la pauvreté, la prison, l’infamie, la honte, la torture, les embûches, les trahisons, les procès, les outrages, les fourberies……