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L’ÉTAT PSYCHIQUE PENDANT LA GROSSESSE

quement longèves[ws 1]. Mes oncles et tantes également étaient fortement constitués et ont vécu longtemps. Mon père et ma mère étaient enfants de propriétaires ruraux assez riches : ils ont été élevés à la campagne. Tous les deux ont mené une vie intellectuelle absorbante. Mon père était directeur d’une banque et président d’un conseil provincial électif (zemstvo) où il menait une lutte ardente pour les idées avancées. Comme ma mère, il avait des opinions très radicales et écrivait des articles d’économie politique et de sociologie dans les journaux et revues. Ma mère faisait des livres de vulgarisation scientifique pour le peuple et pour les enfants. Très occupés par leurs luttes sociales (qui existaient alors en Russie sous une forme différente de celle qu’elles ont aujourd’hui), par les livres et les discussions, je crois que mes parents négligeaient un peu l’éducation et la surveillance des enfants. Des huit enfants qu’ils ont eus, cinq sont morts en bas-âge ; deux autres, à l’âge de 7 et 8 ans ; seul de tous les enfants, je suis arrivé à l’âge adulte. Mes parents se sont toujours bien portés, leur mort eut des causes fortuites. Ma mère était très impétueuse, presque violente de caractère ; mon père était nerveux, mais savait se contenir. Leur tempérament, probablement, n’était pas érotique, car, comme je l’ai su arrivé à l’âge d’homme, leur mariage était une union modèle ; dans leur vie pas l’ombre d’une histoire amoureuse (excepté celle qui finit par leur mariage), fidélité absolue des deux côtés, fidélité qui étonnait beaucoup la société qui les entourait, où cette vertu ne se rencontre guère (la morale des « intellectuels » russes étant très libre dans le domaine sexuel, et même relâchée). Jamais je ne les ai entendus causer de sujets scabreux. Même esprit dans les familles de mes autres parents : oncles et tantes. Austérité des mœurs et des conversations, intérêts intellectuels et politiques. En contradiction avec les idées avancées qu’avaient tous mes parents, il y avait chez quelques-uns d’entre eux un peu de vanité nobiliaire innocente et sans morgue il est vrai : car ils étaient « nobles » dans le sens qu’a ce mot en Russie (c’est une « noblesse » beaucoup moins aristocratique que celle de l’Europe occidentale). 

J’ai passé mon enfance dans plusieurs grandes villes de la Russie mé-

  1. note de wikisource : cf. wiktionnaire : longève, qui a de la longévité