Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/17

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AVANT-PROPOS

à ma célébrité ? Je le demande, que manque-t-il ? Émilianus Strabon, personnage consulaire, que bientôt les vœux unanimes porteront au consulat, a fait dans le sénat de Carthage une motion relative aux honneurs qu’il veut obtenir pour moi, et tous se sont rangés à son avis. Cet assentiment ne vous paraît-il pas être un sénatus-consulte ? J’ajoute une autre circonstance : c’est que, par leur empressement à décréter une place pour la statue, tous les Carthaginois réunis dans cette auguste enceinte ont voulu faire comprendre, je l’espère du moins, que s’ils remettaient à la séance prochaine le vote d’une seconde statue, c’était par respect et déférence pour l’honorable consulaire ; c’était afin de paraître non pas rivaliser avec lui, mais imiter sa munificence, c’est-à-dire, afin de consacrer une journée entière et sans partage au bienfait public qu’ils me réservent. D’ailleurs ces dignes magistrats, ces chefs si bienveillants, n’avaient pas oublié que votre mandat exécutait leur propre volonté. Et j’ignorerais ces détails ! et je ne les publierais point !… » Enfin, c’est l’homme de lettres, le savant irritable, genus irritabile vatum, qui du haut de sa chaire répond à de nombreux ennemis, et se plaint amèrement à plusieurs reprises des travers qu’ils lui suscitent et des dégoûts dont ils l’abreuvent.

Les Florides servent encore puissamment à éclaircir les époques obscures de la vie de notre auteur. Sous ce point de vue, elles méritent une autre espèce d’intérêt. Jusqu’ici c’était dans les Métamorphoses que l’on avait cherché les éléments d’une biographie d’Apulée : nous espérons avoir prouvé, qu’il faut les emprunter presque tous aux précieux et incontestables documents que renferment les Florides.

Enfin, les morceaux dont elles se composent sont, avec l’Apologie, les seuls qui nous montrent Apulée sinon comme un auteur original, du moins comme un écrivain créateur. Plusieurs de ces morceaux sont aussi finement pensés qu’ingénieusement écrits : l’histoire de Philémon, celle d’Asclépiade, et la péroraison de l’éloge d’Orfitus, nous semblent présenter une teinte de mélancolie peu habituelle chez l’auteur des Métamorphoses. Il y a de la pompe dans le morceau où il compare la vue de l’aigle à celle de l’homme ; du nombre et de la mesure, dans sa description d’un temple de Samos, et dans les détails qu’il donne sur Pythagore, le philosophe voyageur. Partout, du reste, on retrouve la même profusion de synonymies, le même luxe