Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/229

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trouble dans les âmes, embarrasse tous projets, toutes méditations, et déconcerte toute volonté. Or, cet être méchant et dépravé doit son exécrable caractère d'abord aux vices qui sont contraires à la nature, comme est la jalousie ou la joie du malheur d'autrui, et ensuite aux impressions que ne désavoue pourtant pas la nature : je veux dire la volupté, le chagrin, le regret, l'amour, la miséricorde, la crainte, la honte, la colère. Cela vient de ce qu'un esprit déréglé, dans quelque direction qu'il se lance, n'a pas de mesure, et que par conséquent il y a toujours en lui insuffisance ou excès. Aussi l'amour conçu par un homme de cette sorte est-il essentiellement corrompu, parce que non seulement dans ses désirs effrénés et dans sa soif inextinguible il désire savourer tous les genres de plaisir, mais parce qu'encore le jugement qu'il porte sur les formes le jette dans les erreurs les plus déraisonnables. Ne connaissant pas la véritable beauté, il n'aime que la beauté corporelle, beauté sans consistance, sans vigueur et sans durée. Ce n'est point aux corps brunis par le soleil ou raffermis par l'exercice qu'un tel homme accorde ses préférences, mais à ceux qui se sont épaissis à l'ombre, amollis dans l'inaction, engraissés par l'excès des soins.

Chapitre 17

Les développements de la malice ne sont pas spontanés, comme la chose se démontre de beaucoup