Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/63

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s'en attribuer faussement l'honneur. En outre, dès mon enfance je me suis consacré si exclusivement aux belles-lettres ; j'ai tellement recherché la réputation d'homme studieux et moral, à Rome auprès des amis d'Orfitus, comme il peut eu être l'illustre garant, et dans votre province, ô Carthaginois, que vous devez accueillir mon amitié avec autant d'empressement que j'en manifeste pour obtenir la vôtre. Je dois dire qu'effectivement la difficulté avec laquelle vous m'accordez de mettre des intervalles entre mes séances, prouve que vous me recherchez assidûment. On ne saurait donner un témoignage plus irrécusable d'amitié pour les personnes, que d'aimer à les voir souvent, de se formaliser de leurs inexactitudes, de se féliciter de leur constance, de regretter leurs interruptions, attendu qu'on n'éprouve ces sentiments que pour ceux de l'absence desquels on gémirait. Et d'un autre côté la voix condamnée à un silence perpétuel ne serait pas plus utile que le nez pour un homme enrhumé, que des oreilles assourdies par le vent, que des yeux couverts d'une taie. Emprisonnez donc les mains dans des menottes ! mettez donc des entraves aux pieds ! enfin, cette âme qui nous dirige, faites-la donc agir quand elle est anéantie par le sommeil, noyée dans le vin ou affaissée sous le poids d'une maladie ! Oui, de même qu'une épée est brillante quand on s'en sert, mais qu'elle se rouille laissée dans un coin ; de même, retenue trop longtemps dans le fourreau du silence, la voix