connaître ; elle est fort riche, c’est la fille d’un banquier ; tu la vois souvent aux Bouffons et à l’Opéra.
» Dépêche-toi de faire ces emplettes ; Joseph, qui te remettra cette lettre, me rapportera tout cela jeudi. C’est jeudi le grand jour de parure ; sois exacte. Joseph te remettra les fonds nécessaires à ces achats. Je sens qu’il y a encore de jolies choses à la mode, à Paris, que je ne connais pas ; je les veux : envoie-les-moi.
» Mais ne va pas m’écrire : — Voici, ma chère Laurence, le chapeau que tu m’as demandé. — Que dirait ma tante, si elle savait que je me révolte ; que je charge une autre qu’elle du choix de mes chapeaux ; que j’abandonne mademoiselle Iris, qui la coiffe et la chausse depuis vingt ans ? car, par une bizarrerie qui m’a toujours paru suspecte, c’est à sa marchande de modes que ma tante s’adresse toujours pour ses envois de souliers : ce qui me fait soupçonner la moralité de mademoiselle Iris… il faut qu’il y ait un cordonnier au fond de ce mystère… Je dirai donc à ma tante que c’est toi qui me donnes le chapeau.
» Envoie-moi une belle écharpe pour elle, une robe pour Clorinde, et des pastilles de chocolat pour Amaury, — je n’en ai plus. — Mais mon chapeau ! avant tout mon chapeau ! Je veux être belle. Tu vas me trouver parfaite maintenant, puisque, disais-tu, il ne me manque que d’être coquette… Eh bien donc, je suis coquette, et plus que toi ! »
Enfin l’idée de plaire lui était venue !
La première pensée d’une femme passionnée est son amour. Aimer, c’est là ce qui l’occupe. Une femme aimante se dit :
— Je vais le voir !
Et elle s’habille à la hâte pour arriver plus vite là où elle doit rencontrer celui qu’elle aime.
Une femme coquette, au contraire, se dit :
— Il va me voir.
Et elle perd une heure d’amour à sa toilette pour lui paraître belle.