sérieux quand tout le monde rit, et pour n’être jamais mis en pénitence ?
— Je travaille, répondit Louis.
— Belle réponse ! Et nous aussi nous travaillons. Cependant il y a des moments où nous ne pouvons nous empêcher de rire ; mais toi, pourquoi donc ne ris-tu jamais ?
— Parce que je porte des clous à mes souliers.
Cette raison parut si niaise aux écoliers, qu’ils se regardèrent entre eux et qu’ils crurent un instant que leur camarade se moquait d’eux.
— Qu’est-ce que tu nous chantes avec tes souliers ? dit en haussant les épaules un bel enfant nommé Richemont ; à quoi peuvent-ils te servir, tes souliers ?
— À donner des coups de pied si forts à la fée Grignote, qu’elle ne vient plus s’y frotter.
— Grignote ! répétèrent tous les enfants.
— Qu’est-ce que c’est que la fée Grignote ?
— C’est, répondit Louis, une méchante souris qui cause tous vos chagrins.
— Une souris ! reprit Richemont ; ah ! oui, Grignote ! c’est un nom de souris. Et tu prétends que c’est elle qui nous fait gronder. Comment ?
— Elle se promène sous la table, dans vos jambes, pendant la leçon : elle vous chatouille et cela vous fait rire.
— Eh bien, nous ferons comme toi, nous mettrons des clous à nos souliers.
— Vous feriez bien mieux de mettre une souricière…
— Une souricière à mon soulier ! s’écria un petit garçon fort ingénu.
— Eh non, imbécile ! une souricière sous la table, avec du lard dedans.
— Du lard ! reprit à son tour Richemont étonné. Est-ce qu’on peut prendre aussi une fée avec du lard ?
— Certainement ! tout comme une autre, dit Louffi, quand cette fée est une souris. Essayez toujours ; vous verrez que quand Grignote sera prise, le maître ne vous grondera plus.