elle dans le parc l’autre jour ; j’ai questionné le garde-chasse, et il m’a dit que tu n’étais pas au château.
— Il n’y demeure pas, dit Léon impatienté, comment le saurait-il ?
— Il venait de voir la princesse quand je l’ai rencontré, et tu n’étais pas avec elle, pas plus que ce prétendu neveu qu’elle t’avait prié de venir amuser, comme si tu n’avais pas auprès de toi un ami qui vaut bien le neveu de toutes les princesses du monde !
— Le garde-chasse est un imbécile ! s’écria Léon en s’éloignant à l’instant ; car s’il savait feindre habilement, il ne savait pas encore bien mentir.
Léon remonta dans sa chambre, inquiet, tourmenté des soupçons de son perfide ami. Une fois la défiance de Henri éveillée, Léon avait tout à redouter de sa curiosité. Comme tous les paresseux, Henri n’avait de cœur, ne se donnait de peine que pour découvrir ce que les autres lui cachaient, pour surprendre ce qu’il ne devait pas savoir.
Léon attendait avec impatience la fin des vacances pour voir partir de chez sa mère le faux ami qui troublait tout son bonheur ; il sentait que le chien volant ne serait en sûreté que lorsque Henri ne serait plus là, et il en voulait à l’oncle de Henri de ne pas l’emmener plus vite. Mais cet oncle était un homme consciencieux, qui faisait une chose non parce qu’elle lui plaisait, mais parce qu’il avait dit qu’il la ferait. Madame de Cherville lui avait écrit ; « Venez passer un mois avec nous à la campagne. » Il avait répondu : « J’irai passer un mois avec vous à la campagne, » et il était venu passer un mois avec elle à la campagne. Il avait quitté Paris le 1er septembre et il y comptait retourner le 1er octobre, pas un jour de plus, pas un jour de moins. Léon savait cela, et il attendait le 1er octobre avec impatience.
Le temps s’écoulait, et M. de Cherville devait arriver de moment en moment. Un soir, Léon voulut aller au-devant de lui ; il se retira dans une allée obscure pour éviter les rayons de la lune, qui pouvait trahir le chien volant, et, après avoir dit le mot magique, il prit son essor. Comme il s’élevait, il entendit une voix qui répétait : — Nasguette ! Nasguette !…