inutile, et que le courant de la conversation amènerait naturellement les choses qu’il désirait savoir. Il tendait des pièges adroitement.
— Le château de Bellegarde est immense, n’est-ce pas ? disait-il.
— C’est un château royal !
— Il faut un grand train de maison pour habiter un pareil château convenablement.
— Mais la duchesse a tout ce qu’il faut pour cela, répondait brièvement madame d’Arzac.
Et le pauvre inquiet n’apprenait rien.
Il attaquait d’une autre manière :
— Le duc doit être là maintenant ? il amène toujours avec lui une foule de flâneurs…
— Le duc est à Paris.
Il fallait tendre un autre piégé :
— On doit jouer la comédie à Bellegarde : nomme-t-on déjà les acteurs ?
— On ne jouera point la comédie cette année.
Enfin il s’avisa d’une question plus heureuse :
— Madame de Bellegarde n’avait pas revu Marguerite depuis qu’elle a été si malade ; elle a dû la trouver bien changée, bien maigrie ?
— Pas trop, elle l’a trouvée charmante.
— Oh ! la duchesse est très-bienveillante, mais les autres personnes qui étaient là ont dû…
— Les autres personnes ? interrompit madame d’Arzac que toutes ces questions impatientaient ; il n’y avait pas un chat !
« Puisqu’il n’y avait personne, puisqu’on ne lui a pas dit de mal de moi, si elle est triste, c’est qu’elle est très-souffrante… » pensa-t-il, et il se hâta afin de revoir Marguerite.
Madame d’Arzac se dépêchait de son côté ; elle avait une peine affreuse à cacher sa mauvaise humeur, et Étienne l’expliquait ainsi : « Elle voit que cette promenade trop longue a fatigué sa fille, et elle se reproche de l’avoir engagée à sortir ce matin. » Mais à peine furent-ils auprès de Marguerite que toutes leurs craintes se dissipèrent.
La jeune femme s’était métamorphosée. Chose étrange et